Le chapitre relatif à l’essai de compréhension des RSN et retour sur le context
Le chapitre relatif à l’essai de compréhension des RSN et retour sur le contexte d’émergence de Facebook est une aubaine pour nous, dans le cadre de ce travail, en ce sens qu’elle nous donne la possibilité non seulement de reconstituer l’itinéraire des RSN, mais aussi, d’apporter des clarifications concernant le terrain scientifique que représente Facebook. Deux sections ont été mobilisées à cet effet. De prime abord, nous avons fait un flashback sur la trajectoire des RSN en montrant un lien entre les ancrages paradigmatiques de la sociologie structurale et l’émergence des RSN (section 1). Ensuite, nous avons procédé à une description d’une part générale de Facebook et d’autre part ciblée autour du commerce en ligne (section 2) Section 1 : Regard panoramique sur la trajectoire des RSN : De l’Analyse des Réseaux Sociaux (ARS) aux Réseaux Sociaux Numériques (RSN) Tout au long de cette section, il nous reviendra pour tâche d’aborder les origines du concept de réseau en un premier temps. En un second temps, nous reviendrons sur les temps forts de l’ARS et ses champs d’application. A travers la revue des grandes idées qui ont jalonné l’ARS, nous ressortirons les éléments de rapprochement et de divergence existant entre l’ARS et les RSN. Enfin, nous nous pencherons sur le phénomène récent que représentent les RSN. 1.1. Origines du concept de réseau En effet, le mot « réseau » n’est pas un néologisme, et l’histoire de ses usages dans la langue française, depuis son apparition au début du XVIIe siècle, est extrêmement féconde en informations, dans la mesure où elle permet d’identifier les différents registres métaphoriques que ladite notion a acquis et continue de véhiculer. D’un point de vue chronologique, les premières utilisations du concept de réseau remontent au siècle sus-mentionné, et relèvent d’un registre textile. Jean Nicot définit à cet égard le « réseul » comme étant : « Tisseure de fil faite à mailles, dont les filets, rets, poches, bourses et tirasses à prendre poissons, connils, cailles et autres oiseaux sont faits » (1606 ; 563). Du CHAPITRE 1 : ESSAI DE COMPREHENSION DES RSN ET RETOUR SUR LE CONTEXTE D’EMERGENCE DE FACEBOOK latin retis, entrelacs de lignes, le terme désigne donc un tissu, dont font usage les chasseurs, mais aussi les femmes pour retenir les cheveux. Le terme français réseul, dès la fin du XVIIe siècle, devient « rézeau », puis « réseau » que la première édition du dictionnaire de l’Académie française (1694) définit comme un « ouvrage de fil ou de soie, fait par petites mailles ou en forme de rets ». Cet ouvrage peut désigner aussi bien les pièges des braconniers que les coiffes des dames (d’où la « résille »). Par la suite, le mot réseau, dans le langage des tisserands, renvoyait à l’idée d’entrecroisement des fibres, d’une façon plus générale qui fait retour à son étymologie latine. La fabrication du réseau-filet était le produit d’un mouvement alternatif continu de va-et-vient : ce mouvement deviendra constitutif de la mythologie du réseau dans la plupart des civilisations. Le second registre métaphorique de la notion en question prend une consonance médicale au XVIIIe siècle, en sus des premiers usages qui ont déjà eu cours au siècle précédent. Tout d’abord, il renvoie à l’idée d’appareil sanguin, et ensuite désigne le système nerveux. La médecine d’Hippocrate associe l’idée du réseau à une vision à une vision de l’organisme où « Toutes les veines communiquent et s’écoulent les unes dans les autres ; Les unes s’abouchent avec elles-mêmes, les autres sont en communication, par les veinules partant des veines qui nourrissent les chairs ». C’est l’association des veines visibles avec les veines invisibles qui font vivre le corps humain. Avec cette extension, à la métaphore explicite de l’entrelacement et du contrôle s’ajoute celle, nouvelle, de la circulation dont le réseau est le support. Ce registre métaphorique nouveau est dénué de toutes ambiguïtés au XIXe siècle, avec l’usage de la notion de réseau pour exprimer l’ensemble des routes, puis des voies ferrées qui parcourent une région ou un pays. Dans le même temps, c’est-à-dire à partir du milieu du XVIIIe siècle, cette notion s’enrichit d’une signification topographique, avec son application aux méthodes de triangulation de l’espace pour délimiter le terrain. Ainsi, depuis ses premières occurrences, la notion de réseau, à mesure qu’elle s’enrichissait par extension et glissement de registres métaphoriques superposés, s’est progressivement abstraite des objets concrets qu’elle servait primitivement à désigner, pour finalement désigner un certain nombre de propriétés générales intimement entremêlées : l’entrelacement, mais aussi le contrôle et la cohésion, la circulation, la connaissance et la représentation topologiques. 