Edward T. Hall Le langage silencieux Traduit de l’américain par Jean Mesrie et

Edward T. Hall Le langage silencieux Traduit de l’américain par Jean Mesrie et Barbara Niceall Éditions du Seuil L ’édition originale de cet ouvrage a paru en langue anglaise sous le titre The Silent Language by Doubleday & Compagny, Inc., Garden City, New York. © 1959, Edward T. Hall. ISBN 2-250-553-2 © ÉDITIONS UNIVERSITAIRES BGSA, pour la traduction française. ISBN 978-2-02-006774-4 © ÉDITIONS DU SEUIL, MARS 1984, pour l’introduction l’édition de poche. « À mes amis et collègues de cultures étrangères qui m’ont tant appris à propos de la mienne. » Remerciements Mon ami et maître Ralph Linton m’a dit un jour qu’il « laissait sa peau » dans chaque ouvrage qu’il écrivait. Je reconnais volontiers la pertinence de cette remarque. J’ajouterai que la rédaction de ce livre a beaucoup empiété sur ma vie de famille, particulièrement celle de ma femme, qui a dû s’habituer à des horaires impossibles, à l’étouffement de notre vie sociale, à mon caractère irascible durant les périodes critiques de la rédaction, et à toutes les versions du manuscrit qu’elle a dû lire, critiquer et corriger. Beaucoup de livres sont dédiés à la femme de l’auteur car « sans sa patience et sa compréhension, cet ouvrage n’aurait jamais vu le jour ». Il est facile de deviner pourquoi cette dédicace est si fréquente, bien que ce fait même ait tendance à affaiblir la portée du message et contribue à rendre les efforts de la femme moins importants qu’ils n’ont été en réalité. Je ne sais comment exprimer de manière juste ce que je dois à ma femme pour la rédaction de cet ouvrage. J’aurais souvent abandonné ou différé mes travaux si elle n’avait été là pour m’encourager. Je dois donc tout d’abord remercier ma femme, Mildred Reed Hall. En tant qu’anthropologue et spécialiste, je dois beaucoup à mes collègues et surtout à Ralph Linton, dont j’ai jadis suivi les cours à l’université de Columbia. Nous avons passé de bons moments ensemble à avancer des hypothèses sur les sujets les plus variés. Lorsque j’étais étudiant, j’éprouvais des difficultés à communiquer avec mes professeurs, et je ressentais le fossé qui nous séparait, non pas tant à cause de la position sociale que de nos relations. Ceci ne s’est jamais produit avec Linton. Il semblait toujours capable de s’exprimer clairement et aimait beaucoup échanger des idées. Si le contenu de cet ouvrage n’a rien à voir avec ce qu’aurait écrit Linton, je suis cependant sûr qu’il aurait compris les idées qui s’y trouvent. Trois autres collègues m’ont stimulé et encouragé durant des années. Ce sont Erich Fromm, David Riesman et John Useem. La plupart des données qui figurent dans cet ouvrage ont été analysées en collaboration avec mon collègue et ami Georges L. Trager, professeur d’anthropologie et de linguistique à l’université de Buffalo. Durant les phases préliminaires de nos travaux, Trager et moi avons été aidés et encouragés par Edward A. Kennard, Ralph Kepler Lewis, et Henry Lee Smith Junior. Toutefois, la forme et le contenu de cet ouvrage n’engagent que moi. La plupart des commentaires ayant trait à des cultures étrangères résultent de l’observation directe et du travail effectué chez les Hispano-Américains du Nouveau-Mexique et d’Amérique latine, les Indiens Navajos et Hopis, les habitants de l’atoll de Truk, les Arabes de l’ouest de la Méditerranée et les Iraniens. Il est inutile de dire que l’anthropologue doit toujours beaucoup aux peuples qu’il étudie, car c’est ce qu’il apprend de leur culture qui rend la sienne plus significative. C’est Clarkson N. Potter qui m’a poussé à écrire cet ouvrage, en me donnant les encouragements et la compréhension nécessaires pour le mener à bien. Je dois également remercier Richard K. Winslow et Kermit Lansner, qui m’ont aidé dans la rédaction de ce livre, ainsi que les éditeurs qui m’ont permis de relever des passages des ouvrages suivants : « A Case of Identity », in The Complete Sherlock Holmes par Sir Arthur Conan Doyle. Reproduit avec la permission des propriétaires de l’œuvre de Sir Arthur Conan Doyle et de John Murray, Ltd. Language, Thought and Reality, œuvres choisies de Benjamin Lee Whorf. Reproduit avec la permission des éditeurs (Technology Press et John Wiley and Sons à New Y ork). Introduction à l’édition de poche Plus de vingt ans nous séparent de la publication du Langage silencieux. Entre-temps, beaucoup de choses se sont passées qui confirment la thèse de ce livre. Au moment de sa parution, j’étais tellement absorbé par mon propre travail, que je n’avais pas réussi à mesurer le besoin qu’il y avait de comprendre pleinement ce