Les Cahiers de l'Acedle, numéro 3, 2008 La lecture en LE et le rôle de l'anapho

Les Cahiers de l'Acedle, numéro 3, 2008 La lecture en LE et le rôle de l'anaphore : exemple de lecture d'un texte en français Eldina Nasufi Université de Tirana, Albanie Résumé Dans cet article nous traiterons le lien entre le phénomène textuel de l'anaphore et la compréhension du texte en langue étrangère (LE). Pour voir dans quelle mesure les anaphoriques influencent la réalisation de la lecture en LE, nous analyserons un texte en français et nous examinerons les anaphores qu'il contient. Pour réaliser cette analyse du lien entre l'anaphore et la lecture en LE, nous avons travaillé avec un groupe d'étudiants dans le but de tester leur capacité de compréhension. De cette analyse nous avons constaté qu'entre la lecture-compréhension et les anaphoriques il existe un lien étroit. Mots-clés anaphore, lecture, compréhension, analyse textuelle Abstract In this article we aim to treat the connection between the textual phenomenon of anaphora and text comprehension in a foreign language. In order to see how the anaphorics influence reading in a foreign language, we analyse a French text and its anaphorics. For this analysis of the link between anaphora and reading in a foreign language we worked with a group of students to test their comprehension skills. We have observed a narrow connection between reading-comprehension and the anaphorics. Keywords anaphora, reading, comprehension, textual analysis Les cahiers de l'Acedle numéro 3, juillet 2008 http://acedle.u-strasbg.fr Page 115 La lecture en LE et le rôle de l'anaphore... de E. Nasufi Les Cahiers de l'Acedle, numéro 3, 2008 1. Introduction La didactique, étant une discipline transversale, emprunte des notions et des méthodes à différentes sciences telles que la linguistique, la sociologie, l'anthropologie. L'une des sciences auxquelles elle se réfère pour améliorer l'enseignement / apprentissage, est la linguistique textuelle. Dans les recherches à caractère didactique on donne de plus en plus d'importance à l'étude des phénomènes textuels en ce qui concerne les différentes compétences qu'un locuteur doit acquérir en langue étrangère. L'un des objectifs que la didactique se donne est la lecture-compréhension du texte en langue maternelle ou en langue étrangère. Très souvent, pour interpréter le processus de construction du sens d'un texte, en didactique, on s'appuie sur les phénomènes de textualité, lesquels constituent l'objet de la grammaire de texte. Notre objectif, dans cet article, est de voir certains aspects de la lecture en langue étrangère à travers un des éléments les plus importants du texte, l'anaphore (ou phénomène de reprise textuelle). Notre hypothèse est que l'anaphore occupe une place importante dans la lecture du texte en langue étrangère et que ce phénomène est important non seulement pour la compréhension superficielle du texte, mais aussi pour sa compréhension en profondeur. Étant donné que l'anaphore est un phénomène linguistique qui présente des particularités à travers ses différentes formes, il nous semble opportun d'essayer de l'expliciter avant de décrire sa relation avec la lecture. Nous essaierons ensuite de donner quelques principes de base de la lecture en langue étrangère afin de mieux mettre en évidence ce qui relie les deux phénomènes. 2. Les différents types d'anaphores L'objectif principal que nous avons quand nous rédigeons ou quand nous lisons, est que l'ensemble des éléments auxquels nous avons affaire aient un lien cohérent. Qu'il s'agisse d'un texte écrit ou oral, la cohérence en est la caractéristique fondamentale pour que nous le considérions comme un texte. De nombreux éléments doivent s'enchevêtrer pour que le texte ait cette caractéristique et ils sont assez hétérogènes. Ils peuvent concerner aussi bien l'organisation générale du texte (comme, par exemple, les éléments cohésifs) que l'organisation sémantique du texte (comme c'est le cas des éléments de la cohérence). La cohésion et la cohérence sont étroitement liées l'une à l'autre, dans la mesure où la cohésion aide au renforcement de la cohérence du texte. Parmi les éléments qui sont le plus souvent Les cahiers de l'Acedle numéro 3, juillet 2008 http://acedle.u-strasbg.fr Page 116 La lecture en LE et le rôle de l'anaphore... de E. Nasufi Les Cahiers de l'Acedle, numéro 3, 2008 mentionnés pour leur rôle dans la réalisation de la cohérence et de la cohésion du texte on cite les connecteurs, les temps verbaux, les anaphoriques, la progression thématique. L'anaphore a été définie traditionnellement comme la "reprise d'un élément antécédent dans un texte" (Pellat, Rioul & Riegel, 1994 : 160). Les expressions anaphoriques ne sont pas autonomes, leur interprétation dépend d'une autre expression qui se trouve dans le texte. Dans la phrase suivante nous pouvons voir concrètement ce phénomène. • C'était le premier été que j'ai passé parmi eux. Cet été-la j'ai appris beaucoup de choses. Dans cet exemple le terme "été" est repris par le terme "cet été-là" et pour que la reprise ait du sens, il faut qu'elle trouve sa référence dans la partie antécédente du texte. Il y a aussi des cas où le terme qui reprend se trouve devant celui qui est repris et, dans ce cas, on parle de cataphore. • Cela seul me rend heureuse, ta réussite et ton succès. Le pronom "cela" reprend les deux termes "réussite" et "succès". L'expression anaphorique en question ne suit pas, mais précède la partie du texte à travers laquelle elle trouve son sens. L'anaphore est un phénomène très étudié et qui, par conséquent, reçoit différentes dénominations, lesquelles varient en fonction de différentes caractéristiques que les auteurs veulent mettre en évidence. Ainsi, on rencontre le terme de "diaphore" qui englobe l'anaphore et la cataphore (voir Maillard, 1974). Existe également la dichotomie "endophore / exophore" (Apothéloz, 1994). Cette deuxième dénomination se base sur le fait que, dans le cas de l'endophore, l'expression complète son sens dans le texte et, dans le cas de l'exophore, le sens est complété par la situation extralinguistique. En dehors de ces appellations, on rencontre également les termes de "substitution", "expression anaphorique" ou tout simplement "anaphoriques". Riegel, Pellat & Rioul (1994) proposent une classification des expressions anaphoriques. a) l'anaphore pronominale : reprise d'un terme à travers différents types de pronoms tels que pronoms personnels, pronoms démonstratifs, pronoms possessifs, pronoms relatifs ou pronoms indéfinis. • Marie était la seule dont on n'avait pas parlé ce soir-là. • La seule différence de ton devoir par rapport au mien est la forme et non pas le contenu. Les cahiers de l'Acedle numéro 3, juillet 2008 http://acedle.u-strasbg.fr Page 117 La lecture en LE et le rôle de l'anaphore... de E. Nasufi Les Cahiers de l'Acedle, numéro 3, 2008 b) l'anaphore nominale : reprise d'un terme à travers un nom ou un groupe nominal. Il existe quatre groupes d'anaphores nominales : - l'anaphore fidèle, qui est la reprise d'un nom uniquement à travers le changement du déterminant. • Louise a trouvé un chien dans la rue. Le chien aboyait sans cesse. - l'anaphore infidèle est la reprise à travers des changements lexicaux : le groupe nominal anaphorique contient des éléments autres que ceux du terme précédent. • Louise a trouvé un chien dans la rue. L'animal aboyait sans cesse. - l'anaphore conceptuelle est la reprise d'un groupe nominal ou d'un segment qui n'apparaissent pas explicitement dans la partie précédente du texte. Elle résume le contenu d'une phrase, d'un paragraphe ou d'un fragment de la partie du texte qui précède. • Vous le retenez pour incapable. Votre préjugé est stupide. Très souvent, cette reprise prend la forme d'une nominalisation et, dans ce cas, le groupe anaphorique contient un nom ou un groupe nominal formés sur une base verbale ou adjectivale, qui apparaissent dans le contexte précédent. • Cette matinée-là, le vieux avait marché longtemps au bord du lac. Son chien l'avait accompagné pendant toute la promenade. - l'anaphore associative se base sur une relation de tout à partie. • C'était des chevaux étranges. Les sabots étaient petits, la crinière soyeuse. (tiré de Maingueneau, 1994 :152) c) l'anaphore adverbiale est la reprise d'un terme à travers un adverbe du type "ainsi", "pareillement" ou de l'adverbe de lieu "là". • Sa mère le priait d'aller chez le dentiste, mais c'était justement là qu'il ne voulait pas aller. d) l'anaphore verbale se réalise au moyen du verbe "faire", qui représente un verbe dénotant un processus. Les cahiers de l'Acedle numéro 3, juillet 2008 http://acedle.u-strasbg.fr Page 118 La lecture en LE et le rôle de l'anaphore... de E. Nasufi Les Cahiers de l'Acedle, numéro 3, 2008 • On n'agit pas comme vous faites. (Molière, exemple tiré de Riegel et al., 1994) e) l'anaphore adjectivale utilise l'adjectif "tel" pour représenter une proposition précédente. • On vous a dit que la décision était sévère, je vous dis que je ne partage pas une telle opinion. Cette typologie des anaphoriques peut être complétée par une classification vue sous un autre point de vue, que donne Jaspersen (1993). L'auteur propose une liste très intéressante et riche des expressions anaphoriques qui ont comme premier terme une préposition. • À : à cet effet, à ce niveau-là, à ce rythme-là, à ce sujet. • DE : de ce coté-là, de cette manière, du même style. • DANS : dans cette acception, dans ce cadre, dans ce cas, dans ce climat, dans uploads/Litterature/ nasufi-cah3.pdf

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