L'A RT D'INDRAVARMAN Par HENRI PARMENTIER, Architecte diplômt par le Gouverneme
L'A RT D'INDRAVARMAN Par HENRI PARMENTIER, Architecte diplômt par le Gouvernement, Chef du Service archéologique de L'Ecole Française d'Extreme-Orient. Un des éléments qui tiennent une place importante dans la décoration des monuments khmèrs présente dans le développement de cet art un mode d'or- nementation caractéristique. Cette partie n'est pas la plus importante; c'est pour une courte période une des plus instructives. La composition d'une façade inférieure de pràsàt carré est, comme l'on sait, assez simple; la porte y tient une place dominante et c'est elle qui donne à l'ensemble sa principale valeur. Si l'on néglige volontairement ce motif brillant', sur lequel on s'est trop sou- vent hypnotisé, il ne reste de chaque coté qu'un écoinçon. Le pilastre, à l'an- gle, offre un décor, qui, dans son long rectangle, montre une composition nécessairement divisée en une suite de motifs: ils peuvent varier; ils sont trop petits pour modifier beaucoup l'impression d'ensemble. Il n'en est pas de mê- me pour le panneau, bien plus large, que le systeme de composition khmère enferme entre ce pilastre etla porte, vraie ou fausse. Celui-ci ne fut que rare- ment traité en champ de petits motifs, et il offre d'ordinaire une décoration d'une seule venue. C'est ce décor constant dans chaque période, mais variant avec netteté de l'une à l'autre, qui impose leur caractère aux parois: il offre ainsi un point de comparaison très expressif. Dans l'art en briques - ou en briques recouvertes d'enduit - qui s'étend du VlI'au IX' siècle de notre ère (1), l'entrepilastre est toujours garni dans les deux tiers inférieurs par une réduction d'édifice traitée comme un palais volant, souvent vide et parfois garni de figures qui n'y sont que l'accessoire. Rarement de grandes images se dressent dans cet espace ('); elles s'y présen-· tent alors isolées et non encadrées d'une niche décorative. (t) Nous avons proposé de désigner cet art encore peu coanu sous le nom d'art c primitir .. k.hmèr en opposition à l'art qui serait dit alors c classique .. d'Aliltor. (t) PrOs;'1 Toè nO 'H, KUk Prà~ K& I n' 93, Ch61 M~I nO 888, cr. BEFEO" IX, p. 940. XIX, t - 2- L'art classique d'Ailkor nous montre une composition toute différente dans l'étroit espace que laisse - non la composition d'écoinçons, les pràsàts isolés y sont trop rares ~ mais l'écartement des pilastres des façades longues. La réduction d'édifice qui, dans le cas de la répétition des travées, existait dans l'art primitif('), disparait ici et l'espace qu'elle a laissé vide est occupé, comme dans l'art cam antérieur, par une figure humaine abritée sous une' niche. Le Campa semblait y placer de préférence une image de prètre. C'est dans l'art khmèr une représentation divine qui occupe cette place, plus souvent mascu- line au début, féminine ensuite jusq u'aux derniers temps. Dans quelques rares monuments des premiers jours de l'époque classique, au Bayon par exem ple, l'anormal et splendide premier-né de cette jeune architecture, l'arc de cette niche se décompose parfois sous les superstructures d'un minuscule pràsàt. Peut-être est-ce un souvenir des réductions d'édifices de la période précé- dente. Mais souvent au Bayon même, et dans toute la suite de l'art classique, la niche ne se détache plus que devant un e oroementation de rinceaux qui semble arrachée au décor ordioair'e des pilastres. C'est ici nettement la figure qui compte, - elle subsiste seule à Ailkor Vat en bien des points, - et qui s'est substituée comme motif à celui du palais aérien. Une forme très spéciale, et dans une certaine mesure intermédiai re, se pré- sente entre ces deux types ; elle nous est fournie par le curi eux ensemble de Roluoi), à quelques kilomètres au Sud-Esl'd'Ailkor. Il ya là un groupe de tem- ple, indépendants les uns des autres. Les deux plus caractéristiques appartien- nent au règne d'lndravarman 1" (877-889 A. D. J, et c'est sous son nOm que nous voulons les réunir. Ce décor très spécial se rencontre aussi dans quelques monuments des environs, et plusieurs, construits en pierre, nous ont conservé des éléments précieux qui, traités en enduit dans les édifices précédents, on disparu avec ce revêtement. Il est impossible d'étudier les uns sans les autres. Nous rassemblerons ici les principaux. Il est clair qu'ils ne sont pas contem- porains : s'ils présentent la même composition d'entre pilastres, les premiers montrent une série de tàtonnements curieux dans l'arrangement de la porte. Les seconds offrent une solution constante qui, avec