1 Le Fonctionnement de sa philosophie A. Le contexte 1. Une tradition hindoue U
1 Le Fonctionnement de sa philosophie A. Le contexte 1. Une tradition hindoue Une compréhension globale et juste de la philosophie de Shankaracharya ne serait pas possible sans connaître le contexte historique dans lequel elle s’est épanouie. D’après les historiens, la date de naissance exacte de Shankara est en dispute. Mais ils sont d’accord pour la situer vers 700 de notre ère1. Il est important de présenter la tradition hindoue jusqu’à Shankara en ayant soin de souligner son caractère complexe et multiforme2. En effet elle englobe différents courants qui semblent parfois difficilement conciliables mais une référence commune à un ensemble de textes sacrés permet de parler d’une tradition hindoue. Son origine remonte au 20me siècle avant J.C3. Contrairement aux autres grandes religions, l’hindouisme n’a pas de fondateur. Elle apparaît souvent déterminée par un principe de développement depuis ses lointaines origines. Les historiens de la religion ont d’abord repéré l’existence d’un culte qu’on appelle Brahmanisme et non pas hindouisme. Par la suite, ce sont les musulmans qui ont utilisé le mot « hindou » au 8me siècle en se référant simplement aux habitants de la vallée Indus4. Au 12me siècle, le terme classique de Sanatana Dharma (« ordre éternel ») apparaît pour désigner l’hindouisme. Aujourd’hui l’hindouisme recouvre une réalité considérable car plus de 80 pour cent des indiens sont des hindous. La tradition hindoue se réfère à des textes reconnus d’inspiration divine ayant une grande importance. Elle s’est nourrie et développée à partir de deux catégories de textes sacrés : 1. Hulin Michel, Shankara et la non-dualité., Bayard Editions, Paris.2001. p .15-18. 2. Michel Angot, L’Inde Classique, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2001, p.25-48. 3. Lois Frédéric, L’histoire de l’Inde , p.48-49. Le mot « tradition hindoue » évoque quelques difficultés parce que il est difficile de prouver l’existence d’un seule pays uni sous le nom Inde dans l’histoire. La référence au terme « hindou » depuis l’antiquité prend son origine du bassin Indus, ce qui est devenu le Pakistan d’aujourd’hui. Cette référence évoque la région au-delà de cette vallée Indus. La tradition hindoue est quelque chose qui commence à partir de l’invasion des ariens. Les historiens situent l’âge de Rig-véda en –1400 mais l’arrivée des ariens était déjà commencée depuis –2000ans. La civilisation qui existait avant était complètement anéantie par l’arrivée des ariens. On ne peut pas ainsi dire catégoriquement que la tradition hindoue est celle des ariens parce que il y a aussi la présence de l’ethnie « Dravidiens » qui s’opposait aux Ariens depuis le début. Donc c’est une tradition assez complexe dans sa nature. 4. Heinrich Gerhard Franz, L’Inde Ancienne , Bordas, civilisation, 1990. p.83. 2 a. La Sruti5 (les textes entendus et vus par les poètes-voyants « rishis » ou bien les textes révélés). b. La Smriti6 (les textes inspirés par les védas et transmis par la mémoire des hommes). a. La Sruti contient les quatre védas i) Le Rig-véda (livre des versets). ii) Le Yajur-véda (livre des formules rituelles). iii) Le Sama-véda (livre des chants). iv) Le Atharva-Véda (livre d’Atharvan). De ces quatre livres, le Rig véda est le plus ancien. Il a été rédigé environ 1400 ans avant J.C. Cette période a vu les prêtres (les brahmanes) affirmer leur supériorité sur les autres classes sociales. Le Yajur véda et le Sama véda constituent la liturgie proprement dite. Ils regroupent les versets utilisés par les prêtres durant les cérémonies. L’Atharva véda est constitué de 20 livres qui regroupent des prières magiques récitées dans un but précis : charmes contre la maladie, charmes & amour, pour la prospérité, pour une longue vie, etc. Chacun de ces quatre Védas est lui-même divisé en quatre parties qui sont des textes explicatifs des Védas écrits en prose a). Les Samhitâs (Le recueil de base ancienne qui rassemble des hymnes cosmologiques adressés pendant la liturgie et les rituels sacrificiels brahmaniques). b). Les Brâhmanas (des exégèses du rituel). c). Les Aranyakas (destinés à ceux qui se recueillent dans la forêt pour méditer). d). Les Upanisads (traités d’inspiration philosophique) Ce sont les dernières couches de la Sruti. Chaque Véda contient plusieurs Upanisads. Ils mettent fin aux Védas. b. La Smriti est formée de textes divers inspirés par les Védas. On y trouve des traités sur le Dharma (fondement de la vie d’un hindou) : les Dharma Sutras et les Dharma Shastras. Ils forment en quelque sorte la loi hindou. L’un des plus importants Shastra est le livre de la Loi de Manu dont l’influence sur la vie hindoue est énorme. Viennent ensuite les grandes épopées poétiques: le Mahabharata et le Ramayana. 5. The Holy Vedas, B.R. Publishing Corporation, Delhi, p.iii-viii. 6. Paul Martin Dubost, Cankara et la Védanta, p ; 48-51. 