1 ALECA : enjeux, défis et impératifs pour les pays de sud de la méditerranée D

1 ALECA : enjeux, défis et impératifs pour les pays de sud de la méditerranée Document D’orientation préparé par Mouez SOUSSI Maître de conférences en sciences économiques, IHEC Carthage I. UE et pays de sud : un processus de négociation discontinus et sélectif Entre l’UE et les pays du sud de la méditerranée, les relations sont passées par trois étapes successives : les accords d’association initiaux (1969-1995), puis le processus de Barcelone qui a lancé la coopération EUROMED (1995-2004) et plus récemment la politique européenne de voisinage (depuis 2004, y compris les révisions effectuées en 2011 et 2015). Au cours des deux dernières décennies, l’Union européenne a opéré une large diversification de ses interventions en direction des Pays du Sud et de l’Est Méditerranéen (PSEM) et plus spécifiquement de deux pays du Maghreb, le Maroc et la Tunisie. Le temps n’est plus où la CEE se limitait à la gestion des échanges. L’UE, bien qu’elle ne le déclare pas explicitement, apporte une contribution croissante à la configuration sur le long terme des espaces qui la bordent les rives sud de la Méditerranée et à celle de l’Afrique du nord-ouest. La diversification de ces interventions s’effectue dans le cadre d’organisations multiples et complexes, où le Maghreb n’occupe pas une place très importante : 2 l’Union pour la Méditerranée (UPM) a 43 membres et pas moins de 16 pays sont éligibles à la politique de voisinage (PEV). Dans la coopération inter-méditerranéenne une distorsion croissante se dessine entre les deux grands bassins de la Mer intérieure. Les perspectives de coopération inter- méditerranéennes dans le bassin oriental sont devenues aléatoires, du fait de l’attitude agressive de la Turquie, de l’absence de solution au conflit israélo- palestinien, et de la montée de nouvelles menaces liées à l’extension des groupes Islamistes. Confrontée à l’impasse dans la négociation d’adhésion avec la Turquie et à l’instabilité croissante des pays de la région, l’UE a bien du mal à aider ses États membres (notamment la Grèce et Chypre). Sauf au Sahara occidental, les frontières des pays du Maghreb sont stabilisées et les cinq pays ne sont pas contestés dans leur existence même, comme le sont plusieurs pays du Moyen-Orient. Contrairement au Machrek, leur géographie et l’orientation de leurs échanges induisent une relation privilégiée avec l’UE, pour laquelle ils n’ont pas d’alternative. Du fait de leur tradition politique et de la libéralisation de leurs économies, elle est aujourd’hui en progrès avec le Maroc et la Tunisie, qui s’acheminent vers le « statut avancé » qui en fera progressivement des partenaires plus proches de l’UE. Cette voie devrait être aussi ouverte pour l’Algérie et cela dépendra du degré de transformation qu’elle voudra apporter à son économie. Elle pourrait être offerte à la Libye, bien que sa situation politique actuelle l’apparente plutôt aux pays les plus instables du Machrek. Reste à définir le statut ultérieur de la Mauritanie, en fonction de la montée en puissance de la dimension saharienne et atlantique dans le grand Maghreb. En conséquence, en termes de coopération UE-Maghreb, il faudrait s’interroger sur les potentialités d’une intensification des relations dans le bassin occidental, dans un cadre à privilégier, par exemple le 5+5, qui regrouperait les pays les plus motivés sur des projets à dimension territoriale et sécuritaire. Si cette coopération devait s’accroître, faudrait-il l’insérer dans le cadre communautaire, en tant qu’espace privilégié de coopération transnationale, avec des perspectives qui ne seraient pas offertes aux autres PSEM ? 3 Tableau 1 : Etat des lieux des accords juillet 2016 Mauritanie Maroc Algérie Tunisie Lybie Statut global ACP PEV PEV PEV PEV Accord d’association Accord de Cotonou révisé en 2010 Signé en 1996 en vigueur 2000 Signé en 2002 en vigueur 2005 Signé en 1995 en vigueur 1998 Absence d’accord Statut avancé Accordé en octobre 2008 Pas de demande Signé en 2012 ALECA (DCFTA) Observateur CEDEAO Début de négociations : mars 2013 Non membre de l’OMC En négociation depuis octobre 2015 Non membre de l’OMC Accord énergie Signé en juillet 2013 Accord pêche Annulé par cours de justice de l’UE Signé en juillet 2013 Partenariat pour la mobilité Déclaration politique en juin 2013 En projet Signé mars 2014 En projet Source : commission européenne ACP : Afrique, Caraïbes, Pacifique PEV : Politique Européenne de Voisinage II. ALECA Cadre et principes L’Accord de Libre Echange Complet et Approfondi (ALECA) est un traité bilatéral signé entre l’Union européenne et un Etat partenaire commercial de longue date. Son objectif est d’assurer l’intégration progressive de l’économie de l’Etat signataire de l’accord dans le marché intérieur de l’UE. Ce traité vise à faire converger les réglementations et à aligner les législations des Etats partenaires de l’UE et signataires de l’ALECA avec celle de l’UE. Pour la Tunisie, l’ALECA prend la forme d’un projet d’accord visant à compléter et à étendre à d’autres secteurs la zone de libre échange pour les produits industriels manufacturés mise en place en 2008 en vertu de l’Accord d’Association de 1995. Cet accord d’association de 1995 ne prévoyait l’élimination des tarifs douaniers que pour les seuls produits industriels, et un échange de concessions pour une liste de produits agricoles, agroalimentaires et de la pêche dans le cadre de contingents. 