The Project Gutenberg EBook of La vie litt raire, by Anatole France  This eBoo

The Project Gutenberg EBook of La vie litt raire, by Anatole France  This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this eBook or online at www.gutenberg.org Title: La vie litt raire  Quatri me s rie   Author: Anatole France Release Date: December 20, 2006 [EBook #20143] Language: French Character set encoding: ISO-8859-1 *** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK LA VIE LITT RAIRE ***  Produced by Carlo Traverso, Eric Vautier and the Online Distributed Proofreaders Europe at http://dp.rastko.net ANATOLE FRANCE LA VIE LITT RAIRE  QUATRI ME S RIE   PARIS CALMANN-L VY, DITEURS   PR FACE  En publiant ce quatri me volume de la _Vie litt raire_, je me fais un   devoir tr s doux de remercier le public lettr de la bienveillance avec   laquelle il a re u les trois premiers. Je ne m rite point cette faveur;   mais si j'en tais digne de quelque mani re ce serait pour avoir donn    beaucoup au sentiment et rien l'esprit de syst me. Je ne sais comment   il faudrait appeler exactement ces causeries, et sans doute elles ont trop peu de forme pour avoir un nom. coup s r, le terme le plus   impropre dont on puisse les d signer est celui d'articles critiques. Je  ne suis point du tout un critique. Je ne saurais pas manoeuvrer les machines battre dans lesquelles d'habiles gens mettent la moisson  litt raire pour en s parer le grain de la balle. Il y a des contes de   f es. S'il y a aussi des contes de lettres, c'en sont l plut t.    Tout y est senti. J'y ai t sinc re jusqu' la candeur. Dire ce qu'on     pense est un plaisir co teux mais trop vif pour que j'y renonce jamais.  Quant faire des th ories, c'est une vanit qui ne me tente point.    Ce qui rend d fiant en mati re d'esth tique, c'est que tout se d montre     par le raisonnement. Z non d' l e a d montr que la fl che qui vole est       immobile. On pourrait aussi d montrer le contraire, bien qu' vrai dire,   ce soit plus malais . Car le raisonnement s' tonne devant l' vidence, et    l'on peut dire que tout se d montre, hors ce que nous sentons v ritable.   Une argumentation suivie sur un sujet complexe ne prouvera jamais que l'habilet de l'esprit qui l'a conduite. M. Maurice Barr s a t bien     avis de dire dans un opuscule exquis[1]: Ce qui distingue un   raisonnement d'un jeu de mots, c'est que celui-ci ne saurait tre  traduit. Il faut bien que les hommes aient quelque soup on de cette   grande v rit , puisqu'ils ne se gouvernent jamais par le raisonnement.   L'instinct et le sentiment les m nent. Ils ob issent leurs passions,     l'amour, la haine et surtout la peur salutaire. Ils pr f rent les     religions aux philosophies et ne raisonnent que pour se justifier de leurs mauvais penchants, et de leurs m chantes actions, ce qui est  risible, mais pardonnable. Les op rations les plus instinctives sont  g n ralement celles o ils r ussissent le mieux, et la nature a fond      sur celles-l seules la conservation de la vie et la perp tuit de    l'esp ce. Les syst mes philosophiques ont r ussi en raison du g nie de     leurs auteurs, sans qu'on ait jamais pu reconna tre en l'un d'eux des  caract res de v rit qui le fissent pr valoir. En morale, toutes les     opinions ont t soutenues, et, si plusieurs semblent s'accorder, c'est   que les moralistes eurent souci, pour la plupart, de ne pas se brouiller avec le sentiment vulgaire et l'instinct commun. La raison pure, s'ils n'avaient cout qu'elle, les e t conduits par divers chemins aux    conclusions les plus monstrueuses, comme il se voit en certaines sectes religieuses et en certaines h r sies dont les auteurs, exalt s par la    solitude, ont m pris le consentement irr fl chi des hommes. Il semble     qu'elle raisonn t tr s bien, cette docte ca nite, qui, jugeant la    cr ation mauvaise, enseignait aux fid les offenser les lois physiques    et morales du monde, sur l'exemple des criminels et pr f rablement    l'imitation de Ca n et de Judas. Elle raisonnait bien. Pourtant, sa  morale tait abominable. Cette v rit sainte et salutaire se trouve au    fond de toutes les religions, qu'il est pour l'homme un guide plus s r  que le raisonnement et qu'il faut couter le coeur quand il parle.  En esth tique, c'est- -dire dans les nuages, on peut argumenter plus et   mieux qu'en aucun autre sujet. C'est en cet endroit qu'il faut tre  m fiant. C'est l qu'il faut tout craindre: l'indiff rence comme la    partialit , la froideur comme la passion, le savoir comme l'ignorance,  l'art, l'esprit, la subtilit et l'innocence plus dangereuse que la  ruse. En mati re d'esth tique, tu redouteras les sophismes, surtout   quand ils seront beaux, et il s'en trouve d'admirables. Tu n'en croiras pas m me l'esprit math matique, si parfait, si sublime, mais d'une telle   d licatesse que cette machine ne peut travailler que dans le vide et  qu'un grain de sable dans les rouages suffit les fausser. On fr mit en   songeant jusqu'o ce grain de sable peut entra ner une cervelle   math matique. Pensez Pascal!   L'esth tique ne repose sur rien de solide. C'est un ch teau en l'air. On   veut l'appuyer sur l' thique. Mais il n'y a pas d' thique. Il n'y a pas   de sociologie. Il n'y a pas non plus de biologie. L'ach vement des  sciences n'a jamais exist que dans la t te de M. Auguste Comte, dont   l'oeuvre est une proph tie. Quand la biologie sera constitu e,   c'est- -dire dans quelques millions d'ann es, on pourra peut- tre    construire une sociologie. Ce sera l'affaire d'un grand nombre de si cles; apr s quoi, il sera loisible de cr er sur des bases solides une    science esth tique. Mais alors notre plan te sera bien vieille et   touchera aux termes de ses destins. Le soleil, dont les taches nous inqui tent d j , non sans raison, ne montrera plus la terre qu'une     face d'un rouge sombre et fuligineux, demi-couverte de scories  opaques, et les derniers humains, retir s au fond des mines, seront  moins soucieux de disserter sur l'essence du beau que de br ler dans les  t n bres leurs derniers morceaux de houille, avant de s'ab mer dans les    glaces ternelles.  Pour fonder la critique, on parle de tradition et de consentement universel. Il n'y en a pas. L'opinion presque g n rale, il est vrai,   favorise certaines oeuvres. Mais c'est en vertu d'un pr jug , et   nullement par choix et par l'effet d'une pr f rence spontan e. Les    oeuvres que tout le monde admire sont celles que personne n'examine. On les re oit comme un fardeau pr cieux, qu'on passe d'autres sans y    regarder. Croyez-vous vraiment qu'il y ait beaucoup de libert dans  l'approbation que nous donnons aux classiques grecs, latins, et m me aux  classiques fran ais? Le go t aussi qui nous porte vers tel ouvrage   contemporain et nous loigne de tel autre est-il bien libre? N'est-il  pas d termin par beaucoup de circonstances trang res au contenu de cet     ouvrage, dont la principale est l'esprit d'imitation, si puissant chez l'homme et chez l'animal? Cet esprit d'imitation nous est n cessaire  pour vivre sans trop d' garement; nous le portons dans toutes nos  actions et il domine notre sens esth tique. Sans lui les opinions  seraient en mati re d'art beaucoup plus diverses encore qu'elles ne  sont. C'est par lui qu'un ouvrage qui, pour quelque raison que ce soit, a trouv d'abord quelques suffrages, uploads/Litterature/ la-vie-litterairequatrieme-serie-by-france-anatole-1844-1924 1 .pdf

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