CM 9 Décadence et Symbolisme. Introduction 1880 : Parnasse s’épuise. Nvx jeun
CM 9 Décadence et Symbolisme. Introduction 1880 : Parnasse s’épuise. Nvx jeunes talents : Mallarmé, Verlaine, Rimbaud (les « poètes maudits ») Dans la poésie : retour triomphal du mystère, de l’inquiétude et de la curiosité métaphysique. A la suite de Baudelaire, des opéras du compositeur allemand Richard Wagner, chargés de symboles, poètes et écrivains se lancent dans l’exploration des continents intérieurs. Recherche du surnaturel, travail de l’imaginaire, se substituent à l'observation du réel ; la poésie & ses interrogations l’emportent sur le roman & la confiance ds monde réel. C'est ainsi que surgit un foisonnement créateur que l'on va baptiser "Symbolisme", pour subsumer l'ensemble des tendances de la fin de siècle. L'étiquette est pourtant controversée : le Symbolisme recouvre un courant hétéroclite, fait de personnalités diverses, disparates. Verlaine déclare « Symbolisme ? Connais pas ! Ce doit être un mot allemand », dénonçant les insuffisances d'un terme qui synthétise mal les sensibilités diverses exprimées en cette fin de siècle. Celles-ci composent d'abord un mouvement désordonné, essentiellement négatif & critique : le « décadentisme » ou "décadence", dont on peut faire remonter l'apparition à la publication du recueil Poèmes saturniens de Verlaine (1866), se cristallise et se fédère autour du roman de Huysmans, A Rebours (1884) et de l'essai que Verlaine consacre aux Poètes maudits (1884). Mais bientôt cette tendance sombre et négative se convertit en une orientation plus lumineuse et positive : la publication, par Jean Moréas, du « Manifeste du Symbolisme », en 1886, constitue l'acte de naissance du mouvement, qui se fédère autour du projet de quête d'une poésie nouvelle, capable de se substituer au modèle romantique, et identifie ses maîtres et modèles : Baudelaire, le grand intercesseur, pour avoir exploré les Correspondances dans ses poèmes ; Richard Wagner, inventeur à l'opéra d'un "art total" qui allie mots et musique. C'est surtout Stéphane Mallarmé qui va organiser et fédérer le mouvement, en tenant salon chez lui, rue de Rome à Paris. La mouvement symboliste couvre toute la fin de siècle et culmine en 1902 avec la création de Pelléas et Mélisande, opéra de Claude Debussy composé sur une pièce du Symboliste belge Maurice Maeterlinck - idéale association de la musique et des mots pour suggérer ce que les mots ne savent plus dire. Plan du chapitre 1. Aux origines du mouvement : le contexte des "tristes années 80" 2. La Décadence 3. Le Symbolisme 4. Crises et fin du symbolisme I. AUX SOURCES DU SYMBOLISME : LES "TRISTES ANNEES 80" Deux facteurs principaux expliquent l’émergence de cette floraison littéraire et artistique hétéroclite en cette fin de siècle : – sur le plan politique : la défaite de 1870, l’échec de la Commune (1871) déclenchent une vision noire, catastrophiste, de l’Histoire. Celle-ci repose, de façon plus aiguë encore qu'en 1850, la question du rôle social du poète, de son utilité historique, de l’utilité de son art. Le décadentisme, puis le symbolisme apparaissent comme une réaction contre ces déceptions historiques : l’art se donne comme un refuge contre un réel décevant/hostile. – Facteurs idéologiques : sur le plan intellectuel, c’est le triomphe du rationalisme : fleurissent les philosophies de l’esprit (Kant, Hegel), le pessimisme de Schopenhauer. Devant l’apogée du matérialisme scientiste et le triomphe de la modernité, le poète ne peut que s’interroger sur la place et même sur l’utilité de son art. Là encore, sa réaction est celle du rejet. Le monde ne doit pas être compris seulement par son apparence sensible, concrète, que la connaissance rationnelle peut circonscrire : il est un mystère à déchiffrer, et les sensations – sons, musiques, couleurs – doivent collaborer pour en percer les secrets. Le Symbolisme invitera ainsi à suivre le Poète mage, initié, pour déchiffrer ces secrets du monde, porté sur les ailes de l'art : les impressions subtiles et complexes qu'il crée permettent d'atteindre les Idées (au sens platonicien), voire de composer un langage inédit. I-B. La crise du rationalisme et le retour des spiritualités. Las du rationalisme officiel et/ou s’estimant méprisés, les artistes se tournent vers des spiritualités hétérodoxes, syncrétiques ou ésotériques. Les spéculations fantaisistes se multiplient : la notion de « symbole » permet de réconcilier philosophie, alchimie & ésotérisme, métaphysique & théosophie etc. On assiste à une première vague de conversion des écrivains vers le catholicisme, qui apparaît comme un refuge contre le mal de vivre : Bloy, Huysmans, Claudel, Jammes, Maritain, Péguy en témoignent, qui rejettent ainsi leur éducation rationaliste et scientiste. Sur le terrain philosophique, on voit le retour des idéalismes et spiritualismes, conséquence d’une overdose de kantisme : ennui et désenchantement sont encouragées