Muhammad ibn ‘Abdallâh at- Tisfâwî L’OUVERTURE DIVINE dans ce qui est utile pou
Muhammad ibn ‘Abdallâh at- Tisfâwî L’OUVERTURE DIVINE dans ce qui est utile pour le disciple tijânî Al- Fath ar-rabbânî fîmâ yahtâj ilayhi al- murîd at- tijânî Introduit, traduit et annoté par Paolo Urizzi i n t ro d u c t i o n La Tarîqa Tijâniyya est l’une des dernières confréries soufies du monde islamique et ce qui est le plus frappant c’est sa considérable expansion, d’abord en Afrique du Nord et ensuite dans le reste du monde, pendant une période relativement courte, de manière à surpasser d’autres Turuq, bien plus anciennes, renommées et importantes sur le plan historique. Une telle expansion, absolument exceptionnelle qui se poursuit encore aujourd’hui, surtout dans des terres étrangères à l’Algérie, où la Tarîqa est née1, et au Maroc, où le Shaykh Ahmad at- Tijânî a fondé sa Zâwiya mère et où il repose maintenant, a suscité l’intérêt des savants occidentaux, mais surtout des africanistes, et seulement dans une certaine mesure celui des islamologues. Cependant, l’impression que l’on a en lisant les quelques études doctrinales qui lui sont consacrées2 est que sa vraie nature n’est pas bien comprise, ou tout au moins qu’ils n’en ont saisi que le côté extérieur. En fait, il n’y a toujours pas en langues occidentales d’étude approfondie dédiée aux enseignements du Shaykh Sidi Ahmad at- Tijânî tels que ceux qui nous sont parvenus dans les Jawâhir al- ma‘ânî, œuvre de son plus intime disciple 1. En fait, la Tarîqa doit son nom au Shaykh Abû-l-’Abbâs Ahmad ibn Mahammad [sic, avec la fatha] at- Tijânî ( 1150/1737 – 1230/1815 ), né à ‘Ayn Mâdhî, village du désert algérien à soixante-dix kilomètres à l’ouest de Laghouat. 2. Le premier ouvrage doctrinal et général sur la Tijâniyya est celui du professeur chrétien libanais Jamil M. Abun-Nasr, The Tijaniyya : A Sufi Order in the Modern World, Oxford University Press, London 1965 ; suivi du recueil d’études sous la direction de Jean-Louis Triaud et David Robinson ( éds ) : La Tijâniyya. Une confrérie musulmane à la conquête de l’Afrique, éd. Karthala, Paris 2005, et du travail hostile de Jillali El Adnani, La Tijâniyya 1781-1881. Les origines d’une confrérie religeuse au Maghreb, éd. Marsam, Rabat 2007, dont l’analyse des sources est présentée sous une forme plutôt tendancieuse, on ne sait si c’est par mauvaise foi ou par pure ignorance. L’ouverture divine 10 | et Khalîfa, Sidi ‘Alî Harâzim. Ce travail, qui a fait l’objet de deux traductions ces dernières années, malgré des lacunes constatées, est à la disposition du public et on espère qu’à terme il attirera des chercheurs qui pourront mener une enquête compétente et détaillée sur son élevé contenu sapientiel. Dans l’attente de voir se multiplier le nombre de chercheurs et d’études à cet égard, nous nous sommes engagés à faire connaître la traduction d’autres travaux fondamentaux de la Tarîqa, sous la marque commune de l’association Le Cercle de Lumière et de l’éditeur Albouraq. Le premier travail qui voit le jour est al- Fath ar-rabbânî, « L’Ouverture divine », avec en sous-titre : « dans ce qui est utile pour le disciple Tijânî » ( fîmâ yahtâj ilayhi al- murîd at- tijânî ). Cet ouvrage, à l’usage des disciples de cette Tarîqa, se présente comme un bréviaire et facilite la compréhension des rites. De ce fait, le Fath ar-rabbânî est l’un des manuels les plus répandus de la Tijâniyya, même s’il n’a jamais fait l’objet d’une édition critique.3 L’auteur, Sidi Muhammad ibn ‘Abd Allâh ibn Hasanayn at- Tisfâwî, est un Égyptien originaire de Tisfâ, petit village à environ quarante kilomètres au nord du Caire. De lui, nous ne connaissons rien de plus que l’information biographique qu’il nous donne lui-même dans son livre, à partir de laquelle il est clair qu’il a vécu dans la première moitié du XXe siècle et qu’il a eu des contacts avec les maîtres Tijânî appartenant à la période formative de la Tijâniyya en Égypte, comme le Muqaddam al- Hâjj Hamû al- ‘Uqbânî ( m. 1325/1907 ) et le Muqaddam al- Hâjj al- Hâshimî Muhammad ad-Dumnâtî ( m. 1332/1914 ). Le travail reflète ainsi pleinement la transmission des connaissances telles qu’elles ont été transmises à l’époque dans l’environnement de la Tarîqa, en plus de celle des sciences islamiques en général. À cet égard, le Fath ar-rabbânî est un exemple de doctrine traditionnelle au service de la spiritualité islamique et du soufisme, puisque le but principal de ce livre est de fournir au disciple tijânî les outils nécessaires pour connaître tous les éléments essentiels dans la pratique de sa Voie en pleine connaissance de cause. En même temps, il s’agit d’une réponse détaillée aux