Revue belge de philologie et d'histoire Une traduction française inédite de la

Revue belge de philologie et d'histoire Une traduction française inédite de la lettre d'Aristée. (manuscrit français 19491 de la Bibliothèque Nationale) Léon Herrmann Citer ce document / Cite this document : Herrmann Léon. Une traduction française inédite de la lettre d'Aristée. (manuscrit français 19491 de la Bibliothèque Nationale) . In: Revue belge de philologie et d'histoire, tome 44, fasc. 1, 1966. Histoire (depuis la fin de l'Antiquité) - Geschiedenis (sedert de Oudheid) pp. 25-53; doi : https://doi.org/10.3406/rbph.1966.2617 https://www.persee.fr/doc/rbph_0035-0818_1966_num_44_1_2617 Fichier pdf généré le 13/04/2018 UNE TRADUCTION FRANÇAISE INÉDITE DE LA LETTRE D'ARISTÉE (manuscrit français 19491 de la Bibliothèque Nationale) L'abbé A. Pelletier, le plus récent traducteur de la ^tre d' Aristée à Philo- crate (Paris 1962), n'a signalé qu'une traduction française du xvie siècle intitulée Histoire d' Aristée, de la translation de la loy de Moïse mise en français par Guillaume Paradin et dont le titre complet est Histoire de Aristée, ambassadeur du roi Ptolêmée Phïladelphe, de son voyage à Jérusalem pour le fait de la translation de la Loi sainte de Moïse. Cette traduction, précédée de notices sur Ptolêmée Philadelphe, sur Aristée « son proche parent et ami », sur Éléazar et sur Démétrius de Phalère, est considérée par l'abbé Pelletier comme n'ayant plus qu'un intérêt documentaire. Mais jugera-t-on qu'il en est de même pour une traduction libre et incomplète, mais inédite, qui est contenue dans un petit manuscrit in-12° de 59 feuillets, provenant du fonds St Germain des Prés et cotée 19491 à la Bibliothèque Nationale ? Le petit livre semble avoir appartenu à Maistre Guillaume Canesat ( ?). Sur le dos de la reliure (très postérieure au xvie siècle) on lit Traité pour le pape, ce qui est saugrenu. On lit sur la première page Aristeas à son frère Philocrates. Les soixante-douze interprètes, mais le titre de la page de garde est Le livre de Aristeas qu'il escrit à son frère Philocrates. Des soixante et douze interprètes de la loi Hébraîcque qu'on appelle vulgairement les septante interprètes. L'explicit du 59 e feuillet v° est Fin du livre de Aristeas des soixante et douze interprètes de la loi Hébraîcque. Je publie cette traduction intégralement, mais en modernisant l'orthographe pour la commodité du lecteur. On notera que le traducteur a négligé de traduire ce qui correspond aux paragraphes [51] à [120] dans le texte, c'est-à-dire ce qui se rapporte aux présents du roi ([51 ]-[82]) et à la description de Jérusalem et des environs ([83]- [120]), contrairement à Paradin. En dehors de cela il n'y a que des lacunes insignifiantes d'une partie de mot ou d'un mot, faciles à combler, une de deux ou trois mots dans [1] et une autre dans [242] qui sont plus difficiles à pallier. Mais il est temps de laisser parole à l'ingénieux traducteur qui me semble, malgré quelques erreurs, avoir bien compris son texte et, malgré quelques locutions vulgaires, l'avoir « translaté » avec un rare bonheur d'expression. 26 L. HERRMANN < Introduction > [1] Pour ce, mon frère, que vous avez toujours fait grande estime de la connaissance d'une chacune chose et que fort vous aimez à apprendre, j'ai proposé vous écrire une chose excellente et qui vaut bien être connue, laquelle est advenue nous étant en la maison d'Éléazar le grand prêtre des Juifs. Mais, afin que vous entendiez plus aisément ceci, je mettrai peine de <vous> déclarer premièrement les causes pour <lesquelles> nous fûmes là envoyés, puis le < voyage, au> plus près de la vérité, tant pour ce que la cho<se> le vaut que pour le désir qu'avez imprimé en votre esprit d'avoir connais- [2] sance de tout<es> choses, car cela est <en> l'homme fort estim<able> d'apprendre quelque chose ou par les histoires ou par ce qui se fait et, par ce moyen, l'entendement étant encore rude et comme enfantif est grandement paré quand du commencement il vient à assembler les plus belles choses et de plus grande valeur suivant Dieu et raison règlement sans faillir. [3] A cette cause comme je cherchais de grande affection la connaissance des choses divines et que la loi de Dieu ne pouvait être connue sans interprète qui la fît entendre, j'ai bien voulu, pour recouvrer la translation d'icelle, prendre la charge — et de bon gré — de faire le passage et légation vers un tel personnage qui, pour sa bonté et honneur, est en