Bac blanc 2017 - Corrigé I. Question de corpus Le corpus présente trois personn

Bac blanc 2017 - Corrigé I. Question de corpus Le corpus présente trois personnages féminins criminels et terribles. Dans Médée, tragédie de Pierre Corneille, écrite en 1635, le personnage éponyme laisse éclater sa colère et sa joie de s’être vengée de son ancien mari. C’est une même vengeance que révèle Dona Lucrezia dans le drame romantique de Victor Hugo, Lucrèce Borgia, écrit en 1833. Quant à Clytemnestre, la régicide de la pièce de Giraudoux Electre de 1937, elle justifie son crime en exposant la répugnance que lui inspirait son ancien mari. Nous allons voir comment s’exprime la violence de chaque personnage dans ces extraits. Tout d’abord, chaque femme s’exprime dans une ou plusieurs tirades. Elles s’imposent donc sur scène pour laisser éclater leur colère. Leurs tirades sont dominées par l’expressivité : les jurons fusent tels que « lâche » pour Médée, ou bien « perfide » et Clytemnestre évoque son mari comme un « niais ». De plus, la modalité exclamative est omniprésente pour souligner la force de leur colère : Dona Lucrezia s’adresse à chaque membre de l’assemblée pour l’exhorter à disparaître « Jeppo Liveretto, va rejoindre ton oncle Vitelli que j’ai fait poignarder… ». Clytemnestre aussi s’insurge « Le roi des rois, quelle dérision ! ». La véhémence de son propos se remarque aussi par les nombreuses répétitions qui rythment son texte : elle souligne l’absurdité du comportement amoureux par les répétitions de la question « pourquoi ? ». De même sa tirade débute par l’anaphore de « oui », signe qu’elle affirme sa haine. On retrouve ce mot également dans les paroles de Dona Lucrezia. En outre, la colère s’exprime par le déchaînement de haine qui caractérise chaque extrait. On retrouve le lexique du meurtre chez Médée avec « vengé » « poignard » « chasser leurs âmes » et « sang ». Dona Lucrezia rappelle ses crimes passés : « j’ai fait poignarder » « j’ai assassiné » « j’ai empoisonné ». Quant à Clytemnestre, elle joue avec l’expression « le roi des rois » qui qualifiait son défunt mari, en la déclinant sur le mode de la colère « le fat des fats » mais aussi « la haine des haines ». De plus, chaque personnage, dominé par la haine et la vengeance, se montre ironique. Clytemnestre reprend avec ironie, à l’aide d’une antiphrase, l’expression d’Electre « ce père admirable ». Les apostrophes employées par Médée sont des antiphrases aussi : « Heureux père et mari » « bienheureux amant », et soulignent avec cruauté que Jason est le plus malheureux des hommes maintenant qu’elle l’a privé de ses enfants et de sa femme. Dona Lucrezia se montre, elle aussi, cynique, elle ironise sur sa vengeance : » Fête pour fête, messeigneurs ! ». A la fête où elle s’est vue humiliée, elle répond par une fête mortelle. C’est la loi du Talion1. Elle exulte même en les traitant avec un mépris teinté d’ironie : « Il me semble que je me venge. Qu’en dites-vous messieurs ? Qui est-ce qui s’y connaît en vengeance ici ? ». Elle montre par un jeu de questions rhétoriques sa supériorité dans le crime. Enfin, la mise en scène permet de renforcer l’expression de la colère. La didascalie indique que Médée s’envole « dans un char tiré par deux dragons ». Ainsi, l’aspect spectaculaire de ce choix scénique permet de renforcer sa supériorité et de souligner la force de sa colère. De même, Dona Lucrezia fait son entrée « tout à coup ». Cette apparition soudaine fait d’elle l’incarnation de la vengeance, ce que renforce le vêtement noir qu’elle porte, symbole de deuil. Giraudoux ne donne pas d’indication de mise en scène pour ce monologue, mais la parole de Clytemnestre permet au spectateur de se représenter visuellement l’ancien roi, caricaturé par sa barbe bouclée et son petit doigt levé. Ainsi, les ressources de la parole théâtrale sont mises ici au service d’un déchaînement violent de colère. II. A) Commentaire du texte de Corneille, Médée Médée est la première tragédie de Corneille, dramaturge de l’époque classique. Jouée pour la première fois en 1635, elle retrace la fin de l’histoire d’amour entre Médée et Jason. Médée, répudiée par Jason, ivre de colère et de jalousie, empoisonne sa nouvelle femme Créuse et tue ses propres enfants. L’extrait étudié est la scène 5 de l’acte V, scène de dénouement de la pièce. Médée apparaît au balcon, éprise de vengeance, et laisse éclater sa victoire devant un