La Main du Percussionniste Pathologies et Percussions DIPLOME INTER-UNIVERSITAI
La Main du Percussionniste Pathologies et Percussions DIPLOME INTER-UNIVERSITAIRE DE REEDUCATION ET D’APPAREILLAGE EN CHIRURGIE DE LA MAIN Responsable universitaire : Professeur François MOUTET Faculté de médecine de l’université Joseph FOURIER C.H.U de Grenoble, 38043 Grenoble cedex En association avec les facultés de médecine des universités de BORDEAUX, MARSEILLE-TOULON, MONTPELLIER, PARIS Benjamin Ravera 2 La pratique instrumentale professionnelle requiert des temps de jeu importants, dans un contexte social et psychologique parfois difficile malgré la dimension artistique et créative de cette activité. Dans ces conditions, le corps des musiciens est soumis à des sollicitations trop importantes qui amèneront à moyen et long terme différentes pathologies. Au cours des vingt dernières années, de nombreuses études ont été menées afin d’identifier ces atteintes et de connaître leur taux de prévalence en fonction des instruments pratiqués. La plupart de ces enquêtes épidémiologiques concernent les musiciens pratiquant au sein d’un orchestre symphonique, ou utilisant les instruments les plus courants tel que le piano ou la guitare. Issues d’un courant musical plus restreint, les percussions à mains nues n’ont été que rarement abordées dans la littérature spécialisée. Regroupées dans la « world music », il n’est pas rare d’entendre ce genre d’instrument dans des orchestrations type jazz, rock ou variété. Bénéficiant aujourd’hui d’un éclairage médiatique plus important, le nombre de pratiquants ne cesse de croître. Loin du cliché des tam-tams et du « bruit » qu’on pouvait leur prêter à une certaine époque, les percussions à mains nues offrent une diversité incroyable dans leurs sonorités et exigent toutes des musiciens, de nombreuses années d’apprentissage. Leurs modalités d’utilisation peuvent être très différentes mais restent néanmoins regroupées sous le principe commun d’un geste percussif réalisé directement par la main, avec un travail de dissociation digital variable en fonction de l’instrument. Dans cette étude, nous tacherons d’établir précisément quel est l’impact des percussions sur la main de ces musiciens et nous évaluerons également les différentes atteintes au niveau du membre supérieur afin de voir si des profils pathologiques se dégagent en fonction du type de percussions pratiquées. Nous avons choisi de nous concentrer sur quatre instruments qui nous semblent connaître un engouement important ces dernières années : le djembé, les congas, la darbouka et les tablas. Le djembé est une percussion africaine qui demande une frappe puissante sur l’ensemble des surfaces palmaires de la main. Le travail de dissociation des doigts y est très faible. La conga est un instrument cubain, regroupé souvent en un ensemble de deux à cinq tambours. La violence des chocs de la main sur les membranes est à rapprocher de celle du djembé, avec un travail du poignet plus important. Les frappes en claqués existent également dans la darbouka orientale, mais dans une intensité moindre et au sein d’un ensemble de techniques digitales très variées et demandant une dextérité importante. Les tablas sont parmi les percussions les plus insolites. Provenant d’Inde, elles demandent un apprentissage infiniment long pour arriver à maîtriser l’ensemble de leurs univers sonore. Les percussions se 3 font au niveau des pulpes des doigts, en tapant énergiquement des zones très précises des peaux de l’instrument. Le niveau de dextérité requis est très élevé. A travers un questionnaire de santé envoyé à de nombreux percussionnistes professionnels issus des différents courants culturels précités, nous essaierons d’établir les pathologies inhérentes à la pratique de ces instruments. Le but étant de pouvoir proposer dans l’avenir des solutions aux musiciens, que ce soit dans la rééducation ou dans la prévention de ces affections. 4 I. Présentation des percussions étudiées A. Instruments à frappe digito-palmaire sans dissociation des doigts 1) Le djembé Le djembé est un membranophone d’origine Maldingue (Guinée, Mali, Sénégal) que l’on retrouve également chez de nombreux groupes ethniques voisins (côte d’ivoire, Burkina- faso…). Introduit en Europe dans les années 1950, par le biais de célèbres djembéfolas (Fodeba Keïta, Amadou Kienou, François Dembélé, Amada Dramé…) il connaît alors un engouement croissant dans les pays occidentaux [Fampou, 1986]. a) Description Tambour de 45 à 65 cm de haut taillé en forme de calice dans une seule pièce de bois, il est généralement monté d’une peau de chèvre rasée (plus rarement d’antilope ou de veau). Cette peau est tendue par un système de cordes tressées et tirées entre deux anneaux métalliques : l’un fixé au bord supérieur de l’instrument