La soif de dominer est celle qui s’éteint la dernière dans le cœur de l’homme.

La soif de dominer est celle qui s’éteint la dernière dans le cœur de l’homme. Nicolas Machiavel Derrière chaque grande fortune se cache un grand crime. Honoré de Balzac Prologue C’est une drôle d’histoire que ce livre, lecteur. Ce qu’il raconte, ce qu’il construit par petites touches impressionnistes. Cette montée en puissance de Larry Fink, le maître du nouveau monstre de la finance, BlackRock. Quand je ferme les yeux et que je pense à Larry et à BlackRock maintenant, l’image qui me vient est celle d’un Godzilla qui émergerait de la mégacrise de 2008 et qui foncerait vers nous… Ce qui rend ce livre encore plus singulier réside surtout dans sa genèse. Il n’aurait jamais dû exister. Cet objet comique et effrayant que vous avez entre les mains aurait dû être une préface, mais les choses ont mal tourné. Et j’ai été le témoin impuissant de ce que j’ai ressenti comme une tentative de censure. C’est délicat pour moi d’utiliser ce mot, mais in fine, c’est de cela qu’il s’agit. Et c’est ce qui a motivé l’écriture de cet improbable objet. Je ne vais pas épiloguer ici sur les faits et leur enchaînement (ce n’est pas vraiment le rôle d’une préface…) Le livre le raconte. Larry et moi naît d’un dialogue et de l’amitié entre un éditeur libre et engagé et son ami écrivain, baroudeur de l’enquête journalistique et du combat politique (Denis Robert fut la cheville ouvrière du scandale Clearstream). L’idée du livre s’est imposée à nous comme une évidence, une nécessité. Il fallait que je le publie, que ce soit moi son éditeur. Mais il fallait aussi que je publie son complément d’objet direct, la raison qui avait fait que Denis se penche sur BlackRock : le livre très documenté et de référence de la journaliste allemande Heike Buchter : BlackRock, ces financiers qui s’emparent de notre argent. Les deux livres, différents, démontrent d’une manière implacable les rouages cachés et les objectifs totalitaires de BlackRock. La multinationale voit passer par sa plateforme Aladdin aujourd’hui plus de trente trillions de dollars. Aladdin, c’est la lampe merveilleuse de Larry Fink, un indécryptable logiciel, un terrifiant mouchard, arbitre et finalement tyran de la finance mondiale. Black Rock gère 7 500 milliards d’actifs dans le monde entier, c’est-à-dire partout, même en France où la firme possède, bon an, mal an autour de 4 % du CAC40. C’est-à-dire des quarante plus grandes sociétés françaises cotées en Bourse. BlackRock est probablement la plus grande menace immédiate et actuelle, bien plus que la moumoute de Donald Trump ou les airs pincés de Xi Yinping – et, à court terme, que l’implacable changement climatique. BlackRock est à la fois le symbole et la réalité de ce mariage monstrueux de la technologie totalitaire des data et de la toute-puissance, mi-gazeuse, mi-hallucinée, de la finance. BlackRock n’est plus seulement un problème économique ni même politique, qui se règle avec des arguments et des éléments de savoir. BlackRock est devenue une folie incontrôlable, construite sur du storytelling. Blackrock est devenue un mythe. Larry Fink, avec son air rassurant de gestionnaire de fonds et de brave cow-boy américain, s’est refait une virginité en devenant le l’homme-qui murmure-à-l’oreille-de-la-Maison-Blanche. Il l’a fait au moment de la tempête des subprimes. Il continue aujourd’hui. Il a lui aussi muté en un personnage de légende. De légende noire. De légende qui risque d’emporter l’humanité entière dans l’effondrement impossible et pourtant probable de son immense château de cartes, de son Xanadu qui ne tuera pas son propriétaire, mais nous. Nous tous, toi, ami lecteur, dont l’argent est géré par ce bon Larry, comme tout le monde. Oui, c’est toi qui seras obligé de chuchoter Rosebud avant de rendre ton dernier souffle… Dès son titre, Larry et moi accomplit le geste vital qui est aujourd’hui celui de notre survie : rendre un nom, une humanité, à la fois banale et pitoyable, et tellement nécessaire, à cet inventeur du plus effroyable logiciel de flicage, de mise en boîte, de transformation en 0 et 1 du travail humain. Et donc de l’homme tout court. Page après page, ce livre résiste et refuse ; refuse la folie aveugle du logiciel Aladdin qui broie et manigance les données économiques, tient la dragée haute à tous, des politiques aux grands patrons, et règne sur le destin de l’économie. Page après page, ce livre rend un nom d’homme à la catastrophe à venir. Il nous réveille du long cauchemar où nous nous voyons aller droit dans