19 Juin 2013 – N°374 Maroc : des faiblesses à surmonter et des défis à relever

19 Juin 2013 – N°374 Maroc : des faiblesses à surmonter et des défis à relever pour une croissance plus équilibrée RECHERCHE ECONOMIQUE Rédacteurs: Jésus CASTILLO Yasmine OSMAN Les performances économiques solides enregistrées ces dernières années par le Maroc sont mises à mal par les vulnérabilités internes au pays (dépendance au secteur agricole, offre à faible valeur ajoutée peu compétitive) et par les chocs extérieurs à répétition (récession en Europe, augmentation des prix des matières premières). Par ailleurs, le soutien budgétaire à la consommation des ménages, s’il a permis de contenir le mécontentement social né du Printemps arabe et de stimuler la croissance dans un contexte de déficit de la demande extérieure, s’est traduit par une forte dégradation des finances publiques et par l’accentuation de déséquilibres macroéconomiques. Les déficits jumeaux ne cessent de se creuser et mettent à mal la stabilité de la croissance marocaine. Pour se sortir de cette impasse, le gouvernement promet de mettre l’accent sur l’amélioration de la compétitivité de l’économie et le rétablissement progressif de l’équilibre budgétaire et de celui de la balance courante. Du respect de ces engagements dépend la stabilité de la croissance économique du Maroc. Malgré une croissance économique élevée, de nombreux défis à relever en 2013 Les performances économiques enregistrées par le Maroc au cours de ces dix dernières années sont solides. En moyenne entre 2000 et 2012, la croissance du Maroc a été systématiquement supérieure à celle de ses voisins du Maghreb (graphique 1). Cette tendance devrait se poursuivre en 2013 avec une augmentation du PIB estimée à 4,5% par le FMI (contre 3,3% pour l’Algérie et 4% pour la Tunisie). La réalisation de cet objectif dépendra de la capacité du Maroc à se passer d’une demande extérieure déprimée et à gérer des problèmes structurels internes de plus en plus gênants. Graphique 1 PIB (GA, %) -4 -2 0 2 4 6 8 1 0 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 1 0 1 1 1 2 1 3 -4 -2 0 2 4 6 8 1 0 Algérie M aroc Tunisie Sources : FM I, Natixis Du côté de l’offre, une dépendance au secteur agricole, un secteur tertiaire moteur et une industrie en difficulté Le Maroc a connu en 2012 un ralentissement inattendu (2,5% de croissance seulement), qui s’explique par la baisse de la valeur ajoutée agricole (-8%). Hors agriculture, le PIB a augmenté de 4,9% (graphique 2). Bien que, au vu des performances du Maroc sur la décennie, ce ralentissement paraisse exceptionnel, il est néanmoins révélateur de la dépendance du pays à un secteur sujet aux aléas climatiques. Le secteur agricole représente en effet 18% de la valeur ajoutée marocaine totale (graphique 3). Graphique 2 Croissance du PIB (GA, %) -1 8 -1 2 -6 0 6 1 2 1 8 24 30 36 08 09 1 0 1 1 1 2 -6 -4 -2 0 2 4 6 8 1 0 1 2 VA agricole (G) PIB (D) PIB hors agriculture (D) Sources : Office Statistique, Natixis Graphique 3 Décomposition de la valeur ajoutée moyenne 2008 - 2012 Agriculture et pêche 1 7,6 Services 56,7 Construction 5,3 Industrie 1 4,6 Extraction 2,1 Energie 3,6 Sources : Office Statistique, Natixis Le secteur des services reste le principal moteur de la croissance avec une contribution au PIB d’environ 4 points de pourcentage en 2012 (graphique 4). Les services commerciaux et les services aux entreprises et services personnels sont les deux branches les plus importantes (graphique 5). Trois autres activités gagnent du terrain : la poste et les télécommunications, l’éducation et la santé et les activités financières et d’assurance (graphique 6). Flash 2013 –374- 2 Graphique 4 Contribution à la croissance du PIB (pts de %) -2 -1 0 1 2 3 4 5 6 08 09 1 0 1 1 1 2 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6 VA agricole VA industrie VA services Sources : Office Statistique, Natixis Graphique 5 Secteur tertiaire, moyenne 2008-2012 (% total) Hôtels et restaurants 3,2 Transports 9,0 Poste et télécom. 1 1 ,6 Activités fin. et assur. ; 9,5 Serv. aux entrep. et serv. perso. 