Cahiers d’ethnomusicologie Anciennement Cahiers de musiques traditionnelles 12

Cahiers d’ethnomusicologie Anciennement Cahiers de musiques traditionnelles 12 | 1999 Noter la musique L’évolution de la notation rythmique dans la musique arabe du IXe à la fin du XXe siècle Habib Yammine Édition électronique URL : http://journals.openedition.org/ethnomusicologie/688 ISSN : 2235-7688 Éditeur ADEM - Ateliers d’ethnomusicologie Édition imprimée Date de publication : 1 janvier 1999 Pagination : 95-121 ISBN : 978-2-8257-0680-0 ISSN : 1662-372X Référence électronique Habib Yammine, « L’évolution de la notation rythmique dans la musique arabe du IXe à la fin du XXe siècle », Cahiers d’ethnomusicologie [En ligne], 12 | 1999, mis en ligne le 08 janvier 2012, consulté le 01 mai 2019. URL : http://journals.openedition.org/ethnomusicologie/688 Ce document a été généré automatiquement le 1 mai 2019. Tous droits réservés L’évolution de la notation ‐ rythmique dans la musique arabe du IXe à la fin du XXe siècle Habib Yammine 1 La rythmique arabe a connu plusieurs systèmes de notations consignés dans de nombreux traités musicaux depuis le IXe siècle jusqu’à l’adoption de la notation occidentale à l’aube du XXe siècle. Pour exposer leur théorie du rythme, les théoriciens ont adopté les principes de la métrique poétique comme leurs écrits l’attestent jusqu’à la fin du XIXe siècle. Très peu de théoriciens ont réussi à s’affranchir des principes de cette métrique pour proposer, partiellement ou intégralement, un système arithmétique se passant de la terminologie et des structures syllabiques des métriciens arabes. 2 Avec l’entrée massive de la culture européenne en Orient, les Arabes ont adopté la notation occidentale au début du XXe siècle. Dorénavant, toute représentation de la musique se fait par l’intermédiaire de ce système de notation qui, à la différence des sytèmes anciens, a eu des incidences sur la transmission de la musique et sur son apprentissage. Les systèmes de notation anciens étaient utilisés pour décrire, mesurer, théoriser et aussi enseigner les principes de base, tandis que la transmission et l’apprentissage se faisaient selon la méthode orale. L’usage de la notation occidentale dans la musique arabe a été généralisé dans tous les domaines ; tout d’abord, la transcription des répertoires musicaux afin de les conserver ensuite et surtout dans la transmission et l’enseignement des répertoires traditionnels et dans l’interprétation. Du côté des musicologues et des ethnomusicologues, occidentaux et arabes, les transcriptions ont essentiellement pour but l’analyse et la description, à l’exception de rares travaux récents qui ont un but pédagogique. Ces derniers seront évoqués dans la seconde partie de cet article. 3 Notre objectif dans cet article est de tracer une petite histoire illustrée des différents types de notation rythmique utilisés par les théoriciens de la musique arabe depuis le Moyen Age jusqu’au début du XXe siècle, date à laquelle la notation occidentale prend le relai des notations anciennes qui étaient limitées aux travaux théoriques, à des usages L’évolution de la notation rythmique dans la musique arabe du ixe à la fin d... Cahiers d’ethnomusicologie, 12 | 1999 1 personnels ou à des cercles privés, pour investir tous les domaines de la musique : recherche, transmission et interprétation. La notation rythmique dans les traités anciens La métrique poétique 4 Les théoriciens arabo-musulmans du Moyen Age ont emprunté les paradigmes (tafâ’îl) de la métrique poétique (‘arûd), formés à partir du verbe fa’ala et ses dérivés, pour expliquer les principes rythmiques de leur époque. La représentation des percussions et des durées qui les séparent à l’intérieur d’une période étaient réalisées à l’aide des syllabes qui constituent ces paradigmes. 5 Il est utile de rappeler en quelques lignes les principes de base de la métrique poétique, car ils ont été à l’origine de l’élaboration de la théorie et de la notation rythmique arabe pendant presque douze siècles. 6 Cette « science de la métrique » ou ‘ilm al-’arûd qui sert à mesurer le vers poétique arabe, fut découverte par al-Khalîl ibn Ahmad al-Farâhîdî (m. vers 786 à Basra) dans la deuxième moitié du VIIIe siècle et perfectionnée dans ses détails par les prosodistes arabes postérieurs sans rien modifier à ses principes de base (Weil 1975 : 690). Elle s’est imposée comme la seule et unique théorie de la métrique et fut incontournable pour les théoriciens de la musique, puisque la langue arabe contient dans sa structure syllabique une notion rythmique fondamentale qui est la notion quantitative, l’opposition des durées longues et brèves. 