BUl.Li'lTlN DK LA r w SOCIETE LIEGEOISE DE LITTÉRATURE WALLONNE TOME XLI. - Fas
BUl.Li'lTlN DK LA r w SOCIETE LIEGEOISE DE LITTÉRATURE WALLONNE TOME XLI. - Fasc. ï. - '^ -^ '^ iloi s LIÈGE IMPRIMERIE H. VAILLANT-CARM ANNE 8, Rue St-AtlalLert, 8. 1900 'W ' ^'^^f^Sijy oF ^^!5 SOCIÉTÉ LIÉGEOISE DE LITTÉRATURE WALLONNE. RAPPORT SUR LE 8^ CONCOURS DE 1899. (PROJET PRATIQUE D'ORTHOGRAPHE WALLONNE). Messieurs, Ainsi qu'elle l'avait fait en 1890 pour la gram- maire wallonne, la Société s'est d(écidée à mettre au concours la question si épineuse et déjà tant discutée de l'orthographe qui conviendrait le mieux à notre langue populaire. En quoi elle a été bien inspirée, car un des deux mémoires que son initiative a provo- qués nous a paru mériter la plus haute distinction (médaille d'or et deux cents francs). L'autre, ayant pour devise : « Jâsans comme nosse père et scriyans comme nos fis ^), est de beaucoup inférieur. Outrt^ que le style y manque trop souvent de clarté, il laisse à désirer pour le fond sous plu- sieurs rapports. L'auteur fait fi, s'il ne les ignore, des règles élémentaires de la philologie, ainsi quand il parle des nasales ou des prétendues déclinaisons wallonnes. Certains chapitres sont écourtés : la conjugaison est expédiée en une demi-page, et l'on nous renvoie tout simplement au tableau qui en a été publié naguère par la Société. Dans certains — VI — endroits, railleur paraît avoir manqué de rûtlexion ou connaître insullisaninient le wallon, ainsi quand il traduit h(wée\)i\r coteau et randahe p'dr hurluberlu. Enlin et surtout son système manque de précision; il est inapplicable, et ses exemples de la lin four- millent de contradictions. Voici quelques échantil- lons pris au hasard : P. 17. Consonne /; il est dit : « Valeur et emploi de 17 français. De plus, comme il a été dit, chaque fois qu'elle est articulée phonétiquement, nous écrirons : drolie (dr(Me) «. U faudra donc écrire coll ou colle = coi. Même page: « p. Valeur et usage du p français. Exemple : cèppe (piège) ». Pourquoi eèppe = cep ? P. 14. C'est une erreur de croire que ch n'est pas usité dans l'écriture du wallon liégeois. Exemples : caniche, lâcher, lâche, chaque, cha- braque, etc. P. 2"2. Pourquoi es = dans ? D'ailleurs, dans ses exemples, l'auteur n'applique pas son orthographe correctement. Il énonce en commençant la règle que « tout signe n'a qu'une valeur en wallon », mais il cite un nombre considérable d'infractions à ce principe. Il est vrai qu'il ajoute naïvement « qu'il faudra donc bien ne l'observer que d'une façon relative ». Franchement, en fait d'orthographe, on a le droit d'être plus exigeant, car (suivant l'heureuse expression de notre grammairien lui-même) « ce n'est peut-être pas une mince affaire » ! VII Le jury estime que ce mémoire ne mérite aucune distinction. Le n" 2 (devise : Liberté réglée) est un travail d'une tout autre valeur; c'est l'œuvre d'un auteur autre- ment consciencieux et infiniment mieux en posses- sion de sa matière. Trop modestement il se qualifie de « simple quidam, unus e multis ». D'abord sa forme est toujours claire, précise et alerte; il rencontre sans effort l'image pittoresque, l'expression à l'emporte-pièce, et ses exposés sévères sont parfois relevés par le piquant d'une plaisanterie sans méchanceté ou d'une ironie exempte d'amer- tume. Partout il se révèle dialecticien délié : sa dis- cussion est toujours serrée et sa réfutation adéquate. Grâce à ces qualités d'exécution, l'œuvre se lit d'un bout à l'autre sans fatigue, et jamais l'intérêt ne faiblit. La méthode aussi mérite tous nos éloges. L'auteur s'est gardé de faire table rase de tout, comme bon nombre de ses devanciers, et d'imaginer m abstracto des règles et des lois absolues. Il croit qu'il faut « consulter la tradition, la jugeât-on mauvaise ') et « partir des théories émises et des tendances mille fois manifestées ». 11 ne s'efforcera donc pas d'être original, car il pense avec raison qu'en fait d'ortho- graphe le système le plus pratique sera celui qui présentera le moins de singularités. II n'a point la prétention d'anéantir tous les systèmes orthogra- phiques proposés par ses aines : « les discuter, les comparer, extraire de tous ensemble plus de VIII — véritn (pi'il n'y en a dans clianin », de tout cela « essuyer de composer mie œuvre de conciliation, capable de satisfaire à la fois les auteurs et le public, de faire face à tous les besoins comme à tous les désirs légitimes, également éloignée des solutions extrêmes, amie de l'unité en même temps que de la liberté », telle a été sa tûclie. Cette entrée en matière nous indique immédiate- ment comment il entend procéder. « Avant de se hasarder soi-même, écrit-il, il sera bon de discuter les théories