critiques adressées à certaines pratiques ou doctrines soufies et, en particulier, à l’égard du Shaykh Sidi Ahmad at- Tijânî et de la Tijâniyya. Ce faisant, l’auteur a magistralement rassemblé une vaste 3. Les textes en arabe que nous avons utilisés, bien que défectueux, sont suffisants pour établir une bonne traduction. Le premier est édité par l’édition Maktaba al- Qâhira, Le Caire, s.d., également disponible en ligne ; le deuxième est celui édité par ’Alâwa Boudarwâz, s.d. e s.l. Dans ce qui est utile pour le disciple tijânî | 11 collection de sources traditionnelles couvrant tous les domaines du savoir islamique et, surtout, s’appuyant sur l’autorité des ulemas et sur des maîtres très représentatifs des différentes branches du savoir traditionnel sunnite.4 Tisfawî s’appuie en réalité, au moins pour une bonne partie de ses sources, sur les grands ouvrages de la Tarîqa, qui servent de fondement à toutes les doctrines relatives à la Tijâniyya. Ceux qui venaient des compagnons du Shaykh dont ils ont directement recueilli les enseignements oraux, tels que les Jawâhir al- ma‘ânî de Sidi ‘Alî Harâzim déjà mentionnés ou, dans une moindre mesure, le livre al- Jâmi‘ de Sidi Ibn al- Mishrî, un autre compagnon intime du Shaykh. Ou ceux tirés des deux œuvres considérées comme de véritables piliers de la Voie Tijânî : les Rimâh du Shaykh et mujâhid Toucouleur al- Hâjj ‘Umar ibn Sa‘îd Tall al- Fûtî et, surtout, le manuel par excellence de la Tarîqa, le livre Bughyat al- mustafîd du très savant Sidi Muhammad ibn as-Sa’ih. La structure essentielle du livre est basée sur ces travaux. Cependant, en analysant le texte, il n’est pas difficile de se rendre compte de la solide culture religieuse et de la vaste érudition de son auteur, qui embrasse une large sélection de textes variés, non seulement ceux qui avaient déjà été publiés à l’époque, mais aussi des œuvres que l’on ne trouve encore aujourd’hui que sous forme manuscrite. Bien que de taille modeste, il parvient à nous donner une image complète de la Tarîqa Tijâniyya, ou plutôt de la Tarîqa Ahmadiyya Muhammadiyya Ibrâhîmiyya Hanîfiyya, selon le nom que le Shaykh lui-même a donné. Il y décrit ses origines, en parlant de sa particularité, de la source de ses pratiques et des privilèges réservés à ses adhérents, en même temps que des arguments scripturaires ( dalâ’il ) de cette Voie d’élection muhammadienne et indirectement des pratiques fondamentales du soufisme.5 La question est d’une importance capitale, car quiconque s’approche de cette Tarîqa ne peut qu’être impressionné du côté unique, exceptionnel et exclusif de cette confrérie, un exclusivisme qui apparaît dès sa naissance et se trouve à la base de nombreuses polémiques, non seulement du côté 4. En note on peut trouver toutes les références mentionnées dans le texte. 5. Après avoir décrit les faits saillants de la vie du Shaykh ( chapitre I ), le Fath ar-rabbânî consa- cre quarante pages à répondre aux critiques formulées contre la Voie du Shaykh et son rang spirituel ( chapitre II ). Ensuite, il décrit les rituels et règles d’adhésion à la Tarîqa ( chapitres III- VI ), ainsi que quelques charismes attribués au Maître ( chapitre VII ). Il se termine enfin par les mérites de ses Awrâd et de ceux qui sont rattachés au Maître ( chapitre VIII ). L’ouverture divine 12 | salafiste, mais également de certains milieux soufis, puisqu’il n’a d’égal dans aucune autre Tarîqa. Les maîtres tijânîs ont été confrontés dès le début à ces controverses et il n’y a pratiquement pas de manuel tijânî qui ne se soit pas engagé à répondre. Surtout, les privilèges réservés aux membres de la Tarîqa semblent particulièrement gênants, car, sans qu’on leur demande de vertus particulières au-delà du simple fait de respecter les conditions d’appartenance, ils obtiennent et même après la mort, davantage que les Pôles parmi les saints. Le livre de Tisfâwî se termine par un exposé détaillé de ces privilèges que, selon une réponse du Shaykh at-Tijâni, nous comprenons ne pas être le résultat des mérites accumulés lors de la récitation de la Salât al- Fâtih, qui, même s’ils ont une valeur inestimable, restent quand même à l’arrière- plan. Comme cela est rapporté dans le Fath ar-rabbânî : « Nul doute que les compagnons de notre Shaykh I n’ont obtenu ces faveurs que parce qu’ils ont suivi la voie de celui-ci. Le Shaykh l’avait d’ailleurs reconnu lorsqu’il fut interrogé par Sidi Muhammad ibn al- uploads/Litterature/ at-tisfawi-louverture-divine-dans-ce-qui.pdf
Documents similaires










-
24
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Oct 27, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
- Taille du fichier 0.4638MB