Histoire littéraire : le personnage de roman. Définition du personnage : Le ter

Histoire littéraire : le personnage de roman. Définition du personnage : Le terme de « personnage », apparu en français au XVème siècle, dérive du latin, persona qui signifie : « masque que les acteurs portaient sur scène, rôle ». Il hérite donc d'une figure, d'une visibilité et d'une lisibilité qui sont sa marque et conditionnent son existence sociale sur la scène publique. Un personnage est un « être de papier », la représentation d'une personne dans une fiction, une personne fictive dans une œuvre littéraire, picturale, cinématographique, bédéique1, ou théâtrale. Lorsque le nom du personnage principal devient le titre de l’œuvre, on parle alors de personnage éponyme. Définition du héros : le mot hérôs en grec signifie « demi-dieu » ou « tout homme élevé au rang de demi- dieu ». En latin, le mot garde la signification de demi-dieu mais aussi celle d’ « homme de grande valeur » I-Evolution historique de la notion :  Dans La Poétique d’Aristote (poétique aristotélicienne) ANTIQUITE, le personnage est secondaire, ce qui prime, c’est l’action à travers des actes héroïques, des exploits guerriers… > « la notion de personnage est secondaire, entièrement soumise à la notion d’action : il peut y avoir des fables sans « caractères » dit Aristote, il ne saurait y avoir de caractères sans fable. »2  Dans l'épopée et le roman français du Moyen-âge (le roman de chevalerie), le héros est un être idéal symbolisant certaines valeurs : le courage, la foi en dieu, la fidélité à la parole donnée. Il est opposé à des personnages incarnant le mal. Ce sont des personnages fabuleux, mythiques, qui accomplissent de hauts faits et gestes (gestae : les exploits accomplis en latin). *** Le héros antique (épique) : a toujours une ascendance divine : c’est un « demi-dieu » doué de qualités exceptionnelles, supérieur à l’humanité commune. En effet, les épopées sont des récits fondateurs qui racontent les premiers temps, inventent les dieux, des héros pour suppléer à l’ignorance des commencements et apprivoiser l’hostilité du monde, le rendre habitable, familier. Elles abordent les grandes questions qui agitent l’âme humaine : destin, mort, sexualité… Elles incarnent aussi les valeurs autour desquelles une communauté entend se rassembler : Romulus fondateur de Rome, Enée, héros de la piété filiale et du respect des morts… *** Le héros héroïque (à partir du Moyen Age) : n’est plus un demi-dieu mais a conservé des caractéristiques de son modèle antique : dans les épopées en vers, dans les romans de chevalerie en prose, il est une figure de la perfection, tant sur le plan physique que moral. Il correspond à un type idéal : - le héros qui obéit à son devoir et se couvre de gloire par ses hauts faits : La chanson de Roland ; - le preux chevalier, en quête d'aventures, épris d'une dame : chez Chrétien de Troyes avec « Lancelot ». Dans le théâtre médiéval, les traits typiques sont encore plus marqués et les figures plus schématiques. A la Renaissance, les personnages s'individualisent davantage. Ils deviennent sujets d'une expérience et d'un désir. Ces personnages restent très abstraits : beauté des traits mais sans précision, description, et cela jusqu’à la fin du XVIIIème siècle quasiment. (Cf les romans du 17ème : l’Astrée, La Princesse de Clèves.) Pour le lecteur, il est difficile de se représenter les portraits physiques de ces personnages. Cette idéalisation subsiste aujourd’hui dans certains types de roman : aventures, science-fiction, héroïc-fantasy. Le héros épique est lié à une société structurée autour de valeurs fortes fondées sur la religion ; cette société se définit par sa stabilité ; elle a besoin de modèles que lui fournissent les personnages de roman. HEROS POSITIF   Changement au cours du 17ème qui va mettre en scène des personnages, des « héros » aux antipodes du héros épique et chevaleresque : de basse extraction, plus roués que vertueux, plus malins que courageux, ils mettent les rieurs de leur côté et ne s’embarrassent pas des valeurs sociales. Etres marginaux, ils s’affranchissent de tout, ne portent pas le destin de la communauté. On les retrouve dans les romans satiriques, parodiques, picaresques : Cf. Roman Bourgeois de Furetière ou Roman Comique de Scarron qui raconte l’histoire d’une troupe de théâtre. (1657), le dernier chef d’œuvre picaresque : Histoire de Gil Blas de Santillane de Lesage(1715) … Cela marque l’ouverture de la littérature à des figures populaires et à une dimension critique : c’est une avancée vers le réalisme. Le personnage de roman s'individualise. Les héros peuvent appartenir à des classes sociales diverses ; le roman leur