Association de Défense du Patrimoine Nucléaire et du Climat (PNC-France) 73 rue
Association de Défense du Patrimoine Nucléaire et du Climat (PNC-France) 73 rue du Château – Boulogne-Billancourt 92100 N° SIREN 893384362 – mail : contact@pnc-france.org Le 27 octobre 2021 Monsieur Xavier PIECHACZYK Président du Directoire Réseau de Transport de l’électricité Immeuble Window 7, Place du Dôme 92073 La Défense cedex Monsieur le Président Vous avez, dans votre conférence de presse du 25 octobre, présenté les résultats de l’étude réalisée par RTE intitulée « Futurs énergétiques 2050 ». Je souhaite d’abord saluer l’immense travail de grande qualité réalisé par vos collaborateurs et l’initiative de la très large concertation publique, inédite et fructueuse, qui l’a nourri. Toutefois, les résultats de cette étude sont entachés d’une hypothèse de départ très restrictive, pourtant d’importance majeure. Le scénario de référence prévoit une consommation d’électricité en 2050 limitée à 645 TWh, à peine supérieure de 35 % à celle de 2019, dernière année « normale » connue, alors qu’il faudra s’être débarrassé des énergies fossiles, qui ont représenté près de 70 % de l’énergie finale consommée cette même année. La marche à franchir est donc immensément haute. Pourquoi cette limitation à une valeur aussi faible, alors que vous avez reconnu et écrit dans vos documents que des pays voisins comparables au nôtre prévoyaient des augmentations de leur consommation d’électricité de 70 à 80 %, c’est-à-dire deux fois plus élevées ? D’où vient cette limitation drastique ? Vous avez, en réponse à une question, répondu dans votre conférence que vous aviez travaillé la « main dans la main » avec l’association NégaWatt et l’ADEME, dont on ne peut ignorer l’opposition au nucléaire, de notoriété publique. C’est évidemment votre droit, mais je m’étonne qu’à l’inverse vous n’ayez même pas pris en considération les estimations de nos deux Académies, celle des sciences et celle des technologies, dont les compétences sont incontestables et l’indépendance de jugement totale ? Vous ne pouvez ignorer que toutes deux ont abouti à des prévisions qui se situent entre 800 et 900 TWh et sont d’ailleurs parfaitement cohérentes avec celles des pays voisins précités. À moins que vous n’ayez choisi de suivre une consigne venue du ministère, ce qui serait contraire à la mission de prospective légalement dévolue à RTE, que vous avez opportunément rappelée au début de votre conférence ? Sur le fond, vous avez tenté de justifier cette très faible consommation par les progrès d’efficacité énergétique attendus. Vous ne pouvez cependant ignorer que ces progrès ont été très faibles depuis plus de 20 ans, de moins de 1 % par an. Passer à une échelle requise au moins trois fois supérieure sera d’évidence un défi majeur qui ne se décrète pas. Miser à ce point sur les progrès d’efficacité énergétique représente par conséquent un grand risque, qui sera très difficile à corriger au fil du temps dans un secteur dont vous êtes le premier à reconnaître les très grandes constantes de temps d’évolution. Vous les avez d’ailleurs opportunément rappelées en conclusion de votre conférence de presse en déclarant qu’il y avait urgence à se mobiliser pour 2050. Cette hypothèse restrictive introduit donc un biais majeur dans vos prévisions. Vous avez certes évoqué une hypothèse « Réindustrialisation profonde » à 752 TWh qui va dans le bon sens, mais elle n’a pas été documentée comme le scénario de référence et mériterait d’être poussée plus loin au vu des variantes « Hydrogène + » et « Efficacité énergétique réduite » susceptibles de cumuler leurs effets additifs à l’hypothèse « Réindustrialisation profonde ». Il Association de Défense du Patrimoine Nucléaire et du Climat (PNC-France) 73 rue du Château – Boulogne-Billancourt 92100 N° SIREN 893384362 – mail : contact@pnc-france.org me paraît donc indispensable de pousser les études jusqu’aux niveaux de consommation anticipés par les Académies