fort grande réputation envers ceux de son pays et tous étrangers et qui porte grand honneur et profit non seulement à ceux avec lesquels il fréquente mais aussi aux autres quelque part où ils soient, car la loi de Dieu est par devers eux mise en peaux de parchemin et écrite en lettres hébraïques. [4] Or ai-je fait ceci bien volontiers, ayant pris du roi l'occasion de parler pour les Juifs étant en captivité, lesquels furent premièrement amenés en Egypte par le père de celui-ci, qui gagna leur ville et pays. Mais, puisque nous sommes tombés sur le propos, j'ai estimé que c'était chose digne de la vous faire savoir, afin que par cela vous en puissiez mieux avoir la connais- [5] sance, car j'estime que vous aimez plus cher entendre et vous adonner au divin service que d'enquérir et chercher les constitutions humaines ores qu'elles soient bonnes et saintes. Aussi avez-vous bien montré l'affe<ction> que vous avez quand vous êtes venu de l'île jusques à nous non pour autre chose sinon de conquérir sur le lieu tout ce qui pourrait orner votre esprit, quelque [6] part que ce fût, car je vous ai premièrement écrit les choses qui m'ont semblé dignes de raconter de la race et nation des Juifs, ainsi que je l'ai entendu [7] et appris des plus savants Egyptiens, gens de grande prudence, afin que j'aidasse à augmenter en ce que pourrais votre savoir, car il faut reconnaître et rendre les plaisirs reçus, principalement à ceux de sa sorte, encore plus amplement à vous, qui savez que c'est de vertu et qui, non seulement pour la race montrez bien avoir les conditions de frère, mais aussi vous suivez [8] et pourchassez l'honneur et ce qui est beau d'aussi bon aveu que moi. Aussi la grâce et beauté de l'or et l'appareil des choses plus précieuses pour une vaine gloire ne nous apportent point tel fruit que nous le recevons par le don du savoir et par considérer les choses. Mais, de peur qu'on ne pense TRADUCTION FRANÇAISE INEDITE DE LA LETTRE d'ARISTÉE 27 que je voulusse faire long préambule par une manière de montre, je retourne à mon propos. <,Le projet du bibliothécaire^· [9] Démétrius Phaléréen étant maître de la librairie du roi mettait toute peine d'amasser force livres de tous les endroits du monde tant qu'il lui était possible par le moyen qu'il commettait gens çà et là aux lieux propices à cela pour acheter et copier les livres et fit tant par sa diligence qu'au mieux [10] qu'il eût pu faire il mit à chef l'entreprise du roi. Car ainsi qu'on lui demandait, moi présent, combien de milliers de livres il avait amassés, il répondit : « Sire, il y en a déjà de serrés en votre librairie plus de deux cent mille et, avant qu'il soit longtemps, je ferai que le nombre passe la somme de plus de cinq cent mille. Outre ce, on m'a dit que les lois des Juifs valent bien d'être transcrites et être mises dedans votre librairie. « Quel em- [11] pêchement y a-t-il, dit-il, que tu ne le fais? N'as-tu pas à ton commandement tout ce qu'il faut pour ce faire ? » Quand Démétrius lui eut répondu qu'il était besoin de truchement pour les entendre pour tant que les Juifs usent de formes de lettres propres à leur langue ainsi que les Égyptiens disposent leurs lettres selon leur parler, car ceux-là se trompent fort qui pensent que les Juifs parlent la langue de Syrie, attendu qu'ils ont bien autre manière de parler. Sur ces propos le roi lui dit qu'il en écrirait au pontife des Juifs afin de faire le tout dépêcher. <CLa libération des esclaves juifs> [12] Alors il me sembla que le temps et l'occasion étaient venus de délivrer ceux que le père du roi avait fait emmener de Judée, pour laquelle chose j'en avais souvent requis Sosibius le Tarentin et André, capitaine de la garde du corps, car le susdit, accompagné du dit André, menant l'armée par la basse Syrie dite Coelé-Syrie et Phénicie, soumit tout à son obéissance, prenant et emmenant les uns pour les détenir comme esclaves ès-colonies, les autres pour les butiner, et dégâtant tout par frayeur, de sorte qu'il emmena bien cent mille prisonniers de Judée en Egypte, du nombre desquels il en [13] arma bien trente mille gens d'élite qu'il ordonna pour la garde du pays. Auparavant il y en avait encore d'autres qui étaient venus avec le Perse, et autres envoyés avec Psammeticus à l'encontre du roi des Éthiopiens, mais ce n'était point en telle multitude que Ptolémée Lagus en emmena [14] lui tout seul, car uploads/Litterature/ lettre-d-x27-aristee.pdf

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