1 www.taichi-kungfu.fr TAO TÖ KING J.J.L. Duyvendak Tao Tö King LE LIVRE DE LA

1 www.taichi-kungfu.fr TAO TÖ KING J.J.L. Duyvendak Tao Tö King LE LIVRE DE LA VOIE ET DE LA VERTU 道德经 (Dao De Jing de Laozi) Traduction : Jan Julius Lodewijk Duyvendak 1953 2 www.taichi-kungfu.fr 3 www.taichi-kungfu.fr Introduction Le Tao tö king est un de ces livres qui gardent leur valeur dans tous les siècles. L’obscurité même du texte semble le rendre plus fascinant. Toute une phalange d’érudits chinois se sont attachés à l’interpréter et, depuis un siècle, de nombreuses traductions en langues occiden- tales en ont paru. Si les interprètes chinois sont loin d’être d’accord, plus grande encore est la divergence entre les traducteurs. Non seu- lement il existe plusieurs versions dues à des sinologues compétents, mais qui diffèrent considérablement les unes des autres ; il y a aussi une foule de soi-disant traductions faites par des personnes dont la connaissance du chinois était tout à fait élémentaire et qui n’ont pas hésité, pour élucider le texte, à recourir à des spéculations philoso- phiques le plus souvent complètement étrangères à l’esprit chinois. Tout en appréciant l’intérêt que ce livre classique a pu exciter dans un public assez large et divers, on ne peut que regretter que le Tao tö king soit ainsi devenu la victime du pire dilettantisme. Un sinologue a bien des raisons d’hésiter à entreprendre une nou- velle traduction. Le Tao tö king présente des problèmes philologiques qui ne sont pas de solution facile, et le laconisme en est exaspérant. Si, néanmoins, je m’y suis risqué, c’est qu’en tant que sinologue on n’échappe pas au besoin et au désir de se rendre compte du sens de ce livre. Bien que j’eusse beaucoup appris des meilleures traduc- tions, aucune d’elles ne me satisfaisait. M’étant formé certaines idées qui ont mûri pendant de longues années, je me suis enfin décidé, au cours de la dernière guerre, alors que le contraste des circonstances incitait tout naturellement à une étude renouvelée de ce livre, à faire 4 www.taichi-kungfu.fr le plongeon. J’ai d’abord publié une traduction en langue hollandaise ; puis, mes collègues français ayant pris connaissance de mes efforts, m’ont engagé à refaire ma traduction en français pour un public plus étendu. C’est ainsi que j’ai été amené à publier ce livre. Pour rédi- ger cette version française, j’ai de nouveau scruté le texte chinois et les commentaires, et j’ai introduit bon nombre de changements et d’additions dans les notes, de sorte que cette version n’est nullement identique à ma première traduction hollandaise. Cette nouvelle version du Tao tö king se distingue de toutes les pré- cédentes par un traitement plus critique du texte. La plupart des tra- ducteurs s’en sont tenus jusqu’ici à la tradition reçue du texte. Il est vrai que les meilleurs d’entre eux ont utilisé, de temps à autre, des leçons différentes, mais personne n’a jamais fait un effort sérieux pour donner une traduction scientifique, basée sur une reconstruc- tion critique du texte entier. Le seul, autant que je sache, qui ait osé faire plusieurs transpositions textuelles, est M. Tch’ou Ta kao dans sa traduction anglaise, parue en 1937, mais il ne rend aucun compte des changements qu’il a adoptés. M. Arthur Waley a publié, en 1934, une traduction intéressante, inti- tulée The Way and its Power, qui vise surtout à donner une interpré- tation historique. Bien que dans le détail ma traduction diffère beau- coup de la sienne, mon point de vue est foncièrement le même et si, dans mes notes, j’ai quelquefois exprimé des critiques, c’est que ses vues valent d’être contredites. M. Waley accepte un très petit nombre de variantes, mais dans l’ensemble il s’en tient au texte reçu. Or, il me semble qu’une traduction du texte reçu peut avoir sa valeur si l’on désire rendre compte des idées que les Chinois eux mêmes, pendant 5 www.taichi-kungfu.fr deux mille ans, se sont formées de ce livre saint. Si, au contraire, on se propose de pénétrer le sens que ce livre a pu avoir au moment où il fut composé, une étude critique d’un texte si évidemment cor- rompu me paraît indispensable ; il faut alors traiter ce livre comme n’importe quel texte ancien. C’est précisément à quoi vise la présente traduction. Ni la tradition du texte, ni celle de l’interprétation, ne sont admises comme faisant autorité. Ce n’est pas à dire que j’aie envisagé le texte comme une donnée isolée. Au contraire, il a été méthodiquement situé dans son temps et dans son milieu, et le développement ultérieur du Taoïsme a été, lui aussi, pris en considération. Mais les vues des commentaires ne peuvent