Asinag, 4-5, 2010, p. 113-129 113 Questions de métrique kabyle tradition
Asinag, 4-5, 2010, p. 113-129 113 Questions de métrique kabyle traditionnelle Kamal Bouamara Université de Béjaïa (Algérie) Z * & [+A& G \ ] * ^ F,_!Q%E B4% V4`Q !*a VEb! c [+U c &4 *%G 7E V &!<"2%Gdef0 Ag_2%V% N 3_2 c 69M h[a c c D12 h[a c , iI j V5!> Hk &4T! e;& $G \ VE![>% )56lm V% <L!> n4%m!-9 JJ !> B, 'F,0 A !a &GF!> &"P *%1. ' )["o * ('% ,)op! 045 <L V4% 045!f$% =>F . B! *325!EOP1)9'?5iE V% &4`Q ^1U VE&-` ! &L!> 0 A ?%1 3 _U g 2F,!(& G 6 T c &%9M [+U c o" ?WP !*a '>q2"V% M, & Th[ &L2&4 H La poésie kabyle contemporaine est sensiblement différente de la poésie traditionnelle. Bien qu’il ne s’agisse ici que de cette dernière, nous pensons qu’il est nécessaire de commencer par montrer en quoi la première se démarque de la seconde. Cette distinction est par ailleurs nécessaire pour mieux cerner les contours de l’objet dont il sera question dans la présente contribution. Ainsi que nous l’avons écrit ailleurs (Bouamara, 2007), la littérature kabyle actuelle n’est plus ce qu’elle était au début de l’indépendance politique de l’Algérie, et encore moins durant l’époque coloniale française (1830-1962). La transformation profonde de la configuration littéraire d’expression kabyle traditionnelle est due, essentiellement, à l’avènement en Algérie, voire au Maghreb, de deux phénomènes culturels importants : il s’agit, d’un côté, de ce que l’on appelle le processus de « passage à l’écrit » et, de l’autre, de la médiatisation. Le phénomène de l’écrit, qui a traversé à la fois la langue et la culture berbères (dont la littérature) dès le milieu du XIXe siècle, a donné naissance, dans un premier temps, à une littérature orale transcrite et, plus tard, à une littérature écrite, dont la première création écrite en kabyle remonte aux années 19401. De leur côté, les moyens modernes de communication, à l’instar du disque magnétique et de la radio2, et leur investissement immédiat par les artistes kabyles, notamment en France où il y a eu, dès les années 1910/20, une forte émigration, ont donné lieu à une littérature orale médiatisée. A l’heure actuelle, cette littérature écrite est diversement composée, puisque plusieurs genres dits « modernes » sont représentés : poésie, roman, nouvelle, chronique, théâtre, etc. Par ailleurs, en ce qui 1 Les cahiers de Bélaid ou la Kabylie d’antan, ouvrage qui n’a été publié par le FDB (Fichier de Documentation Berbère) qu’en 1963 (en version bilingue : kabyle/français), ont été rédigés en réalité dans les années 1940, puisque Bélaid décède en 1950. 2 La radio d’Alger a commencé à émettre en kabyle dès 1937 ; celle de Béjaïa (ex-Bougie) en 1947. Kamal Bouamara 114 concerne la poésie écrite, de nombreux recueils ont été publiés durant ces deux dernières décennies, dans lesquels on trouve de la poésie versifiée, de la poésie libre, mais également de la prose poétique. Pour ce qui est de la littérature orale traditionnelle, en général, nous pensons qu’elle présente au moins les deux caractéristiques suivantes : (i) elle est d’essence orale, ce qui signifie qu’elle se manifeste publiquement soit sous forme chantée, soit sous forme déclamée, ou alors sous forme mixte ; (ii) elle est très souvent3 versifiée. La présente contribution se limitera à la métrique de cette poésie orale traditionnelle. Quelques définitions relatives à la métrique La métrique, écrit Cornulier (1995 : 13), est l’étude des régularités systématiques qui caractérisent la poésie littéraire versifiée, qu’il s’agisse des formes de vers (mètre), de groupes de vers (strophe) ou parfois de poèmes entiers (« forme fixe ») ... (c’est nous qui soulignons). Etudier la métrique d’une poésie donnée, consiste donc à rendre compte des types de mètres qui y sont employés, des « formes fixes » des poèmes et, éventuellement, des « formes » intermédiaires. Le mètre étant défini par un nombre défini de syllabes, la syllabe est par conséquent l’unité de base de toute métrique. Au dessus du mètre, il y a la « forme fixe » du poème et, comme forme intermédiaire, on peut trouver éventuellement les strophes, voire les sous-strophes. L’existence de la strophe n’est par ailleurs attestée que si le poème est constitué de vers dont le nombre correspond, au moins, au double de celui dont les formes fixes simples sont formées. En outre, les strophes, lorsqu’elles existent, sont délimitées par le changement de la rime à l’intérieur du poème. Nous y reviendrons. Les différentes hypothèses sur la métrique kabyle La réflexion sur les mécanismes qui meuvent la poésie kabyle traditionnelle remonte à l’époque coloniale 4 . Après l’indépendance, elle n’a pas cessé de connaître un regain d’intérêt, dans la mesure où des hypothèses abondent. Nous nous limiterons aux plus importantes et par ordre chronologique de leur apparition. L’hypothèse de Basset (1952)5 En analysant quelques poèmes de veines et de factures différentes, Basset a proposé pour le kabyle une théorie de type accentuelle. « Sa description, écrit 3 Dans les dits de chez Cheikh Mohand (Mammeri, 1990), on trouve bien de la prose rythmée. 