7 La science de la métrique fut élaborée à partir de l’organisation syllabique dans le vers poétique arabe. Ses fondements sont constitués de la syllabe brève ou harf mutaharrik (consonne mue ou consonne suivie d’une voyelle brève) qui est l’unité métrique minimale de la langue (ex. : mu, ta, fa, etc.), et d’une syllabe longue à deux variantes qui est le double de la brève. 1. sabab khafîf (c+v+c) ou (c+v longue), ex. : tun, fâ. 2. sabab thaqîl (c+v+c+v), ex. : muta, tana. Les combinaisons de la syllabe brève et des syllabes longues donnent quatre autres durées multiples de la syllabe brève ; triple, quadruple et quintuple ainsi que les huit paradigmes qui forment les 16 mètres poétiques. La durée triple de la syllabe brève : 3. watad majmû’ (c+v+c+v+c), ex. : ‘ilun, fa’û. 4. watad mafrûq (c+v longue+c+v), ex. : fâ’i, lâtu. La durée quadruple de la syllabe brève : 5. fâsila sughrâ (c+v+c+v+c+v+c), ex. : fa‘ilun, mutafâ. La durée quintuple de la brève : 6. fâsila kubrâ (c+v+c+v+c+v+c+v+c), ex. : fa’ilatun, muta’ilun. Pour plus d’uniformité graphique, phonétique et de ressemblance sonore avec les coups du plectre sur les cordes du luth, les théoriciens vont utiliser d’autres suites syllabiques équivalentes à celles-ci, formées à partir des consonnes (t) et (n) et de la voyelle (a). ta = 1, tan ou tâ = 2, tanan = 3, tananan = 4, tanananan = 5. L’évolution de la notation rythmique dans la musique arabe du ixe à la fin d... Cahiers d’ethnomusicologie, 12 | 1999 2 Métrique poétique et rythme musical ou la rythmique quantitative (IXe-XIe siècles) 8 Bien que la métrique poétique ne mette en valeur que l’aspect quantitatif du rythme en laissant de côté l’aspect qualitatif (accent et timbre, qui sont fondamentaux à l’élaboration d’un rythme), les théoriciens comme al-Kindî (vers 796-873), al-Fârâbî (872-950), Avicenne (980-1037) et al-Urmawî (m. en 1294) vont l’utiliser comme principe de base pour expliquer les durées rythmiques et transcrire les rythmes. Précisons que le recours à ce principe n’aura pas la même fréquence ou la même importance chez tous les auteurs. C’est Avicenne qui l’utilisera d’une manière systématique dans l’élaboration de sa théorie du rythme. Un seul auteur fera exception en abandonnant la métrique poétique comme moyen d’explication et de notation du rythme et en ajoutant l’aspect qualitatif dans la notation ; c’est Ibn Zayla (m. 1044). 9 Al-Fârâbî évoque la correspondance entre les différentes combinaisons des syllabes métriques et des durées rythmiques exposées plus haut ; mais l’explication de sa théorie du rythme se base sur deux unités de mesure opposées et purement arithmétiques : le « temps premier » (al-zamân al-’awwal) et le « temps primitif » (zamân al-mabda’). Le « temps [premier] est considéré comme le plus court [et] compatible avec le mouvement du rythme qu’il s’agit de transcrire « (Erlanger 1959 : 14) ; quant à la durée du « temps primitif », il écrit que « la plus longue durée d’une note adaptable à un rythme équivaut à celle de l’articulation de huit syllabes légères {ou brèves] suivies d’une pause ; la valeur de cette pause étant à peu près double de celle du temps qui sépare l’attaque de deux de ces syllabes, émises de suite, sans arrêt » (Erlanger 1935 : 28-29). Lorsque Fârâbî analyse les durées d’un cycle rythmique, ils les présente soit comme des multiples du « temps premier » soit comme des subdivisions du « temps primitif ». 10 A part la définition du « temps primitif » comme étant l’articulation de huit syllabes légères..., l’auteur ne généralise pas l’usage de la métrique et de sa terminologie dans son système rythmique. Il n’utilise pas, comme d’autres théoriciens, les syllabes ta et tan pour préciser les durées qui séparent les frappes dans un cycle rythmique, mais pour indiquer la place des frappes. Même lorsqu’il précise que la durée de tel ou tel temps équivaut à tant de syllabes légères (brèves), il ne l’applique pas dans sa transcription. 11 C’est à l’aide du cercle (O) et du point (.) qu’il transcrit toutes ses formules rythmiques. Les cercles indiquent l’emplacement des percussions et les points les durées qui les séparent. Il rajoute au-dessus de cette notation les syllabes (ta, tan, na) pour renforcer le rôle des cercles qui marquent l’attaque des notes. Ces syllabes pourraient avoir un rôle dynamique mais pas du tout quantitatif chez al-Fârâbî, car elles ne sont pas équivalentes au nombre de points indiquant la durée exacte entre deux cercles comme le ferait Avicenne ou al-Urmawî. Elles ne correspondent au nombre de points que dans deux cas, lorsque la durée de la syllabe est égale à la brève ou à son double. 12 Voici le rythme khafîf al-thaqîl al-thânî ou mâkhurî à six temps uploads/Histoire/ ethnomusicologie-688.pdf

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  • Publié le Aoû 04, 2022
  • Catégorie History / Histoire
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