LES Médailles romaines DE CHRISTINE DE SUÈDE PAR LE BARON DE BILDT de l'Académi
LES Médailles romaines DE CHRISTINE DE SUÈDE PAR LE BARON DE BILDT de l'Académie Suédoise. ROME LOESCHER & CiE ( W. Regenberg) 1908 CHRISTINE DE SUÈDE BUSTE EN BRONZE APPARTENANT AU MARQUIS P. AZZOLINO A FLORENCE A Ma chère fille Blanceflor Ton sourire est venu bien des fois égayer mon travail. Ta petite main a souvent manié les médailles dont parle ce livre. Je te le dédie, en souvenir de la patience avec laquelle tu as toujours écouté ce qite je te racontais alors sur elles. Puissent mes lecteurs en avoir autant! Rome, janvier iço8. Nul/us est liber tam malus, ut non aliqiia parte prosit. C. Plinii Caecilii Secundi Epistolarum Lib. III. np. V. PRÉFACE Cet ouvrage prend place à la suite des volumes que j'ai déjà publiés sur Christine de Suède. Les archives Azzolino, que le possesseur actuel m'a ouvertes avec la plus grande libéralité pour mes études précédentes, contiennent des documents sur les médailles faites à Rome en l'honneur de la reine, que j'ai voulu sauver de l'oubli. C'est pour cette raison que j'ai entrepris ce travail. Il m'a offert de grandes difficultés, car je ne saurais me reconnaître aucune compétence en matière numismatique, et je me suis trouvé ici sur un terrain absolument neuf. Qu'il me soit donc permis de faire appel à l'indulgence de mes lecteurs. Rome, janvier igo8. INTRODUCTION L'art italien du dix-septième siècle ne jouit pas d'une grande faveur auprès des amateurs et critiques d'art de notre temps. Il est généralement convenu qu'il est pom- peux et maniéré, que le mauvais goût y domine, qu'il manque de vérité et de sincérité, et qu'il mérite peu qu'on s'en occupe. Tout au plus daigne-t-on admettre qu'il y eut alors en Italie quelques grands artistes, comme Lorenzo Bernini, Pietro da Cortona et Salvator Rosa, mais on se hâte d'ajouter que ce sont des exceptions, et de déplorer que leur génie ou leur talent ait été amoindri par l'influence du milieu dans lequel ils ont vécu. Jusqu'à un certain point cette impopularité de l'art « baroque » est justifiée. La critique moderne, éprise, avec raison, de liberté, de lumière et de vérité, ne se réconcilie que difficilement avec des œuvres où domine la convention, académique et officielle, et avec des ar- tistes qui ont trop souvent sacrifié leur propre sentiment à l'effet à produire sur le mécène. Mais il y a aussi beaucoup de parti pris dans la condamnation du seicento. Ce sont les précurseurs de l'âge d'or, les préraphaélites. De Bildt. I 2 LES MÉDAILLES ROMAINES DE CHRISTINE DE SUÈDE qui sont à la mode. Ils absorbent tellement l' intérêt et l'attention du public qui lit ou qui écrit, qu'il ne reste plus grand'chose pour les autres. Le moindre disciple ou ami de Botticelli est reçu avec plus d'égards que Serpotta ou Soldani Benzi. Avouez, lecteur, que vous n'avez guère entendu parler de ceux-ci, ou que, si leurs noms vous sont connus, vous ne les avez pas jugés di- gnes d'occuper votre temps. Il n'y a pas de mal à cela, et vous avez parfaitement raison de négliger des gens dont personne ne se soucie. Pourquoi se sont-ils avisés de naître en Italie dans un siècle comme le dix-septième? C'est bien leur faute, et pas la vôtre. J'ose croire, en toute humilité, qu'un revirement se produira un jour en faveur de ces oubliés. On se sou- viendra alors que ces pauvres artistes « baroques » étaient de formidables travailleurs, qui ne reculaient devant au- cune difficulté, qu'ils avaient le sentiment décoratif fort développé, et que si leur goût les porte plutôt vers la pompe que vers la simplicité, ils ont au moins l'œil sûr et la main habile et prompte. On leur pardonnera peut- être d'avoir ignoré ce que c'est que la naïveté, à cause de leur évident désir de charmer les yeux, et on leur sera peut-être reconnaissant lorsqu'ils y ont réussi. Ainsi soit-il! Mais nous n'en sommes pas encore là. La réhabi- litation du seicento est toujours à faire. Elle commence à se dessiner en faveur de son architecture, qui redevient peu à peu l'inspiratrice de celle de nos jours, mais pour les autres arts, les voiles de l'oubli sont lents à tomber. INTRODUCTION 3 L'art de la médaille partage ce discrédit. De nom- breux volumes ont été publiés sur les médailleurs de la Renaissance, mais il est rare qu'un auteur daigne pousser ses recherches au delà du seizième siècle. On se contente en général de savoir qu'après Benvenuto Cellini l'art de la médaille est en décadence. C'est vrai. Il y a décadence, et, chose curieuse, cette décadence est accompagnée d'un progrès très notable de l'art de la monnaie, dû