1.2. Analyse des Réseaux Sociaux et ses champs d’applicabilité 1.2.1. Analyse des Réseaux Sociaux Le réseau social est, dans le langage courant, à partir du milieu du XIXe siècle, l’ensemble d’individus et des relations qu’ils entretiennent les uns avec les autres. Du point de vue de la sociologie structurale, il est aperçu comme étant constitué d’organisations ou d’individus reliés entre eux par des liens qui sont créés à l’occasion d’interactions sociales. C’est un thème dynamique qui a connu une forte expansion ces dernières années et particulièrement dans la sociologie américaine et allemande. Il est tout à fait plausible de dater assez précisément le moment où les sciences sociales ont opté de porter un intérêt à ladite notion, considérée au départ sous le nom de structures, systèmes, cercles, groupes. Contrairement aux usages originels du concept de réseau, adossés sur des registres métaphoriques, la théorie des structures sociales revêtent un double positionnement. En un premier temps, il s’inscrit comme un outil de plus dans l’escarcelle du sociologue et lui concède la possibilité de comprendre, de décrire et de rendre compte des relations entre les individus et les régularités structurales qu’elles présentent, leurs formations et leurs transformations, et d’analyser leurs effets sur les comportements individuels par le truchement d’un ensemble de méthodes, de concepts, de théories, de modèles et d’enquêtes. En un second temps, il trouve au-delà des divergences au sujet des origines de l’ARS existant entre l’école française avec pour tête d’affiche A. Degenne et M. Forsé et l’école britannique avec pour chef de fil S. Wasserman et K. Faust, un consensus portant à reconnaître en l’analyse structurale une nouvelle posture paradigmatique accordant une importance soulignée à la notion de cercle social et se situant entre les deux grandes traditions de la sociologie à l’instar des théories individualistes qui majorent le rôle de l’acteur et les théories holistes qui privilégient le système collectif. Le parcours de l’histoire que nous exposons dans cette articulation se décompose en trois temps selon un schéma bien connu des historiens de la sociologie : le temps des précurseurs, le temps des pionniers, le temps des fondateurs. La trajectoire de l’ARS exposée pour le compte de cette recherche, est une tentative de réconciliation entre les deux traditions de recherche, française et britannique, au sujet de la naissance de l’ARS. La première situant l’ARS à partir de la sociologie Simmelienne, et la seconde quant à elle situant le point de départ de l’ARS avec la sociométrie de J. L. Moreno. 1.2.1.1. Le temps des précurseurs Le temps des précurseurs est celui au cours duquel, sans faire allusion de manière formelle au concept de réseau, la sociologie, en même temps qu’elle se bâtissait, témoignait de préoccupations qui préfigurent celles qui seront ensuite au cœur de l’ARS. On assiste à cette période à la construction de l’histoire des idées structurales par d’un côté quelques figures célèbres de la philosophie soupçonnées de récupération généalogique et considérées davantage comme des pères adoptés que comme des géniteurs naturels, et d’un autre côté par le philosophe et sociologue allemand G. Simmel considéré comme le précurseur légitime de l’ARS. S’agissant de la récupération généalogique, plusieurs philosophes sont pris en compte. Entre autres, F. Heider affirme avoir puisé l’inspiration de sa théorie de l’équilibre structural dans le livre de B. Spinoza fort opportunément intitulé L’éthique. La substance de sa pensée se résume en ces mots : « Si nous imaginons que quelqu’un affecte de joie la chose que nous aimons, nous serons affectés d’amour à son égard » (1946). En d’autres termes « Les amis de mes amis sont mes amis » (B. Spinoza ; 1999 ; 695). Cette proposition du sens commun est à la base de la théorie de F. Heider. Ainsi, la personne humaine est appelée naturellement à élargir son réseau de relation en partant de ses amis vers les amis de ses amis et ainsi de suite, vers le réseau le plus large possible. T. Hobbes dans la même perspective déclare dans le Léviathan1 que : « Avoir des amis, c’est avoir du pouvoir » (1651). Déporter dans un contexte de guerre ou de défense, il est fort logique de mobiliser des éléments relatifs à la force humaine et aussi à la capacité des acteurs à nouer des alliances ou élargir leur réseau pour mieux faire prévaloir leur force. Sans conteste, le philosophe et sociologue allemand G. Simmel, est systématiquement considéré par les tenants de l’ARS comme étant le précurseur légitime de cette uploads/Ingenierie_Lourd/ des-reseaux-sociaux-numeriques-a-facebook-trajectoire-d-x27-un-objet-d-x27-etude-en-symbiose-avec-la-pratique-du-commerce 1 .pdf
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- Publié le Fev 28, 2022
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