1 9,2 Education, santé et action sociale 1 4,4 Admin. pub. et Séc. Soc. 1 3,9 Commerce 1 9,2 Sources : Office Statistique, Natixis Graphique 6 Services (base 100 en 2006) 80 1 00 1 20 1 40 1 60 1 80 200 06 07 08 09 1 0 1 1 1 2 80 1 00 1 20 1 40 1 60 1 80 200 Commerce Poste et télécom. Activités financières et assurance Serv. aux entrep. et serv. perso. Education, santé et action sociale Sources : Office Statistique, Natixis La production industrielle a quant à elle ralenti en 2012 (0,2% de croissance au T4-2012 contre 3,7% au T4-2011). Ce ralentissement s’explique par les mauvaises performances de l’industrie textile, filière tournée vers l’exportation, et qui doit faire face conjointement à une concurrence exacerbée de la part des émergents et à une demande européenne déprimée (graphique 7). Graphique 7 Production industrielle (GA, %) -1 0 -5 0 5 1 0 1 5 08 09 1 0 1 1 1 2 -1 0 -5 0 5 1 0 1 5 textile manufacture alimentation habillement chimie Sources : Office Statistique, Natixis Flash 2013–374- 3 L’industrie marocaine est frappée par un double mal :  Sur le plan conjoncturel, la baisse de la demande émanant des pays européens, principaux partenaires commerciaux du Maroc ;  Sur le plan structurel, une offre peu diversifiée et à faible valeur ajoutée, qui la rend particulièrement sensible à la concurrence des émergents par ailleurs plus compétitifs. Le ralentissement des exportations, un problème à la fois conjoncturel et structurel Les exportations du Maroc n’ont cessé de ralentir depuis 2011 avant de baisser de 6,5% en GA en février 2013 puis de 4,7% en GA en mars 2013 (graphique 8). Le contexte économique européen explique en partie ce phénomène, puisque l’Europe absorbe en moyenne 60% des exportations marocaines (graphique 9). La détérioration de la situation économique de l’Espagne et de la France, principaux importateurs de produits marocains (graphique 10), devrait plus particulièrement peser sur les performances commerciales à venir du Maroc (graphique 11). Graphique 8 Exportations par région (MM3, %) -40 -20 0 20 40 60 07 08 09 1 0 1 1 1 2 1 3 -40 -20 0 20 40 60 M onde UE Sources : FM I, Natixis Graphique 9 Exportations par continent en 2012 (% total) Europe 60,8 Asie 1 7,7 Amérique 1 1 ,2 Afrique 6,6 Océanie 3,8 Sources : Bank Al-M aghrib, Natixis Graphique 10 Exportations par pays (% total) France 40,1 Espagne 32,6 Royaume-Uni 5,7 Italie 7,7 Allemagne 4,7 Autres 9,1 Sources : FM I, Natixis Graphique 11 Exportations par pays (MM3, %) -60 -40 -20 0 20 40 60 80 07 08 09 1 0 1 1 1 2 1 3 -60 -40 -20 0 20 40 60 80 Espagne Italie France Sources : FM I, Natixis Les mauvaises performances commerciales du Maroc découlent également de facteurs structurels. En effet, l’offre marocaine est constituée de produits à faible valeur ajoutée, pour lesquels l’industrie marocaine n’est pas compétitive. Flash 2013 –374- 4 La structure des exportations marocaines révèle une spécialisation dans des produits à faible valeur ajoutée (graphique 12). Entre 2007 et 2011, le Maroc a exporté principalement : des produits d’origine minérale bruts et semi-finis (phosphate, zinc, plomb et cuivre), de l’habillement (vêtements, bonneterie, chaussures), des produits agroalimentaires (produits de la mer, agrumes) et des biens d’équipement. Les biens d’équipement (essentiellement fils et câbles pour l’électricité) sont toutefois en progression (graphique 13) : alors qu’ils ne représentaient que 3% des exportations marocaines en 2000, ils en constituent aujourd’hui environ 15%. Graphique 12 Exportations par groupe de produit (en % totale) en moyenne sur 2007-2011 Biens d'équipement 1 3,3 Habillement 25,3 Agro- alimentation 1 8,5 Produits semi-finis 28,4 Energie et lubrifiants; 2,2 Produits anim. et végét.; 2,0 M inéraux 1 0,3 Sources : Bank Al-M aghrib, Natixis Graphique 13 Exportations par groupes de produits (base 100=2000) 0 1 00 200 300 400 500 600 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 1 0 1 1 0 1 00 200 300 400 500 600 Alimentation, boissons, tabac Produits bruts d'origine minérale Produits semi-finis Bien d'équipement Habillement Sources : Bank Al-M aghrib, Natixis Bien qu’il n’y ait pas eu de véritable montée en gamme de la production marocaine, les prix à l’exportation, eux, ne cessent d’augmenter, et ce beaucoup plus rapidement que ceux des principaux concurrents émergents (graphique 14). A offre équivalente, les prix des produits marocains sont plus élevés. En conséquence, le Maroc voit diminuer sa part de marché dans les exportations mondiales (graphique 15). De 0,15% en 1999, la part de marché du Maroc est aujourd’hui à environ 0,10%. Graphique 14 Indice des prix à l'exportation (base 100 en 2005) 60 80 1 00 1 20 1 40 1 60 1 80 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 1 uploads/Industriel/ 504-analyse-leconomie-du-maroc-par-natixis-juin-2013.pdf

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