Matérialités discursives 1 MATÉRIALITÉS DISCURSIVES Colloque des 24, 25, 26 avr
Matérialités discursives 1 MATÉRIALITÉS DISCURSIVES Colloque des 24, 25, 26 avril 1980 Université Paris X — Nanterre Bernard Conein, Jean-Jacques Courtine, Françoise Gadet, Jean-Marie Marandin, Michel Pêcheux PRESSES UNIVERSITAIRES DE LILLE U N I C A M P BiBUOTECA CENT? AC Matérialités discursives / Bernard Conein, Jean-Jacques Courtine, Françoise Gadet, Jean-Marie Marandin, Michel Pêcheux. — Lille : Presses universitaires de Lille, 1981. — 1 vol., 210 p. ; 24 cm. • — (Linguistique). ISBN 2-85939-279-7. ! CLASSIF. AUTOR. CH—0 0 0 1 65 3 3 - 5 © Presses Universitaires de Lille ISBN 2-85939-279-7 Livre imprimé en France Le Colloque «Matérialités Discursives» (Nanterre, 24-25-26 Avril 1980j a été organisé par Bernard CONE!N, assistant de Sociologie à Paris VIII Vincennes, Jean-Jacques COURTINE, assistant de linguistique à Grenoble H, Françoise GADET, assistante de linguistique à Paris X Nanterre, Jean-Marie MARANDIN, Miche! PECHEUX, maître de recherches au C.N.R.S., Laboratoire de Psycho logie Sociale de Paris VH Jussieu, associé au C.N.R.S. Le Groupe de Recherches en Analyse de Discours de l'Université de Grenoble U, le Centre de Recherches Linguistiques de l'Université de Paris X Nanterre, et l'équipe «Langue, Discours, Idéologies» du Laboratoire de Psychologie Sociale de l'Université Paris VH Jussieu remercient leurs Univer sités et Laboratoires C.N.R.S. respectifs, qui ont accordé leur soutien scien tifique au projet de ce colloque, contribué à sa réalisation, et participé financièrement à la présente publication. Le Colloque a été suivi d'une Table Ronde qui a réuni Antoine CULIOLI, Jean-Pierre FA YE, Jacques RANC/ERE et Elisabeth ROUDINESCO. Questions initiales (juillet 1979) Matérialités discursives : quelles matérialités se trouvent mise en jeu dans l'analyse des faits de discours par l'histoire, la psychanalyse et la linguistique ? H y a un réel de la langue. U y a un réel de l'histoire. H y a un réel de l'inconscient. Cette triple assertion, où se manifeste un rapport problématique au réel, exclut d'emblée qu'une position théorique vienne y organiser son dispositif de réponses : il s'agit plutôt de résister par là au système des fausses réponses contournant la matérialité de ce qui est en-jeu dans la langue. Un symptôme : l'inflation sur les termes (texte, tangue, grammaire, dis cours, langage, parole.. .), point de fuite vers de nouvelles formes de l'entente universitaire entre disciplines, qui peuvent prendre des figures institutionel- les (sociolinguistique, sémiotique, poétique, pragmatique. . .), ou des figures plus instables d'allégeance, d'alliance ou de convenance entre logique, psycha nalyse et histoire. Est-il possible, en remontant les lignes de plus grande pente de l'éclectisme, de l'empirisme et du néo-positivisme, de faire s'ouvrir d'autres questions ? L'addition naive de la linguistique à l'histoire et à la psychanalyse en une « théorie du discours» ne fait décidément pas le compte : ceux qui ont pu donner jadis ou naguère dans ce fantasme théorique unificateur ont appris à en redouter les effets universitarisants qui sont une autre manière, théori- ciste, de liquider l'affaire en croyant l'avoir déjà résolue «dans son principe». Toucher à ce triple réel de la langue, de l'histoire et de l'inconscient, sans présupposer une théorie plus ou moins générale de l'objet «discours», cela exige d'explorer le réseau des questions qui y circulent : nos terrains de rencontre problématiques. De quoi nous protégeons-nous, en nous déclarant linguistes, historiens, ou psychanalystes ? Et si c'était des effets de la tangue, en tant qu'ils affectent les limites de l'histoire, de la linguistique et de la psychanalyse ? D'où, en vrac, nos questions : — à quelle matière a-t-on affaire avec la «matérialité discursive» ? Le dis cours : déchet de la langue des linguistes, ou horizon au-delà de ta phrase ? Qu'est-ce que faire énoncé ? Qu est-ce qui limite un énoncé ? Y-a-t-il de l'expression qui ne fasse pas énoncé ? Que! rapport y-a-t-il entre le régulier dont se fonde la théorie de ta gram maire et ce qui se répète sous ta forme d'énoncés récurrents dans le para graphe, le retour, la reprise, la mémoire, ta répétition. . . ? — de quelle nature est la déception devant les disciplines qui prétendent parler de la langue, du texte, du discours, de la parole.. . ? En histoire, des évènements (éléments de parole et de pratiques) appa raissent dans une autre dimension que celle de la modification des énoncés : 12 pourquoi y-a-t-il de telles difficultés à penser le tien entre résis tan ce/ré vol te et discursivité ? Comment les formes d'existence historique des idéologies dominées tou chent-elles à la question de la tangue ? Y-a-t-il des niveaux linguistiques descriptibles, susceptibles de caractériser comme telle «de l'idéologie dominée» ? Y-a-t-il des discours qui ne revêtent pas la forme de la domination idéo logique ? Comment existent les discours de la révolte avant la politique dans son rapport à l'État ? — Quand on parle de lutte des classes, à quoi a-t-on affaire en ce qui concer ne ta langue ? Le tissu de l'antagonisme est-il de l'ordre du rapport ou du non-rapport ? « Tenir le discours de l'adversaire)) : est-ce le porter, le saisir, le retourner, le prendre au mot ? Qu'est-ce qui fait bord, frontière, dans l'idéologie ? L'inénonçable d'une idéologie, ce qui s'en trouve forclos : y-a-t-il un sujet pour le dire ? Qu'est-ce que parler en son propre nom en politique ? Le porte-parole est-if jamais anonyme ? Actes du colloque (24, 25 et 26 avril 1980) Ouverture du colloque Michel Pêcheux C.N.R.S. - Paris VII Ce colloque sur les matérialités discursives constitue un pari. En l'organisant, nous avons voulu provoquer une rencontre entre des histo riens, des linguistes et des analystes. Donc un mélange de pratiques, transportant chacune ses marques : La poussière des archives, la craie des tableaux et la sueur des divans . . . Notre pari d'organisateurs (nous qui n'appartenons pas nécessairement à l'une de ces trois catégories, professionnellement parlant), c'est que cette rencontre n'en deviendra pas pour autant impossible. J'ajoute tout de suite que nous n'avons prévu aucun dispositif neutrali sant les marques en question : le fait qu'il y a de la parole et qu'il y a de l'écriture - autrement dit : du discours - ne saurait nous autoriser à consi dérer d'emblée que, à un certain niveau de généralité, homogénéisante et auto-nettoyante, nous parlons tous de «la même chose». Car c'est tout simplement faux. La question théorique des matérialités discursives surgit précisément de ce qui, entre l'histoire, la langue et l'inconscient, résulte comme hétérogénéité irréductible : un ressassement de paroles entendues, rapportées ou transcrites, un fourmillement d'écrits citant des paroles, et d'autres écrits. Des récits, privés ou officiels, véridiques ou rêvés, des murmures secrets et des hurlements, des lettres de toutes sortes, des professions de foi, des pro messes, des accusations et des aveux, des poèmes, des romans et des chan sons, des répliques de théâtre (sur scène ou à la ville), des programmes, des sermons, des appels et des consignes, des traités (de paix ou du vide) et des lois (de la pesanteur, de la République, du Talion. . .), des descriptions, des recettes, des règlements et des codes, des leçons et des conférences, des pro clamations, des célébrations, des déclarations (de guerre, ou d'amour) des citations (entre guillemets, ou à l'ordre de la Nation), des inscriptions, et des notes, des notes en bas de page, des notes de séance, des notes d'infa mie. . . Et dans ce ressassement et ce fourmillement, des réseaux polarisés de répétition déjouant l'identité, des ruptures qui prennent l'allure de genèses continuées, des points d'antagonisme qui s'embrasent, et s'apaisent pour reprendre ailleurs. 16 «L'étrangeté familière» des matérialités discursives ne se manifeste-t-elle pas au moment paradoxal où des historiens découvrent que le texte des archives n'est pas transparent à leur regard, où des linguistes s'avertissent que tout système linguistique recèle un reste asymétrique irreprésentable, où des ana lystes viennent buter sur le lien entre la religion comme effet de groupe consolidé et la pérennité du sens ?. . . Mais comment se déprendre de l'évidence théologique du sens, à l'instant où sa défaillance le rend encore plus précieux ? Et comment voir du dehors ce à l'intérieur de quoi le regard est pris ? En d'autres termes (pour reprendre ceux de J.M. Rey) : «Sait-on ce que c'est que lire ?». Cette question ne surgirait-elle pas de ce que les mots n'arrivent pas tou jours à s'épeler et à s'articuler ? de ce qu'ils se brisent parfois, et virent bizarrement ? de ce qu'ils ne forment pas toujours des phrases ? et de ce qu'il arrive que des phrases restent en suspens, ou en souffrance, sans parve nir à se «tenir debout» ? Comment alors ne pas aller jusqu'au bout, et ne pas reconnaftre que la prétention d'analyser des discours met nécessairement en jeu ce que j'appel lerai un parti pris pour i'imbécilité ? Faire l'imbécile : c'est-à-dire décider de ne rien savoir de ce qu'on lit, de rester étranger à sa propre lecture, d'en rajouter systématiquement sur le morcellement spontané des séquences, pour achever de libérer la matière verbale des restes de sens uploads/Litterature/ materialites-discursives.pdf
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- Publié le Jui 01, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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