Chapitre 6. Jakob + Macfarlane, du modèle numérique à la forme construite Somma
Chapitre 6. Jakob + Macfarlane, du modèle numérique à la forme construite Sommaire 6.1. Trajectoires de projets...................................................................................................................... 2 6.1.1. Débuts de carrière et orientations méthodologiques ...................................................................... 3 6.1.2. Le Restaurant Georges, Centre Georges Pompidou (1998-2000) ..................................................... 8 6.1.3. La trame, un procédé interprétatif d’intégration contextuelle ...................................................... 12 6.1.4. Les figures morphologiques, outils génériques de synthèse projectuelle ...................................... 31 6.2. Docks en Seine, Institut de la mode et du design (2004-2008) ....................................................... 45 6.2.1. Une exploration projectuelle polymorphe en phase concours ...................................................... 45 6.2.2. Par-dessus et en-dedans, une résolution constructive hiérarchisée et didactique ......................... 59 6.2.3. Le « plug over », un masque en forme de façade épaisse.............................................................. 62 6.2.4. Les « grottes », l’ossature tubulaire entre structure et ornement ................................................. 68 6.2.5. Genèse du projet, de l’effet de surface à l’ossature tubulaire ....................................................... 74 6.2.6. Continuité de l’ossature tubulaire : du maillage numérique aux capots métalliques ..................... 83 6.3. Les Turbulences, FRAC-Centre (2006-2013) .................................................................................... 89 6.3.1. Modèle filaire : de la figure morphologique au processus conceptuel des turbulences ................. 90 6.3.2 De la peau de verre à la dialectique entre intérieur et extérieur .................................................... 99 6.3.3. Sillons, joints creux et joints évidés : matérialiser les tracés du modèle numérique ................... 107 6.3.4. Surface panélisée : fabrication numérique et techniques constructives traditionnelles .............. 123 6.3.5. Ossature tubulaire : Savoir-faire constructif et File-to-factory..................................................... 115 6.4. Figures de traductions constructives chez Jakob + Macfarlane .................................................... 138 6.4.1. Poétique numérique de la construction ? ................................................................................... 138 6.3.2. Tubes, joints et engravures : la construction comme représentation chez Jakob+Macfarlane ..... 140 6.3.3. Figures de la traduction constructive chez J+M ........................................................................... 141 6.1. Trajectoires de projets Dominique Jakob et Brendan MacFarlane ont établi leur bureau éponyme à Paris depuis 1992. Si les réalisations de la jeune agence Chevalier Morales Architectes créée en 2005 ne bénéficie d’une reconnaissance sur la scène québécoise et canadienne que depuis très récemment, les travaux du couple d’architectes ont déjà fait l’objet de nombreuses publications et expositions et bénéficient d’une diffusion internationale. Plusieurs monographies leur ont été consacrées, publiées aussi bien en Italie (2004) qu’en Australie (2006) ou en Chine (2012)1, auxquelles s’ajoutent de nombreuses publications en France. En 2011 par exemple, un numéro spécial de la revue Archistorm leur est intégralement dédié2. Certains de leurs dessins, maquettes et prototypes ont également été intégrés aux collections du Centre Georges Pompidou à Paris et du Fonds Régional d’Art Contemporain de la région Centre (FRAC-Centre) à Orléans, deux institutions qui leur ont par ailleurs confié la réalisation de projets. Les analyses de plusieurs auteurs, dont Frédéric Migayrou, conservateur en chef des collections architecture et design au Centre Georges Pompidou, et Christian Girard, enseignant au sein du département Digital Knowledge à l’ENS d’architecture Paris-Malaquais, ont déjà balisé un certain nombre de traits saillants de la démarche architecturale développée depuis vingt-cinq ans par Jakob+MacFarlane. Notre contribution sera concentrée sur l’analyse détaillée du processus de conception de deux projets réalisés récemment : Docks en Seine (2004-2008) accueillant la Cité de la mode et du design à Paris et Les Turbulences (2006-2013) accueillant le FRAC-Centre à Orléans, qui ont chacun fait l’objet d’une publication individuelle3. Ces analyses ont été documentées directement à partir des archives professionnelles de l’agence et à partir d’un entretien réalisé avec Brendan MacFarlane4. En cohérence avec la structure du chapitre précédant, ces deux analyses détaillées seront déployées à partir de thématiques issues d’une analyse préliminaire, transversale à l’ensemble des productions architecturales de l’agence. Capitalisant sur les écrits existants, cette 1 Girard, Christian. Jakob+Macfarlane. Libria, Melfi (Italie), 2004 ; Jakob, Dominique ; Brendan MacFarlane et Robyn Beaver (Ed.) Jakob+MacFarlane, Coll. NeoArchitecture, The Image Publishing Group, Victoria (Australie), 2006 ; Yudina, Anna ; Migayrou Frédéric. Phase, the architecture of Jakob+Macfarlane, AADCU Publication, Pékin, 2012 2 « Jakob+MacFarlane », Archistorm, Hors-Série #2, Avril 2011 3 Migayrou, Frédéric ; Dominique Jakob et Brendan MacFarlane. Jakob+MacFarlane : Les Docks, HYX, Orléans, 2011. Brayer, Marie-Ange. Les Turbulences FRAC-Centre : Jakob+MacFarlane, HYX, Orléans, 2013. 