1 Résumé Cité des Muguets, Chante- loup-les-Vignes, banlieue de Paris. Victime

1 Résumé Cité des Muguets, Chante- loup-les-Vignes, banlieue de Paris. Victime d’une bavure poli- cière, Abdel est grièvement bles- sé et reste entre la vie et la mort. Des émeutes éclatent dans la cité. Le lendemain, nous suivons trois de ses amis, un vrai trio black-blanc-beur. Vinz, le juif à fleur de peau (Vincent Cassel) a récupéré l’arme d’un policier et veut se venger si son copain meurt. Hubert, un noir plutôt débonnaire (Hubert Koundé) préfère éviter l’affrontement avec la police et cherche à calmer Vinz. Enfin, Saïd, un Magrébin plein de tchatche (Saïd Tagh- maoui), joue plutôt les média- teurs. Le spectateur va suivre le trio de 10 heures du matin au len- demain à l’aube. On les accom- pagne d’abord dans un gymnase détruit par les émeutiers, puis sur le toit d’un immeuble, avant d’être évacués par la police. A l’hôpital, ils veulent rencontrer Abdel, mais là aussi, la police les empêche de passer. Les trois amis se dirigent ensuite vers Paris pour récupérer de l’argent d’un dealer déjanté, surnommé Astérix. Encore une fois, les choses dérapent et Saïd et Hubert se retouvent au commissariat, puis molestés par deux policiers odieux, sous l’œil d’un petit nouveau effrayé, mais passif. Le schéma est alors bien en place : les policiers traquent les jeunes des banlieues et ceux-ci haïssent les « keufs ». La tension augmente sans cesse. Et à chaque épisode, pour reprendre la fameuse formule d’Hubert - « C’est l’histoire d’un homme qui tombe d’un immeuble de cinquante étages… » - , c’est l’atterrissage qui se rapproche. Encore un détour par un match de boxe thaï, le vernis- sage d’une galerie d’art et une baston avec un groupe de skin- heads et ce sera le retour vers la cité… ___________________________________________________ Film long métrage de fiction, France, 1995 Réalisation : Mathieu Kassovitz Scénario : Mathieu Kassovitz Interprètes : Vincent Cassel (Vinz) Hubert Koundé (Hubert) Saïd Taghmaoui (Saïd) Karim Belkhadra (Samir) Benoît Magimel (Benoît) Vincent Lindon (l’homme seul) Production : Lazennec Productions, La Sept Cinéma, StudioCanal et Kasso inc. Productions Edition DVD : Studio Canal Durée : 1 heure 35 Récompenses : Prix de la mise en scène (Cannes 1995) César du meilleur film (1996) Public concerné : âge légal : 16 ans âge suggéré : 16 ans (http://www.filmages.ch) Fiche pédagogique La Haine Projections scolaires à la Cinémathèque suisse du 19 au 23 mars 2012 2 Commentaires Contexte Après la Seconde Guerre mondiale, la croissance démo- graphique et l’essor économique vont entraîner en France un énorme besoin de logements, encore accentué par l’arrivée de nombreux immigrés. L’Etat dé- cide donc de favoriser la cons- truction de cités à loyer modéré, en périphérie des grandes villes. Caractérisées par une architec- ture qui fait la part belle à des immeubles sans âme, ces ban- lieues vont très vite faire fuir les classes moyennes et grouper les plus défavorisées, issues le plus souvent de l’immigration. La cité (ou « téci » dans le film) devient le symbole de la pauvreté et de l’exclusion so- ciale. Le climat est alors propice à la violence et dès les années 70, émeutes et interventions policières ponctuées de bavures vont marquer le quotidien des habitants des grands ensembles, d’autant plus que le gouverne- ment de droite met en place une politique répressive qui va favori- ser les tensions. La mort de Malik Oussekine en 1986, frappé par des policiers lors d’une manifestation, puis celle en 1993 de Makomé M’Bowolé, tué d’une balle dans la tête dans un commissariat, amènent la tension à son pa- roxysme. Le film Mathieu Kassovitz (photo ci- contre), jeune réalisateur (28 ans en 1995) encore inconnu à l’époque, décide alors de « faire un film qui rentre dans le lard » pour montrer comment le cercle vicieux de la haine s’est mis en place. Même si ce n’est pas le premier film sur les banlieues, La Haine frappe d’emblée les es- prits par son approche sociale très critique, peu habituelle dans le cinéma français. Comme « le mec qui tombe d’un immeuble de 50 étages », la société va dans le mur, semble nous dire le réali- sateur. Le film est aussi un réquisi- toire contre la police et Kassovitz ne s’en cache pas : "La Haine est un film contre les flics et je voulais qu'il soit compris comme tel." Lorsque le film est présenté au Festival de Cannes en 1995, la police qui en assurait la sécuri- té tourne d’ailleurs le dos aux acteurs et à l’équipe du film, au moment de la montée des marches. La Haine atteint très vite les 2 millions d’entrées en France, marche très bien en Belgique, en Suisse et devient un vrai phéno- mène de société. Il est vendu partout dans le monde. Kassovitz apparaît dans les Guignols de l’info et provoque des bouscu- lades d’enthousiasme à chaque apparition publique. Les ré- pliques du film sont utilisées dans le langage courant. Le film devient très rapidement culte pour toute une génération. Mais La Haine n’est pas cen- tré uniquement sur les violences policières. Le quotidien des jeunes de banlieue est égale- Disciplines et thèmes concernés Géographie : la ville ; l’espace urbain ; les banlieues ; la ségrégation spatiale ; Paris. Histoire : la création des HLM ; la poli- tique sécuritaire du gouver- nement français à la fin des années 80. Education aux citoyennetés : les minorités ; le racisme ; les violences policières. Education aux médias : le film en noir et blanc ; le flashback ; les astuces de mise en scène ; les films sur les banlieues (L’Esquive, Tout ce qui brille...) Français : l’argot des banlieues ; le ver- lan ; l’improvisation. Musique : le reggae et Bob Marley ; le rap (NTM, Assassin…). 3 ment un élément important. Il semble tourner autour de petits trafics et surtout de l’inactivité et de l’ennui. « L’avenir, c’est vous » propose une affiche pu- blicitaire entrevue dans le film, clin d’œil bien sûr ironique face au futur bien sombre, sans pers- pectives des jeunes de la cité. Notons également que lorsqu’il sort de la banlieue pour aller au centre de Paris, le trio se re- trouve encore davantage en difficultés et la cité apparaît alors en creux comme une sorte d’espace protecteur. On regrettera cependant que Kassovitz reste parfois à la sur- face des problèmes, à la limite des stéréotypes. Le film n’analyse pas les causes pro- fondes et multiples du malaise des banlieues. Il en reste au constat. Le film est encore intéressant par son approche de la culture des banlieues, désormais omni- présente dans notre univers mé- diatique. Le recours au hip-hop et au rap, musique de révolte pour des jeunes marginalisés, est ainsi habituel. De même, les personnages parlent le langage des banlieues, dont l’utilisation e désormais largement débordé les quartiers des cités. Le choix de tourner le film en couleurs, mais de le présenter en noir et blanc n’est évidemment pas anodin. L’ambiance désolée des banlieues apparaît plus net- tement encore (même si la Cité des Muguets n’est pas la plus glauque) et le film gagne en qua- lité esthétique. Kassovitz a avoué qu’il lui était plus facile d’apporter une plus-value en noir et blanc plutôt que de mettre sur pied des effets de lumières ou de décors en couleurs. L’univers visuel des banlieues est parfai- tement rendu, des esplanades bétonnées aux salles de sports dévastées en passant par les places de jeux abandonnées. La Haine est surtout une re- marquable leçon de cinéma, d’autant plus méritoire que Kas- sovitz ne disposait que d’un bud- get limité. Il a ainsi multiplié les trouvailles visuelles ou de mise en scène. La gestion du rythme du récit est particulièrement ori- ginale. L’action se déroule sur un peu moins de 24 heures, juste scandée par une horloge qui revient sans cesse et marque une tension toujours plus grande, jusqu’à la scène finale. Le film peut donc être perçu comme un long flash-back depuis le plan initial sur le visage de Saïd, au moment d’une détonation, juste après le générique. Kassovitz s’est montré parti- culièrement créatif dans le ca- drage, les mouvements de ca- méra ou l’éclairage. C’est un véritable « cinéma à effets ». On notera par exemple l’utilisation d’un travelling compensé (ou 4 dolly zoom, procédé « inventé » par Hitchcock dans Vertigo et repris par Spielberg dans Les Dents de la Mer) pour illustrer le malaise du trio arrivant en ville de Paris. Notons aussi que de nombreuses scènes ont été tournées en longs plans sé- quence (par exemple à 12’23) qui permettent souvent aux ac- teurs d’improviser (scène de la coupe de cheveux par exemple), mais qui soulignent parallèle- ment l’ennui qui règne dans les banlieues. Au niveau de la bande-son, Kassovitz a su surprendre en travaillant avec des groupes de rap provocateurs, comme NTM. Autre originalité : la partie tour- née en ville a été enregistrée en son mono, comme pour souli- gner davantage l’inadéquation des trois copains dans les quar- tiers chics de la capitale. Les uploads/Litterature/ la-haine-def.pdf

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