et l’autre à la partie médiane du calice. Afin de mieux comprendre le mode de survenue de certaines pathologies qui seront décrites ultérieurement, il est important de souligner deux points concernant la peau de l’instrument : - certains joueurs montent sur leur djembé une peau de veau qui leur fournit un son plus fort. Cette membrane, plus dure et plus épaisse, engendre des troubles cutanés et des traumatismes plus importants et plus fréquents. - issu de l’artisanat, il arrive que certaines peaux soient mal rasées ou présentent une couronne de poils décorative à la circonférence de l’instrument. Le joueur s’expose alors à un 5 risque infectieux non négligeable soit par passage de germes au travers de plaies cutanées déjà présentes, soit parce que le poil (très dur) vient se ficher dans le derme à la manière d’une écharde inoculant ainsi l’agent pathogène. b) Positions de jeu Position de jeu assis : C’est le positionnement du djembé entre les genoux du musicien qui va déterminer la posture de ce dernier. Le fait que ce volumineux instrument soit coincé entre les membres inférieurs du joueur interdit à celui-ci de se caler au fond du siège, et d’y faire reposer les faces postérieures de ses cuisses. Le jeu se fera donc assis sur l’avant du siège, les ischions reposant seuls sur celui-ci. De ce fait, ils pourront basculer de l’avant vers l’arrière ou même latéralement, au gré des besoins du musicien. A partir de cette observation, deux cas de figure se présentent : - Dans le premier, le djembé est installé presque verticalement entre les faces internes des cuisses et des genoux du joueur. Il se retrouve ainsi proche de l’axe du corps, la position érigée du bassin du musicien est facilitée, les épaules sont droites et la tête n’est pas projetée en avant. Néanmoins, le djembéfola devra légèrement casser ses poignets pour frapper la peau (Figure 1) - Dans le deuxième, le djembé forme un angle de 45° environ avec le sol et repose entre les faces internes des genoux et des mollets. La zone de frappe est plus basse et plus éloignée de l’axe du corps : les mains tombent alors naturellement sur celle-ci et restent dans l’alignement des avant-bras. La position de l’instrument tend à générer une antéversion du bassin et donc une lordose lombaire. Les épaules sont enroulées vers l’avant et la tête est projetée également dans cette direction (Figure 2). Figure 1 Figure 2 6 Position de jeu debout : La position debout est de loin la plus physique. Elle autorise une liberté de mouvement beaucoup plus grande mais requiert endurance, souplesse et maintien postural. La difficulté majeure pour le joueur est de ne pas se laisser entraîner par le poids de son instrument sans se raidir, ce qui générerait des tensions inutiles et une activité musculaire parasite, le percussionniste doit rester le plus droit possible, et garder tête et cou dans l’alignement du corps. Les épaules sont maintenues et le musicien ne doit pas se voûter sous peine de fermer sa cage thoracique : « la respiration du rythme dépend de celle du batteur ». [Blanc, 1993]. Les mains sont dans le prolongement des avant-bras et reposent parallèlement à la peau en formant un triangle entre elles. Les coudes ne doivent pas être collés au buste ni s’en éloigner. Enfin, pour assurer une meilleure stabilité à l’édifice, le joueur adopte une position légèrement fléchie au niveau de ses genoux. S’il choisit de jouer debout, le percussionniste doit attacher une importance toute particulière à la sangle qui va retenir son instrument. Elle doit être large et confortable pour ne pas blesser les masses musculaires. Sa longueur est calculée afin que l’embase du djembé repose à mi-hauteur des cuisses, incliné de 45° par rapport à la verticale. Selon les préférences, la sangle peut être passée par les épaules et croisée dans le dos ou nouée autour de la taille. Il semble préférable de jouer en utilisant les deux méthodes de fixation associées et non l’une ou l’autre. Ainsi le poids du djembé est mieux réparti, le maintien postural moins coûteux. 7 c) Techniques de jeu On décrit trois grands types de frappe (figure 5) et des nombreuses variations propres à chaque musicien, destinées à enrichir le répertoire sonore de l’instrument. La tonique sombre : « pé » Le son va être cherché au bord de la peau et donnera un rendu sec et mat. Le pouce tenu à l’écart ne participe pas, les doigts longs sont généralement serrés les uns aux autres. Seules les faces palmaires des deuxièmes et troisièmes phalanges frappent la peau. Dans ce geste, il y a un mouvement de rebond naturel des doigts afin que le son reste ouvert (figure uploads/Litterature/ la-main-du-percussionniste.pdf
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- Publié le Nov 21, 2021
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