aux mêmes causes. La découverte de nouveaux procédés a abaissé le niveau artistique de la médaille et élevé celui de la monnaie. Elle a fait des- cendre la première de la région de l'art vers celle de l'industrie et monter la seconde de l'industrie vers l'art. Le mouvement est curieux et mérite une explication. On sait que les premières médailles italiennes ont été coulées, c'est-à-dire reproduites en métal par la fonte dans un moule pris sur un modèle de cire. C'était un procédé lent, mais qui n'exigeait ni un long apprentis- sage, ni un outillage compliqué, et qui avait l'avantage de permettre à l'artiste de retoucher son œuvre par le ciselage. Le nombre des exemplaires obtenus ne pouvait être très grand, mais la médaille avait un caractère d'œuvre personnelle, qui devait nécessairement manquer, nous le verrons bientôt, aux médailles obtenues plus tard par le procédé plus difficile de la frappe. La monnaie, au contraire, se faisait toujours par la frappe. Le monnoyer gravait en creux le type dans un bloc d'acier, qui devenait ainsi le coin-matrice, et le mon- nayage s'opérait en plaçant un flan de métal entre deux 4 LES MÉDAILLES ROMAINES DE CHRISTINE DE SUÈDE coins qu'on enfonçait à coups de marteau. L'opération était simple, mais lente et coûteuse. Et comme il arri- vait facilement que le coin se brisât sous les coups de marteau, il était rare qu'on voulût dépenser beaucoup de travail pour donner une beauté artistique à une chose aussi fragile. On se hâtait de graver un coin sans trop se soucier de l'esthétique, et quand il se brisait, on le remplaçait promptement par un autre aussi peu soigné que le premier. Cette différence dans la fabrication expli- que la contradiction apparente entre la perfection des médailles et l'aspect grossier des monnaies du quinzième siècle. Deux inventions vinrent changer cela. Le médailleur Vittorio Gambello, dit Camelio — c'est à lui qu'on at- tribue généralement l'idée - imagina de ne plus graver le type en creux directement dans le coin-matrice, mais de le tailler en relief sur un bloc d'acier, qui devenait ainsi un poinçon. Après avoir été soumis à la trempe, ce poinçon était enfoncé dans d'autres blocs d'acier, qui recevaient l'empreinte en creux et devenaient des coins- matrices. Une seule opération de gravure produisait ainsi, au lieu d'une seule matrice, toute une série de coins, ce qui permettait d'opérer le monnayage plus vite et de remplacer facilement les coins brisés. On commença alors à trouver qu'il valait la peine de s'imposer quelques fa- tigues pour avoir un beau poinçon. Il durait assez long- temps pour récompenser l'effort. Une autre invention vint bientôt compléter celle-ci. Dans la première moitié du xvi"^ siècle on s'avisa, en INTRODUCTION 5 Allemagne, de se servir pour enfoncer les coins dans le flan métallique, d'une presse à balancier, au lieu du marteau. Le nouvél engin, bientôt perfectionné par les monnoyers français, augmenta considérablement la rapi- dité et la sûreté de la fabrication, affranchit en une large mesure les monnoyers des soucis matériels de la pro- duction et les encouragea dès lors à se préoccuper da- vantage de la beauté de leurs types. Justement, les mé- dailleurs étaient là pour leur fournir les modèles désirés, et leur influence ne tarda pas à se faire sentir. Vers la fin du xvi° siècle, alors que l'usage du poinçon gravé en relief et celui du balancier s'étaient généralisés, la monnaie prit un caractère d'art qu'elle n'avait pas eu depuis l'époque classique. Une vraie renaissance s'opé- rait à la suite de ces heureuses innovations. Mais il advint en même temps que les médailleurs voulurent à leur tour exploiter les nouveaux procédés au profit de leur art, ou plutôt de leur métier. Ils te- naient fort à émettre certaines catégories de leurs pro- duits rapidement et en grande quantité. Si l'on pouvait se contenter de l'étrier du fondeur pour obtenir lente- ment les médailles commandées par un prince qui vou- lait faire cadeau de son image à ses courtisans, ou par un particulier qui aimait avoir son portrait en plomb ou en bronze, il n'en était pas de même, p. ex., pour les médailles religieuses, qui pouvaient se vendre par mil- liers, ou pour les médailles commémoratives, dont une large distribution s'imposait. On eut donc recours à la frappe, et on s'en trouva bien. Les médailles sortaient 6 LES MÉDAILLES ROMAINES uploads/Litterature/ les-medailles-romaines-de-christine-de-suede-par-le-baron-de-bildt.pdf
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- Publié le Apv 18, 2022
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