STEPHANE MALLARME – BRISE MARINE La chair est triste, hélas! et j’ai lu tous le

STEPHANE MALLARME – BRISE MARINE La chair est triste, hélas! et j’ai lu tous les livres. Fuir! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres D’être parmi l’écume inconnue et les cieux! Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux Ne retiendra ce cœur qui dans la mer se trempe O nuits! ni la clarté déserte de ma lampe Sur le vide papier que la blancheur défend Et ni la jeune femme allaitant son enfant. Je partirai! Steamer balançant ta mâture, Lève l’ancre pour une exotique nature! Un Ennui, désolé par les cruels espoirs, Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs! Et, peut-être, les mâts, invitant les orages Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots… Mais, ô mon cœur, entends le chant des matelots! Poème de jeunesse, écrit en 1865. Un double désir exprimé dans ce poème : - nécessité d’un changement d’existence, un besoin d’évasion pour échapper au quotidien. - Une volonté passagère – de retourner à une poésie moins difficile. IDEE DIRECTRICE : « Fuir... » -- l’appel du large ; signification symbolique de cet ailleurs exotique. Se confond avec la Perfection et la Beauté. STRUCTURE : v. 1-3 – lassitude devant l’existence et l’attrait de l’évasion v. 4-8 – les raisons qui pourraient contrarier ce départ – rejetées, proclamation de liberté. v. 9-12 – l’instant du départ exalté. (la volonté de partir réaffirmée et l’adieu évoqué). v. 13-15 – les périls qui guettent le voyageur (les risques de l’aventure poétique). v. 16 – l’appel du large triomphe. ANALYSE : v. 1 – Désespoir du poète : « Hélas », souffrance rendue par l’acuité du son I. Aucun secours de l’expérience sensuelle (« la chair «) ni de la culture (« .. tous les livres ») – aucune satisfaction du corps ou de l’esprit. v. 2 – un cri d’évasion, le vers commence par « Fuir ! » et sa répétition. « Là-bas » -- pas une contrée précise mais s’oppose à l’univers quotidien qui emprisonne le poète. Violence du désir --- rythme saccadé. (1 2 12//6) »Je sens que » (=/ connaissance intellectuelle) – perception sensible de la réalité – l’ivresse d’une vie élémentaire. v. 3 – les oiseaux – ce besoin d’évasion, accèdent ----- à la mer (« écume ») – aspiration horizontale (pureté, mystère, l’ailleurs, cf. Baudelaire). ----- aux cieux – aspiration verticale – l’Idéal. Expression « ivres d’être » = se griser de grands espaces et de liberté. v. 4-8 – Commencent par « Rien » - détaché du reste – insistance, puis triple tour négatif « NI ... NI ...NI » (v. 4, v. 6, v. 8) --- repousse toutes les raisons de se laisser retenir. v. 4 – « les vieux jardins ... les yeux » -- les jardins l’antithèse de l’écume – un monde clos, limité, un décor familier/ l’infini. La nature modifiée par la main de l’homme=/ la nature intacte. La VUE – les choses et les objets n’existent qu’en fonction des « yeux ». Le plus intellectuel de nos cinq sens. v. 5 – le COEUR (la sensibilité) ; se TREMPE = relation intense grâce à l’immersion + reprendre ses forces. v. 6-7 – allusion au TRAVAIL INTELLECTUEL (cf. l’écriture de l’Hérodiade). « Déserte » -- véritable ascèse, solitude du poète (« vide » aussi). Et dans le v. 7 – impuissance à créer, stérilité du poète. « Défendre » - la blancheur protège la pureté de la feuille et interdit toute possibilité d’écriture au poète. v. 8 – la négation renforcée par ET NI, allusion à sa famille. v. 9-10 - L’affirmation énergique du départ (futur + position détachée du verbe). « Steamer » (mot anglais – bateau à vapeur) – images relatives au voyage – mâture (gréément des cheminées) – ancre. L’impératif « Lève » -- un ordre (progression). La prononciation des E muets – semble allonger le vers et permettre ainsi au rêve de s’épanouir. v. 11 – Explication de la précipitation – l’Ennui (le réel trop laid, le dégoût d’une existence où la poésie est difficilement accessible =/ mal de vivre de B). « cruels espoirs » --- les possibilités entrevues mais toujours déçues de réaliser le pur chef- d’oeuvre poétique. v. 12 – le départ rendu nécessaire – « adieu suprême ». v. 13-15 – Renversement de perspective – peur devant l’inconnu, mort possible. L’adverbe « peut-être » + rime « orages/ naufrages... « – difficultés de la création poétique. Rythme saccadé du v. 15 + reprise des tours négatifs (« sans mâts ...ni... ») – l’affolement du naufragé en détresse. « fertiles îlots » -- plus l’espoir d’échouer sur une île salvatrice ; la perfection artistique inaccessible. v. 16 – Un hymne du départ à l’accent très baudelairien. (v. Parfum exotique : « chant des mariniers ») « O mon coeur ... » -- néanmoins une résonance nostalgique, voire pathétique (dans la vie réelle de M. – aucun départ)/ Voyelles nasales : mon – entends – chant --- ferveur et tristesse. CONCLUSION : - Un besoin d’échapper à l’univers – vie authentique dans une « exotique nature » -- tradition romantique et rêverie baudelairienne. - Signification plus précise, plus personnelle – recherche d’une nouvelle inspiration dans un contact avec une vie élémentaire où l’instinct et les sensations se substituent à l’intelligence. uploads/Litterature/ analyse-du-poeme-brise-marine-mallarme.pdf

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