4 Voir notamment Hanoteau (1867), Ben Sedira (1887) et Basset (1952). 5 La première édition des écrits de Basset sur la métrique kabyle date de 1952 ; ici, nous utilisons l’édition de l’EDB (1986, 1989). Questions de métrique kabyle traditionnelle 115 Bouamara (2003 : 303), a porté sur la rime, la scansion syllabique et les accents. Sur la base de la rime, Basset a distingué deux types de poèmes : (i) deux neuvains dont la rime est configurée comme suit : aab, aab, aab ; (ii) six sizains dont la formule rimique est variable d’un poème à l’autre. Sur la base du décompte syllabique, il a constaté l’irrégularité du nombre de syllabes en passant d’un vers à l’autre (le nombre va de 5 à 8) […]. Enfin, sur la base de l’accent, l’auteur a décelé, en général, 03 accents pour chaque vers analysé ». Il s’agit donc, selon Basset, d’une métrique à trois accents. L’hypothèse de Mammeri (1969, 1991) Selon Mammeri (1969 : 79, 1991 : 84), qui a repris Ben Sedira (1887) et Feraoun (1960), le vers kabyle est fondé sur trois caractéristiques : la syllabe, le décompte syllabique et, enfin, la rime ou l’assonance – qui marque toujours la fin de vers. L’hypothèse de Chaker (1984) A travers son analyse qui a porté sur deux poèmes appartenant à la veine dite villageoise, Chaker remarque que le vers kabyle repose plus fondamentalement sur deux types de récurrences : (i) récurrences phoniques, dont : a. intonatives ; b. accentuelles ; c. phonologiques parmi lesquelles la rime (ou l’assonance) ; (ii) récurrences grammaticales, au sens large du terme : lexicales, morphologiques et syntaxiques. Chaker (1984 : 43) soutient que l’élément fondamental du vers kabyle se situe bien au niveau de la structuration prosodico-syntaxique et que « Les autres formes de récurrences, bien qu’elles ne soient pas totalement absentes (RIME, SYLLABATION..., cf. ci-dessus), paraissent nettement secondaires et peu prégnantes. » Soulignons que dans cet article, Chaker propose une disposition typographique des vers en hémistiches. L’hypothèse de Salhi (1996, 2007) Salhi (1996 : 62) a axé sa démonstration en prenant en considération a. la mélodie de l’énoncé (vers), c’est-à-dire l’intonation ; b. son organisation syntaxique et c. son organisation sémantique. Autrement dit, Salhi propose également la disposition typographique des vers en hémistiches. L’hypothèse de Bounfour (1999) Bounfour a fondé son hypothèse sur trois types d’arguments : la structuration prosodico-syntaxique des vers, la qualité de la rime/assonance et la transcription autochtone de la poésie en caractères arabes. Selon Bounfour, les fins de vers Kamal Bouamara 116 kabyles, par opposition aux fins des sous vers, s’achèvent par des syllabes marquées, comme la CVC ou CVCC. Par ailleurs, Bounfour, comme Chaker et Salhi, propose la disposition des vers en hémistiches. L’hypothèse de Bouamara (1995, 2003) Après avoir remis en cause l’hypothèse selon laquelle la rime ne clôt pas seulement les fins de vers, mais également les fins des sous vers, Bouamara (2003 : 315 et suivantes) soutient que c’est la courbe intonative – qui se manifeste lors de la déclamation des poèmes oraux – qui constitue le critère démarcatif entre les fins de vers et celles des sous vers. A l’instar de Chaker, Salhi et Bounfour, Bouamara propose également la disposition en hémistiches. L’espace du présent article ne nous permettant pas d’en dire plus sur les fondements de chacune de ces hypothèses6, nous allons donc à l’essentiel. En fait, le nœud du problème que tente de traiter ces hypothèses se situe au niveau de la définition du vers (kabyle), d’où cette question récurrente : sur quels critères se définit le vers kabyle ? Selon : – le nombre de syllabes et la rime ou assonance, qui clôt les fins de vers (Ben Sedira, 1887 ; Feraoun, 1960 ; Mammeri, 1969) ; – le nombre de syllabes et la rime ou assonance, en plus d’autres critères, tels que l’accent (Basset, 1952), les éléments grammaticaux (Chaker, 1984), le rythme uploads/Litterature/ agadir-metrique-kabyle-traditionnelle.pdf
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- Publié le Apv 10, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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