3 Le Mahabharata, épopée de la Dynastie Bharata, est un texte de plus de 100 000 vers écrits en sanskrit. Il constitue la plus grande œuvre littéraire du monde, loin devant les épopées grecques comme l’Odyssée. Le texte est profondément imprégné par la religion et traite du Dharma. Dans cet ensemble, la Bhagavad-Gîta (Chant du Seigneur), est un récit assez réputé mettant en scène Krishna, une des incarnations de Vishnu. L’influence de la Bhagavad-Gîta est profonde car, contrairement aux Védas, c’est un texte accessible pour tous dans lequel sont abordées des questions philosophiques. Le Ramayana est une épopée mettant en scène Rama, une des autres incarnations de Vishnu. La Smriti contient aussi d’autres écrits parmi lesquels on peut mentionner Brahmasutra (un recueil de 555 aphorismes sur le Brahman, écrit par Bâdarâyana)7. L’hindouisme est traversé par de nombreux courants et il revêt plusieurs formes. Premièrement l’âge védique deuxièmement l’âge bramanique et troisièmement l’âge de la religion hindoue qu’on connaît aujourd’hui. Il existe 3 grands cultes : celui de Shiva (le sivaïsme), celui de Vishnu (le vaishnavisme) et celui de Shakti (le tantrisme). Shakti a plusieurs noms dont Kali, Durga et Parvati Epouse de Shiva. c. Caractéristiques de la tradition hindoue 1. Tout d’abord la reconnaissance de l’autorité des Védas et celle des Brahmanes. De ce fait, les hindous reconnaissent l’existence de classes sociales (varnas) dont l’appartenance est déterminée par la naissance. La population hindoue est ainsi divisée en 4 classes Les Brahmanes (les prêtres). Les Ksatriyas (les rois et guerriers). Les Vaishyas (le peuple ordinaire). Les Shudras (les serviteurs). Première référence aux castes se trouvent dans le Rig-veda. X, 90. « sa bouche devient le brahmane, le Guerrier fut le produit de ses bras, ses cuisses furent l’Artisan, de ses pieds naquit le serviteur »8 Ces classes sont elles-mêmes divisées en castes (jatis). Les castes caractérisaient autrefois la position sociale et professionnelle d’un individu. Elles définissaient 7. Ibid., p.50. 8. Hymnes spéculatifs du Véda , traduits du sanscrit et annoté par louis Renou, Gallimard,1965, p.99. 4 aussi la manière dont les individus d’une caste devaient se comporter face aux rituels religieux. Certains individus sont hors-castes et sont considérés comme « Intouchables » (les Dalits) car impurs. 2. Les hindous croient en la succession des réincarnations (samsara). Les conditions de la renaissance sont déterminées par le karma, c’est-à- dire la façon dont la vie précédente s’est déroulée. Le samsara n’a, en principe, pas de début et pas de fin. Le seul moyen d’en sortir est d’atteindre la délivrance (moksha) par divers moyens (les margas) dont la méditation et la dévotion. La vie d’un hindou est régie par son Dharma. Il constitue une sorte de code de conduite sur lequel l’hindou bâtit sa vie, convaincu qu’il a une destinée propre notamment définie par sa classe et sa caste de naissance. Les textes relatifs au Dharma ont permis l’élaboration d’une doctrine sociale applicable aux trois classes supérieures qui divise la vie en quatre étapes, les ashramas. L’hindou sera donc étudiant (brahmachari), puis chef de famille (grihastha), se retirera ensuite en forêt dans une contemplation spirituelle (vanaprastha) puis deviendra éventuellement un ascète (sannyasi). L’objectif essentiel est de sortir du cycle des réincarnations. 3. Les hindous croient en une unique réalité, éternelle, transcendante et représentant le tout : le Brahman (ne pas confondre avec le dieu Brahma). L’univers, et tout ce qu’il contient, est une émanation du Brahman. On a tendance à croire que l’hindouisme est une religion polythéiste au même titre que l’antique religion grecque. En fait, les dieux hindous représentent une émanation du Brahman, sans attribut, sans forme. Les hindous considèrent que Brahman est en chacun d‘eux, il est leur âme, l’atman. Il y a donc identité entre la présence du Brahman au sein de l’univers et de l’atman au sein de chaque individu. Depuis ces lointaines origines, la tradition hindoue s’est constituée à travers des conflits internes et des mouvements de réforme. Ainsi au cours des siècles, les textes sacrés contenant les réflexions philosophiques ont parfois été écartés et l’insistance a été mise sur les rituels. Le système des castes s’est énormément développé en produisant de l’exclusion. 5 2. Le contexte philosophique L’Inde à partir du VIIIe siècle avant notre ère jusqu'au Xe siècle a élaboré six systèmes de philosophie connus sous le nom « Darçana »9 qui accordent plus ou moins une uploads/Litterature/ le-fonctionnement-de-sa-philosophie-de-sankara.pdf
Documents similaires










-
36
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jan 26, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
- Taille du fichier 0.2864MB