Sémiotique : Devenir du sens 54 I.2. Sémiotique : Devenir du sens « L’empire de
Sémiotique : Devenir du sens 54 I.2. Sémiotique : Devenir du sens « L’empire des signes, c’est la prose »129. La sémiotique, théorie de la signification, du signe et du sens est « la science qui étudie la vie des signes au sein de la vie sociale »130 Elle joue, pour Barthes, le rôle de catharsis, c'est-à-dire une autre manière de « dire » et de « lire ». Et comme il s’agit de lire un texte littéraire, on doit s’attendre à « ce que tout élément y fasse signe »131 Donc lire un texte littéraire, consiste à entreprendre une tâche exploratrice à la recherche de signes significatifs, nous propose G. Vigner, car le texte littéraire est posé comme source de signes multiples, à différents niveaux, qu’il faut repérer, relever puis interpréter. « Un signe est une matérialité que l’on perçoit avec l’un ou plusieurs de nos sens »132. On peut le voir (par exemple : une couleur), l’entendre (un cri), le sentir (un parfum), le toucher ou encore le goûter. Ces signes perçus renvoient à quelque chose d’autre, c’est là leur particularité : être là pour désigner et signifier autre chose. « Un signe est quelque chose, tenant lieu de quelque chose pour quelqu’un, sous quelque rapport, ou à quelque titre »133. 129- J. P. SARTRE, Qu’est ce que la littérature ? Ed. Gallimard, Paris, 1948, p.17. 130- F. de Saussure, cité par M. JOLY, in Introduction à l’analyse de l’image, Ed. Nathan, Paris, 1993, p.25. 131- T. ARON, note de lecture 132- M. JOLY, Op. Cit., p.25. 133- CH. S. PEIRCE, ibid. Sémiotique : Devenir du sens 55 Pour Peirce aussi, le signe est d’abord direction ; en effet, dire qu’un objet ou une situation ont un sens, c’est dire qu’ils tendent vers quelque chose « dans la mesure où le sens d’un texte s’est rendu autonome par rapport à l’intention subjective de son auteur, la question essentielle n’est plus de retrouver derrière le texte, l’intention perdue, mais de déployer en quelque sorte devant le texte, « le monde » qu’il ouvre et découvre »134. Tout « objet sémiotique » est considéré à priori comme ayant du sens, c'est-à-dire que tout élément d’une culture donnée est toujours d’ordre sémiotique (dans notre cas, ce sont les noms, les couleurs et les chiffres) et qu’il possède nécessairement du « sens ». La sémiotique s’intéresse à tout ce qui relève de la culture, à tout ce qui peut-être utilisé et interprété par l’homme. En ce sens « tout ce qui a trait à la culture est coextensif à la sémiotique »135. Le signe permet alors d’ancrer le texte dans son contexte (pour Peirce, il s’agit d’une sémiotique en contexte) ; c’est ainsi que le « signe permet notre enracinement et nos aspirations dans leurs rapports à nos références …et parce qu’il habite justement la mémoire humaine, il est garant du développement de l’espèce humaine, partagée aux plans scientifique, technologique et technique par la dialectique du ressourcement et du renouvellement… »136. 134- P. RICOEUR « Réflexion faite, autobiographie intellectuelle », Article 135- J. COURTES, Nouveaux actes sémiotiques, l’énonciation comme acte sémiotique, Ed. PULIM, Université de Limoges, 1998. 136- F. DAHOU, « Intelligence du signe en procès : pour décoloniser notre pensée », Communication en plénière, Médeas, 2005. Sémiotique : Devenir du sens 56 Ainsi, « dès le départ, le sens n’est plus contenu dans les mots puisque c’est lui, au contraire, qui permet de comprendre la signification de chacun d’eux ; et l’objet littéraire, quoi qu’il se réalise à travers le langage, n’est jamais donné dans le langage, il est au contraire, par nature, silence et contestation de la parole. Aussi les cent mille mots alignés dans un livre peuvent- être lus un à un sans que le sens de l’œuvre en jaillisse, le sens n’est pas la somme des mots, il est la totalité organique »137. Notre analyse sémiotique permet de « consymboliser » c'est-à- dire de participer au jeu des symboles, onomastiques, chromatiques et numérologiques auxquels le texte nous convie même si elle n’atteint pas « la vérité d’un auteur, elle suggère plutôt la vérité »138 c'est-à-dire que l’analyse sémiotique nous met face à /à côté d’une « insécurité » ou d’une « incertitude » interprétative symbolique. 137- J. P. SARTRE, Op. Cit., pp. 50- 51. 