LA LETTRE ENTRE REEL ET FICTION SOUS LA DIRECTION DE JÜRGEN SIESS TEXTES DE Jea
LA LETTRE ENTRE REEL ET FICTION SOUS LA DIRECTION DE JÜRGEN SIESS TEXTES DE Jean-Michel ADAM, Ruth AMOSSY, Michèle BOKOBZA KAHAN, Violaine GÉRAUD, Jan HERMAN, Catherine KERBRAT-ORECCHIONI, Dominique MAINGUENEAU, Georges-Elia SARFATI, jürgen SIESS, Françoise VOISIN-ATLANI SEDES QUESTIONS DE LITTERATURE à paraître Pour un humanisme romanesque, ouvrage coordonné par Gilles Philippe et Agnès Spiquel. Ouvrages sous la direction de Gabriel Conesa Albert Cohen, au nom du père et de la mère, par Véronique Duprey. Racine et notre temps, par Jean Emelina. déjà paru Ouvrages sous la direction de Gabriel Conesa La poétique de Mallarmé, la fabrique des Iridées, par Danièle Wieckowski. Faits de langue et sens des textes, ouvrage sous la direction de Franck Neveu. Ainsi que le présent ouvrage. La loi du 11 mars 1957 n'autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'Article 41, d'une part, que les «copies ou reproductions stric- tement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective» et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans le but d'exemple et d'illustration, «toute représentation ou reproduction intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite» (alinéa 1 de l'Article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les Articles 425 et suivants du Code pénal. @ 1998, E d i t i o n s S E D E S ISBN 2-7181-9526-6 Jürgen Siess I n t r o d u c t i o n L'exploration d'un roman épistolaire polyphonique aussi complexe que Les Liaisons dangereuses semble favoriser la rencontre entre spé- cialistes du texte littéraire et linguistes. Les études littéraires ont depuis longtemps constitué le roman par lettres en objet d'étude privilégié : elles en ont élaboré une histoire et une poétique en même temps qu'elles offraient des lectures d'œuvres particulières. Parallèlement, un intérêt croissant pour les correspondances d'auteurs a redonné son importance à la lettre réelle dans ses dimensions les plus diverses. Si on a étudié la lettre à l'écrivain ou la formation littéraire dans la corres- pondance, on s'est aussi penché sur «l'épistolarité à travers les siècles» et sur les correspondances privées d'inconnus La profusion des maté- riaux historiques, la richesse des analyses ponctuelles, font plus que jamais sentir la nécessité de trouver des principes d'organisation et de conceptualiser cet objet mouvant et protéiforme qu'est la correspon- dance. D'où le besoin d'une «théorie de la lettre », ou tout au moins de modèles et de concepts opératoires. Ces modèles, c'est la linguistique qui peut aujourd'hui les fournir dans la mesure où elle s'attache à l'analyse du discours conçu comme langage en acte et en situation. Se vouant à l'étude des formes dialo- gales et des modes d'échanges verbaux, les sciences du langage éclai- rent en effet l'interlocution et l'interaction des partenaires. A travers l'analyse de l'énonciation et des relations entre locuteur et allocutaire, elles tentent de dégager les lois propres à la dynamique qui sous-tend divers genres de discours. Désormais l'épistolaire envisagé comme une forme discursive, un mode d'échange soumis à des normes langagières et culturelles, peut se donner comme objet d'investigation linguistique. 1. José-Luis Diaz (éd.), Ecrire à l'Ecrivain, Textuel, n° 24, 1994; Brigitte Diaz et Jürgen Siess (éds.), Correspondance et formation littéraire, Elseneur, n° 13; Mireille Bossis et Charles A. Porter (éds), L'Epistolarité à travers les siècles. Geste de communication et/ou d'écriture (Colloque de Cerisy), Stuttgart, Steiner, 1990; Marie-Claire Grassi, L'Art de la lettre au temps de La Nouvelle Héloïse et du romantisme, Genève, Slatkine, 1994; Roger Chartier, « Des secrétaires pour le peuple ? Les modèles épistolaires de l'Ancien Régime entre littérature de cour et livre de colportage », dans R. Chartier (éd.), La Correspondance. Les usages de la lettre au XIX siècle, Paris, Fayard, 1991. Une première réflexion globale sur la lettre comme «objet sémio- tique composite » a été proposée dans La Lettre, approches sémiotiques publiée en 1988 sous la direction de A. J. Greimas La correspondance y est considérée à la fois comme « l'un des possibles de la structure de l'échange généralisé» et comme «un phénomène culturel, circonscrit et variable dans le temps et l'espace sociaux ». Les éléments de pragma- tique déjà développés dans certaines contributions de ce volume ont depuis été élaborés par des travaux portant sur les correspondances de Rousseau et de Diderot ou encore sur les lettres fictionnelles chez Madeleine de Scudéry et chez Crébillon La fécondité de ces diverses études, mais aussi les avancées récentes de la linguistique, appellent aujourd'hui à tenter une nouvelle synthèse des recherches d'inspiration linguistique sur la lettre, du réel au fictionnel. On peut en effet se demander dans quelle mesure les récentes études de l'interlocution et de l'interaction fournissent de nouveaux modèles d'analyse pour l'épistolaire. C'est ce que le présent ouvrage tente d'exa- miner en deux temps. Une première partie met en place les éléments d'une théorie de la lettre à dominante pragmatique. Un second volet éprouve ces modèles d'analyse sur un corpus du XVIII siècle, au centre duquel figurent Les Liaisons dangereuses. Les considérations théo- riques s'appuient toujours sur des exemples précis (que ce soient les lettres de Truffaut ou les correspondances du XVII siècle) et s'élabo- rent à travers l'étude des textes (des lettres de Mme du Châtelet à Aurélia Steiner de Marguerite Duras). Les analyses concrètes de la seconde partie n'offrent pas une simple application de notions théo- riques préexistantes : elles les développent à la lumière des données puisées dans les lettres réelles du XVIII siècle et le roman épistolaire de Laclos. Un mouvement de va-et-vient s'établit ainsi entre le travail de théorisation et l'étude concrète des corpus. Les notions d'interaction, de genre de discours et de scène, d'énon- ciation et de séquence sont au centre de ces réflexions Les perspectives 1. Aljirdas J. Greimas/Jean-Blaise Grize et al., La Lettre, approches sémiotiques, Actes du VI Colloque interdisciplinaire, Fribourg, Editions Universitaires (la citation p. 5), 1998. 2. Patrizia Violi, «Présence et absence. Stratégies d'énonciation dans la lettre»; Jacques Geninasca, «Notes sur la communication épistolaire», in Greimas, Grize, 1988, p. 27-35 et p. 45-54. 3. Anna Jaubert, La correspondance entre Henriette*** et J. J. Rousseau. La subjectivité dans le discours, Paris-Genève, Champion-Slatkine, 1987 ; Benoît Melançon, Diderot épistolier. Contribution à une poétique de la lettre au XVIII siècle, Boucherville, Québec, FIDES, 1996; Delphine Denis, La Muse galante, Paris, Champion, 1997 ; Violaine Géraud, La Lettre et l'esprit de Crébillon fils, Paris, SEDES, 1995; Bernard Bray, «Treize propos sur la lettre d'amour», dans l'excellent numéro de Textuel consacré à la lettre d'amour, dirigé par José-Luis Diaz, 1992 ; Beugnot, Bernard, « Les voix de l'autre. Typologie et historiographie épistolaires », dans B. Bray et C. Strosetki (éds), Art de la lettre, art de la conversation à l'époque classique en France, Paris, Klincksieck, 1995, p. 47-59. 4. Voir D. Maingueneau, Les Termes clé de l'analyse du discours, Paris, Seuil (coll. Mémo), 1996; G. E. Sarfati, Eléments d'analyse du discours, Paris, Nathan (coll. «128»), 1995. ouvertes par l'analyse conversationnelle permettent une etude contras- tive de la conversation et de l'échange épistolaire. Catherine Kerbrat- Orecchioni montre que la correspondance ne saurait être conçue comme le reflet ou le prolongement d'une communication orale et face à face. Elle constitue une interaction distincte qui, passant par un canal écrit, se différencie par son caractère prémédité, la situation non parta- gée des participants et la nature simulée des interventions de l'autre. C. Kerbrat-Orecchioni étudie dans cette optique les séquences forte- ment ritualisées d'ouverture et de clôture dans leur rapport à celles de la conversation. La notion de « tours de parole » est relayée par celle de «tour d'écriture» (de la demande à la réponse) empruntée à T. de Rycker 1 pour qui une correspondance est une suite de paires de lettres. La lettre est ainsi comprise comme un échange dans le sens où elle per- met une alternance entre deux scripteurs. Notons que dans cette optique, il n'y a interaction que s'il y a intervention de deux correspon- dants : dans la lettre isolée, l'énonciation reste «monologale» (D. Maingueneau). D'autres conceptions de l'épistolaire conçoivent néan- moins l'« interaction » comme l'influence mutuelle qu'exercent l'un sur l'autre le locuteur et l'allocutaire à l'intérieur même du discours épis- tolaire, indépendamment de la réponse du correspondant. Dans la perspective de la pragmatique textuelle Jean-Michel Adam propose un modèle de l'organisation interne du texte épistolaire, en le situant par rapport au modèle de composition prescrit par la rhétorique ancienne. Traités et manuels réservaient une place importante à la « dis- positio », aux règles de la composition d'une lettre. Si J.-M. Adam pro- pose un découpage en cinq séquences (ouverture, séquences transac- tionnelles, clôture) qui fait écho à la disposition en cinq parties prônée par la rhétorique, il conçoit cependant ces séquences comme de véri- tables unités interactionnelles. Dans cette optique la séquence transac- tionnelle conclusive (la «péroraison») a pour fonction d'« achever de convaincre [...] en préparant les futures interactions avec le destinataire ». Adam uploads/Litterature/ la-lettre-entre-reel-et-fiction.pdf
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- Publié le Jui 21, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
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