N°112 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - MARS 201 7 154 Les entrepôts sont-ils morts ? «
N°112 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - MARS 201 7 154 Les entrepôts sont-ils morts ? « Je viens de commander un pantalon jaune sur votre site en taille 42, quand va-t-il arriver ? » Cette question anodine d’un client qui a réalisé une commande 5 min avant en utilisant son smartphone et en faisant en sorte de ne rien payer de trop, et surtout pas de frais de port, c’est vous, c’est moi, c’est le client de 201 7. Exigeant, polymorphe, habile et engagé, il veut des produits basiques mais pas diminués, un service personnalisé mais n’est pas toujours prêt à le fi nancer. « Après tout, je suis client et tout le monde offre les frais de port mainte- nant ! » Oui sauf que... La logistique est-elle un métier zéro coût ? Le consommateur change, la distribution se métamorphose, et les entrepôts ? A uteur de la thèse « Des usines à colis », le sociologue David Gaborieau sou- ligne que l’émergence des entrepôts logistiques est liée aux transformations du monde industriel. Autrefois la logistique était opérée dans les usines, et l’externalisation a commencé à se produire dans les années 1970- 1980, ne cessant de se développer depuis, la croissance étant aujourd’hui portée par celle du commerce en ligne. L’entrepôt, parent pauvre d’une chaîne logistique en mutation ? Incontestablement, l’entrepôt de 2017 est un outil moderne, ayant un recours de plus en plus intense aux technologies de l’information et à la robotique. Sous la pression d’une économie qui leur demande toujours plus au moindre coût, les entrepôts sont souvent le maillon de la chaîne logistique qui doit supporter la plupart des contraintes pour être toujours plus produc- tif. La réponse des ingénieurs a été l’automati- sation, qui a certes amélioré les rythmes mais qui n’a pas rendu le travail moins répétitif. Les préparateurs de commande – le « gros » des troupes – sont amenés à exécuter des tâches récurrentes, que les robots n’ont pas rendues plus enrichissantes. En outre, la généralisation de la gratuité des frais de préparation de commandes, notam- ment dans l’e-commerce, a créé une vision de la logistique déformée en la faisant passer pour une opération « sans valeur » dans la tête des donneurs d’ordre, et en particulier des clients fi naux. En réaction logique à cette perception, de plus en plus d’opérateurs de commandes en sont venus à considérer leur travail comme n’ayant pas de valeur ajoutée, alors même que les cadences le dévalorisent déjà. Frédéric Klotz Fondateur d’OpenYourWeb, conseil en Supply-Chain du e-commerce contact@openyourweb.net ©OPENYOURWEB ©JOSSDIM-FOTOLIA MARS 201 7 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE ■ N°112155 Alors, l’entrepôt pourra-t-il rester ce parent pauvre d’une chaîne logistique secouée par les mutations économiques, culturelles et numé- riques ? Vers un foisonnement de lieux de stockage ? Des acteurs du commerce de détail commencent à réfl échir leur logistique autrement. Opératrice d’une solution de premier kilomètre, la société Wing est par exemple en train de mettre en place pour certains clients un parcours logis- tique qui court-circuite l’étape de stockage : le stock affi ché à la vente dans les boutiques et sur les canaux de vente digitaux est celui présent dans… les boutiques du client. Ainsi, quand une commande vient de Lille et que le produit est disponible dans un point de vente de Mont de Marsan, alors un ordre de prépara- tion tombe dans la boutique qui doit le prépa- rer, un coursier vient récupérer la commande lors de sa tournée et il est remis à un atelier qui l’emballe et l’expédie. Ce type d’expérimentation présage-t-il un ave- nir fait d’un foisonnement de lieux de stoc- kage maillant le territoire, par opposition aux entrepôts-mastodontes et centralisés ? Un peu comme la distribution qui focalise tous ses efforts sur les points de vente de proximité après avoir misé massivement sur des hyper- marchés aux dimensions titanesques ? Une mue technologique du transport Le monde du transport aussi entreprend sa mue technologique. Avec son service de « 3D Printing », UPS est devenu fabricant de pièces détachées. Le fournisseur de pièces ne lui fait plus parvenir de colis contenant les produits à transporter mais un simple fi chier informatique contenant les données du transport et celles de la pièce à imprimer : ici aussi, l’étape de stoc- kage a disparu. Alors, l’entrepôt est-il mort pour autant ? En s’adaptant, les entrepôts pourront survivre. En parvenant par exemple à passer d’un modèle spécialisé et centralisé à une organisation souple et mieux répartie géographiquement, en apportant des services à valeur ajoutée visibles pour les clients fi naux, ou encore en faisant en sorte de laisser l’itératif aux seules machines, pour laisser à l’humain l’espace et le temps de la réfl exion. ■ uploads/Industriel/ tribune-112-3 1 .pdf
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- Publié le Jan 07, 2023
- Catégorie Industry / Industr...
- Langue French
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