4 Entretien de Brendan MacFarlane réalisé par Louis Destombes le 8 mars 2014 dans les locaux de l’agence Jakob+MacFarlane. Durée totale 1h20mn. analyse transversale visera à préciser les thématiques identifiées à travers ces écrits en étudiant la manière dont celles-ci sont mises-en-œuvre à travers un ensemble de projets de concours et de réalisations construites. Touchant aussi bien aux domaines du bâtiment, de l’aménagement intérieur, de la scénographie d’exposition, du design de mobilier et de l’installation artistique, l’ampleur des productions de l’agence Jakob+MacFarlane depuis 25 ans ne peut pas être retranscrite ici de manière exhaustive. Nous avons privilégié les projets présentés par les architectes eux-mêmes ou par les différents auteurs comme des projets –clés, représentatifs des différents tournants qui dessinent la trajectoire de projets développées par les concepteurs. 6.1.1. Débuts de carrière et orientations méthodologiques Jakob+MacFarlane présentent aujourd’hui leur travail comme « une exploration des technologies numériques à la fois comme apport conceptuel et comme moyen de fabrication »5. La démarche de conception des architectes s’inscrit effectivement très tôt dans un rapport étroit aux outils numériques de conception et de fabrication, comme en témoigne le projet du restaurant Georges conçu et réalisé entre 1998 et 2000. Évoquant douze ans plus tard leur trajectoire de projets, les architectes distinguent volontiers un « avant Georges » (1992-1999) et un « après Georges » (2000-).6 Le parcours suivi par les deux architectes au cours de cette première période invite néanmoins à situer la compréhension de leur démarche exploratoire dans une perspective élargie dépassant largement les enjeux liés aux technologies numériques. Née à Paris en 1966, Dominique Jakob étudie l’histoire de l’art à Paris 1 La Sorbonne puis l’architecture à Paris-Villemin dont elle est diplômée en 1991. Brendan MacFarlane est né en 1961 à Christchurch en Nouvelle-Zélande. Après avoir brièvement travaillé à Sydney dans l’agence d’Harry Seidler, un architecte néo-moderne, il se rend aux États-Unis pour étudier l’architecture, d’abord à la SCI-Arc, jusqu’en 1984 puis à la GSD de Harvard dont il obtient un M.Arch en 1990. Les deux architectes se rencontrent à Los Angeles, où ils travaillent tous deux au sein de l’agence Morphosis. Dirigée par Thom Mayne, qui a notamment contribué à la création de la SCI-Arc en 1972, Morphosis se positionne comme un acteur majeur du déconstructivisme sur la côte ouest, un mouvement qui gagne une ampleur considérable en Amérique du Nord suite à l’exposition 5 Tiré du texte de présentation de l’agence sur son site web. Ressource en ligne : http://www.jakobmacfarlane.com consultée en mars 2013 et en avril 2017 6 Yudina, Anna ; Migayrou Frédéric. Phase, the architecture of Jakob+Macfarlane, Op.Cit. p.24 Deconstructivist Architecture tenue au MOMA en 1988 sous le commissariat de Marc Wigley et Philip Johnson. Au-delà de cette expérience professionnelle, le séjour californien des architectes leur permet également de développer des accointances avec le monde de l’art. Leur première commande est un atelier d’artiste, le studio Riegelman qu’ils réalisent à Los Angeles entre 1989 et 1992. Installé à Paris depuis 1992, le collectionneur d’art Daniel Bosser leur confie en 1994 le mandat de transformer son appartement parisien afin d’y présenter les œuvres issues de sa collection privée regroupant des œuvres d’art conceptuel et minimaliste. Achevé en 1996, l’appartement-galerie inclue notamment l’œuvre AMZ de Claude Rutault qui présente la particularité d’être actualisée par l’artiste à l’occasion de chaque nouvel accrochage, rendant indispensable une collaboration étroite entre l’artiste, le collectionneur et les architectes. En 1998, le galeriste Charles Cartwright leur commande un projet pour un nouvel espace d’exposition qui ne sera finalement pas réalisé. La production architecturale développée par Jakob+MacFarlane au cours des années 1990 se démarque fortement de la signature formelle propre à l’architecture déconstructiviste. L’attention apportée à la matérialité et aux déplacements du corps dans l’espace dont témoignent le Monument à la mémoire et à la paix réalisé à Val-de-Reuil en collaboration avec Frédéric Vialet (1996) ou la restructuration du théâtre L’éclat, à Pont-Audemer (1997-2000) offre un contraste saisissant avec l’autonomie formelle défendue par un Peter Eisenman ou un Daniel Liebeskind. Néanmoins, la prééminence du processus de création sur le résultat, qui constitue un trait commun aux artistes conceptuels et à aux architectes déconstructivistes, semble marquer durablement l’approche développée par le couple d’architectes. Questionné en 2014 sur les spécificités de cette approche, Brendan MacFarlane répond qu’« en tant qu’architecte, [il est] beaucoup plus intéressé par le procès que par le résultat. » 7 Il justifie cet intérêt du fait que « [d]ans un procès il n’y a pas un seul bâtiment, mais peut être plusieurs bâtiments. C’est comme un arbre avec plusieurs branches. […] Il s’ouvre énormément de possibilités qui sont à la fois là, possibles, et à la fois pas encore là, mais suggérées par le procès et par l’outil. »8 Si l’influence de la période californienne ne peut que difficilement être retracée à travers les premières productions des architectes, elle s’exprime clairement à travers les orientations méthodologiques qu’ils mettent en place et qui seront développées par la suite. 7 Retranscription de l’entretien du 8 mars 2014. 5mn12s 8 Ibid. 5mn12s En 1995, Jakob+Macfarlane s’associe avec deux autres jeunes agences, Paillard & Jumeau et uploads/Ingenierie_Lourd/ jakob-macfarlane.pdf
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- Publié le Jan 13, 2021
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