le mur automatiquement, ou plutôt algorithmiquement. Page après page, lecteur, ce livre vous invite, à votre tour, à apostropher Larry, et à lui dire : « Larry, si tu es un homme, si tu es comme tu le crois un bon Américain, un bon gars sympa, débranche ta lampe merveilleuse, et rends au plus vite tes 7 500 milliards à ceux qui les possèdent vraiment. Pas seulement aux retraités dont tu concentres la fortune. Mais à nous tous. De notre avenir tu es devenu, par un concours de circonstances schizophrènes, le garant et le gourou. Toute cette puissance concentrée entre tes seules mains, Larry, tu le sais bien, est l’origine de la plus grande bouffée délirante qui ait jamais atteint le cerveau de l’économie mondiale. » En fait, lecteur, la seule parade qui nous reste, c’est de nous rappeler que derrière nos actifs, il y a Larry, et moi. C’est-à-dire nous tous. Et de le crier au plus vite. Vous verrez à la fin du livre une lettre. C’est un moyen pour nous de transformer la littérature en combat. Donnez de vos nouvelles à Larry et à BlackRock… Maintenant, ce livre et celui d’Heike Buchter, qui sortira dans quelques semaines, sont là pour toi, lecteur. À toi d’échapper au sortilège et de décider de ton sort. Florent Massot À la centaine d’activistes et de militants écologistes qui ont occupé les locaux de BlackRock en février 2020 à Paris, À Raymond M., Olivier L. et à tous ceux qui financent les médias indépendants, sans rien attendre d’autre en retour qu’un peu de liberté, À mon père, 1. Larry et moi, c’est une vieille histoire. Même si un océan nous sépare, on est nés sur la même planète. Larry a six ans de plus que moi. Son père était marchand de chaussures à Los Angeles (ouest des États-Unis) et sa mère professeure d’anglais. Ma mère était couturière, mon père ingénieur EDF à Thionville (est de la France). Larry a fait des études de sciences politiques et possède une maîtrise en administration des affaires, obtenue à l’université de Californie en 1976. L’année de mon bac. J’ai fait mes études de psychologie à Nancy jusqu’à un DEA de psycholinguistique. Niveau durée d’études, on peut dire que je le bats d’une courte tête. Je ne frime pas. Je narre. Niveau patrimoine, c’est une autre affaire. À part ma maison et une vieille Jaguar, je n’ai ni actions, ni plan d’épargne, ni résidence secondaire. Larry a gagné 25 millions de dollars en revenus et actions de BlackRock l’année dernière. Ce qui en fait le troisième plus gros salaire de Wall Street. Deux vieux banquiers le dépassent de peu : le boss de Morgan Stanley (27 millions) et celui qui truste la première place depuis des années : Jamie Dimon, le patron de JPMorgan (31 millions). Ce salaire annuel le classe également derrière Neymar, Messi et Ronaldo, mais légèrement devant Mbappé. L’histoire ne dit pas les autres revenus boursiers ou immobiliers de Larry. Il est très discret sur ses investissements. Bloomberg a cependant lâché le morceau en avril 2018 pour annoncer que Larry entrait dans la grande famille des milliardaires, puisqu’il venait selon le journaliste de la chaîne de dépasser le milliard en fortune personnelle, essentiellement grâce aux actions de BlackRock qu’il possède en nombre 1. Son score – même enviable – ne lui permet pas pourtant pas d’entrer dans le top 100 des hommes les plus riches du monde. En revanche, au palmarès des plus puissants, Forbes le place en vingt-huitième position en 2018, derrière Xi Jiping, Poutine et Trump, mais loin devant beaucoup d’autres patrons et hommes politiques influents. Depuis que le classement existe, sa cote ne fait que grimper et je vous fiche mon billet qu’il entrera dans le top 10 en 2020. Forcément. Doucement, mais aussi sûrement que BlackRock étend son influence sur le globe. Et, Forbes ou pas, il sera évidemment numéro un en 2021. Larry Fink, Master of the Universe. Ça vous pose un homme. Il fera dorer son nom à l’or fin sur des cartes de visite qu’il distribuera ensuite sans sourire (Larry a un humour très limité) lors de ses déplacements en Europe ou en Asie. Larry aime la richesse, pas l’opulence. Il est très secret sur ce qu’il gagne et amasse. Une ferme à North Salem avec des vaches et des chevaux, une villa à Aspen dans la station pour happy few du Colorado, Larry ne multiplie pas, contrairement à bon nombre de ses amis banquiers, les investissements immobiliers tapageurs. Notre homme aime surtout le uploads/Litterature/ denis-robert-larry-et-moi-comment-blackrock-nous-aime-nous-surveille-et-nous-detruit-massot-2020.pdf

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