ELIPHAS LEVI , Le Bf|^ des Sages OEUVRE POSTHUME PARIS LIBRAIRIE GÉNÉRALE DES S

ELIPHAS LEVI , Le Bf|^ des Sages OEUVRE POSTHUME PARIS LIBRAIRIE GÉNÉRALE DES SCIENCES OCCULTES BIBLIOTHÈQUE CHACORNAC [M, QUAI SAINT-MICHEL. Il 1912 Dédié à mon Jlmï le (Baron SPÊDAIÎERI PRÉFACE Ce livre contient les principes et les éléments de cette troisième révélation qne le Comte Joseph de Maistre disait être nécessaire au monde. Cette troisième révélation ne peut être que l'expli- cation et la synthèse des deux autres. Elle doit concilier la science et le dogme, l'autorité et la liberté, la raison et la foi. Nous avons préparé le grain et d'autres feront les semailles. Celui qui a écrit ces pages est loin de se croire un prophète. Il voit la vérité et il l'écrit. Son autorité ,c'est l'évidencetet sa forcer'est la raison. Il parle pour les sages et il s'attend à la dérision et au dédain des fous. Il écrit pour les forts et ne sera pas lu par les faibles à qui l'on fera peur de ses doctrines. Ce livre est en deux parties : La première contient des dialogues résumant toute la polémique religieuse et philosophique du siècle présent. La seconde contient des définitions et des aphorismes. Il n'y a ici, ni fleurs de rhétorique ni phrases. Deux choses éternelles ont seules préoccupé l'auteur, la jus- tice et la Vérité. K. L. LE LIVRE DES SAGES DISCUSSION en forme de dialogue PREMIER DIALOGUE UN CLÉRICAL — ELIPHAS LÉVI LE CLÉRICAL Vos prétendues sciences viennent de l'enfer et vos raisons sont des blasphèmes. ELIPHAS LÊVI Je ne sais si votre ignorance vient du ciel; mais vos raisons à vous ressemblent fort à des injures. LE CLÉRICAL J'appelle les choses par leur nom, tant pis pour vous si ces noms doivent vous paraître injurieux. Comment, vous qui êtes sorti de l'Eglise, vous qui essayez d'ai- der l'impiété à saper dans sa base son édifice éternel, vous avez le fol orgueil de croire qu'elle chancelle sous les coups de vos semblables, et pour comble d'outrages, vous étendez pour la soutenir votre main sacrilège! Ne craignez-vous pas le sort d'Oza, que Dieu frappa de mort parce que, dans une intention meilleure que la vôtre et avec des mains peut-être plus pures, il vou- lut soutenir l'arche sainte 1 — 18 — ELIPHAS LÉVI Je vous arrête ici, Monsieur, vous citez la Bible sans la comprendre, j'aimerais mieux à votre place la com- prendre sans la citer. La mort d'Oza, dont vous me parlez ici, ressemble un peu à la fin tragique des qua- rante-deux enfants dévorés par des ours pour avoir ri de ce que le prophète Elisée était chauve. Heureuse- ment, dit Voltaire à ce propos, il n'y a pas d'ours en Palestine. LE CLÉRICAL Alors la Bible est un tissu de contes ridicules, et vous vous en moquez comme Voltaire? ELIPHAS LÉVI La Bible est un livre hiératique, c'est-à-dire sacré; elle est écrite en style sacerdotal, avec un mélange con- tinuel d'histoires et d'allégories. LE CLÉRICAL L'Eglise seule a le droit d'interpréter la Bible. Croyez- vous à son infaillibilité? ELIPHAS LÉVI Je suis de l'Eglise et je n'ai jamais rien dit, ni rien écrit, de contraire à son enseignement. LE CLÉRICAL J'admire votre aplomb. N'êtes-vous pas un libre pen- seur. Ne croyez-vous pas au progrès? N'admettez- vous pas les témérités de la science moderne qui donne tous les jours des démentis à l'Ecriture Sainte? Ne croyez-vous pas à l'ancienneté indéfinie du monde et à la diversité soit simultanée, soit successive, des races humaines? Ne traitez-vous pas de mythe ou de fable, ce qui est la même chose, l'histoire de la pomme d'Adam — *3 — sur laquelle se fonde le dogme du péché originel? Mais vous savez bien qu'alors tout s'écroule; plus de péché originel, ph:s de rédemption, partant plus de révéla- tion ni d'incarnation, car tout le christianisme n'a été qu'une longue erreur; l'Eglise ne peut se maintenir qu'en proscrivant le bon sens et en propageant l'igno- rance. Vous en êtes là et vous osez vous dire catho- lique? ELIPHAS LÉVI Que veut dire le mot catholique? Ne veut-il pas dire universel? Je crois au dogme universel et je me garde des aberrations de toutes les sectes particulières. Je les supporte pourtant, dans l'espérance que le progrès s'accomplira et que tous les hommes se réuniront dans la foi aux vérités fondamentales, ce qui s'est déjà accom- pli dans cette société déjà répandue par tout le monde, qu'on nomme la Franc-Maçonnerie. LE CLÉRICAL Courage, Monsieur, démasquez-vous enfin complè- tement; vous êtes franc-maçon sans aucun doute et vous savez parfaitement que'ïès Francs-Maçons