qu’est la « Communication interculturelle ». En fait, le langage silencieux est une traduction : non pas celle d’une langue dans une autre, mais celle d’une série de communications contextuelles, complexes et tacites, en mots. Le titre résume non seulement le contenu de ce livre, mais aussi l’un des plus grands paradoxes de la culture. Il ne s’agit pas seulement du fait que les gens se parlent aussi sans employer des mots, mais encore de tout un univers de comportements qui n’a pas été exploré, étudié, et qui, de ce fait, se trouve ignoré. Cet univers fonctionne sans parvenir à la conscience, juxtaposé à celui des mots. Ceux qui parmi nous ont un héritage européen, vivent dans un « monde de mots » qui leur paraît le réel ; mais parler ne veut pas dire pour autant que ce que nous communiquons par le reste de notre comportement n’est pas aussi très important. S’il n’y a pas de doute que le langage façonne la pensée par des voies particulièrement subtiles, l’humanité doit à présent s’attaquer à la réalité des autres systèmes culturels, et aux effets pénétrants de ces autres systèmes sur la façon dont le monde est perçu, dont l’individualité est expérimentée et dont la vie elle-même est organisée. Nous devons aussi nous accoutumer au fait que parfois les messages au niveau du mot veulent dire une chose, alors que, à un autre niveau, quelque chose de tout à fait différent est communiqué. Vingt ans ne suffisent pas pour prouver la valeur de ces affirmations. Certainement plus de temps est nécessaire pour que de telles implications deviennent effectives. Le lien est beaucoup plus étroit entre le langage et les gestes qu’entre le langage et les autres systèmes culturels – temps et espace, par exemple – tels qu’ils sont décrits ici. L ’espace, qui fut l’objet d’un livre ultérieur, la Dimension cachée, ne fait pas seulement communiquer, dans le sens élémentaire du terme, mais organise presque tout dans la vie. Il est même plus facile de voir comment l’espace peut organiser les activités et les institutions, que de reconnaître la façon subtile dont le langage organise la pensée. Le plus difficile est d’accepter que nos propres modèles sont particuliers et donc qu’ils ne sont pas universels. C’est cette difficulté des hommes à sortir de leur peau culturelle qui m’a poussé à faire part de mes observations et de leur traduction théorique par le truchement de l’écriture. Un des avantages qu’il y a à avoir écrit un livre – qui survit aux fantaisies de la mode – c’est que l’on reçoit un écho de la part de ses lecteurs : non seulement par des mots d’encouragement, mais aussi par la confirmation qu’apportent les exemples qu’ils invoquent. J’aimerais remercier tous ceux qui m’ont écrit des quatre coins du monde : le livre a été traduit en chinois, hollandais, polonais, français, italien et serbo-croate. Je m’intéresse depuis longtemps à la sélection et à la formation d’Américains travaillant à l’étranger, pour le gouvernement ou pour leur propre compte. Je crois que nos rapports avec les pays étrangers butent sur l’ignorance où nous sommes de la communication interculturelle. Cela fait que nous gaspillons à l’étranger les efforts ou la bonne volonté de notre nation. Lorsque des Américains sont appelés à travailler avec des pays étrangers, le critère de sélection devrait être leur aptitude à se mouvoir dans une culture différente de la leur. Ils devraient également savoir parler et écrire la langue en usage et connaître parfaitement la culture du pays. Tout ceci est long est coûteux. Mais, à défaut de cette sélection et de cette formation, nous limitons nos possibilités à l’étranger. Encore, dans un programme d’ensemble, cette formation théorique à la langue, à l’histoire, à la politique et aux mœurs des pays étrangers n’est-elle qu’une première étape. Il est également primordial de connaître le langage non verbal qui existe dans chaque pays, à l’échelon national et local. Beaucoup d’Américains ne sont que vaguement conscients de ce langage sans paroles, qu’ils expérimentent pourtant chaque jour. Ils ne perçoivent pas les schémas de comportement qui dictent notre conception du temps, notre perception de l’espace, nos attitudes envers le travail, le jeu, la connaissance. En sus de ce que nous exprimons verbalement, nos sensations réelles s’extériorisent constamment par un langage sans paroles, le langage du comportement. Quelquefois, ce langage est correctement interprété par des sujets de culture différente. Mais le plus souvent, ce n’est pas le cas. Il est rare uploads/Litterature/ hall-edward-twitchell-le-langage-silencieux.pdf

  • 33
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager