Dossier enseignants Reflets d’or D’Orient en Occident, la céramique lustrée IXe
Dossier enseignants Reflets d’or D’Orient en Occident, la céramique lustrée IXe - XVe siècle Dossier rédigé sous la Direction de Xavier Dectot, Conservateur au musée de Cluny Coordination, David Jacquard, Responsable du développement des Publics Nous tenons à remercier pour leur aide Jeannine Mercier, Responsable de la Photothèque et Camille Broock, stagiaire. 1 Sommaire Sommaire p. 1 Textes généraux p. 2-12 - Présentation de l’exposition p. 2 - Les panneaux de l’exposition p. 7 Choix d’œuvres p. 13 - 30 - Un choix d’œuvres dans l’exposition p. 13 - Corpus photographique p. 27 Annexes p. 30- 44 - Glossaire p. 30 - Cartes p. 34 - Bibliographie p. 35 Musée de Cluny : musée national du Moyen Âge - Dossier Reflets d’or - Textes généraux 2 Reflets d’or. D’Orient en Occident, la céramique lustrée, IXe XVe siècle (Présentation de l’exposition) L’histoire de la céramique à reflets métalliques est d’abord celle d’un double miracle. Miracle esthétique en premier lieu, celui, tant cherché par les artistes, quel que soit leur mode d’expression, d’une surface présentant, suivant l’angle de vision, des aspects différents. Sous la plupart des angles, le lustre apparaît d’une couleur métallique, variant du jaune doré au rouge cuivreux, plus ou moins profond. Mais pour peu que celui qui contemple l’objet se trouve en lumière spéculaire (c’est à dire que le rayon de lumière arrive à l’œil après s’être reflété à angle droit dans le décor de lustre), c’est tout un monde iridescent qui s’ouvre à lui. Ce phénomène est d’autant plus fascinant que la perception du lustre en lumière spéculaire ne s’effectue que bien rarement au point sur lequel se concentre le regard. En raison des conditions particulières qui le produisent, c’est le plus souvent en vision périphérique qu’il apparaît, disparaissant dès que le regard se tourne vers le point qui semblait briller pour réapparaître à l’endroit exact où celui-ci se portait auparavant. Derrière ce miracle esthétique se cache un miracle technique qui se répand peu à peu sans rien perdre de son mystère. Un savant mélange d’argent, de cuivre, d’agents oxydants et de liant crée un pigment qui, appliqué en une couche d’une extrême finesse, de l’ordre de quelques nanomètres, et cuit dans des conditions d’oxydo- réduction savamment maîtrisées, donne naissance au lustre. Les Romains en connaissaient probablement déjà le secret et l’appliquaient sur le verre ; cette technique fut reprise par les verriers du califat abbasside. Ce sont les céramistes de ce même califat qui parvinrent à transposer cet art des nanoparticules au monde de la céramique glaçurée. De là, la technique se répandit petit à petit dans plusieurs villes d’Orient et d’Occident, en Iran, en Égypte, en Syrie puis dans l’Algérie actuelle, en al Andalus et, de là, à Valence. Les céramistes de cette ville étendirent, au XVe siècle, leur domination sur l’ensemble du marché européen avant de se faire ravir la prééminence par ceux d’Italie centrale au siècle suivant. Une innovation maîtrisée Dès avant le VIIe siècle, peut-être dès le IVe siècle, l’Égypte copte s’était établie comme le principal territoire de production de verres à décor de lustre métallique. Sont-ce ces verriers qui eurent les premiers l’idée de transposer cette technique à la céramique glaçurée ? Émigrèrent-ils vers les nouveaux centres du pouvoir abbasside, y important leur technique ? L’hypothèse a été évoquée. C’est en tout cas en Mésopotamie, à Sammara (capitale du califat de 836 à 892), dans l’ensemble palatial de Dar al-Khilafa, que les plus anciens éléments de céramique à reflets métalliques ont été trouvés. Dès ces premières traces, la maîtrise technique impressionne, tant par la qualité de l’application du décor que par sa diversité, puisqu’il est aussi bien utilisé pour des pièces de forme que pour le décor architectural. À côté de Sammara, d’autres centres, comme Suse ou Bagdad, se développent en parallèle. C’est d’ailleurs de Bagdad que seront importés, en 862-863, une partie au moins des carreaux, toujours en place, de la Musée de Cluny : musée national du Moyen Âge - Dossier Reflets d’or - Textes généraux 3 mosquée Sidi Uqba de Kairouan, en Tunisie. Quand vit-on se développer, à côté des importations mésopotamiennes, des productions locales en Afrique du Nord ? Il est bien difficile de le dire. En tout cas, la technique remporte un vif succès tant en Égypte qu’en Ifriqiya, et l’on ne peut que se demander si certaines pièces trouvées en fouilles, à Raqqada, près de Kairouan, ou à Fustat (près du Caire actuel), n’ont pas été produites sur place. Des pièces signées, des commandes prestigieuses Dès le début du Xe siècle, les Fatimides se montrent des amateurs de céramique lustrée et encouragent le développement d’une production locale. Après la conquête de