des formes étrangères, est aussi celle de l'art classique. Nous diviserons donc cette étude en deux groupes, le premier qui représente plus exactement l'ère des recherches, le second l'application des résultats acquis. Le groupe de Roluoi) à lui seul constituera la première série. Les trois monuments y sont Bàkoil, Prài) Kô et Lolei, datés (') les premiers (') de 880, le (1) Pràsàt Prà~ Sr~i nO 143. éd ifices principaux de Sarp.b6r-PreÎ Kilk nO ,62. (':1:) Toutes les dates dans cet article sont donn ées en ère chrétienne. (3) Sàkoi!: est daté seulement par la présence d'inscriptions sanskrites inachevées identiques a celles de Pral;! KÔ . -3 - dernier de 893 et construits sans doute dans cet ordre ; car le premier, bien plus important que le second , dut, pour ètre achevé dans le mème temps, ètre commencé beaucoup plus tôt. Pràl) Kô passera cependant ici avant les autres par- ce que seul il apporte le panneau complet d'entrepilastre ; encore les éléments en sont-ils dispersés sur plusieurs façades et il faut les y rechercher pour obtenir un ensem ble. Tous les édifices sont ici en briques et le décor y est demandé à un épais revètement de chaux ou à quelques blocs de grès incrustés dans la maçonnefl e. La seconde série est pl us vaste mais présente des ensembles moi ns i mp or~ tants. C'est d'abord, au Sud du groupe de Roluol), le Pràsàt Traplin Phbn, sanctuaire isolé,.sans date, en briques enduites ; le Pràsàt Phnom Bok et 1e' Pràsàt Chuk voisin, l'un ell grès, l'autre en briques, le Pràsàt Phnom Kroljl en pierre, tous les trois en fronts triples de tours, et non datés ; Prè Rup, groupe important dont le noyau central comporte un quinconce de cinq sanctuaires ; le Pràsàt Kravlln qui les aligne sur une terrasse uniq ue (92 t) ; le Mébbn oriental (947) avec le plan de Prè Rup; Baksei Càm Krbn (948); le Pràsàt Bàt CUm, rangée de trois tours (953), le Pràsàt Liik Nan (960), tous en briques enduites et qui sauf Prè Rup n'on t presque rien gardé de leur décor de chaux ; enfin le joli temple en grès nouvellement découvert que les indigènes appellent Bantay Srei. A la réserve des seuls pràsàts Chuk, Bàt CUm et Lak Nàn, groupés ici pour d'autres raisor.s qui apparaltront au cours de cette étude, tous ces monuments présentent , plus ou moins ruiné, le motif caractéristique d'entrepilastre. Dans ce décor (pl. XV , Al l'importance est partagée entre le personnage dans sa niche et l'entourage qui l'encadre dans toute la hauteur de l'entrepilastre ; aussi les planches 46, 47, des Ruilles Khmères de Fourn ereau donnent- elles une idée très fausse de cet art en isolant les niches à personnages; elles ne le sont que déjà trop dans la réalité. Cet état, simple résultat de la ch ute des enduits, a trompé les premiers observateurs et leur a masqué, sinon l'exis- tence de cet ensemble décoratif du panneau, au moins sa valeur caractéristi- que. Il est inutile de détailler ici cette composition ; elle apparaltra nettement dans l'étude de Pràl) Kô et de Bantai Srei ainsi que dans les courtes notes sur Prè Rup, sous les trois formes, en enduit, mixte, ou tout en grès . . , . . .. , XIX,I -4- GROUPE DE ROLUO~. Trois temples s'échelonnent du Nord au Sud perpendiculairement à l'an- cienne route d'Ailkor à KÔIJlPoil T holJl dont la haute levée sépare les deux premiers, Lolei , Prà~ Kô et Bàkoil ('), Dans cet ensemble, que le monument se complique ou qu'il se présente seulement en groupe de pràsàts, ceux-ci s'élèvent suivant des dispositions communes qu'il y a tout intérêt à ne donner qu'une fois, Ces tours sont construites en briques avec parties de grès aux points Où des masses plus compactes sont exigées pour la résistance ou par le décor; celui-ci, partout ailleurs, fut ciselé dans un revêtement d'enduit qui ne laissait apparaître aucune des surfaces de briques; il s'interrompait seulement quand (t ) l es deux. ouvrages de FOU RNERUU. Les Ru.ines d'Angkor et Les Ruines Khmères (in-fo!io. Paris . Leroux , IS " p ) donnent une sé rie de vues d'.ensem ble et de détails d'une b:>nne part des édifices de ce groupe. Les in dicatio ns de ces remarquables clichés sont incomplètes ou fausses. Comme nou~ revenons so uve nt à cette exce llente docu- m ~ n tation photographique. nous allons faire ici une fois pour to utes les rectifications ou ad ditions nécessaires. Les Ruines d'Angkor. 87 Bakong. - uploads/Ingenierie_Lourd/ l-x27-art-indravarman-parmentier-1919.pdf
Documents similaires










-
26
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Mar 17, 2021
- Catégorie Heavy Engineering/...
- Langue French
- Taille du fichier 16.4891MB