4 L’ALECA devrait être envisagé dans un cadre de stratégie nationale de réformes pour renforcer l’intégration économique du pays dans son contexte régional, maghrébin, arabe, euro-méditerranéen et international. L’accélération de ces réformes dans le cadre de l’ALECA pose un problème de souveraineté de décision, de planification des actions et de sauvegarde d’intérêts nationaux. Certes l’UE dans le cadre de l’ALECA ne pose pas de conditions explicites quant au choix du modèle de développement et de ses priorités mais elle fixe des standards et des normes à respecter pour intégrer le marché européen. Consciente de la difficulté pour les pays du sud de la méditerranée à atteindre facilement les seuils fixés, l’UE a veillé à un certain assouplissement au niveau des grands principes orientant les négociations de l’ALECA. Spécifiquement pour la Tunisie les points suivants ont été fixés : • Respect total de la souveraineté de la Tunisie sur ses choix économiques et ses priorités • Approche « asymétrique » toujours en faveur de la Tunisie • Respect des différents niveaux de développement des secteurs en négociation et de leur niveau de compétitivité • Définition de périodes de transition appropriées • Possibilité d’exclure des produits sensibles ou de les libéraliser partiellement • Progressivité et souplesse d’évolution de l’accord • Cohérence entre les engagements qui seront pris dans le cadre de ces négociations et les autres forums de discussions, d’une part, et les réformes nationales, d’autre part • Volonté réciproque d’associer les acteurs économiques et la société civile • Transparence totale sur les négociations quant à leur objet et leur calendrier. L’Union européenne a fait part de sa disposition à adapter ses propositions à l’agenda des réformes économiques et aux priorités librement choisies par la Tunisie. Par ailleurs, l’ALECA n’impose aucun calendrier à la Tunisie et, à fortiori, aucune réforme contraire à ses intérêts. 5 III. Les domaines concernés par l’ALECA Ces informations ont été synthétisées à partir du site : http://www.aleca.tn (consulté le 12 avril 2017) III.1. Le commerce de produits agricoles, de produits agricoles transformés et de produits de la pêche L'UE et la Tunisie sont liées par un Accord d’association signé il y a 20 ans. Cet accord établit une zone de libre-échange qui porte essentiellement sur la réduction ou l'élimination de droits de douane sur les produits industriels. Il a aussi établi une certaine libéralisation des échanges des produits agricoles, des produits agricoles transformés et des produits de la pêche sur une base réciproque, mais asymétrique. L’Accord d’association prévoit que l’UE et la Tunisie entreprennent de nouvelles négociations visant à étendre la libéralisation des échanges en matière de produits agricoles, de produits agricoles transformés et de produits de la pêche. Étant donné que ces négociations n’ont pas encore eu lieu, l’UE et la Tunisie ont décidé de les inclure dans l’exercice global de l’ALECA. L’Union européenne appuiera également la Tunisie dans la mise à niveau des secteurs prioritaires identifiés par la Tunisie et dans les limites des moyens disponibles. Parmi les éléments de négociation figurent les points suivants : • la liste des produits sensibles et le traitement réservé à ces produits, par exemple au moyen de contingents tarifaires; • le traitement réservé aux produits sensibles (par exemple au moyen de • contingents tarifaires) • les calendriers de démantèlement, les périodes de transition pour la Tunisie, et le rythme d’accroissement des contingents tarifaires; • les quantités des contingents tarifaires des produits sensibles • les calendriers de démantèlement, les périodes de transition pour la Tunisie, et le rythme d’accroissement des contingents tarifaires • l’ajustement du régime de prix d'entrée. 6 Les mesures non tarifaires dans le secteur agroalimentaire (mesures sanitaires et phytosanitaires, ainsi que les obstacles techniques au commerce) feront partie des Chapitres Mesures sanitaires et phytosanitaires et Obstacles techniques au commerce de l'ALECA. III.2. Les règles sanitaires et phytosanitaires L’agriculture, la production de denrées alimentaires et d’aliments pour animaux sont des uploads/Industriel/ 16-pdf-policy-paper-aleca.pdf

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