225 243 253 Problèmes d'une sociologie du roman Sommaire Lucien Goldmann : Intr

225 243 253 Problèmes d'une sociologie du roman Sommaire Lucien Goldmann : Introduction aux prob!èmes d'une sociologie du toman. Georges Lukàcs : La forme intérieure du roman' Georges Lukàcs : Conditionnement et signification historico-philosophique du toman. 263 René Girard : De < La Divine Comédie > à Ia sociologie du toman' 271 Erich Kôhler : Ies Romans de Cfuétîen de Trcges' 285 Lucien Goldmann : Introduction à une étude structutale des Romans de Malraux. 3g3 Michel Bernard: L'æuvrc tomanesque de Malraux uue à ttavets la presse de I'entre deux guettes. 431 Nouueau roman et ftalitê : 431 L - Nathalie Sarraute. 443 ll. - Àlain Robbe-Grillet. 449 III. ._ Lucien Goldmann. Numéro réalisé par le centre de recherches de sociologie littéraire de I'Institut de Sociologie Directeur : Lucien Goldmann Secrétaire : Roger Lallemand " -::ien GOLDMANN Introduction aux problèmec d'une sociologie du roman Lorsqu'il y a deux ans, en janvier 1961, I'Institut de Sociologie de Université Libre de Bruxelles nous a proposé de prendre la direction :i groupe de recherches de sociologie de la littérature et de consa- ::er nos premiers travaux à une étude des romans d'André Malraux, :.cus avons accepté cette offre avec beaucoup d'appréhension. Nos ::avaux sur la sociologie de la philosophie et de la littérature tragi- r'les au xvlle siècle ne nous laissaient préjuger en rien la possibilité : une étude portant sur une æuvre romanesque et, encore moins, sur -re cÊuvre romanesque écrite à une époque presque contemporaine. En ::it, durant la première année nous avons entrepris surtout une recher- :he préliminaire portant sur les problèmes du roman en tant que genre .::téraire, recherche pour laquelle nous sommes parti du texte, déià ::esque classique - bien qu'encore peu connu en France - de Georg -ukacs La théorie du roman et du livre qui venait de paraître de René Girard Mensonge romantique et uérité romanesque. dans lequel :elui-ci retrouvait sans les mentionner r et, comrne il nous l'a dit, :ar la suite, sans les connaître - les analyses lukacsiennes tout en .es modifiant sur plusieurs points particuliers. L'étude de La théorie du roman et du livre de Girard, nous a conduit à formuler quelques hypothèses sociologiques qui nous sem- 5ient particulièrement intéressantes, et à partir desquelles. se sont :er-eloppées nos recherches ultérieures sur les romans de Malratrr. Ces hypothèses concernent, d'une part, I'homologie entre la strtrc- :Jre romanesque classique et la structure de l'échange dans l'écono- :lre libérale, et, d'autre part, I'existence de certains parallélismes entre :':rs évolutions ultérieures. Commençons par tracer les grandes lignes de la structrtre qLri, selon L:rkacs, caractérise, sinon, comme il le pense, la forme ronrancsque en :-';réral. tout au moins un de ses aspects les plus importants (et clui est :robablement, du point de vue génétique, son aspect primordial). La :ornre de roman qu'étudie Lukacs est celle que caractérise I'existence C un héros romanesque qu'il a très heureusement défini spus le terme le héro.s problématique r. r Il nous faut cependant indiquer que, selon nous, lc champ de vahdité dc cette :r'pothese doit i'tre rétréci car si elle s'applique à des ouvrages aussi importants 226 lntroductioo aur problènes d'une sociologie du rcman I-e roman est I'histoire d'une recherche dégradée (gue Lukacs appelle < démoniaque >), recherche de valeurs authentiques dans un monde dégradé lui aussi mais à un niveau autrement avancé et sur un nnode différent" Par valeurs authentiques" il faut comprendre, bien entendu, non pas les valeurs que le critique ou le lecteur estiment authentiques, mais celles qui, sans être manifestement présentes dans le roman, organi- sent sur le mode implicite i'ensemble de son univers. Il va de soi gue ces valeurs sont spécifiques à chaque roman et différentes d'un roman à I'autre. Le roman étant un genre êpique caractérisé, contrairement à l'épo- pée ou au conte, par la rupture insurmontable du héros et du monde, il y a chez Lukàcs une analyse de la nature des deux dégradations (celle du héros et celle du monde) qui doivent engendrer à la fois une opposifion constitufiue, fondement de cette rupture insurmonta- ble et ûne communauté suffisanfe pour permettre I'existence d'une forme épique. La rupture radicale seule aurait en effet abouti à la tragédie ou à la poésie lyrique, I'absence de rupture ou I'existence d'une rupture seu- lement accidentelle aurait conduit à l'épopée ou au conte. Situé entre les deux, le roman a une nature dialectique dans la mesure où il tient précisément, d'une part, de la communauté fonda- mentale du héros et du monde gue suppose toute forme épique et, d'autre part. de leur rupture insurmontable ; la communautê du héros et du monde résultant du fait qu'ils sont I'un et I'autre dégradés, par rapport aux valeurs authentiques, I'opposition résultant de la diffé- rence de nature entre chacune de ces deux dégradations. Le héros démoniaque du roman est un fou ou un criminel, en tout cas, cornme nous I'avons dit, un personnage problématique dont la recherche dégradée, et par là même inauthentique" de valeurs authen- tique dans un monde de conformisme et de convention, constitue le contenu de ce nouveau genre littéraire que les écrivains ont créé dans la société individualiste et qu'on a appelé < roman >. A partir de eette analyse, Lukacs élabore une typclogie du roman. Partant de la relation du héros et du monde, il distingue trois types schématiques du roman occidental au xtrxe siècle, auxquels s'ajoute un dans I'histoire de la littérature que Don Quichotte de Cervantès. Le Rouge et Ie Noir de Stendhal, Madame Bovarg et L'Education Sentimentale de Flaubert, elle ne saurait s'appliquer que très partiellement à La Chaftreuse de Pacrne et nulle- ment à I'ceuvre de Balzac qui occupe une place considérable dans I'histoire du roman occidental. Telles quelles cependant, les analyses de Lukàcs permettent, nous sem- ble-t-il, d'entreprendre une étude sociologique sérieuse de la forme romaûesque. latrodrrctlon aux problèmes d,uae sociologie &r romaa 227 ::atrième qui constitue, déià, une transformation du genre romanes- :-e vers des modalités nouvelles qui demanderaient rlne analyse de '-':e différent. cette quatrième possibilité lui paraît, en 1920, incarnée n ' ent tout par les romans de Tolstoi qui s'orientent vers l'épopée. l.::ant aux trois types.constitutifs du roman sur lequel porte son ana- ' se, ce sont : a) Le roman de < I'idéalisme abstrait >; caractérisé par l'acti- ..:é du héros et par sa conscienee trop étroite par rapport à la com- :.exité du monde. (Don Quichotte, Le frouge et te No'k_l b) Le roman psychologique ; orienté vers I'analyse de la vie inté, : .rre, caractérisé par la passivité du héros et sa conscience trop large :rur se satisfaire de ce que le monde de la convention peut lui appor- .:: (à ce type appartiendraient oblomov et I'Education sentimenta{el . =: enfin c) I-e roman éducatif ; s'achevant par une auto-limitation qui, :--'rt en étant un renoncement à la recherchement problématique, n'est :ependant ni une acceptation du monde de la convention ni un aban- :':n de l'échelle implicite des valeurs - auto-limitation qu'on doit =ractériser par le terme de < maturité virile > (wilhelm Meister, de loethe, ou Der grûne Heinrich, de Gottfried Keller). Les analyses de René Girard" à quarante ans de distance, rejoi- :ient très souvent celles de Lukacs. Pour lui aussi, le rornan est . bistoire d'une recherche dégradée (qu'il appelle < idôratre >) par un -'.éros problématique, des valeurs authentiques, dans un monde :égradé. [.a terminoiogie dont il use est d'origine heideggerienne, mais .- lui confère souvent un contenu assez "différent de celui que lui a:tribue Heidegger. Sans nous étendre sur cet aspect, disons que 3irard, à la place de la dualité distinguée par Heidegger enrre |onio- ,cgique et I'ontique, utilise la dualité sensiblement voisine de I'onto- 'cgique et du mêtaphysique qui correspondent pour lui à I'authentique tl âu ooo-âuthentique ; nais alors que, pour Heidegger, toute idée :e progrès et de recul est à éliminer, Girard confère à sa terminologie :e I'ontologique et du métaphysique un contenu beaucoup plus pro- :he des positions de Lukacs gue de celles de Heidegger, en intro- :uisant entre les deux termes une relation régie par les catégories de :iogrès et de régression 2. 2 Dans la pensée de Heidegger, comme d'ailleurs dans celle de Lukàcs. il y : :-'rpture radicale entre I'Etre (chez Lukàcs, la Totaiité) et tout ce dont on peut :::ier soit à I'indicatif (iugement de fait), soit à I'impératif (iugement de valeur). c est cette différence que Heidegger désigne comme celle de I ontologique et :e , cntique. Et, dans cette perspective, la métaphysique, qui est une des formes 228 lntroduction aux problènes d'une sociologie du rooan La typologie du roman de Girard repose sur I'idée que la dégra- dation de I'univers romanesque est le résultat d'nn mal ontologique plus ou moins avancé (ce < plus ou moins >> est rigoureusement contraire à la pensée de Heidegger) auquel correspond à I'intérieur du monde romanesque un accroissement du désir métaphysique, c'est-à-dire du desir dégradé. Elle est donc fondée sur I'idée de dégradation, et c'est ici que Girard apporte à I'analyse lukacsienne une précision uploads/Litterature/ goldmann-introduction-aux-problemes-d-x27-une-sociologie-du-roman.pdf

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