Section 2 : La valorisation de l’innovation par les contrats portant garantie d

Section 2 : La valorisation de l’innovation par les contrats portant garantie des droits de la propriété industrielle du breveté En sus des contrats portant transmission des droits de la propriété industrielle, l’innovation brevetée peut être valorisée par les conventions ayant pour objet la garantie des droits de la propriété industrielle. En effet les droits de la propriété industrielle, en raison de leur valeur patrimoniale réelle et de la possibilité de constituer une garantie sur leur base, constitue une source non négligeable de crédit. Une structure, à l’instar d’une start-up, pouvant se prévaloir de la titularité de brevets d’inventions issues de son département recherche et développement est à la réalité fort crédible sur les places boursières et financières. Et dans ce sens, elle peut bénéficier de l’octroi de crédits financiers garanties par des conventions de sûretés assises sur un audit des brevets en question, afin d’assurer la soutenabilité de la dette ainsi contractée. Ces conventions de garanties prennent la dénomination de nantissement des droits de la propriété industrielle, dont le régime juridique est régi par les dispositions de l’A.B.R et de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des sûretés. Avant de présenter ce régime juridique des conventions de nantissement des droits de la propriété industrielle (paragraphe 2) il importe de restituer les fondements socio- économiques du principe de la valorisation de l’innovation par ces contrats de garanties (paragraphe1). Paragraphe 1. Les fondements socio-économiques du principe de la valorisation de l’innovation par les contrats portant garantie des droits de la propriété industrielle « L’économie a changé ». C’est par ces mots qu’est entamé le rapport 2006 de la commission française sur l’économie de l’immatériel. Il y est soutenu qu’en quelques dizaines d’années, une nouvelle composante s’est imposée comme moteur déterminant de la croissance des économies modernes : l’immatériel. D’un point de vue socio-économique, il est devenu en fait difficile de considérer, que l’histoire du concept de propriété se soit arrêtée à la période de la révolution industrielle avec le triomphe du dogme propriétaire matériel. Tout au contraire, cette histoire est relancée par le défi que représente l’inscription dans la vie du droit moderne, des actifs incorporels innovants. Dans la conception socio-économique et juridique de la propriété, il est en effet apparu impératif de considérer une nouvelle catégorie de biens et d’actifs économiques parmi les facteurs de production, dans nos sociétés devenues, pour la grande majorité, capitalistes. Il s’agit des créations intellectuelles en l’occurrence industrielles, sur lesquelles reposent de plus en plus les économies et les sociétés contemporaines, à telle enseigne qu’on est enclin à parler aujourd’hui d’« économie du savoir ». Le Dictionnaire d’analyse économique du Pr. Bernard GUERRIEN intègre d’ailleurs les actifs immatériels dans la définition du capital économique. Il énonce que dans un sens « technique », le capital peut désigner un ensemble de biens ou d’actifs produits dans le passé et qui interviennent dans la production présente ou future d’autres biens. Parmi ces biens l’auteur range à côté des biens matériels, les biens immatériels, les actifs de la propriété industrielle. Cette mutation de la compréhension classique du capital économique serait en fait le fruit de la révolution des causes de sa propre naissance, une conséquence directe et évidente du développement du capitalisme moderne, devenu en quelque sorte « immatériel » en vieillissant, c'est-à-dire assis davantage sur des actifs intangibles que sur ceux tangibles comme à son origine. Alors qu’il était basé sur le capital, le profit et la propriété essentiellement matérielle, avec l’évolution socio-technologique et économique de notre temps, le capitalisme repose aujourd’hui principalement sur l’information et les idées innovantes fruits du génie humain. C’est désormais la capacité à innover, à créer des concepts et à produire des idées, qui est devenue l’avantage compétitif essentiel. Au capital matériel a succédé le capital immatériel ou, pour le dire autrement, le capital des talents, du savoir, de l’innovation. Qu’on en juge, alors qu’être leader de l’industrie automobile, c’était avant tout s’imposer par la faculté financière à produire des véhicules, aujourd’hui, c’est la marque, le concept-car, le design, les dessins et modèles industriels ou le degré de technologie verte intégrée dans les véhicules et brevetée qui font dans ce secteur, la réussite industrielle et la crédibilité économique. Le patrimoine des entreprises repose de plus en plus sur des éléments immatériels, parfois quantifiables, parfois moins, tels que la valeur de leur portefeuille de brevets ou la capacité créative et innovatrice de leurs équipes de recherche-développements. Pour comprendre ce mouvement, il faut revenir sur les mutations qui marquent l’économie