Misr et la fondation du Caire, ce sont les céramistes de Fustat qui furent les premiers bénéficiaires des riches commandes d’une cour fastueuse. C’est l’occasion d’un apogée de la céramique lustrée, où les pièces, souvent signées, portent parfois les noms de leurs prestigieux commanditaires, et se couvrent d’un décor narratif riche et varié. Derrière la multiplication des signatures, celle des styles est encore plus frappante. Il semble probable que, face à l’importance de la demande, les céramistes les plus renommés, tels Muslim ibn Dahhân, aient créé de véritables ateliers de production où des artistes aux talents très divers travaillaient sous l’autorité d’un seul maître. Les troubles qui touchent le califat fatimide dans la deuxième moitié du XIe siècle se ressentent sur la production de céramique. Tandis que les signatures, si fréquentes auparavant, se raréfient, les figures humaines se font plus simples, les décors plus stéréotypés, et l’on voit disparaître les scènes narratives. Pour autant, c’est aussi une période d’innovation technologique : les pâtes argileuses sont remplacées par des pâtes très riches en silices, et, surtout, les céramistes emploient désormais un vaste répertoire de glaçures colorées. Autre innovation promise à un large succès, le décor de lustre est repris par des gravures à la pointe. De Tell Minis aux Mameluks La situation de plus en plus périlleuse, tant sur le plan politique que sur le plan économique, du califat fatimide et tout particulièrement de sa capitale poussèrent les céramistes égyptiens à émigrer vers la Syrie dans la deuxième moitié du XIIe siècle. Territoire placé entre deux puissances politiques alors affaiblies, les califats fatimides et abbassides, celle-ci voit en effet alors s’établir des petites puissances locales qui, sans atteindre au raffinement des fatimides du siècle précédent, n’en créent pas moins les conditions de l’émergence d’une production locale. Une production, associée au village de Tell Minis, en Syrie septentrionale, se développe dans un premier temps. Elle reprend certaines caractéristiques fatimides, notamment le décor esgrafié et l’utilisation d’un décor à base d’animaux et de rinceaux. Puis, autour des années 1200, alors que la Syrie retrouve une cohésion politique avec l’arrivée, notamment, des Ayyubides, la production ne se concentre dans la ville de Raqqa, sur les bords de l’Euphrate. Proches des premiers lustres iraniens dans l’emploi du décor végétal, utilisant un lustre aux tonalités brunes, sombres, associé à des glaçures colorées, les productions de Raqqa se caractérisent avant tout par la quasi disparition du décor figuré. La conquête du pouvoir par les Mamluks va ramener le centre du pouvoir au Caire, qui redevient un Musée de Cluny : musée national du Moyen Âge - Dossier Reflets d’or - Textes généraux 4 lieu de commande d’objets de grand luxe. Raqqa s’efface alors comme centre de production de céramique lustrée au profit, notamment, de Damas. Dans tous les cas, la céramique lustrée semble perdre de son attrait très tôt dans le XIVe siècle. Iran Parallèlement à la production dite de Tell Minis, un autre centre de production s’impose dans la seconde moitié du XIIe siècle. Pour la première fois depuis les créations de Suse, qui dépendaient bien davantage de l’aire mésopotamienne, l’Iran développe une production propre : la plus ancienne pièce datée connue est une bouteille datée de 1179 dont seule une partie est parvenue jusqu’à nous. Dans un premier temps, la ville de Kashan s’impose comme le principal centre de production de cette région. La conquête mongole, dans les années 1219-1220, ne bouleverse pas ce schéma, mais elle marque une transformation dans la commande. Le XIIIe et le début du XIVe siècle iraniens marquent en effet l’apogée de l’utilisation du décor de lustre métallique dans la céramique architecturale. C’est alors l’époque des grands lambris de croix et d’étoiles réalisés tant pour les palais que pour les édifices religieux, auxquels viennent parfois s’adjoindre de grandes plaques qui donnent une nouvelle dimension à la céramique lustrée. Le milieu du XIVe siècle voit la fin des ateliers de Kashan, et la production iranienne se fait alors plus rare et de moindre qualité, sans doute aussi parce qu’elle correspond moins aux attentes des Timourides. Époque de splendeur technique, l’Iran pré-mongol et mongol est aussi essentiel à notre connaissance de la céramique à décor de lustre métallique parce que c’est là que furent écrits les premiers traités techniques parvenus jusqu’à nous. D’Est en Ouest Parallèlement au développement de la céramique lustrée en Egypte, en Syrie et uploads/Histoire/ dossier-reflets-d-or.pdf
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- Publié le Nov 29, 2021
- Catégorie History / Histoire
- Langue French
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