pour réellement disposer d’une vision prospective complète et robuste. Par ailleurs, concernant la capacité nucléaire en 2050, vous vous êtes limité à « la proposition industrielle la plus haute de la filière [qui] consiste à date à atteindre un parc nucléaire d’une capacité complète de 50 GW en 2050 » tout en précisant plus loin avec raison : « Cette projection pourra être amenée à évoluer avec le temps : sans réinvestissement dans la filière, sa capacité projetée à long terme continuera de diminuer, tandis qu’une décision rapide de relance pourrait conduire, ultérieurement, à revoir à la hausse ses perspectives ». Pourquoi, là encore, ne pas avoir élargi l’éventail des possibilités, ce qui relève à nouveau pleinement de votre mission prospective ? Car il est essentiel d’y voir clair dès que possible. Ce serait en l’occurrence indispensable à deux égards : vos études publiées le 25 octobre mettent clairement en évidence que c’est le scénario qui comporte le plus de nucléaire qui : est le moins coûteux de tous ; a le moins besoin de capacités de « flexibilité » pour assurer l’équilibre du réseau ; a le moins d’impact sur les modifications des réseaux de transport et régionaux ; a le meilleur bilan carbone de tous. Ceci sans compter qu’il minimise le recours aux éoliennes et aux grands parcs photovoltaïques qui posent d’importants problèmes potentiels d’acceptabilité sociétale. De plus, pour faire face à des consommations qui ont toutes chances d’être supérieures à celle de votre scenario de référence, il sera nécessaire d’augmenter la production, donc la capacité nucléaire qui est le moyen le plus performant au vu de votre étude. Afin d’éclairer les décisionnaires politiques et permettre aux industriels de se positionner, il me semble de ce fait indispensable d’étudier des scénarii comportant notablement plus de nucléaire. Mais peut-être cela est-il prévu dans les mois qui viennent, puisque vous avez annoncé que vos études vont être complétées ? Les échanges avec nos voisins européens vont constituer un enjeu de plus en plus crucial. Vous insistez sur la nécessité d’accroître les capacités des lignes d’interconnexion, sans évoquer les capacités de production qui seront effectivement disponibles. Dans une Europe aux capacités de production pilotable réduites, fortement dépendante de l’énergie éolienne et donc des régimes de vent en Europe de l’Ouest, il est peu vraisemblable que les secours entre pays soient au rendez-vous à la bonne échelle. Quant au photovoltaïque, on ne peut bien sûr rien en attendre lors des pointes de consommation hivernales les plus élevées à 19 heures. Les prévisions d’importations très élevées figurant dans votre étude me semblent donc pour le moins optimistes et porteuses de risques et de contraintes fortes sur les consommateurs. Je voudrais terminer par une considération stratégique : il y a une très forte dissymétrie entre un risque de surinvestissement et celui d’un sous-investissement dans le nucléaire. Dans le premier cas, l’électricité nucléaire française trouvera très facilement à s’exporter dans une Europe qui manquera de moyens pilotables, il n’y a donc aucun risque d’investissements échoués. Dans le deuxième cas, le pays risque de manquer d’électricité, d’autant plus si des difficultés de développement des sources renouvelables se font jour. Les conséquences économiques et sociales seraient alors majeures pour le pays et ses citoyens. Développer le nucléaire est par conséquent une opération sans regret. Je reste à votre disposition, avec le Collège d’experts de PNC-France, pour participer aux réflexions concernant la capacité nucléaire souhaitable, et vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes salutations distinguées. Bernard Accoyer Président uploads/Industriel/ lettre-de-bernard-accoyer-president-de-patrimoine-nucleaire-et-climat-a-rte.pdf
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- Publié le Apv 05, 2021
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