mondiale depuis quelques années, expliquent les économistes. Dans toutes structures économiques, quels que soient le produit ou le service vendu, la création de valeur ajoutée se fonde en effet de plus en plus sur des actifs immatériels que sur ceux matériels. A la suite de la révolution des technologies de l’information et de la communication, nouveau vecteur des échanges économiques, un changement radical s’opère et s’impose : parallèlement au capital physique, palpable et visible, l’intelligence, le talent, la matière grise prennent une place de plus en plus importante. C’est cela l’économie du savoir, une économie qui n’a pas de fondement physique mais qui place les capacités intellectuelles innovatrices au cœur de la création de valeur et de la richesse. Le capital, en tant que facteur de production ne renvoie plus uniquement aux biens corporels ou matériels tels la propriété foncière. La richesse d’une personne ou d’une entreprise n’est plus évaluée sur la base de ses actifs uniquement corporels et tangibles (immeubles, stock, outillage, matériel…etc.). Avec la révolution technologique et les bouleversements que cela entraine dans l’économie mondiale, l’on assiste à l’émergence d’une économie de plus en plus fondée sur le savoir, l’immatériel et de façon saillante sur l’intelligence économique et les actifs intellectuels innovants. Les innovations objets de droits de propriété industriels protégés viennent enrichir le patrimoine, et se présentent désormais comme des actifs économiques susceptibles, par leur valeur dans les circulations marchandes, de garantir des crédits auprès des établissements financiers. La publicité, le marketing et la vente, dopés par les nouvelles technologies de communication, permettent à ces actifs incorporels d’être plus attractifs et d’acquérir ainsi une très grande valeur financière. Du reste, sur un plan strictement juridique, dans cette mouvance moderne des systèmes économiques, où le succès est attribué aux structures qui se montrent les plus capables de s’approprier, de valoriser et de protéger les talents et les créations innovantes, les prêteurs dans leur relation avec les emprunteurs, intègrent de plus en plus les actifs intellectuels protégés telles que les inventions brevetées. Dans ce sens, à l’image du gage pour les biens mobiliers corporels, ou de l’hypothèque pour ce qui est de la garantie de la propriété immobilière corporel, c’est le concept juridique de nantissement qui est ici convoqué pour permettre au droit du crédit et des sûretés de saisir l’immatérialité de ces facteurs de production. Il importe à présent de préciser le régime juridique de cette sûreté réelle immatérielle, en termes de conditions de validité et de suites et effets. Paragraphe 2. Le régime juridique du nantissement des droits de la propriété industrielle sur les innovations brevetées. A la suite des mutations sus évoquées, des modifications substantielles des principes d’analyse financière des prêteurs s’observe dans le sens de la prise en compte de la propriété industrielle dans l’évaluation globale des éléments d’actifs des emprunteurs, susceptible de faire l’objet d’une sûreté et de contribuer ainsi au financement de leurs projets et développements. Le droit OHADA œuvrant justement à l’harmonisation du droit des affaires sur le continent africain, a adopté des actes uniformes dans divers domaines de cette matière pour assurer aux milieux d’affaires la sécurité juridique nécessaire à l’exercice de leurs activités. L’un de ces actes est justement constitué par l’Acte Uniforme portant organisation des sûretés, lequel consacrent des dispositions sur les conditions de fond et de forme du mécanisme de crédit constitué par le nantissement des droits de la propriété industrielle (A) afin que ce dernier produise des effets de garantie (B). A- Les conditions du nantissement Signalons d’entrée de jeu que le mécanisme de toute sûreté est subordonné à l’assurance que doit ou peut se faire l’emprunteur, sur la possibilité de se faire rembourser selon les termes de la convention de garantie constituée. Ce qui intéresse le créancier prêteur, c’est la possibilité pour lui de réaliser sa sûreté en cas de défaillance de l’emprunteur. Il n’acceptera un bien en garantie que si celui-ci possède une valeur stable, certaine, ou et tout au moins qui lui permette de présumer qu’en cas de défaillance du débiteur, la valeur du bien lui suffira à rembourser sa créance. Dans ce sens il sera procéder avant toute chose, l’audit du bien apporté en garantie. Sommes toutes et au-delà de ce préalable à toute garantie qui consiste en la valeur ajoutée que peut réellement procurer l’actif apporté en sûreté, le nantissement des droits de la propriété industrielle est déterminé, du point de vue du droit, par des conditions communes à toutes sûretés réelles ainsi que par des conditions spécifiques au sens des dispositions de l’Acte Uniforme O.H.A.D.A. portant uploads/Industriel/ seance-9-cours-d-x27-innovations-et-brevets-polytechnique-dr-nguele-mballa.pdf

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