viennent, tout récemment encore, d'être excommuniés par le Pape. ELIPHAS LÉVI' Oui, je sais cela, et depuis ce temps, j'ai cessé d'être Franc-Maçon, parce que les Francs-Maçons, excommu- niés par le Pape, ne croyaient plus devoir tolérer le catholicisme; je me suis donc séparé d'eux pour garder ma liberté de conscience et pour ne pas m'associer à leurs représailles, peut-être excusables, sinon légitimes, mais certainement inconséquentes, car l'essence de la maçonnerie, c'est la tolérance de tous les cultes. — 14 — LE CLÉRICAL C'est-à-dire l'indifférence en matière de religion? ELIPHAS LÉVI Dites en matière de superstitions. LE CLÉRICAL Oh! je sais que pour vous la Religion et la supers- tition sont une seule et même chose. ELIPHAS LÉVI Je crois, au contraire, que ce sont deux choses oppo- sées et inconciliables, tellement qu'à mes yeux les su- perstitieux sont des impies. Quant à la religion il n'y en a qu'une. Et il n'y en a jamais eu qu'une vérita- ble. C'est celle-là que j'appelle vraiment catholique ou universelle. Un musulman peut la pratiquer comme l'a bien fait voir l'émir Abdel-Kader, lorsqu'il a sauvé les chrétiens de Damas. Cette religion c'est la charité; le symbole de la charité, c'est la communion et l'opposé de la communion, c'est l'excommunication; communier, c'est évoquer Dieu, excommunier, c'est évoquer le diable. LE CLÉRICAL C'est pour cela que vous avez le diable au corps, car certainement de pareilles doctrines font de vous un excommunié. ELIPHAS LÉVI Si j'avais le diable, ce serait vous qui me l'auriez donné, et certes, je ne serais pas assez méchant pour vous le rendre; je le traiterais comme les marchands f—ïtont les pièces fausses qu'ils clouent sur leur comp- toir pour les retirer de la circulation. _.. 15 — LE CLÉRICAL Je ne veux pas vous écouter davantage, vous êtes un extravagant et un impie. ELIPHAS LÉVI {riant) Vous en savez long sur mon compte ! Et vous en dîtes des choses dont je suis loin de me douter; je ne suis pas si savant et je ne vous dirai pas ce que vous êtes. Je vous ferai observer seulement que ce que vous dites n'est ni charitable ni poli. LE CLÉRICAL Vous êtes un des plus dangereux ennemis de l'Eglise. ELIPHAS LÉVI C'est M. de Mirville qui vous a dit cela. Mais je répon- drai à lui comme à vous par ces deux vers de notre bon et grand La Fontaine : Rien n'est plus dangereux qu'un imprudent ami, Mieux vaudrait un sage ennemi. — 16 — DEUXIÈME DIALOGUE UN PHILOSOPHE - ELIPHAS LÉVI LE PHILOSOPHE (entrant) Que faisiez-vous de cet énergumène ? ELIPHAS LÉVI Rien de bien bon, je crois; j'aurais voulu le calmer et je ne parvenais qu'à le mettre de plus en plus en colère. LE PHILOSOPHE Aussi qu'avez-vous à faire avec de pareilles gens? Et pourquoi vous obstinez-vous à vous dire encore catho- lique. Vous éloignez de vous les libres penseurs et les catholiques vous exècrent. ELIPHAS LÉVI C'est un malentendu. LE PHILOSOPHE Dont vous êtes cause. Pourquoi vous obstinez-vous à dire un chien lorsqu'il s'agit d'un chat? ELIPHAS LÉVI Je ne crois pas m'être permis de pareilles excentri- cités de langage; j'appelle les choses par leurs noms, mais il m'est arrivé de .voir des chiens et des chats qui s'entendaierrt ensemble à merveille. LE PHILOSOPHE Cela ne prouve rien en faveur de votre rêve qui est l'accord impossible entre la religion et la science, entre l'autorité dogmatique et la liberté d'examen. ELIPHAS LÉVI Pêurquoi impossible? „. 17 — LE PHILOSOPHE Parce que la relig'on, c'est le rêve qui veut faire la loi à la raison; c'est l'absurde qui s'impose avec l'obs- tination de la folie; c'est l'orgueil de l'ignorance qui, pour se croire surnaturelle, invente des vertus contre nature; c'est Alexandre VI mis à la place de Dieu; c'est la clé du ciel remise dans les mains sanglantes des in- quisiteurs. ELIPHAS LÉVI Non, la religion n'est rien de tout cela; la religion c'est la foi, l'espérance et la charité. LE PHILOSOPHE Qu'appelez-vous la Foi? La foi c'est l'affirmation de ce qui doit être et l'aspi- ration confiante à ce qu'il est bon d'espérer. LE PHILOSOPHE Sortons des nuages s'il vous plaît. Vous vous dites catholique, or savez-vous ce que c'est qu'un catho- lique? ELIPHAS LÉVI Catholique veut dire universel; un catholique, c'est celui qui se rattache aux croyances universelles, c'est- à-dire à la religion unique dont le fond se trouve dans les dogmes de tous les peuples et de tous les temps. uploads/Litterature/ eliphas-levi-le-livre-des-sages.pdf

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