La prise en compte de la dynamique attentionnelle : éléments théoriques. (extra
La prise en compte de la dynamique attentionnelle : éléments théoriques. (extrait d’un rapport de recherche EDF-CNRS, écrit en collaboration avec J. Theureau, G. Fillippi, G. Saliou) Une partie de notre travail s'est orientée vers la dimension attentionnelle de l’activité des agents, ce que l’on peut nommer comme une prise en compte de la dynamique des fenêtres attentionnelles. La manière de traiter et d’exploiter ce thème de l’attention est suffisamment nouvelle par rapport aux publications classiques (Bloch 1966; Braun, Koch and Davis 2001; Broadbent 1958; Camus 1996; Coquery 1994; Cowan 1997; Geissler 1909; Hatfield 1998; James 1901, 1890; La Berge 1995; Luck 1998; Mack and Rock 1998; Parasuraman 1998; Pashler 1998a; Pashler 1998b; Pashler and Johnston 1998; Pashler 1998c; Ribot 1894; Titchener 1973; Wright 1998; Wundt 1912) pour nécessiter une présentation du cadre théorique de l’attention en soulignant l’articulation entre approche phénoménologique (Husserl 1950; Husserl 1991; Husserl 1995; Vermersch 1998; 1999; 2000b) et approche psychologique de l’attention. Dans un premier temps nous présenterons les principales propriétés de l’attention auxquelles nous ferons appel. Nous les u tiliserons ensuite pour éclairer certains aspects de la modélisation de la conduite accidentelle / incidentelle, et en particulier pour mieux comprendre le cycle élémentaire de la lecture-partition de consignes APE et des effets des interruptions dues aux communications. Propriétés des « modulations attentionnelles » Ayant clarifié le niveau où se situe le découpage descriptif des fenêtres attentionnelles (cf. chapitre 2), il est nécessaire de préciser le sens de cette expression et de déployer les concepts qui permettent d’opérer et de penser les descriptions en fonction de l’attention. Si l’on adopte une approche subjective1 de l’attention cf. (Vermersch 2000a), l’attention est conçue dans la lignée phénoménologique de Husserl comme ce qui module « la conscience de » (Vermersch 2001 a). Autrement dit, d’un certain point de vue, conscience et attention désigne le même objet scientifique envisagé suivant deux points de vue différents. Choisir le point de vue de l’attention c’est décrire les propriétés fonctionnelles de la conscience, sa structure, ses transformations dynamiques. Une des propriétés essentielles de l a conscience c’est sa structure intentionnelle, autrement dit toute conscience est conscience de quelque chose. En conséquence, dans notre expérience, nous ne saisissons jamais la conscience directement, nous ne la saisissons que par ce dont nous avons conscience, donc par son contenu, tel qu’il nous apparaît, ce que la phénoménologie désigne pas le « noème ». La structure intentionnelle est une structure tripartite, il y a le contenu (noème), il y a l’acte (noèse) qui vise ce contenu et qui fait que c’est intentionnel, et il y a un sujet (ego) qui vise ce contenu particulier. Autrement dit, toute conscience est structurée par un pôle sujet, qui vise à travers un acte, un contenu particulier. Si maintenant on fait l’expérience imaginaire d’un sujet qui vise un contenu particulier, à travers un acte unique comme de voir, et que l’on pense ce rapport comme constant pendant un moment, alors même dans cette constance quelque chose peut encore varier, tantôt c’est telle partie de ce qui est vu et qui est privilégiée, tantôt c’est telle autre, tantôt c’est un certain intérêt qui organise ce que je regarde, tantôt un autre. Ces variations de découpage ou d’éclairage selon lesquelles on a conscience à travers un acte particulier d’un contenu donné, ces variations sont précisément selon Husserl les phénomènes que l’on regroupe sous le terme d’attention. Nous voyons que les phénomènes attentionnels ne sont saisissables qu’à un haut niveau d’abstraction, puisque pour les prendre en compte il faut se situer au sommet d’une pile d’abstractions successives : 1/ modulation de la conscience : l’attention 2/ conscience et niveaux de conscience (multiples : conscience réfléchie, conscience directe, pré donation) 3/ actes particuliers (actes perceptifs : voir, entendre etc., actes aperceptifs : se souvenir, imaginer, raisonner, etc. 4/ contenus de conscience (rapportés à l’acte par lesquels ils sont saisis, du vu perçu, du vu souvenu, du vu imaginé par exemple, du conceptuel sans nécessairement un support imagé ou quasi sensoriel qui l’accompagne etc.) 5/ structure élémentaire des contenus, parties, propriétés élémentaires, significations, etc. 1 « subjectif » est ici pris dans le sens générique, de ce qui propre au point de vue du sujet. Pour cerner les propriétés essentielles de l’attention, nous mettrons de côté plusieurs aspects, par exemple le pôle sujet, ou le f ait que ce dont nous sommes conscient puisse l’être sur un mode direct ou sur un mode réfléchi. Mais si nous avions à questionner à nouveau des opérateurs, ces distinctions seraient essentielles, puisque par exemple, on ne peut verbaliser que ce qui est devenu réflexivement conscient, et que ce qui ne l’est pas encore reste cependant potentiellement accessible et verbalisable, mais pas immédiatement, il faut d’abord en opérer le réfléchissement(Vermersch 1994; Vermersch 2000a; Vermersch and Maurel 1997). Dans le cadre de la modélisation de la conduite, nous nous cantonnerons aux données effectivement disponibles. Nous traiterons successivement : a- la structure fondamentale du champ de l’attention organisée par un thème, c'est-à-dire ce qui est un intérêt pour le sujet, ce qui par différence définit un champ thématique de tout ce qui est autour du thème et lui est pertinent, et de manière plus périphérique et secondaire tout ce qui constitue la marge thématique, b- la médiation des actes ; ce thème est ce qui est visé, par tous les moyens disponibles au sujet, mais cette visée s’opère toujours par l’intermédiaire d’actes particuliers (perceptions, raisonnement, mémoire etc.), qui vont filtrer la visée thématique par leurs contraintes propres, de plus étant donné un acte particulier, à côté de ce qui est la visée thématique, il y a toujours la possibilité que des saillances exogènes ou endogènes (un son plus fort qu’un autre, une pensée qui surgit) sollicitent l’attention en dehors d e ce qui est pertinent au thème en cours, cette seconde fonction de l’attention est la fonction du « remarquer », contrairement au « prendre-pour-thème » qui est la fonction de visée élective attentionnelle, le « remarquer » est fonction uniquement des saillances transitoires. c- les fenêtres attentionnelles types ; parmi ces contraintes, au sein de chaque type d’acte, des fenêtres attentionnelles peuvent être définies, comme un nombre limité de cadrage-type, on le verra de manière plus détaillée sur l’exemple des fenêtres-attentionnelles liées à l’acte de perception visuelle d- les modes d’actualité par rapport à l’ensemble du champ de conscience et son feuilletage tel que le décrit la théorie phénoménologique de l’attention de Husserl ; e- les modes dynamiques ; au sein de chaque fenêtre attentionnelle type, principalement les modes distribués versus focalisés ; (il faudrait dire : au sein d’un thème déterminé, à travers le medium d’un acte particulier, cadré momentanément par une fenêtre-type visuelle, il y a encore différents modes de circulation de l’attention). f- les différents temps du cycle de toute dynamique attentionnelle : visée attentionnelle avec son caractère balistique, saisie attentionnelle avec son caractère focal, maintenir-en-prise de l’attention quand le même objet doit être exploré, ou si c’est un objet temporel, doit être suivi pour apparaître avec ses propriétés, le désengagement de la saisie attentionnelle, le déplacement de la visée attentionnelle d’un saisie à une autre, avec une grande variétés de mode de déplacements étudiés par (Ardvidson 2000; Gurwitsch 1957; Gurwitsch 1966; 1985; Schutz 1970). a/ L’attention est organisée par un intérêt La structure fondamentale de l’attention est d’être organisée par un intérêt (que cet intérêt soit réflexivement conscient ou non), et c’est à partir de ce principe que s’organise un champ d’attention avec un centre : ce qui est pris pour thème, et ce qui lui est périphérique et relié : un champ thématique, et un horizon thématique pour tout ce qui pourrait être pertinent de manière plus lointaine ou indirecte. On a donc un principe organisateur, l’intérêt, et à partir de là une stratification de tout ce qui pourrait faire l’objet d’une saisie attentionnelle effective. Ayant défini cette structure initiale : thème, champ thématique, horizon thématique, l’idée de stratification ou de feuilletage est importante pour réintroduire immédiatement une dimension potentiellement dynamique dans cette structure qui peut apparaître figée, le centre demeurant le centre, le champ le restant comme champ périphérique etc. Or, s’il y a stratification, cela signifie qu’à chaque instant une partie seulement de ce qui pourrait servir l’intérêt est saisie, ce qui est saisi est au centre et constitue le thème, et la continuité de la saisie assure la continuité de la visée thématique, mais ce qui est périphérique peut à tout moment passer au centre, ou ce qui vient d’être au centre, passer en périphérie en fonction des mouvements de l’attention, donc des mouvements de la visée. On a donc à la fois une structure feuilletée et une dynamique de déplacement de la visée telle qu’elle est incarnée par des actes particuliers à chaque instant. On voit que la fonction principale de l’attention est de moduler le couplage sujet / monde à travers un intérêt et des actes qui en médiatisent l’accès. b) L’attention est toujours médiée par un acte particulier Cet uploads/Litterature/ la-prise-en-compte-de-la-dynamique-attentionne.pdf
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- Publié le Apv 21, 2022
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