par les idées et les philosophies qui sont dans l’air du temps, sans les comprendre forcément. Ce sont les «tristes années quatre-vingt » pour citer Paul Claudel (Contacts et circonstances). Schopenhauer, connu par des adaptations partielles avant la traduction du Monde comme volonté et comme représentation en 1886, exerce une énorme influence par sa négation du vouloir-vivre, de l’idée de progrès et sa radicale misogynie. le compositeur Richard Wagner est également vu comme le prophète du crépuscule des générations, dont il peint la flamboyante épopée dans sa tétralogie "L'Anneau du Niebelungen" : inspirée de vieilles légendes germaniques, elle dépeint le "Crépuscule des dieux" au moment où Nietzsche rédige Le Crépuscule des idoles. Avec Nietzsche précisément, et Bergson, la philosophie trouve des auteurs qui aident à formuler de nouvelles questions. Bergson construit une philosophie de la conscience et, en valorisant l’intuition, remet en cause les déterminismes : dans son Essai sur les données immédiates de la conscience (1889) puis, dans Matière et mémoire, il oppose à la science positiviste, une connaissance immédiate, qui atteint à la réalité profonde du moi et des choses, saisie non plus dans les catégories mesurables de l’espace et du temps, mais dans une durée pure, qui résiste à toute analyse. Il connaît un grand succès croissant auprès d’écrivains ou de futurs écrivains comme Valéry, Péguy, ou le jeune Marcel Proust I-C. Modèles picturaux et musicaux : de Monet à Wagner. L'apparition de la mouvance symbolisme est favorisée par l'organisation, en peinture, du mouvement impressionniste. Lancé dans les années 1870, celui-ci tire son nom de la toile Impression, Soleil levant de Claude Monet. Ses principes : l'impressionnisme cherche à représenter des impressions. Il faut tenter de rendre sur la toile les miroitements de la lumière, la palpitation des couleurs, la fluidité éphémère et fluctuante des paysages, les changements de contours et de couleurs – d'où la multiplication, chez les impressionnistes, des "séries" prenant pour objet un paysage ou objet identique, soumis aux variations de la lumière, de la couleur, du climat (ex. la cathédrale de Rouen ou les Nymphéas de Monet) Comme lui, le symbolisme tentera de saisir par les mots, les impressions éphémères et fugaces. Le modèle musical : l'œuvre de Richard Wagner. Une des plus importantes sources d’inspiration du symbolisme est la révolution musicale engagée par le compositeur allemand Richard Wagner. Écrivant le livret des opéras qu'il met lui-même en musique, puis en scène, poète, compositeur et scénographe, il rêve d’un art total mêlant poésie & musique, cherche la fusion des arts et des moyens artistiques. « L’œuvre la plus complète du poète doit être celle qui, dans son dernier achèvement, serait une parfaite musique » (Wagner, Correspondance). Il inaugure un art de la suggestion fondé sur une nouvelle structuration du langage musical : des phrases et thèmes musicaux remplacent les vieilles structures classiques (concerto, symphonie, récits & airs à l’opéra), fonctionnant comme symboles. Ainsi le prélude de son opéra Tristan et Isolde n'hésite pas à malmener les repères classiques des tonalités, inaugurant certains accords volontairement dissonants ("l'accord de Tristan" qu'on entend dès les premières notes) pour suggérer le drame à venir ; il conjugue différents thèmes musicaux ("leitmotive") qui, accompagnant le texte, serviront d'éléments suggestifs pour le public, rappelant ici le thème du filtre d'amour, suggérant là le désir, la mort, la passion... Vous pouvez écouter cette page magistrale ici L'œuvre de Wagner invite à mettre en relief la musicalité, l’harmonie dans les textes poétiques : cette recherche, initiée par Verlaine et son fameux « De la musique avant toute chose » (« Art poétique »), poursuivie par les Symbolistes. II. LA MODE DÉCADENTE (DÉCADENTISTE). Dans les années 1860-70, un mouvement confus prend la relève d’un romantisme défunt depuis longtemps : la "Décadence", ou décadentisme. Rassemblant des éléments disparates, il forme un carrefour d’influences plutôt qu’une école ou un mouvement. La « décadence » désigne normalement l’état de dégradation d’une société, en référence à l’empire romain tardif, finissant, du Bas-Empire (IIIe-IVe siècles ap. JC) : cette période se caractérisait par l'alliance paradoxale d'une complète déréliction politique et sociale (effondrement du pouvoir central, corruption des mœurs, ...) et d'un raffinement inégalé dans les arts. Cette période n'a cessé de fasciné le XVIIIe et le XIXe siècle : au XVIIIe siècle, elle inspire à Montesquieu ses Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence, occasion d’un parallèle entre la société française de la fin du XVIIIe siècle et uploads/Litterature/ decadence-et-symbolisme.pdf
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- Publié le Sep 08, 2021
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