GEORGES MARGOULIÈS DOCTEUR ÈS LETTRES ANCIEN CHARGÉ DE MISSION EN CHINE BIBLIOT
GEORGES MARGOULIÈS DOCTEUR ÈS LETTRES ANCIEN CHARGÉ DE MISSION EN CHINE BIBLIOTHÈQUE SCIENTIFIQUE LA LANGUE L'ÉCRITURE CHINOISES P A Y O T. P A R IS BIBLIOTHÈQUE SCIENTIFIQUE GEORGES MARGOULIÈS Docteur ès lettres Ancien chargé de mission en Chine LA LANGUE ET L’ÉCRITURE CHINOISES PAYOT, PARIS 106, BOULEVARD ST-GERMA1N 1957 droite de traduction, de reproduction et d’adaptation réservis pour tous pays. Copyright by Payot, Paris, TABLE DES MATIÈRES I ntroduction ................................................................................................. 7 I. — P ropriétés de la langue chinoise .............................. 13 A. — Étymologie........................................................................ 16 B. — Syntaxe................................................................................ 38 II. — P ropriétés de l’écriture chinoise .............................. 62 III. — Conséquences des propriétés de la langue et de l’écriture chinoises dans le domaine littéraire'. 131 IV. — Conséquences des propriétés de la langue et de l’écriture chinoises dans les domaines historique, culturel et psychologique ............................................ 159 V. — P arallèle des propriétés linguistiques et graphi ques chinoises et occidentales ................................... 211 Conclusion ...................................................................................................... 246 Appendice : le problème d’une langue internationale___ 254 LA LANGUE ET L’ÉCRITURE CHINOISES INTRODUCTION En entreprenant l’étude des particularités de la langue et de l’écriture chinoises, je crois utile d’exposer en quelques mots l’intérêt que présente une recherche semblable ; le fait est que cet intérêt dépasse singulièrement les bornes d’une simple étude linguistique et permet d’envisager et de poser des problèmes multiples. Bien entendu, il y a toujours celui de faire connaître dans ces caractéristiques principales la langue et la façon de penser d’un grand peuple, ancien et civilisé, beaucoup trop peu connu en Occident et qui mérite de l’être davantage. Mais cet intérêt, que le chinois aurait en commun avec un nombre malheureusement fort élevé d’autres langues et civilisations, se trouve accru d’un autre qui est propre au chinois seul. La langue chinoise et son écriture présentent des parti cularités qui la rendent unique en son genre : la langue chi noise est monosyllabique et son écriture, idéographique, alors que l’immense majorité des langues est polysyllabique et que tous les systèmes d’écriture que nous connaissons sont, soit entièrement phonétiques, soit idéo-phonétiques, mélangeant les deux systèmes. Nous exposerons plus loin ce que signifient ces particularités et les conséquences nombreuses qu’elles ne manquent pas d’entraîner ; il nous suffit maintenant de men tionner ce fait pour montrer que la langue chinoise et son écriture forment un ensemble que nous ne rencontrons nulle part ailleurs, basant tant la grammaire que l’écriture sur des principes inverses de ceux qu’on rencontre dans toutes les langues occidentales et la majorité des autres. Cette différence foncière est, du reste, la raison pour la quelle s’est répandue et accréditée la légende de la difficulté déroutante de la langue et de l’écriture chinoises. Bien en tendu, cette légende est fortement exagérée ; si, néanmoins, elle persiste à travers les pays et les siècles, la raison en est la divergence foncière des principes inspirant le chinois 8 INTRODUCTION et les langues occidentales. C’est pour cela que la locution populaire dit : « C’est du chinois » pour désigner un langage incompréhensible ; il est bien entendu que cette locution dé signe quelque chose de plus qu’un langage étranger et inconnu puisqu’il y en a des centaines. Ce qu’elle veut exprimer, c’est la divergence de structure et de principes, tellement communs aux autres langues qu’on a pris l’habitude de les considérer comme des éléments inhérents à tout langage humain ; le chinois suivant des règles de structure différentes, on est dé routé par cette nouveauté et la première réaction est d’affir mer qu’une langue pareille est impossible à apprendre et pré tendre, comme l’ont fait certains, que le chinois n’avait pas de grammaire et que son écriture était impossible à retenir. Cependant, si c’est là la réaction de l’homme de la rue, celui qui pense et qui sait analyser peut, au contraire, tirer de ces constatations des leçons multiples et utiles. Il sait que toute langue est forcée d’avoir d’office une grammaire, puisque la grammaire n’est autre chose que l’ensemble des règles que suit une langue dans ses formes d’expression ; ainsi donc, s’il y a langue, il y a automatiquement grammaire. Il sait égale ment que les mots comportent un sens et un son et que, si toutes les écritures qu’il connaît notent le son seul en laissant le sens totalement de côté, il n’y a aucune raison qui empêche une écriture de suivre la voie inverse et se baser non plus sur le son des mots mais sur leur sens. Ceci une fois posé, il devient d’un intérêt primordial de pouvoir examiner sur un exemple vivant les effets que ces principes inverses peuvent entraîner, les divergences de men talité qu’elles imposent, les répercussions qu’elles ne manquent pas d’avoir dans tous les domaines de la vie d’un peuple. Une étude semblable permet, à son tour, par une juxtaposition des éléments divergents des langues que l’on connaît avec ceux du chinois, de faire la part exacte des prin cipes linguistiques et graphiques dans l’élaboration de la civi lisation et la formation de la mentalité. De cette façon, on se trouve posséder un point de compa raison extérieur à l’ensemble des langues et écritures occi dentales, ce qui permet d’envisager cet ensemble objective INTRODUCTION 9 ment et de faire avec précision la part des éléments innés et universels, propres à la nature humaine et des éléments se condaires, déterminés par les particularités graphiques et linguistiques, propres aux groupes de peuples qui les pos sèdent. De la sorte, on pourra établir par comparaison non seule ment les caractéristiques de la civilisation chinoise déter minée par sa langue et son écriture, mais tout aussi bien celles des civilisations des langues polysyllabiques usant d’écritures phonétiques ; on pourra également faire la part, dans l’évo lution culturelle, des éléments déterminés par ces caractéris tiques et établir les limites qu’elles imposent et les lignes d’évolution qu’elles suggèrent. Enfin, en se plaçant à un point de vue plus général, on pourra également étudier utilement l’influence de ces élé ments linguistiques et graphiques sur la formation de la pensée humaine et, suivant les similitudes et les divergences qu’on rencontre entre les groupes examinés, fixer les rapports entre la pensée et son expression verbale. Tout ce qui précède relève du domaine des avantages que présente une étude de linguistique comparée ; mais, d’après ce que nous avons dit sur les propriétés uniques de la langue chinoise, il résulte que l’étude des éléments originaux de celle-ci permet une base de comparaison infiniment plus large que n’importe quelle autre, puisque toutes les langues occi dentales et la plupart des autres langues aussi bien forment un groupe unique par comparaison avec les langues mono syllabiques et que le chinois est seul à avoir créé et utilisé une écriture intégralement idéographique. Ainsi donc, si, pour un chercheur chinois, la connaissance de n’importe quelle langue occidentale ou même toute autre, à condition qu’elle ne soit pas monosyllabique, peut offrir cet élément de comparaison nécessaire, pour un penseur occidental le chi nois est la seule langue qui puisse lui offrir un avantage pa reil ; son étude est imposée pour des recherches de ce genre, dont la portée est évidemment immense tant dans le domaine sychologique que dans celui de l’histoire, de la pensée et, général, des manifestations de la culture humaine envi 10 INTRODUCTION sagée dans ses rapports avec les moyens dont dispose l’homme pour réfléchir et créer. Voici donc l’intérêt que présente l’examen des particula rités et propriétés de la langue chinoise ; il est facile de voir qu’il dépasse singulièrement celui, tout naturel, qu’on peut avoir pour la Chine elle-même et entraîne dans son orbite un ensemble de penseurs et chercheurs dont le domaine d’études n’a par ailleurs rien qui les dirige vers la Chine plutôt que vers tout autre pays. On peut, sans crainte d’exagéra tion, affirmer que, d’après ce que nous venons de dire, l’exa men des propriétés linguistiques et graphiques du chinois est utile à toute personne qui veut se rendre compte de la nature et du mécanisme de la pensée, des raisons d’être des formes que prennent les manifestations de la civilisation humaine et des cadres que chaque groupe de langue fixe aux peuples qui les parlent, cadres dont ils ne sauraient sortir et qui déter minent leur évolution à un point beaucoup plus grand que l’on ne pourrait le supposer à première vue. Il est bien entendu que l’ensemble que nous venons d’ex poser dépasse de beaucoup le cadre de la présente étude ; il faudrait, pour épuiser ces diverses possibilités qu’ouvre l’étude du chinois, toute une bibliothèque dont la rédaction nécessiterait des connaissances multiples et variées. Notre but est beaucoup plus modeste ; tel qu’il est défini par le titre même, il se limite à un exposé des propriétés du chinois, langue et écriture, et à un bref aperçu de ce que ces pro priétés déterminent dans les différents domaines de la mani festation de la civilisation nationale chinoise, littéraire, social et psychologique. Ainsi donc, notre exposé sera strictement limité à la Chine seule. Cependant, pour faire connaître ces propriétés, uploads/Litterature/ 1957-georges-margoulies-la-langue-et-l-ecriture-chinoises-libreria-gulla-via-padre-paolino-bufalieri-15-00124-roma-333-236-4618-pdf.pdf
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- Publié le Oct 04, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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