Apprendre ! Les talents du cerveau, le défi des machines, S. Dehaene. Éd. Odile

Apprendre ! Les talents du cerveau, le défi des machines, S. Dehaene. Éd. Odile Jacob (2018). Stanislas Dehaene : Professeur au Col- lège de France, président du Conseil scientifique de l'Education nationale. Pour commencer Stanislas Dehaene explique le fonctionnement de notre cerveau et de tous nos neurones en le comparant à un disque dur d'ordina- teur. Il estime que notre connaissance du dictionnaire tiendrait dans un petit fichier informatique de 250 kilo-octets. Nos capacités de connaissance et d'apprentissage seraient-elles infinies ? Comment fonctionne notre cerveau ? « Grâce à l'apprentissage, les données brutes qui frappent nos sens se muent en idées abstraites, raffinées et suffi- samment générales pour que nous puis- sions les exploiter dans des situations nouvelles. En sciences cognitives, nous les appelons des modèles internes. » « René Descartes l'avait déjà pressenti : nous devons apprendre à transformer les entrées visuelles en commandes musculaires. » « Apprendre, c'est construire, au sein de notre cerveau, un nouveau modèle du monde. L'apprentissage permet à notre cerveau de saisir une parcelle de réalité qui lui échappait auparavant. » Tous nos sens enrichissent notre modèle interne et nos représenta- tions mentales. Celles-ci concernent aussi bien celles de la langue française que ce qui concerne nos membres et comment les situer et les faire bouger et aussi la connaissance des objets et nos interactions avec eux : tenir un stylo, faire du vélo, ou bien apprendre à reconnaître des personnes de notre entourage, des voix, leurs goûts. . . Exemple : comment notre cerveau se comporte-t-il pour apprendre la langue maternelle et d'autres langues ? Les langues seraient définies par quelques paramètres qui régissent les combina- toires de chaque langues. Elles seraient enregistrées par les « 86 milliards de neurones, chacun pourvu d'une dizaine de milliers de contacts synaptiques dont la force peut varier ». Des combinatoires sont communes à plusieurs langues. Plus notre cerveau sera en contact avec des combinatoires différentes, plus il apprendra de langues. Si les capacités du cerveau semble infi- nies, comment va-ton le « formater » ? Des exemples sont donnés en comparai- son avec les algorithmes informatiques. D'ailleurs « la plupart des réseaux de neurones observent leurs erreurs, et s'en servent pour ajuster leur état interne dans la direction qui leur paraît le mieux à même de faire diminuer cette erreur. » Il cite, entre autre, Pierre Changeux dans l'Homme neuronal : « Apprendre, c'est éliminer » N'est-ce pas le principe de la rééduca- tion ? Faire et refaire, pour contrôler les erreurs. Enfin, « notre cerveau n'est donc pas simplement soumis, de façon passive, aux entrées sensorielles. Au contraire, il possède d'emblée un jeu d'hypothèses abstraites héritées de son évolution qu'il projette sur le monde extérieur. » Ces informations générales sur le fonc- tionnement de notre cerveau vont nous permettre de mieux comprendre les applications sur notre vie quotidienne et mieux organiser l'orientation que nous devons donner à nos prises en charges orthoptiques. Le chapitre consacré au « savoir invi- sible : les étonnantes intuitions des bébés » révèle les capacités extraordi- naires du nouveau né, ce qu'il sait déjà lors de sa naissance car appris in utero, et tout le raisonnement dont il est capable durant sa première année de vie. Lorsqu'est étudié la « naissance du cer- veau », plusieurs chapitres pour cela : Le cerveau du bébé déjà bien structuré, Les autoroutes du langage, L'auto-orga- nisation du cortex. Tous ces sujets sont décrits de façon simple et avec beau- coup d'exemples, source d'informations au sujet de nos très jeunes patients. « La part de l'acquis » aborde la plasti- cité cérébrale, notion importante en rééducation. Bien sûr le fonctionnement des synapses, l'évolution de leur orga- nisation et celle de la mémoire avec ses différents types. . . doivent se faire dans un certain ordre avec une grande impor- tance de l'âge et l'influence des interac- tions avec le monde. « Qu'est-ce-qu'une période sen- sible ? » est un paragraphe plein d'enseignements pour notre profession d'orthoptiste car il aborde les périodes favorables pour certains apprentissa- ges, périodes qui s'ouvrent et se ferment selon les régions cérébrales concernée. L'exemple de l'apprentissage des lan- gues étrangères est donné. Que veut dire « Recyclez votre cerveau » ? « Il nous reste à comprendre comment l'éducation joue avec la plasticité céré- brale précoce. » « Les synapses et faisceaux de conne- xions se modifient en permanence chaque fois que nous apprenons des connaissances nouvelles. » La lecture recycle les circuits de la vision et du langage parlé. Faisant référence à son livre Les neurones de la lecture Stanislas Dehaene nous dit que lorsque nous apprenons à lire nous réorientons (recyclons) ces circuits afin que les régions visuelles reconnaissent les chai- nes de lettres et qu'elles les envoient vers les aires du langage parlé. Après avoir lu ces deux premiers chapitres, le troisième est une synthèse passion- nante sur quatre piliers de l'apprentissage :  L'attention qui amplifie l'information sur laquelle nous nous concentrons. Chapitre important lorsque l'on sait toutes les difficultés de nos patients dans ce domaine.  L'engagement actif, un algorithme qu'on appelle également « curiosité », et qui incite notre cerveau à évaluer sans relâche de nouvelles hypothè- ses. Il est dit que l'exploration active (avec mouvements de tout le corps) du monde est essentielle au bon développement de la vision. Nous pouvons peut-être faire le rapproche- ment avec la rééducation « active » de l'amblyopie ?  Le retour sur l'erreur : qui compare nos prédictions avec la réalité et cor- rige nos modèles du monde. Là aussi de nombreux exemples : se tromper c'est déjà apprendre. . . Ne pas asso- cier erreur et sanction mais plutôt Revue francophone d'orthoptie 2019;12:50–51 Livres / Fiche de lecture 50 https://doi.org/10.1016/j.rfo.2019.02.014 donner un retour sur erreur rapide et détaillé. Ainsi l'apprentissage, la reprogrammation neuronale, la compensation est plus rapide. N'est ce pas ce que nous devons faire durant les séances de rééducation ?  La consolidation ; qui automatise et fluidifie ce que nous avons appris, notamment pendant le sommeil. Son importance et ce qui se passe dans notre cerveau pendant que nous dor- mons sont développés avec quelques exemples, « Sommeil, enfance et école ». La qualité de celui-ci a été démontrée concernant les performan- ces scolaires, ainsi que chez l'enfant ayant des troubles spécifiques des apprentissages, et chez les enfants hyperactifs, Le dernier chapitre a pour titre : « Réconcilier l'éducation avec les neuroscience ». Une mise en applica- tion tout à fait précise avec des conseils et exemples aussi bien pour nos petits patients que pour les enfants de notre entourage. A lire absolument car des domaines compliqués sont expliqués avec simpli- cité et exemples ! Déclaration de liens d'intérêts L'auteur déclare ne pas avoir de liens d'intérêts. Annick Bouly de Lesdain 13 rue de Neuilly, 94120 Fontenay-sous-Bois, France Adresse e-mail : alesdain@gmail.com Livres / Fiche de lecture 51 uploads/Litterature/ revue-francophone-d-x27-orthoptie-volume-12-issue-1-2019-doi-10-1016-j-rfo-2019-02-014-lesdain-annick-bouly-de-livres.pdf

  • 21
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager