www.comptoirlitteraire.com André Durand présente Jean-Paul SARTRE (France) (190
www.comptoirlitteraire.com André Durand présente Jean-Paul SARTRE (France) (1905-1980) Au fil de sa biographie s’inscrivent ses œuvres qui sont résumées et commentées (surtout ‘’La nausée’’, ‘’Les mouches’’, ‘’Huis clos’’ et ‘’Les mots’’). Bonne lecture ! 1 Issu d’une grande famille de la bourgeoisie protestante libérale, né quelques mois avant la mort de son père dont il ne garda qu’une photo jaunie, élevé dans un univers protégé par une mère humble et un grand-père mégalomane (parent du docteur Schweitzer), il fut un enfant culturellement choyé, entouré de livres mais découvrant très tôt le sentiment de sa «bâtardise» (le sentiment d’être de trop), l’expérience de la «mauvaise foi», ayant conscience de jouer par sa conduite cabotine les attitudes de l’adulte. En fréquentant le cinéma de son quartier, enfant, il conçut le coeur de son travail à venir et qui serait de montrer «le véritable lien des hommes, l'adhérence». Admis directement en huitième au lycée Montaigne, il fut, comme il le raconta dans ‘’Les mots’’, rétrogradé dès sa première dictée en classe de dixième pour avoir écrit : «Le lapen çovache ème le ten» («Le lapin sauvage aime le thym») ! Mais il devint un adolescent intellectuel et ambitieux qui prenait Nietzsche pour modèle et sa phrase «Deviens qui tu es» pour devise. Il passa du lycée Henri-IV (1915) à celui de La Rochelle (1917), où il rencontra Paul Nizan. Déjà décidé à devenir écrivain, il publia dans une revue d’étudiants : _________________________________________________________________________________ “L’ange du morbide” (1922) Nouvelle Un professeur arrivant en province n’a de cesse de copuler avec une rachitique. Commentaire Sartre y manifeste déjà son horreur fascinée des corps dans leur facticité, son obsession de la laideur et de la beauté. _________________________________________________________________________________ “Jésus la chouette, professeur de province” (1922) Roman Un professeur de province est victime de chahuts jusque sur sa tombe après son suicide. Commentaire On sent déjà le romancier de “La nausée” qui élabore son approche du «réalisme critique» surtout à l’égard du comportement des bourgeois de province, des élites socialistes. _________________________________________________________________________________ Avec Paul Nizan, à partir de 1924, Sartre suivit les cours de l'École Normale Supérieure. Il s’y lia à Raymond Aron, Maurice Merleau-Ponty et, surtout, Simone de Beauvoir qu’il appela «le castor» (jeu de mots sur Beauvoir et «beaver», «castor» en anglais). Avec ses condisciples, il s’employa à critiquer les valeurs et les traditions de sa classe sociale, cette bourgeoisie qu’il jugeait trop sûre d’elle, de sa sécurité, de ses devoirs et encore plus de ses droits. Nietzsche était toujours son maître ; aussi la volonté de puissance, le surhomme, se dessinent-ils dans les écrits du normalien : _________________________________________________________________________________ 2 “Une défaite” (1927) Roman Frédéric est un jeune homme de vingt-trois ans qui fait des études de philosophie et que Richard Organte, compositeur et écrivain célèbre, engage pour qu’il donne des leçons à ses filles. Il devient le maître à penser de Frédéric qui lui fait part de son désir de devenir écrivain en mariant la philosophie et le roman. Cosima, la femme de Richard, a des allures de petite fille, vit dans l’imaginaire et aime les contes de fées. Frédéric s’éprend de cette femme fatale et mystérieuse qui le déçoit cruellement, comme le déçoit aussi Richard. Commentaire Dans ce roman qui resta inachevé, Sartre se glissait dans la peau de Nietzsche en reprenant la liaison triangulaire que, vers 1870, il avait connue avec Richard Wagner et Cosima. _________________________________________________________________________________ Reçu premier à l’agrégation de philosophie en 1929, en même temps que Simone de Beauvoir, Sartre enseigna de 1931 à 1933 au lycée du Havre, tandis qu’elle était nommée à Marseille. Au nom de la « franchise » (son credo était vagabondage amoureux, polygamie, transparence), il se sentit obligé de lui écrire de longues descriptions détaillées de ses conquêtes sexuelles. Puis il fut nommé à Paris. Pensionnaire à l’Institut français de Berlin (1933-1934), il y poursuivit sa formation philosophique, y découvrit la phénoménologie de Husserl et de Heidegger qu’il contribua à faire connaître en France et dont il développa la méthode (description réflexive) et le principe essentiel (intentionalité de la conscience : «Toute conscience est conscience de quelque chose»). Mais, sur le régime nazi, son silence demeura fracassant. De retour en France en 1936, il se rapprocha de ses camarades communistes, s'adonna à la drogue, vécut un ménage à trois, produisit ses premiers textes philosophiques : “L’imagination” (1936), “Esquisse d’une théorie des émotions” (1939), “L’imaginaire” (1940) où apparut le double refus du réalisme naturaliste et mécaniste qui prétend expliquer la conscience par autre chose qu’elle-même (critique de la psychologie objective mais également de la psychanalyse et de sa notion d’inconscient) et de l’idéalisme, qualifié de «philosophie douillette de l’immanence». Mais il trouva d’abord dans le roman, voulant être «à la fois Stendhal et Spinoza», un moyen d'expression qui donnait chair à ses idées les plus abstraites, qui rendait sa pensée accessible au grand public : _________________________________________________________________________________ “La nausée” (1938) Roman de 240 pages À Bouville, petite ville de France, Antoine Roquentin, intellectuel solitaire, célibataire de trente-cinq ans, vit retiré après avoir vécu une vie de voyages dont, très vite, il s'est lassé. Il travaille à la rédaction d'un mémoire qui traite de la vie d'un aristocrate du XVIIIe siècle, Monsieur de Rollebon. “La nausée” est le journal qu'il a entamé lorsqu'il s'est aperçu, en ramassant un galet au bord de la plage, que les objets ou la perception qu'il en avait avaient changé. À force d'observer une racine, il ne sait plus la nommer. Les objets les plus ordinaires semblent animés d'une vie propre. Lorsqu'il ramasse une feuille de papier, il n'a plus le sentiment de se saisir d'un objet inanimé mais bien d'être touché, 3 comme si celui-ci s'était transformé en animal vivant. Le monde inanimé des choses provoque en lui une impression d'écœurement douceâtre, de nausée. Un après-midi, après s'être examiné longuement dans la glace de sa chambre d'hôtel, il perd le goût de lui-même, ne se reconnaît pas. Comme une nouvelle nausée s'annonce, il se réfugie au café, “Le rendez-vous des cheminots”, dont l’ambiance est le seul rempart qu'il ait réussi à opposer à cette agression, la musique et l'atmosphère bruyante semblant le protéger. Il passe par une série de désillusions et se demande même s'il n'est pas en train de devenir fou. Les mythes rassurants qui justifiaient son existence s'effondrent les uns après les autres dans la dérision. Mais ces désillusions sont autant de démystifications. L'illusion des aventures se dissipe. Simple leurre aussi que les moments parfaits que son ancienne amie, Annie, prétendait créer. À la bibliothèque, son étude sur Monsieur de Rollebon le laisse indifférent ; déçu par les résultats hypothétiques de son travail, il écarte la narration historique et observe plutôt les autres lecteurs et plus particulièrement l'Autodidacte. Ce clerc de notaire, héros grotesque de la culture, a la particularité de vouloir lire systématiquement tous les livres de la bibliothèque municipale en en suivant l'ordre alphabétique. Quant aux gens de bien, qui se figurent avoir trouvé leur place dans la société et l’occupent avec bonne conscience, qui sont engoncés dans leur respectabilité arrogante, qui paradent à la sortie de la messe ou au musée de Bouville, ils sont démasqués par le narrateur qui voit en eux des «salauds». Il rompt tous ses liens avec cette société mesquine, conventionnelle, étouffante, pour mettre à nu l'existence. S'il lui arrive de se laisser aller à quelque lyrisme, ses exaltations passagères se brisent vite : l'horreur de la nature et du monde l'emporte et la nausée le poursuit. Tout en effet est de trop, les hommes comme les choses ; d'obscures menaces pèsent sur la ville, et des proliférations monstrueuses surgissent des campagnes environnantes. Il se sent de plus en plus mal à l'aise devant l'existence des choses puis devant sa propre existence soumise au regard des autres et il la ressent progressivement comme «une mollesse, une faiblesse de l'être». S’il pense à se tuer, il découvre que son suicide lui-même serait dépourvu de sens : il se sentent «en trop» dans un monde «trop plein». Le dimanche, il s'essaie à l'aventure des promenades sur la jetée, mais la vraie mer est «froide, noire et pleine de bêtes». Tous ces instants mis bout à bout lui font pressentir que le sentiment d'aventure serait tout simplement celui de l'irréversibilité du temps. Un déjeuner avec l'Autodidacte, qui ne cesse de l'admirer, provoque une nouvelle nausée. Les propos du clerc sont si naïfs, si empreints d'humanisme et de bonne volonté, et surtout d’un socialisme sorti tout droit de la littérature, que Roquentin ne peut s'empêcher de le contredire, lui faisant sentir que les gens qui les entourent ne savent même pas qu'ils existent. La nausée, ce sont les objets qui existent, c'est le monde qui existe sans que les gens ne distinguent la mince pellicule dont se parent les objets et les êtres. Roquentin perçoit leur réalité, leur existence. Roquentin peut enfin nommer sa nausée : c'est l'expérience de l'absolu, de l'absurde irréductibilité du monde car exister, c'est être là, gratuitement, et lorsqu'on s'en rend compte, on ne peut échapper uploads/Litterature/ 286-sartre.pdf
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- Publié le Jui 16, 2022
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