Module : Ouverture sur la littérature Niveau : M1 Mme. Aït-Aïssa Cours 1 Que pe

Module : Ouverture sur la littérature Niveau : M1 Mme. Aït-Aïssa Cours 1 Que peut la littérature ? [...] Elle peut beaucoup. Elle peut nous tendre la main quand nous sommes profondément déprimés, nous conduire vers les autres êtres humains autour de nous, nous faire mieux comprendre le monde et nous aider à vivre1 « La littérature est le seul instrument qui nous reste pour accéder à la connaissance et à la prise de possession d’un moi en jachère »2 Qu’est-ce que la littérature : Le mot « littérature » est issu du latin « littera » qui a pour signification « lettre » et « litteratura » qui veut dire : écriture, grammaire et culture. Les dictionnaires et les encyclopédies se sont entendus à donner presque la même définition celle : « des œuvres écrites ou orales caractérisées par une dimension esthétique qui les distingue des écrits scientifiques ou didactiques » Cependant ce mot a connu bien des changements au fil du temps, il est passé d’une définition limitée au fait d’écrire en se soumettant à des règles et à des conditions bien définies, à une définition plus universelle et générique. Le mot littérature dans l’antiquité A l’antiquité, la littérature était considérée selon Cicéron (1er siècle avant J-C) comme étant le fait d’écrire un ensemble de lettres, son sens s’est étendu au cours du même siècle avec Sénèque et Tertullien (IIIème avant J-C) pour qui la littérature est la maîtrise technique et savante des textes écrits. 1 Todorov Tzvetan, La littérature en péril, Paris, Flammarion, 2007, p. 69-72 2 Mircea Marghescu, « La question de la littérarité aujourd’hui », Interférences [En ligne], 6 | 2012, mis en ligne le 16 janvier 2018, consulté le 15 janvier 2021. URL : http://journals.openedition.org/interferences/108 ; DOI : https://doi.org/10.4000/interferences.108 Module : Ouverture sur la littérature Niveau : M1 Mme. Aït-Aïssa L’humanisme introducteur des belles-lettres : Sous le signe de l’humanisme, la littérature est passée à l’érudition acquise par les livres (le savoir-lire, le savoir-écrire et les acquis de la pratique de la lecture) notamment avec l’éducation de Gargantua dans l’œuvre de Rabelais. Celui-ci consacre plus de dix chapitres à l’éducation de son héros afin d’en faire un homme épanoui tant dans son corps que dans son esprit ou son âme. Cette définition s’est étendue vers la connaissance des belles-lettres au XVIIe siècle sous le règne de Louis XIV qui a donné le privilège à une vie sociale raffinée empreinte de pratiques culturelles valorisées. Cette notion de belles-lettres, pour définir la littérature, a perduré jusqu’au XVIIIe siècle notamment avec Voltaire qui estimait que la littérature désigne, dans toute l’Europe, la connaissance des ouvrages de goût. Naissance de la subjectivité : Le mot littérature évolue dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle, pour tendre vers la subjectivité. En effet, le grand médiéviste français Michel Zink a démontré que « l’enfance de la littérature française, c’est-à-dire à la fois le moment historique de son apparition et l’élaboration de la notion de littérature dans le domaine français, est marquée par la prise de conscience de la subjectivité ». L’écrivain commence à s’imposer à travers ses écrits et à justifier ses choix (l’expression du moi). Littérature et engagement : Dans son livre qu’est-ce que la littérature, Jean Paul Sartre, estime que la littérature est un engagement. Sa démarche consiste à définir la littérature dans une perspective politique en mettant l’accent sur les valeurs existentialistes de liberté et de responsabilité récusant ainsi les avis de ses détracteurs qui pensent au contraire que la littérature doit être authentique et doit s’affranchir du politique et se centrer que sur elle-même. Il associe le lecteur comme participant à la création littéraire puisque le livre ne peut exister sans l’acte de lecture. Par ce rôle politique, l’écrivain dévoile la société, il place son public devant un choix, celui d’assumer la société telle qu’elle est ou tenter de la changer. Module : Ouverture sur la littérature Niveau : M1 Mme. Aït-Aïssa Littérature et littérarité : La littérarité est un concept inventé par Roman Jakobson. C’est « ce qui fait d’une œuvre donné, une œuvre littéraire ; d’un message verbal, une œuvre d’art ». De nombreux théoriciens ont essayé de définir ce concept sans toutefois parvenir à se mettre d’accord sur une définition unanime. Ils se sont néanmoins entendus sur le fait que « les éléments qui composent l’œuvre ne se combinent plus selon la logique de la réalité, mais selon une logique esthétique spécifique »3 Prenant l’exemple de Riffaterre qui estime que « le texte est toujours unique en son genre. Et cette unicité est, me semble-t-il, la définition la plus simple que nous puissions donner de la littérarité »4, c’est-à-dire que la littérarité relève de ce qui rend un texte unique par rapport aux autres textes, qui le fait sortir du lot des autres écrits, c’est ce qu’on appelle communément le « style ». Cependant ce style pour Riffaterre ne provient nullement de l’auteur mais c’est le texte lui-même. (Texte = Unicité = Style = Littérarité) Ce n’est plus la fonction référentielle qui prime dans le langage littéraire mais la fonction poétique celle-ci étant le seul garant de la littérarité d’un écrit. Exemple : Bientôt nous plongeons dans de froides ténèbres ; Adieu, vive clarté de nos été trop court !... (Baudelaire, chant d’automne) 3 Mircea Marghescu, « La question de la littérarité aujourd’hui », op.cit. 4 Riffaterre Michael, La production du texte, Paris, Seuil, 1979, p. 08 Module : Ouverture sur la littérature Niveau : M1 Mme. Aït-Aïssa Cours 2 Le contexte en littérature : Le contexte est le milieu qui entoure l’œuvre littéraire et qui peut avoir une incidence sur elle, en la déterminant ou en participant à son interprétation. Cette incidence peut toucher le genre, le style, le signifiant…etc. Il existe un contexte interne et un contexte externe. Le contexte interne : il est soit monosémiotique (texte ordinaire), soit polysémiotique (texte avec image). Quand il s’agit du contexte interne on parle de cotexte et il peut être de même sémiotique ou d’une autre sémiotique que l’unité analysée. • Dans le contexte monosémiotique l’unité analysée et son cotexte représente le même produit sémiotique • Dans le contexte polysémiotique l’unité analysée et son cotexte ne représente pas le même produit sémiotique (sont incluses dans le contexte, et les unités textuelles et les unités imagiques) Le contexte externe : ses formes sont diverses et variés, on peut tenir compte du côté : - Sociologique : état de la société à cette époque - Biographique : l’histoire de l’auteur ou sa psychologie - Historique : la grande et la petite histoire - Socioculturel : la culture sociale, rites, habitudes, coutumes - Politique et idéologique : la position politique et idéologie de l’auteur - Les autres œuvres du même auteur ou d’autres auteurs Donc les cinq grandes variables du contexte externe sont l’auteur, le lecteur, le temps, l’espace et la culture. Le temps, l’espace et la culture de l’auteur et du lecteur peuvent être les mêmes comme ils peuvent être différents donc il faut distinguer entre le contexte de production et le contexte de réception. Il existe des approches qui excluent le contexte tel que les approches immanentes (sémiotique, rhétorique…) comme il existe des approches qui excluent l’immanence de l’œuvre (la philologie, la génétique, la thématique, la psychocritique…). Cependant ces approches restent complémentaires bien qu’opposées puisque pour comprendre une œuvre littéraire, il faut un minimum de contextualisation et de description interne. L’auteur : Selon l’étymologie l’auteur est l’agent de l’œuvre, du latin « auctor » c’est celui qui augmente, fait croître, garant d’une vente). La définition de l’auteur évolue selon les siècles et les cultures. Module : Ouverture sur la littérature Niveau : M1 Mme. Aït-Aïssa Dans l’Antiquité, on ne reconnait l’auteur en tant que tel sauf si ses écrits se soumettent aux exigences d’un genre et aux codes de la rhétorique. Dans les textes les plus anciens de la Grèce antique, les aèdes prétendaient recevoir leur parole des dieux par l’intermédiaire des muses. Les auteurs à cette époque s’effaçaient devant leurs écrits, ils étaient seulement des vecteurs d’une inspiration et des porte-parole d’une communauté et non de leurs propres valeurs. La figure de l’auteur n’apparaissait que quand il signait une œuvre et engage sa responsabilité en s’affirmant comme le dépositaire d’un savoir-faire, d’une technique et d’une pensée. En France, ce n’est qu’au XVIIIe siècle que les auteurs acquièrent une reconnaissance juridique et sociale. Le XIXe siècle se l’auteur voit octroyer un statut symbolique inégalés, ses écrits relèvent du divin, il enchante ceux qui le lisent et ses paroles raisonnent comme un chant qui illumine les esprits de cette époque. L’écrivain se transforme progressivement en intellectuel, à travers d’abord la « figure romantique, superbe et solitaire de l’auteur souverain dont l’intention enferme la signification de l’œuvre, puis celle d’un Zola, engagé, accusateur politique »5. Au XXe siècle, Barthes pense que l’écrivain est le médiateur entre son propre moi et la société « son langage littéraire se trouve à l’articulation de l’individuel et du social »6, c’est-à- uploads/Litterature/ ouverture-sur-la-litterature-m1-sdl.pdf

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