Mars-avril 2014 1 SOMMAIRE 4 Éditorial : Une atmosphère inflammable. Esprit 6 P

Mars-avril 2014 1 SOMMAIRE 4 Éditorial : Une atmosphère inflammable. Esprit 6 Positions – Refus de l’école : fausses raisons et vrai malaise (Joël Roman). Les langues minoritaires en France : une chance pour l’intégration (Marc-Olivier Padis) NOTRE NIHILISME 13 D’un siècle à l’autre (1914-2014) : toujours face au nihilisme. Introduction. Michaël Fœssel et Olivier Mongin 16 Pourquoi le nihilisme ? Michaël Fœssel Face au mot « crise », si souvent employé depuis quelques années qu’il ne renvoie plus à grand-chose, il est utile de redonner sa place au « nihilisme ». Issue d’une histoire, cette notion nous permet de ne pas nous enfermer dans notre présent, et d’interroger aussi bien la destruction du sens qui semble caractériser notre époque que l’appel aux valeurs qui trop souvent prétend y répondre. 27 Quand le sens ne fait plus monde. Entretien avec Jean-Luc Nancy Le constat de la crise du sens ne date pas d’aujourd’hui ; ni même peut-être d’hier. À y bien réfléchir, ne faut-il pas remonter à la Rome antique pour trou- ver l’image d’un « monde » cohérent et sensé ? Mais le monde romain lui- même est entré en crise, crise que le christianisme a révélée, et dans laquelle, à bien des égards, nous sommes toujours. 1. GÉNÉALOGIES : UNE HISTOIRE EUROPÉENNE ? 47 Introduction. Olivier Mongin 52 Enquête : Olivier Abel, Rémi Brague, Jérôme de Gramont, Daniel Lindenberg, Jean-Loup Thébaud 68 Les récidives de la gnose. Entretien avec Bruce Bégout Le gnosticisme, qui identifie le monde au mal, et en un sens le refuse, renaît aujourd’hui non plus comme une doctrine mais comme une réalité objective. Le déni du monde s’incarne dans des espaces urbains sans lien avec leur environnement, dans des produits de la technologie moderne qui rendent l’homme étranger au monde qu’il habite. 75 Nietzsche : un inactuel qui parle encore. Paul Valadier La notion de volonté est au cœur de la Généalogie de la morale. Ce texte, sans doute l’œuvre la plus sombre de Nietzsche, s’intéresse aux ressorts de la volonté, de la faiblesse et de la force chez les individus. Et résonne encore dans la société contemporaine. Sommaire 2 2. RELIGIONS ET NIHILISME : ADVERSAIRES OU COMPLICES ? 80 Introduction. Jean-Louis Schlegel 88 Enquête : François-Xavier Bellamy, Ami Bouganim, Daniel Lindenberg, Denis Moreau, Patrick Royannais 112 Al-Qaida et le nihilisme des jeunes. Olivier Roy On parle souvent, au sujet des terroristes islamiques, de « nihilisme du croyant ». Bien souvent, ceux qui commettent des attentats suicides ne le font guère pour des raisons théologiques ; ils sont la plupart du temps jeunes, par- fois convertis, en quête d’appartenance. Et si finalement ce nihilisme était davantage une question de génération que de religion ? 117 Une perspective extrême-orientale. Bernard Stevens Le bouddhisme est parfois perçu comme une sagesse nihiliste. Or l’œuvre du penseur japonais Keiji Nishitani, qui s’articule justement autour de la notion de nihilisme, montre bien que celle-ci est un produit de notre époque, de notre modernité, ce dont la catastrophe de Fukushima a été la tragique métaphore. 124 Les athées ont-ils tué Dieu ? Dialogue entre Camille Riquier et Pierre Zaoui Si la « mort de Dieu » est l’acte de naissance du nihilisme, l’athéisme en est- il le synonyme ? Les choses sont plus complexes, d’une part parce que, chez Nietzsche, le christianisme est aussi l’une des sources du nihilisme, d’autre part parce qu’être athée ne signifie pas nécessairement refuser de prendre la foi au sérieux. 3. OBSESSION DES VALEURS, TRIOMPHE DU RIEN 131 Introduction. Joël Roman 132 « Les eaux glacées du calcul égoïste. » Jean Vioulac Dans l’analyse de Karl Marx, la logique capitaliste dévalorise toute réalité par son évaluation marchande. En effet, c’est la valeur d’échange qui prime, dans un système où l’on définit toute chose par sa capacité à être vendue et tout travail par sa capacité à produire cette valeur. Car le capital n’est autre que la valorisation de la valeur elle-même. Le nihilisme n’est pas loin… 137 Enquête : Rémi Brague, Jean-Philippe Domecq, Jean-Joseph Goux, Jean-Claude Monod, André Orléan, Philippe Raynaud, Camille Riquier, Joël Roman, Pierre Zaoui 164 Le nihilisme de l’après-pétrole. Gaël Giraud L’énergie est le moteur de nos sociétés. Mais peut-être n’avons-nous pas suffi- samment vu à quel point elle pouvait aussi être, liée au progrès social ou à la régression. Le développement de la société de consommation a largement été lié au pétrole. À l’heure où les énergies fossiles se raréfient, comment recons- truire le sens, pour ne pas céder à la peur du rien ? 173 Le nihilisme gris contemporain. Yves Michaud Nous ne sommes plus aujourd’hui dans le nihilisme barbare, sauvage, du XXe siècle, mais dans un nihilisme soft. On ne veut pas le néant, mais on ne sait pas bien ce que l’on veut ; alors, on veut ce que les autres veulent. Le nihilisme contemporain est conformiste et hédoniste : on se laisse déterminer par la volonté des autres ou par son propre plaisir. Sommaire 3 180 « Croire dans ce monde-ci ». Michaël Fœssel et Olivier Mongin 184 Présentations des auteurs ARTICLES 185 Faut-il abandonner l’euro ? Anne-Laure Delatte Des économistes et des politiques en appellent à la sortie de l’euro, qui serait responsable de la crise actuelle. Si l’euro demeure une monnaie incomplète, une sortie de l’Union monétaire, quel que soit le scénario envisagé, aurait des conséquences économiques catastrophiques. In fine, c’est au politique qu’il faut en appeler, à la veille des élections européennes, pour relancer l’intégra- tion budgétaire et faire ainsi de l’euro une véritable monnaie unique. 196 Valérie Rouzeau. La grâce et la gravité. Poèmes présentés par Jacques Darras JOURNAL 199 Querelles de familles (Michel Marian). Istanbul, la fin du système Erdogan ? (Guillaume Perrier). L’espoir de la constitution tuni- sienne (Édith Lhomel). Le Portugal, la démocratie et l’Europe (Guilherme d’Oliveira Martins). Mourir dans la rue (Véronique Nahoum-Grappe). Top chef, l’excellence à la française ? (Alice Béja) BIBLIOTHÈQUE 219 Repère – Le théâtre et ses spectateurs, par Selim Lander 225 Librairie. Brèves. En écho. Avis Abstracts on our website : www.esprit.presse.fr Couverture : © Sophie Chivet/Agence Vu Mars-avril 2014 4 Éditorial Une atmosphère inflammable UNE simple rumeur peut désormais conduire à déscolariser des enfants, un appel de groupuscules mal identifiés jeter des mani- festants dans les rues, un sketch inquiéter les autorités, un livre pour enfants affoler des responsables politiques… Une surenchère d’in- dignation bruyante conforte l’ambiance de panique morale. Que penser de cette atmosphère inflammable où le moindre fait divers peut accaparer l’attention et les commentaires ? La contagion virale favorisée par les nouvelles technologies offre bien sûr une force de diffusion et une vitesse de propagation inouïe aux idées les plus farfelues. Mais la technologie n’explique pas tout : la réception favorable accordée aux théories du complot les plus grotesques montre une montée de la crédulité et un affai- blissement inquiétant du sens commun. Avant le développement de l’internet, la presse et la télévision étaient tenues pour respon- sables de ces emballements médiatiques à répétition. Mais l’affai- blissement de la presse et le désintérêt croissant pour le journalisme dans les médias télévisuels font émerger une nouvelle réalité : un recul de la discussion informée au profit de querelles demi-savantes et de polémiques bouffonnes. Le journalisme a longtemps constitué un bouc émissaire pratique : c’est lui qui était considéré comme responsable de la dégradation du débat public. La surenchère commerciale imposée par la concurrence du marché prostituait l’esprit civique. Mais ce procès est-il encore d’actualité, alors que le modèle économique de la presse papier s’est effondré et que des titres aussi emblématiques de la presse française que Libération risquent de disparaître ? Au demeurant, ce procès se trompe souvent de cible, en se focalisant sur quelques éditorialistes, alors que le travail de la presse consiste dans une activité collective, organisée dans une rédaction : vérifier, recouper, hiérarchiser, contextualiser… Entendu ainsi, le journalisme peut très bien migrer du papier au numérique. Mais, quoi qu’en disent les pionniers des nouveaux médias, le modèle économique des sites d’information n’est pas mûr : le consentement à payer du consommateur y est plus faible, la concurrence du gratuit plus directe, les revenus publicitaires dix fois inférieurs. Comme le montrent les mésaventures récentes de Libération, la diversification des modes de financement peut rapi- dement mettre en péril la force du titre : monétiser une marque « branchée » en vendant des journées de colloque « clé en mains » aux grandes villes françaises ou en transformant la rédaction en salon gastronomique et culturel, c’est masquer un peu plus au lecteur la réalité du travail journalistique qui permet d’assurer l’in- cessante tâche d’un quotidien. N’anticipons pas trop vite le discours rétrospectif : un autre modèle naîtra sans doute de cette crise. Mais garantira-t-il une infor- mation indépendante ? Et à quelle échéance ? Entre-temps, des titres disparaîtront. Or un titre de presse, c’est aussi une manière de fédérer des lecteurs, de donner forme à des ambiances sociales, de coaliser des préférences ou des curiosités. Et surtout de surprendre ce lectorat, uploads/Litterature/ notre-nihilisme.pdf

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