émises, de les analyser parcelle par parcelle, d'en mettre à nu les contradictions et les faiblesses pour les écarter, d'en faire saillir les parties saines et fortes pour les conserver ». Ce pro- gramme n'annonce ni un révolutionnaire, ni un novateur, mais un réformateur raisonnable, qui tiendra compte des nécessités du présent sans oublier les droits du passé. L'auteur veut procéder uniquement par induction: c'est par l'examen critique des projets et des procédés existants qu'il espère aboutir à un système plausible. Il n'est pas de ceux qui voudraient imposer une réforme radicale, parce qu'il admet l'existence de traditions orthographiques en wallon : c'est l'unité qui ne règne pas, mais sous la variété actuelle il y a des tendances communes. C'est ce qu'il s'agit d'étudier d'abord. Rien de plus juste que ces vues, rien de plus légi- time que pareille méthode d'investigation. Avant de proposer un système nouveau, il faut — IX montrer l'insuifisance des autres. Prenant comme point de départ une courte nomenclature dressée par M. Delaite dans son Projet d^ortografe walone, l'auteur passe donc en revue les auteurs, lexico- graphes et théoriciens qui, depuis les naïfs essais de représentation phonique de Cambresier (1787) jus- qu'aux projets plutôt analogiques de nos contempo- rains, ont essayé de tixer l'orthographe de notre dialecte. Or les systèmes furent nombreux et divers : les uns préconisent le phonétisme pur, les autres tiennent pour l'analogisme absolu, d'autres les com- binent à doses inégales. Chaque théorie, chaque tentative nouvelle est examinée à son tour logique ou chronologique, dans chacune de ses parties (tinales ele muet, consonnes, voyelles, morphologie), et cela avec une minutie, une patience et une finesse qui ne se démentent pas un instant au cours des vingt systèmes ainsi passés au crible. J'ajouterai que le critique se calomnie quand il s'accuse d'avoir « combattu avec âpreté les théories d'autrui » et demande pa'rdon à ses devanciers de ses « vivacités d'expression » : il s'exprime toujours avec mesure et courtoisie; il a le secret d'être sévère sans âpreté; il sait résister à la tentation de triompher trop faci- lement des maladresses et de l'inexpérience de quel- ques-uns de ses devanciers. De chaque système, absolu ou mixte, il signale les points faibles, les contradictions, les illogismes et en fait ressortir les innovations heureuses, la partie solide et viable, celle qu'il entend conserver. — X En cllel, ail fur et à mesure qu'il avance dans son exameti critique, (|ii'il di''l)laie de ses scories le domaine de notre orlhotiraplie, ses préférences s'accusent; son système se dessine et se précise. Quel sera-t-il donc ? Ce ne sera pas le phonélisnie pur : il ne faut pas renionler le cours des choses en orthographe ; or les Wallons sont habitués à la graphie française; la ten- dance générale des auteurs est bien orientée vers l'analogie du français; leurs mots ont acquis par un siècle de littérature une physionomie traditionnelle et devenue faixiilière à leurs yeux : il faut la respecter et composer avec l'orthographe française, mais autant que de raison. Ce ne sera donc pas non plus la pure analogie, car l'écriture doit reproduire exactement la pronon- ciation ; « il ne faut pas que le respect de l'analogie s'achète au prix de l'ambiguïté »; la lettre est un sym- bole du son : à tous les points de vue, les éléments différentiels doivent être figurés dans l'écriture, au moins par un minimum de notation diff'érentielle ; « à différence phonétique, différence orthogra- phique ». D'axiome en axiome (et tout le travail est ainsi jalonné d'aphorismes dont l'évidence frappera tout lecteur non-prévenu), de démonstration en démons- tration, « après avoir épluché tout le monde, après avoir critiqué les solutions, relevé les contradictions, etc. », l'auteur doit à son tour « dégainer un sys- tème ». Et celui-ci sera composé de toutes les — XI — remarques qu'il a éparpillées dans son long et copieux exposé historique, remarques « coordonnées et nettoyées de leurs possibles contradictions «. C'est donc un système mixte, comme le sont d'ailleurs plus ou moins, qu'ils le veuillent ou non, tous les autres. Préoccupé d'obtenir une adéquation aussi complète que possible du langage et de l'écriture, et le phonétisme pur étant impossible dans la pratique, l'auteur combat pourtant le fétichisme de l'ortho- graphe française, l'esprit de conservation à outrance, repousse les excès uploads/Litterature/ jules-feller-essai-d-x27-orthographe-wallonne-1900.pdf
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- Publié le Oct 29, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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