Jason impuissant. Nous allons nous demander comment ce dénouement tragique permet à Corneille de faire de Médée l’incarnation de la vengeance. Nous étudierons d’abord la violence qui caractérise l’affrontement entre les deux amants, avant d’étudier la façon dont la vengeance est représentée dans cette scène. Le dénouement de cette tragédie est particulièrement spectaculaire et violent. Tout d’abord, le dénouement est tragique, dans la mesure où la mort est présente sur scène pour terminer la pièce. Médée a mis ses projets infanticides à l’œuvre. Elle annonce à Jason la mort de leurs enfants de façon imagée dès la première tirade « Ce poignard que tu vois vient de chasser leurs âmes/ Et noyer dans leur sang les restes de nos flammes ». Elle avoue donc avoir tué ses enfants. Le champ lexical du meurtre est présent pour souligner le registre 1 Loi du Talion « Œil pour œil, dent pour dent ». tragique avec les mots « poignard » « sang » et « chasser leurs âmes ». L’amour est évoqué au passé aussi comme le soulignent les deux images des « feux » et des « flammes », les enfants ayant disparu, l’amour aussi. La vengeance a été réalisée car Médée ne reverra ainsi plus Jason dans ses enfants. En effet, le futur et les deux pronoms personnels « moi » et « toi » associés à la négation « ne plus » indiquent clairement la fin de leur histoire. Ils « ne feront plus pour moi/ De reproches secrets à ton manque de foi ». Ils ne pourront plus rappeler à Médée, par leur ressemblance physique, la trahison de Jason. La scène permet enfin la catharsis, conformément au but d’une tragédie : ici, le public ressent de la crainte vis-à-vis du personnage de Médée ainsi que de la pitié pour ses enfants et pour Jason. Ensuite, le dénouement est aussi particulièrement spectaculaire. On peut le constater dès la première réplique de Médée. En effet, elle emploie à plusieurs reprises des termes du champ lexical de la vue : « lève les yeux » « reconnais ce bras » « tu vois ». Il s’agit d’exhiber la vérité aux yeux de Jason, de lui montrer ce qu’elle a fait. Ainsi, Médée correspond bien au sens étymologique du mot « monstre » qui veut dire « montrer » en latin. Médée se dévoile et dévoile son crime. Corneille choisit une mise en scène spectaculaire, comme l’indique la didascalie : « en l’air dans un char tiré par deux dragons ». Cette mise en scène à la mode à l’époque correspond au théâtre à machines. Le dénouement choisi par Corneille s’appuie sur ces techniques pour mettre en valeur la victoire finale de Médée. Ce dénouement particulièrement impressionnant permet à Corneille de clore sa pièce. Mais l’aspect tragique de cet extrait est renforcé par la violence des propos échangés entre les deux personnages. L’ultime confrontation des amants laisse éclater une violence hors norme. Dans un premier temps, les deux personnages laissent éclater leur haine. Les deux anciens amants emploient, pour se désigner l’un l’autre des apostrophes violentes. En effet, Médée qualifie Jason de « parjure », de « perfide » et de « lâche », les mots sont mis en valeur en tête de vers, de phrase et de tirade. Jason, quant à lui, lance une réplique cinglante, sous forme de phrase averbale, simplement construite sur deux jurons juxtaposés, dans lesquels sa rage explose « Horreur de la nature, exécrable tigresse ! ». Le premier groupe de mots rapproche Médée du monstre, de l’être surnaturel et infâme. Le second procède par métaphore : la tigresse est choisie pour qualifier la cruauté de Médée. L’adjectif insiste sur le mépris et le dégoût ressentis par Jason. Il se débat comme tout héros tragique. On peut repérer au fil de ses tirades, une tentative de révolte, une montée de la tension. Après avoir insulté Médée, il s’indigne et reprend courage : l’exclamation « quoi ! », le verbe « oser », l’interrogative montrent qu’il se dresse contre le pouvoir écrasant de Médée, « le bras », sur un ton frondeur : « ta brutalité pense encore échapper à mon bras irrité ». Il désire se venger en évoquant une « peine » pour son ancienne compagne. Il reprend cette idée dans sa dernière réplique grâce aux termes « supplice » « punisse » « répondra »- au sens de rendre justice- Jason est animé par cet esprit de vengeance et se montre digne d’un héros épique, comme l’attestent les expressions « ah ! uploads/Litterature/ i-question-de-corpus-bac-blanc-2017-corrige 1 .pdf

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