Directeur De la publication Michel Hochmann Directeur aDjoint Paola Bassani Pac
Directeur De la publication Michel Hochmann Directeur aDjoint Paola Bassani Pacht réDacteur en chef Laura de Fuccia coorDonnées AHAI – Istituto Italiano di Cultura 50 rue de Varenne 75007 Paris contact.ahai@gmail.com www.artitalien.fr Art Italies. La revue de l’AHAI, no 26/2020, a été publiée avec le concours : de l’Istituto Italiano di Cultura de Paris, de la Wolfgang Ratjen Stiftung, de Vincent Aubry-Lecomte, de Jean-Christophe Baudequin, de Claire Carzou, de Laura Cedrangolo, de Stanislas Cozon, d’Emmanuel Du Douet de Graville, de Françoise Heilbrun, de Nicolas Joly, de Chantal Mauduit, de Marie-Catherine Sahut. Art Italies La revue de l’AHAI En couverture : Nicolas Poussin, Le Baptême du Christ, Paris, collection particulière. 26 Perspectives de recherche III comité De réDaction Paola Bassani Pacht, docteur en histoire de l’art Laura de Fuccia, docteur en histoire de l’art (EPHE), chef de projet (INHA) Antonella Fenech Kroke, chargée de recherche, Centre national de la Recherche scientifique, Centre André Chastel, UMR 8150, université Paris-Sorbonne Michel Hochmann, directeur d’études, École pratique des hautes études, Paris Jérémie Koering, professeur ordinaire à l’université de Fribourg Jane Mac Avock, historienne de l’art Véronique Meyer, professeur d’histoire de l’art moderne, université de Poitiers Catherine Monbeig Goguel, directeur de recherche émérite, CNRS, musée du Louvre, Paris Philippe Morel, professeur d’histoire de l’art moderne, université Paris I – Panthéon-Sorbonne Daniel Russo, professeur d’histoire de l’art médiéval, université de Bourgogne, Dijon comité scientifique Daniele Benati, professeur d’histoire de l’art moderne, Università di Bologna Hugo Chapman, directeur du Department of Prints and Drawings, British Museum, Londres Claudia Conforti, professeur d’histoire de l’architecture, Università degli Studi di Roma Tor Vergata Philippe Costamagna, directeur du Palais Fesch-musée des Beaux-Arts et conservateur des musées de la ville d’Ajaccio Annick Lemoine, maître de conférence, université de Rennes 2, directrice du musée Cognacq-Jay, Paris Stéphane Loire, conservateur en chef du département des Peintures, musée du Louvre, Paris Stefania Mason, professeur d’histoire de l’art moderne, Università di Udine Catherine Puglisi, professeur et directrice du Department of Art history, Rutgers University Simonetta Prosperi Valenti Rodinò, professeur d’histoire de l’art moderne, Università degli Studi di Roma Tor Vergata Pierre Rosenberg, directeur honoraire du musée du Louvre, membre de l’Académie française, Paris Nicolas Schwed, historien de l’art, spécialiste de l’art du dessin, galeriste, Paris Michele Tavola, historien de l’art, spécialiste de l’art contemporain, Lecco Catherine Whistler, conservateur en chef, l’Ashmolean Museum, Oxford coorDination scientifique, révision Des textes, traDuction Marie Caillat, chargée d’édition © 2020, Association des historiens de l’art italien. Tous droits réservés. Dépôt légal : 3e trimestre 2020 ISSN : 2263-0783 ISBN : 978-2-9564012-2-3 93 olivier chiquet Giovanni Antonio Massani et les vendeurs ambulants d’Annibal Carrache « Fu pittore universale, sacro, profano, ridicolo, grave e vero pittore. » Giulio Mancini, Considerazioni sulla pittura, 1620 P ubliées à Rome en 1646 par Giovanni Antonio Mosini (de son vrai nom Giovanni Antonio Massani), les Diverse figure al numero di ottanta, disegnate di penna nell’hore di ricreatione da Annibale Carracci intagliate in rame e cavate dagli Originali da Simone Guilino parigino. Dedicate a tutti i virtuosi, et intendenti della Professione della Pittura, e del Disegno constituent la première édition d’une remarquable série de quatre-vingts dessins d’Annibal Carrache, commencée à Bologne autour de 1585 et peut-être achevée à Rome, où l’artiste se rend en 1595 pour travailler au service du cardinal Edoardo Farnese. Ils représentent pour la plupart les vendeurs et les artisans des rues de Bologne. Mosini les fait reproduire par le graveur français Simon Guillain et les publie accompagnés d’une préface. Depuis sa redécouverte par Denis Mahon 1, cette préface est considérée comme un texte fondamental dans l’histoire de la théorie artis- tique italienne, puisqu’elle théorise pour la première fois la caricature et qu’elle cite un long et précieux extrait d’un traité sur la peinture – malheureusement perdu – probablement écrit entre 1607 et 1615 par un proche d’Annibal, le prélat Giovanni Battista Agucchi (dont Mosini fut d’ailleurs le secrétaire). Or, dans les rééditions des Diverse figure – sous le nouveau titre d’Arti di Bologna – d’abord vers la fin du xViie siècle, puis en 1740 et en 1776 2, cette préface disparaît. De manière symétrique, les éditions modernes du texte d’Agucchi-Mosini le privent trop souvent des dessins 3, quand elles ne font pas le choix de ne publier que l’extrait du traité d’Agucchi 4. Nous souhaiterions donc, dans le sillage de l’édition d’Alessandro Marabottini 5, proposer une lecture conjointe des dessins d’Annibal et du cadre théorique à deux voix supposé les accueillir. Nous interrogeons plus précisément ici l’attitude paradoxale de Mosini, consistant à diffuser des dessins alors méconnus d’Annibal Carrache que l’on doit considérer comme de véritables dessins de genre (notion complexe et élastique sur laquelle nous aurons à revenir) et, dans le même temps, à gauchir la distinction des genres picturaux établie par Agucchi sur la base d’une actualisation de la Poétique d’Aristote, dans le but de placer l’ensemble de la production de l’artiste bolonais sous le signe de l’idéalisme et d’en minimiser le versant naturaliste. Ce déphasage entre la théorisation de Mosini et la production graphique d’Annibal 94 Art Italies, N° 26 permet ainsi d’apporter un éclairage sur les difficultés, au milieu du xViie siècle, à accepter l’image d’un Annibal Carrache peintre de genre. Les Arti di Bologna, un jalon dans l’histoire de la peinture de genre Les dessins de genre d’Annibal publiés dans l’édition de 1646 constituent une étape fondamentale dans l’évolution qui conduit du grotesque des figures humbles peuplant la « peinture ridicule » cinquecentesca à leur figuration plus réaliste (en même temps que moins subversive 6) dans la peinture de genre, qui s’impose sur le marché de l’art italien au cours des premières décennies du siècle suivant. Figurer le peuple, des parerga comiques aux « peintures ridicules » Si, depuis le xiVe siècle, la peinture italienne ne s’est guère privée de le figurer, il faut attendre les dernières décennies du Cinquecento pour voir se multiplier des représentations autonomes du peuple. Ce dernier s’émancipe alors de la fonction de parergon qui était traditionnellement la sienne dans la peinture d’histoire, en particulier dans la peinture sacrée. Les théoriciens de l’art de la Contre-Réforme avaient donc raison de se méfier des parerga comiques, puisque l’autonomisation des sujets « bas » fut bien l’aboutissement de la progressive relégation, dans la représenta- tion de certains épisodes bibliques, de la scène religieuse au second plan et, partant, de l’anoblissement de la dimension profane au détriment de la dimension religieuse. Cette évolution caractérise d’abord la peinture hollandaise et flamande, avant de toucher l’art italien : on peut par exemple l’observer dans la manière dont le thème de la visite du Christ à Marthe et Marie a été successivement traité par Pieter Aertsen (vers 1552) 7, par Joachim Beuckelaer (vers 1565) 8, puis par Jacopo Bassano (vers 1577) 9 et Vincenzo Campi (vers 1580) 10. Les représentations parfaitement autonomes de figures populaires, qui témoignent d’un véritable élargissement du champ du représentable, connaissent un fort développement en Vénétie et en Lombardie, du milieu des années 1570 jusqu’au milieu des années 1590, en particulier dans les toiles du bolonais Bartolomeo Passerotti ou du crémonais Vincenzo Campi – même s’ils ne sont bien sûr ni les seuls ni les premiers à pratiquer ce type de peinture en Italie 11. Cette concentration géographique et temporelle d’artistes pratiquant ce genre pictural s’explique notamment par la tradition naturaliste lombarde (et, donc, l’héritage des têtes grotesques de Léonard), ainsi que par l’influence de la peinture nordique dans ces régions : on trouve par exemple des toiles d’Aertsen et, surtout, de Beuckelaer dans la collection Farnèse à Parme. Comme le théorise pour la première fois le cardinal Gabriele Paleotti dans son Discorso intorno alle imagini sacre e profane de 1582 (même si c’est pour les condamner) 12, en se référant au De oratore cicéronien, les peintures dites « ridicules » suscitent non pas la « dérision » du spectateur parce qu’elles seraient gauchement exécutées, mais son « rire » parce qu’elles donnent à voir « des difformités, mais représentées d’une façon non difforme, comme l’affirme Cicéron : “Le terrain de choix et le domaine du ridicule est quelque difformité, qui signale une laideur d’une façon qui ne soit point laide” », c’est-à-dire qu’elles imitent correctement des figures comiques (au sens aristotélicien du terme) 13. Or, elles sont d’autant plus « ridicules » que les personnages « bas », souvent en train de rire eux-mêmes comme le signale Giovanni Paolo Lomazzo dans son Trattato de 1584 14, y sont généralement figurés dans une intention satirique et de manière triviale, voire « caricatu- rale » – cette dimension grotesque étant généralement accentuée par un rendu violent des expressions, par le recours à la mezza figura ainsi que par l’exploitation d’un symbolisme obscène, dont peuvent notamment être porteurs les aliments 15. La vie quotidienne dans la production picturale bolonaise d’Annibal Carrache des années 1580 À Bologne, dans les années 1580, Annibal Carrache exécute lui aussi des peintures comiques – dont nous verrons qu’elles seront passées sous silence par les théoriciens de l’art du Seicento, de Giulio Mancini à Carlo uploads/Litterature/ giovanni-antonio-massani-et-les-vendeurs.pdf
Documents similaires










-
32
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Sep 07, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
- Taille du fichier 0.6376MB