Société des Missionnaires d’Afrique - Série historique n° 6 ___________________

Société des Missionnaires d’Afrique - Série historique n° 6 _______________________ Mgr Anatole-Joseph TOULOTTE Membre de l’équipe de fondation de Ste-Anne de Jérusalem Successeur du Cardinal Lavigerie comme Vicaire Apostolique du Sahara-Soudan 1852 – 1907 Jean-Claude CEILLIER, M.Afr. Anatole Toulotte en 1874 à 22 ans, année de son ordination Rome Société des Missionnaires d’Afrique 2006 Mgr Anatole-Joseph TOULOTTE Fondateur de Ste-Anne de Jérusalem, Successeur du Cardinal Lavigerie comme Vicaire Apostolique du Sahara-Soudan 1852 – 1907 ____________________________ Quand on étudie l’histoire on fait toujours des rencontres. Des visages sortent peu à peu du brouillard du temps et on est surpris de découvrir combien certains de ces hommes et de ces femmes peuvent nous devenir proches. Dans le cadre des études consacrées à l’histoire de la Société des Missionnaires d’Afrique les pages qui suivent voudraient aider à la rencontre d’un missionnaire de la toute première génération, Anatole-Joseph Toulotte. Il est entré dans la Société déjà grand séminariste en 1873, il a connu le Cardinal qui l’a beaucoup estimé, et il a participé à de nombreux événements de ces temps de fondation. En plus de nous faire découvrir une personnalité exceptionnelle, son parcours, à bien des égards, est représentatif de ce qu’ont vécu un bon nombre des premiers missionnaires d’Afrique dans les années 1870-1900. LES PREMIÈRES ANNÉES (1852-1873) Anatole Toulotte est né en France dans le village de Lisbourg, diocèse d’Arras, le 7 janvier 1852. Son père était bourrelier, famille plutôt pauvre qui comptera neuf enfants, sept garçons et deux filles : Anatole est l’aîné. Le curé du village prenait alors en charge les enfants qui lui semblaient mériter d’être suivis, et il prend ainsi le petit Anatole à l’école du presbytère. Mgr Toulotte gardera toute sa vie beaucoup de reconnaissance à ce prêtre qui l’a ainsi pris en charge. Dans cette région il y avait une dévotion marquée à l’égard de saint Benoît Labre, lui-même originaire de l’Artois : cela mérite d’être signalé car, plus tard, de nombreux observateurs souligneront une réelle parenté spirituelle entre lui et Mgr Toulotte. En octobre 1865 Anatole quitte son village pour le collège de Sainte- Austreberthe, dans la ville voisine de Montreuil-sur-Mer, et il y passe six années. Il y reviendra présider une messe solennelle plus de 25 ans plus tard, en août 1891, à l’occasion de sa consécration épiscopale ; il rappellera alors qu’il n’est pas le seul ancien du collège à être parti vers l’Afrique : en effet quatre Missionnaires d’Afrique venaient déjà de ce collège, les pères Lourdel, Desoignies, Modeste Raux et Poultier . À la fin du collège, en 1871, Toulotte entre au grand séminaire d’Arras, et une année plus tard il y reçoit la tonsure et prend la soutane. On remarque déjà son caractère silencieux et effacé, plutôt porté à la solitude. A cette époque proche de la fondation de la Société des Missionnaires d’Afrique, quelques pères sillonnaient la France pour susciter des vocations. Le père Charmetant, un des tout premiers compagnons de Lavigerie, passe ainsi dans le diocèse d’Arras et parle de la mission aux séminaristes. Deux d’entre eux obtiennent de l’évêque l’autorisation de rejoindre cette nouvelle congrégation missionnaire, Toulotte lui-même, et Léonce Bridoux, qui deviendra vicaire apostolique du Tanganika où il mourra à l’âge de 35 ans, en octobre 1890. Le futur père Lourdel les rejoindra l’année suivante. FORMATION ET PREMIÈRES RESPONSABILITÉS (1873- 1877) Les deux amis débarquent à Alger le 24 février 1873, et on est stupéfait d’apprendre que c’est à ce moment-là seulement que Toulotte écrit à ses parents pour leur dire où il se trouve : il avait quitté sa famille sans les informer, ayant le sentiment que Dieu lui demandait d’agir ainsi. On peut penser qu’il redoutait d’avoir à résister aux pressions de ses parents qui, de fait et malgré leur foi profonde, souffriront longtemps de cette séparation. Le noviciat commence le jour même à Alger pour les deux nouveaux arrivés. Le noviciat n’est pas à cette époque aussi strictement réglementé qu’il le sera plus tard et l’arrivée des novices, trente-huit en tout cette année-là, s’échelonne entre janvier et février. C’est une grosse promotion, qui compte entre autres futurs missionnaires des noms qui marqueront à des titres divers l’histoire de la Société, tels Livinhac qui succédera au Cardinal et sera Supérieur Général pendant trente années, Louail, futur premier provincial d’Europe (en 1888), Delattre qui deviendra célèbre par ses travaux d’archéologie à Carthage, Jamet, fondateur de la procure de Zanzibar, etc. Pères Léonce Bridoux, Alfred Louail, Alfred-Louis Delattre, Louis Jamet Les deux amis venus du Nord prononcent leur serment missionnaire un an plus tard, le 2 février 1874, et reprennent alors leurs études de théologie. A cette époque cependant le cursus des études était loin d’être aussi structuré qu’aujourd’hui et Mgr Lavigerie a un grand besoin de personnel. Comme il est fréquent dans ces premières années de l’histoire de la Société, le père Toulotte se voit alors confier une charge, tout en continuant ses études de théologie : il est nommé responsable d’une section d’enfants à l’orphelinat fondé par Lavigerie, et cela dure quatre mois. Toulotte reçoit alors les ordres mineurs à N.-D. d’Afrique et intègre le scolasticat, installé depuis quelques mois dans les locaux attenants à Notre- Dame d’Afrique. En septembre 1874 il est nommé professeur d’arabe au noviciat de Maison-Carrée. Il est finalement ordonné sous-diacre, diacre et prêtre en octobre 1874, en même temps que son compagnon Léonce Bridoux et douze autres missionnaires. Ils sont ordonnés par l’évêque de Constantine, Mgr Robert, un ami de Lavigerie qui deviendra par la suite évêque de Marseille. Après son ordination, il continue son service d’assistant du supérieur et de professeur d’arabe au noviciat, et on sait qu’il acquerra une excellente maîtrise de cette langue. En 1875, l’année suivante, les Jésuites quittent le noviciat et c’est le père Charbonnier qui en prend la direction. Un événement montre alors la confiance que lui font ses confrères : en 1875, au Chapitre Général qui se réunit à N.-D. d’Afrique, le père Toulotte est élu membre du Conseil Général de la Société. Il s’agit du deuxième Chapitre Général (le premier ayant eu lieu l’année précédente), qui se tient directement sous la responsabilité de Mgr Lavigerie et compte quinze participants. Pourquoi ce nouveau Chapitre si rapproché du précédent ? Lavigerie a constaté que le vicaire général, le père Deguerry, est souvent seul pour prendre des décisions, et il décide donc d’augmenter de deux à quatre le nombre des assistants. À cette époque, la Société des Missionnaires d’Afrique, vieille seulement de quelques années, avait un effectif total de 56 missionnaires. Toulotte est présent à cette assemblée comme représentant de Maison-Carrée, et il est élu assistant général dès le premier tour de scrutin, le 18 octobre 1875 ; il est âgé de 23 ans. Et comme le petit nombre oblige au cumul des fonctions, on lui confie en même temps la charge de trésorier de la Société. Tout cela l’amènera à voyager souvent de poste en poste pendant les trois années à venir. L’année suivante, en 1876, le père Toulotte se voit nommé à une œuvre par laquelle Lavigerie espérait faire naître des vocations venus du monde algérien, le petit noviciat ou noviciat arabe. Créé en 1873, ce pré-noviciat est alors installé dans les bâtiments voisins de Notre-Dame d’Afrique et compte une vingtaine d’élèves. Cette sorte de moyen séminaire se révéla en fait difficile à animer, même si Toulotte, nommé directeur, y fit preuve de réelles capacités d’animateur et d’éducateur. Trois jeunes cependant entreront au grand noviciat l’année suivante. Finalement Mgr Lavigerie décidera en 1877 la fermeture de cet établissement qui ne donnait pas les résultats qu’il en attendait. Cependant, avant même cette fermeture, Anatole Toulotte reçoit une autre affectation qui le conduit, cette fois, vers le Sahara : nous sommes en juillet 1877. BRÈVE EXPÉRIENCE SAHARIENNE (1877-1878) En 1876, trois Missionnaires d’Afrique, les pères Ménoret, Paulmier et Bouchand, sont massacrés au Sahara lors d’une expédition en direction de la boucle du Niger et de Tombouctou. Très impressionné par ce drame le père Anatole Toulotte écrit alors à Mgr Lavigerie pour proposer de prendre la relève des disparus dans une nouvelle expédition vers le sud. Cette démarche impressionne le fondateur qui la commente ainsi dans une lettre au père Deguerry : Le P. Toulotte demande instamment à aller à Tombouctou, à pied et en guenilles, s’il le faut ; j’admire son zèle et aussi sa sagesse, car, pour moi, l’une des causes de la mort de nos chers martyrs est qu’ils ont emporté trop de bagages et de chameaux. On les a crus riches et cela suffisait, pour peu que les Touaregs aient été poussés.1 À défaut d’être investi d’une mission vers Tombouctou comme il le souhaitait, Toulotte est nommé en juillet 1877 au Sahara, plus exactement au poste de Metlili, situé à une quarantaine de kilomètres au sud de Ghardaïa et fondé en décembre 1874. L’histoire de ce poste de Metlili est étroitement liée au grand projet apostolique de pénétration du Sahara qui habite Mgr Lavigerie depuis son arrivée à Alger. Il est convaincu uploads/Litterature/ mgr-toulotte.pdf

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