avoir pour moi qu’un intérêt secondaire. La formation, dans le courant des siècles, de la doctrine taoïste, est un sujet dis- tinct, dont il ne s’agit pas dans ce livre. Cette traduction n’est qu’une lutte corps à corps avec le texte lui-même. Il va de soi que je me suis servi abondamment des travaux critiques des érudits chinois. Sans parler des éditions anciennes, je dois men- tionner en tout premier lieu l’ouvrage de M. Ma Siu louen, Lao tseu ho kou (1924), qui tente une reconstruction critique du livre entier. Mes notes prouveront assez à quel point cet ouvrage m’a été indis- pensable. Le point de vue de M. Ma est très radical. A mon avis, il tend trop facilement à apporter des modifications au texte. Dans beau¬coup de cas, je ne suis pas d’accord avec lui ; je n’ai accepté les changements qu’il propose que lorsqu’ils m’ont paru absolument nécessaires. Je n’ai pas toujours signalé les points sur lesquels mes idées diffèrent des siennes, et de celles des autres commentateurs et traducteurs, afin de ne pas trop encombrer mes notes. Je n’ai men- tionné ces divergences que dans des cas spéciaux ; on peut pourtant 6 www.taichi-kungfu.fr être assuré que les interprétations des critiques chinois et des tra- ducteurs sérieux ont été partout pesées soigneusement. En dehors de l’ouvrage de M. Ma Siu louen, celui de M. Kao Heng, Lao tseu tcheng kou (1930), m’a été très utile, et je me suis aussi servi avec profit des éditions de M. Yang Chou ta, Lao tseu kou yi (1928) et de M. Li K’iao, Lao tseu kou tchou (1929). La belle édi- tion critique, avec variantes tirées de vieilles inscriptions et de vieux manuscrits, publiée par l’Institut Archéologique de l’Académie Nationale de Peiping, sous le titre de Kou pen Tao tö king kiao k’an (1936), m’a aussi rendu grand service. C’est à cet ouvrage que j’ai emprunté mon frontispice, reproduisant le commencement du texte gravé sur pierre d’après une calligraphie exécutée en 1316 par Tchao Meng fou, peintre et calligraphe célèbre, ainsi que le titre chinois du présent livre, tiré d’un texte gravé sur pierre en l’an 738. Le texte chinois, reproduit dans ce livre, est emprunté à l’édition de M. Ts’ai T’ing kan, intitulée Lao kiai Lao (1921), qui, par son index excellent, m’a aussi été fort utile. Je regrette que quelques autres éditions cri- tiques et récentes du texte, que j’aurais voulu consulter, me soient restées inaccessibles. Mon étude critique du texte ne se borne pas à utiliser d’anciennes variantes ou à faire quelques conjectures. Elle consiste aussi dans une reconstruction du contenu même des chapitres. Le texte compte 81 chapitres. Ce nombre n’est pas un accident. 81 est 3 x 3 x 3 x 3 ; c’est un nombre sacré dans le Taoïsme et il est certain que, pen- dant ou peu après la dynastie des Han (206 avant J.C. 221 après J.C.), cette division a été faite artificiellement. Or, les anciens livres chinois étaient écrits sur des tablettes étroites de bois ou de bambou qui, ordinairement, comportaient chacune une seule ligne de texte. Ces 7 www.taichi-kungfu.fr tablettes étaient enfilées ensemble au moyen d’une ligature passée par des trous taillés dans le bord des lamelles. Si le lien se brisait, les tablettes tombaient facilement en désordre. Il est évident que, lors d’une redistribution du texte selon un principe artificiel visant à arri- ver au nombre 81, les lignes couraient grand danger de s’embrouil- ler et d’être rangées contrairement à l’ordre original, d’autant que le texte était obscur et qu’à première vue l’organisation contextuelle de ses parties n’était pas toujours claire. Les rimes, qui sont fré- quentes, sont d’un secours précieux, mais elles sont trop irrégulières pour être toujours un guide sûr. En outre, il est possible que, sous les Han, on n’ait pas toujours reconnu les rimes dans des mots dont la prononciation avait changé. Aussi suis je convaincu qu’une telle confusion a eu lieu dans bien des cas. On trouve plusieurs répétitions qui, dans un texte tellement bref, sont très peu vraisemblables, et plusieurs lignes me paraissent égarées dans des chapitres où elles n’ont aucun sens compréhensible. Dans le style lapidaire du Tao tö king, l’interprétation dépend entièrement du contexte, et de telles lignes, du fait qu’elles sont mal placées, deviennent inintelligibles ; mais, si l’on réussit à les remettre dans leur contexte original, elles paraissent avoir un bon sens. Ce travail est, naturellement, chose dé- licate uploads/Litterature/ ebook-pdf-taoisme-le-lao-tseu-tao-te-king-le-livre-de-la-voie-et-de-la-vertu-j-j-l-duyvendak-laozi-da-de-jing.pdf

  • 20
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager