Blandine Pluchet explique comment éveiller le goût des sciences à partir de fic
Blandine Pluchet explique comment éveiller le goût des sciences à partir de fictions ; Sophie Van der Linden offre une lecture inédite des meilleurs albums de jeunesse. Page 9. « Bologne ville à vendre », de Loriano Macchiavelli, et « Pourquoi, tuons-nous ? », de Gianni Biondillo. Et aussi les romans d’Aino Trosell et Christian Jungersen. Page 10. LA FRANCE À L’HEURE POSTCOLONIALE « Lire en fête » « Le Monde des livres » accompagne cette manifestation, dont la 18 e édition a lieu du 13 au 15 octobre dans toute la France. Programme. Page 11. Une rencontre avec Mona Ozouf à l’occasion de la parution des « Récits d’une patrie littéraire ». Et les ouvrages de George L. Mosse et Elisabeth Belmas. Pages 8, 11 et 12. Après le temps des polémiques, plusieurs ouvrages approfondissent le débat sur les prolongements contemporains de notre passé impérial. Dossier. Pages 2, 6 et 7. ph. J. Sassier © Gallimard Ian McEwan Gallimard du monde entier "Comme un dompteur, Ian McEwan a toujours apprivoisé le pire de l'homme." Manuel Carcassonne, Le Magazine littéraire Samedi roman Traduit de l’anglais par France Camus-Pichon Policiers Michèle Desbordes Deux livres posthumes – dont un récit, « L’Emprise » – confirment la valeur et l’intensité d’une œuvre rare, sereine et mélancolique. Littératures. Page 3. Boniface d’Oliveira, tirailleur béninois. PHILIPPE GUIONIE Jeunesse SPÉCIAL « LIRE EN FÊTE » Histoire 0123 DesLivres Vendredi 13 octobre 2006 2 0123 Vendredi 13 octobre 2006 LETTRE D’OXFORD Deux historiens anglais révèlent les non-dits du 17 octobre 1961 AU FIL DES REVUES A travers le « Labyrinthe » postcolonial SERAIT-CE un délai de rigueur lorsque la mémoire française sai- gne ? Il aura fallu plus de quaran- te ans pour que le pogrom anti- algérien du 17 octobre 1961 à Paris devienne un véritable objet d’histoire. Pour qu’après le temps de l’occultation et de la manipulation, après celui de la bataille pour l’ouverture des archives puis de la commémora- tion, le dernier massacre perpé- tré par les forces de l’ordre dans les rues de la capitale fasse l’ob- jet d’un travail historique global incluant les zones d’ombre et les non-dits de ce cauchemar franco- algérien. De façon significative, ce sont deux historiens britanni- ques, Neil Macmaster (université d’East Anglia) et Jim House (uni- versité de Leeds), qui ont accom- pli ce travail dans un livre qui, sans attendre sa traduction fran- çaise, fera date. Longtemps, le débat sur la répression sanglante de la mani- festation nationaliste du FLN organisée à quelques mois de l’in- dépendance algérienne s’est foca- lisé sur une date – le 17 octo- bre –, sur un nom – le préfet de police Maurice Papon –, et sur un nombre – celui des morts. Ces questions essentielles ont joué un rôle déterminant dans l’exhumation médiatique de la ratonnade. L’ouvrage, intitulé Paris 1961. Algerians, State Terror and Memory donne à l’événe- ment un sens et une profondeur qui les relativisent. Si le paroxys- me de la répression se situe indu- bitablement le 17 octobre, la chas- se à l’homme a duré pendant les mois d’octobre et novembre. Eva- luant à « plus de 120 » le nombre d’Algériens tués par la police pen- dant ces deux mois, les auteurs, fort d’un long travail sur les archives, se disent convaincus que le nombre de victimes ne sera « jamais » connu avec exac- titude, tant sont nombreuses les procédures maquillées et les cadavres jetés à la Seine. Système de terreur Enfin, le livre dissèque la stra- tégie de violence frontale de Mau- rice Papon et montre que cette répression, qui prétendait terrori- ser les terroristes, a renforcé la cohésion des Algériens et confor- té le monopole du FLN. Passion- nant par ses échos dans l’actuali- té internationale, le récit replace l’action de l’ancien fonctionnaire vichyste dans un système de ter- reur qui inclut non seulement des policiers fascisants opérant hors de leur hiérarchie, mais aus- si de « véritables escadrons de la mort » relevant de l’appareil d’Etat lui-même. La force de Paris 1961 ne tient pas seulement dans son minu- tieux décryptage d’événements déjà largement mis au jour par les historiens militants français bien plus que par les universitai- res. Le livre britannique, fort d’ar- chives inédites, éclaire le sens politique et social de l’oubli puis de la redécouverte de l’événe- ment. Il faudra les morts français de Charonne pour que la gauche, divisée et quasi muette devant le massacre d’Algériens, investisse à son tour la rue. Quant au Gou- vernement provisoire algérien, il effacera lui-même de son calen- drier la manifestation du 17 octo- bre, organisée par sa rivale pour la conquête du pouvoir, la Fédé- ration de France du FLN. Instrumentalisée ensuite dans l’Algérie indépendante, la date du 17 octobre fit, en France, l’ob- jet d’un black-out total, aussi bien en Mai 68 que, plus tard, au sein de l’immigration, analysent les auteurs en étayant le travail de Benjamin Stora. Le retour de flamme sera le fait des enfants de l’immigration, qui, en mon- tant à l’assaut des amnésies fami- liales, transformeront le 17 octo- bre en un enjeu de mémoire, d’histoire et de société. a Ph. Be. Paris 1961. Algerians, State Terror and Memory de Jim House et Neil Macmaster, Oxford University press, 376 p. Un colloque organisé à la BNF du 28 au 30 septembre analysait les liens entre passé colonial et flux migratoires De la colonisation à l’immigration Une correction malencontreuse dans un article de notre collaboratrice Alexandra Laignel-Lavastine intitulé « Aux sources de l’obsession du passé » (« Le Monde des Livres » du 29 septembre) a infléchi le sens de son texte. En réalité, l’auteur n’estime pas que le livre d’Olivier Lecour Grandmaison, Coloniser. Exterminer. Sur la guerre et l'Etat colonial (Fayard, 2005) illustre l’esprit de concurrence victimaire qui alimente parfois les polémiques autour du « devoir de mémoire ». ENTRE PENSÉES vagabondes et savoirs hybrides, la revue Labyrinthe a été fondée en 1998 par de jeunes universitai- res issus d’horizons divers, mais qui partagent un même désir d’« indiscipline » : contre les cloisonnements institutionnels et la segmentation des discipli- nes, il s’agissait d’inventer un atelier où de jeunes chercheurs pourraient se retrouver afin d’échanger textes et idées, quels que soient leurs galons, leurs orientations théoriques et sur- tout leurs spécialités. Dans ces conditions, il ne faut pas s’étonner de voir l’équipe de Labyrinthe consacrer un riche numéro aux études dites « post- coloniales », qui tentent de « revi- siter le passé et le présent des empi- res ». Car depuis leur naissance, aux Etats-Unis, il y a de cela envi- ron un quart de siècle, ces études se distinguent par leur vocation éminemment transdisciplinaire, à la charnière de l’histoire, de la littérature, de la philosophie ou encore des études féministes. Ain- si ce champ de recherche permet- il une « mise en danger volontaire de nos topographies scientifiques acquises, de nos petites patries et de nos prés carrés », note ici Marc Aymes. Intitulé « Faut-il être post- colonial ? », le dossier élaboré par la revue Labyrinthe (Ed. Mai- sonneuve & Larose, n o 24, 140 p., 10 ¤, www.revuelabyrinthe.org) retrace la genèse de ce domaine d’études en le replaçant dans son creuset institutionnel : les cam- pus américains, où la souplesse des structures universitaires a permis l’émergence des gender, transnational et autres Afro-Ame- rican studies, en étroite relation avec les évolutions de la société elle-même, et en fidélité critique à l’œuvre de théoriciens souvent français (Foucault, Derrida ou Lacan, entre autres), comme en témoigne Anne Berger, profes- seur de littérature française à l’université de Cornell. Et tandis que Laurent Dubreuil souligne « le poids de la diaspora indienne anglopho- ne », et par exemple de deux figu- res centrales comme Gaytari Spi- vak et Homi Bhabha, Anthony Mangeon regrette qu’en France le développement tardif de ce type d’études « s’apparente plus à un détournement qu’à une appro- priation critique ». Et de fait, conclut Grégoire Leménager, la réception française de ce courant théorique souffre d’un biais mili- tant qui substitue trop souvent la simplification polémique à l’ana- lyse scientifique. Signalons également, dans le dernier numéro de Multitudes, un dossier « Post-colonial et politique de l’histoire ». « La question du caractère toujours déjà colonial du pouvoir (...) fait partie des interrogations majeu- res qui traversent les différents courants de la pensée politique et historique qui ont émergé ces der- nières années », écrivent en ouverture Yann Moulier- Boutang et Jérôme Vidal (Ams- terdam, 240 p., 12 ¤). Enfin, la revue Contretemps se penche, elle, sur les liens entre « Post-colonialisme et immigration », avec des contri- butions, entre autres, de Mama- dou Diouf, Tom Shepard, Laure Pitti, Houria Bouteldja et Sylvie Thénault (Textuel, n o 16, 192 p., 19 ¤). a J. Bi. S ’il est banal de constater et même de dénoncer la persistance des sté- réotypes coloniaux dans le sort réservé aux populations issues de l’immigration, considérer certains flux migratoires comme les conséquences de la colonisation relève du uploads/Litterature/ 2006-10-12ven-le-monde-des-livres.pdf
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- Publié le Sep 18, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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