138- Note de lecture Sémiotique : Devenir du sens 57 I.2.1.La titrologie « Le texte est un temple et le titre est son portique »139 Pour Henry Mitterrand : « il existe(…) autour du texte du roman, des lieux marqués, des balises, qui sollicitent immédiatement le lecteur, l’aide à se repérer et orientent presque malgré lui, son activité de décodage. Ce sont au premier rang, tous les segments du texte qui présentent le roman au lecteur, le désignent, le dénomment, qui portent le titre, le nom de l’auteur et de l’éditeur, la bande annonce, la dernière page de couverture,…bref tout ce qui désigne le livre comme produit à acheter, à consommer, à conserver en bibliothèque, tout ce qui le situe comme sous-classe de la production imprimée, à savoir le livre, et, plus particulièrement le roman. Ces éléments (…) forment un discours sur le texte et, un discours sur le monde »140. Les éléments nommés par Henry Mitterrand permettent, selon J.P. Goldenstein141, le passage du hors texte au texte qui constitue un des lieux stratégique de la fiction romanesque : déchiré entre le monde réel qu’il est souvent censé représenter et ce qu’il propose objectivement aux lecteurs. La série des signes « inauguraux » qui déterminent un véritable « combat de lecture » et qui est souvent fondé sur « une rhétorique de l’ouverture entièrement codifiée », sont des éléments du paratexte ; désignations données par Gérard Genette dans son ouvrage « Seuils ». La paratextualité constitue l’une des formes de transtextualité. 139- LUC- VAILLANCOURT, « La rhétorique des titres chez Montaigne », Site Internet, http:// www. Fabula. Org. Le 10/ 09/ 2004. 140 –H. MITTERRAND, « Les titres des romans de Guy des Cars », in Sociocritique, Ed. Nathan, Paris, 1979, cité in Convergences critiques, Ed. OPU, Alger, 1990, pp. 28-30. 141-J.P. GOLDENSTEIN, Pour lire le roman, Ed. de Boeck, Bruxelles, 1985. Sémiotique : Devenir du sens 58 Pour G.Genette le paratexte est : « ce « entre autres » par qui le texte devient livre »142 c'est-à-dire s’inscrit dans « l’institution littéraire ». Les éléments du paratexte, nous servent de point de départ pour aborder les aspects généraux de l’œuvre et alimentent une réflexion sur l’ensemble de l’œuvre, livrent les clés pour permettre d’aborder et d’entrer dans le vaste univers crée par l’écrivain. Le paratexte, rappelons le, comprend un ensemble « hybride » et varié de signes qui présentent, introduisent ou « clôturent » un texte donné : titres, sous- titres, intertitres, préfaces, post-face, épigraphe, illustrations, autrement dit tout ce qui entoure le texte, qui l’annonce, l’explique et le prédétermine. Ces éléments paratextuels procurent au texte un entourage « variable et parfois un commentaire, officiel ou officieux »143. G. Genette écrivait aussi à ce propos : « je m’apprête aujourd’hui à aborder un autre mode de transcendance, qui est la présence, fort active autour du texte, de cet ensemble, certes hétérogène de seuil et de sens que j’appelle le paratexte : titre, sous-titre, préface, notes, prières d’insérer, et bien d’autres entours moins visibles mais non moins efficaces, qui sont, pour le dire trop vite, le versant éditorial et pragmatique de l’œuvre littéraire et le lieu privilégié de son rapport au public et par lui au monde »144. Le paratexte est ce par quoi un texte se fait lire. Il entoure le texte en soi, se situe dans ses marges, constitue le seuil ; son effet, comme l’explique Gérard Genette, est diabolique. 142- G. GENETTE, « Transtextualité », Magazine littéraire, 1983, pp. 40-41. 143-G.GENETTE, Seuils, Ed. du Seuil, Paris, 1987, pp. 14 – 15. 144-G. GENETTE, cité par CH. ACHOUR, Op. Cit. Sémiotique : Devenir du sens 59 La fonction la plus évidente du paratexte est de « cautionner » le texte qu’il ouvre : il rend visible et surtout lisible le texte, il ne s’efface jamais, il est trace : trace signifiante. Le paratexte place le roman en situation de marché et de communication. Cette dimension pragmatique se manifeste dès la couverture, « il s’agit pourtant, d’un des lieux privilégiés de la dimension pragmatique de l’œuvre, c'est-à-dire de son action sur le lecteur »145, mais le paratexte est également tourné vers le texte qu’il enveloppe, et avec qui il entretient des rapports de « conformité ou de tension ». L’appareil paratextuel donc informe le lecteur de façon non négligeable, importante et participe à sa façon à une entrée en littérature qui réunit et permet un entrecroisement entre le code linguistique et le code iconique. L’appareil paratextuel nous propose une série d’éléments et d’observations qui touchent autant à l’apprentissage des langues qu’à la culture, la civilisation et l’histoire auxquelles le texte appartient. Un élément du paratexte peut communiquer une pure information comme il peut uploads/Litterature/ chapitre-1-2-pdf.pdf
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- Publié le Sep 13, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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