prête des traits de caractère particuliers, leur attribue des qualités mais aussi des faiblesses. Dès lors que la société est prise en compte dans l’ensemble de ses composantes, d’autres histoires sont possibles : pas seulement quête du Saint Graal 1 B.D 2 BARTHES, Introduction à l'analyse structurale des récits, 1966. ou les chants contraires de l’amour et de la vertu, mais le trajet social qui fait passer d’une classe à l’autre. HEROS NEGATIF  Au XVIIIème siècle, avec le drame bourgeois que Diderot introduit sur la scène, le personnage devient un individu. Un double mouvement d'individualisation et d'inscription du personnage dans la Société se produit en se préoccupant de leurs actions, des réactions aux situations. Les cadres de la société traditionnelle sont remis en cause; la société apparaît comme une réalité en mutation, un système complexe dont le roman doit rendre compte. Les auteurs ont un plus grand souci de réalisme : les espaces géographiques et temporels sont mieux déterminés mais aussi plus romanesques dans le but de s’émanciper de cadres trop stricts (La Vie de Marianne (1742), Le Paysan Parvenu (1735) de Marivaux, Manon Lescaut(1731) de l’abbé Prévost, Paul et Virginie (1785) de Bernardin de Saint- Pierre, Les Liaisons dangereuses de Laclos…). L’influence des Lumières, l’émergence d’une nouvelle sensibilité avec Rousseau et Goethe : roman d’éducation, le personnage fait un trajet en lui-même, il évolue, n’est plus monolithique, semblable du début à la fin, mais se transforme au fil des épreuves : initiations et métamorphoses… • Au XIXème siècle, le roman est devenu le genre dominant. Il se définit comme un instrument d'exploration et d'explication de la réalité en cherchant à donner une image fidèle de la réalité sociale afin de pouvoir l'expliquer : c'est pourquoi il privilégie l'illusion de réalité, la description. C’est la naissance du roman réaliste qui fait du personnage le représentant d'une catégorie sociale : on parle alors de type romanesque. Le héros est confronté à une réalité impitoyable face à laquelle il doit déployer son énergie pour survivre ou s'élever. Le personnage acquiert un statut et une identité de plus en plus complexes et évolutifs. Le roman réaliste et naturaliste confirmera cette évolution. PERSONNAGE TYPE HEROS COLLECTIF La reconnaissance et la conception du personnage comme transposition littéraire d'une « personne » se sont manifestées par un « réalisme psychologique ». Dans L'art du roman, Milan Kundera retrace l'évolution qu'on peut observer entre le roman traditionnel et le roman moderne inauguré, selon lui, par le Don Quichotte3 de Cervantès. Les traits du personnage de roman traditionnel sont créés selon des normes quasi inviolables : - Donner le maximum d'informations sur son apparence physique, sa façon de parler et de se comporter ; - Faire connaître son passé, c'est là que se trouvent toutes les motivations de son comportement présent ; - Le personnage doit avoir une totale indépendance : l'auteur et ses propres considérations doivent disparaître pour ne pas déranger le lecteur qui veut céder à l'illusion et tenir la fiction pour une réalité. Selon Vincent Jouve4, « le roman ne peut se passer d'une illusion référentielle minimale » ; le personnage doit faire croire qu'il existe en dehors du papier.  A la fin du XIXème siècle, et au début du XXème, des auteurs comme Joyce, Kafka, Pirandello assimilent le personnage à un point de vue sur le monde, une conscience éclatée que détermine la perception toujours fluctuante d'autrui. Kundera travaille sur la modernité de Musil, Kafka (avec le personnage de K). « Musil a rompu ce vieux contrat entre le roman et le lecteur. Et d'autres romanciers avec lui. Que savons-nous de l'apparence physique de Esch, le plus grand personnage de Broch ? Rien. Sauf qu'il avait de grandes dents. Que savons-nous de l'enfance de K ou de Chvéik ? Et, ni Musil, ni Broch, ni Gombrowicz n'ont aucune gêne à être présents par leurs pensées dans leurs romans »5. Il donnera alors sa propre conception du personnage, en relation avec sa conception du roman comme instrument d'exploration, de découverte : « Le personnage n'est pas une simulation d'un être vivant. C'est un être imaginaire. Un ego expérimental. Le roman renoue ainsi avec ses commencements. Don Quichotte est quasi impensable comme être vivant. Pourtant dans notre mémoire, quel personnage est plus vivant que lui ? » Au XXème siècle, création de personnages qui avouent leur fragilité, leur passivité ou leur veulerie : aux antipodes du héros épique, le roman met en scène uploads/Litterature/ histoire-litteraire-personnage.pdf

  • 22
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager