Soldats de France Magazine d’histoire militaire de l’armée de Terre LA SECONDE

Soldats de France Magazine d’histoire militaire de l’armée de Terre LA SECONDE GUERRE MONDIALE N°8 - JUILLET 2018 2 S O M M A I R E Directeur de la publication : Général Dominique Cambournac Rédacteur en chef : Lieutenant-colonel Rémy Porte Rédacteur en chef adjoint : Lieutenant (R) Rémi Mazauric Comité de rédaction : Colonel Thierry Noulens, Lieutenant-colonel Vincent Arbarétier, Lieutenant-colonel Jean Bourcart, Lieutenant-colonel Frédéric Jordan, Lieutenant-colonel Rémi Scarpa, Commandant Julien Monange. Adresse mail : emat-histoire.referent.fct@intradef.gouv.fr En couverture : septembre 1939-10 mai 1940, un artilleur du 402e régiment d’artillerie antiaérienne (RAAA) confectionne une maquette d'avion dans un poste de combat, ECPAD. Réalisation : SIRPA Terre/CPIT6 Saint-Maixent-l'École Témoignage : Le Miroir des limbes. ................................................................................................3 Cas concret : Les spahis de 1940 à La Horgne : tactique et rapport des forces. ..4-6 Bataille : La bataille de Keren des Forces françaises libres (FFL). ..............................7-9 Combat : 1939-1940, la guerre des gaz n’aura pas lieu …. ..........................................10-11 Équipements : La francisation des tenues d’origine alliée au sein de l’armée française libre.................................................................................................................................12-13 Matériels : Le Char B 1 bis..........................................................................................................14-15 Symbolique : Le bonnet de police dans l’armée de Terre de 1891 à nos jours...16-17 Unité : Les groupes de reconnaissance de division d’infanterie............................18-22 Tradition : Les « vieux régiments » de Sa Majesté. ...............................................................23 Chronique BD : Avec le Maréchal Leclerc. ........................................................................ 24-25 Portrait : Le sergent Charles Antoine : un des « Corps-francs ». ...................................26 Littérature : Le journal du Général Buat...................................................................................27 Quiz : connaissez-vous nos OPEX ? « Serval » et « Tacaud »..........................................28 En partenariat avec l'ECPAD 3 « Malgré le fracas des chenilles, il nous sembla tout à coup retrouver le silence : les chars venaient de quitter la route. Une minute nous roulâmes ainsi, délivrés, entre des vergers en fleurs et des bancs de brume. Dans l’odeur d’huile de ricin et de caoutchouc brulé, je tenais nerveusement mes ficelles ; prêt à arrêter le char pour le tir : le tangage, même dans ces champs apparemment unis, était trop fort pour pointer en marche. Depuis que nous avions quitté la route et que les rares formes devinées pouvaient devenir des buts, nous ressentions davantage notre balancement d’anguleuses galères. Les nuages masquaient la lune. Nous entrions dans les blés. C’était la minute où la guerre commence. Nous nous dirigions à la boussole, et ne distinguions que ce qui se découpait sur le ciel ; poteaux télégraphiques, toits, cimes d’arbres ; les vergers à peine plus clairs que la brume avaient disparu, les ténèbres semblaient massées au ras des champs qui nous balançaient ou nous secouaient ; qu’une chenille cassa, nous serions morts ou prisonniers. (…) Que les furieuses vibrations fêlassent une des tuyauteries d’essence, et le char attendrait les obus en tournant sur lui-même comme un chat épileptique. Mais les chenilles martelaient toujours les champs et les pierres, et, par les fentes de visée de ma tourelle, je regardais, au-delà de ce que je distinguais de blés courts, de brume, de vergers, monter et descendre sur le ciel nocturne l’horizon qu’aucune flamme de canon ne rayait encore. Les positions allemandes étaient devant nous ; de face, nos chars ne pouvaient être atteints efficacement qu’à la lunette de tir et au masque du canon. Nous avions confiance en nos blindages. L’ennemi n’était pas l’Allemand, c’était la rupture de chenille, la mine ou la fosse. Surtout la fosse. La mine, on en parlait pas plus que de la mort ; on sautait ou on ne sautait pas, ce n’était pas un sujet de conversation. La fosse en était un : nous avions écouté les histoires de l’autre guerre et, à l’instruction, nous avions vu les fosses modernes, leur fond oblique pour que le char ne puisse relever sa proue, leurs 4 canons antichars déclenchés par la chute. Il n’était pas un d’entre nous qui ne se fût imaginé entre quatre antichars croisés, à l’instant où ils allaient tirer sur lui ». » Un char B1 bis en Normandie en 1940, Conseil Régional de Basse-Normandie. National Archives USA, domaine public. Témoignage Le Miroir des limbes Extrait de Le Miroir des limbes, André Malraux, éditions Gallimard, 1972. Mai 1940. Le char B1 bis Chambertin n° 378 de la 3e division cuirassée progresse dans une rue de Cauroy (Ardennes) pour s’opposer à l'avancée allemande, Cauroy, Ardenne. SCA. France, 1940 4 Cas concret Les spahis de 1940 à La Horgne : tactique et rapport des forces Colonel ABC (er) Thierry Moné À la mi-mai 1940, se joue dans l’Ardenne française une phase cruciale du plan d’attaque allemand contre la France. La Meuse est franchie et les divisions de panzers chargées de l’effort au niveau opératif s’engagent avec tous leurs moyens de combat… à première vue vers le sud-ouest, vers Reims et Paris. En fait, le plan opératif allemand prévoit une conversion de 90 degrés vers le nord – le coup de faucille – qui permet d’emporter un premier succès opératif en longeant initialement la rive droite de la vallée de la Somme, puis en fonçant plein nord jusqu’à la mer. Les meilleures unités françaises et britanniques engagées en Belgique sont ainsi prises au piège et neutralisées. Le général Guderian est l’un des principaux responsables du succès de cette délicate conversion. Manœuvrant avec trois divisions de panzers au niveau de Sedan, il se couvre avec l’une d’elles face à une éventuelle réaction offensive française dans le secteur de Stonne et fonce vers l’ouest avec les deux autres pour enfoncer le dispositif français entre Meuse et Somme. L’espace de manœuvre ainsi conquis permet la conversion opérative vers le nord. Une grande vitesse d’exécution est impérative afin que le dispositif français disloqué n’ait pas le temps de se rétablir. Au matin du 15 mai 1940, les chefs de la 1re et de la 2e divisions de panzers sont bien conscients de l’enjeu et veulent aller au plus vite border la Somme dans le secteur de Saint-Quentin. À la 1re division de panzers, on manœuvre alors avec en tête deux groupements tactiques interarmes de circonstance. L’un de ces groupements est commandé par le colonel Walter Krüger. C’est lui qui aborde le secteur du petit village ardennais de La Horgne, le 15 mai 1940 au matin. Krüger a sous ses ordres le commandant Max Richter pour l’infanterie mécanisée et le commandant Sauvant pour les chars. Dans le village, le colonel Olivier Marc commande la 3e brigade de spahis (3e BS) qui comprend le 2e régiment de spahis algériens (RSA) du colonel Emmanuel Burnol et le 2e régiment de spahis marocains (RSM) du colonel Émile Geoffroy. Le lieutenant Dugué Mac Carthy, commandant le 3e escadron du 2e RSM, résume ainsi la mission de la 3e BS : « Une brèche importante s’étant ouverte entre les 2 e et 9 e armées françaises après la percée du corps blindé de Guderian à Sedan, le 13 mai 1940, la brigade reçoit l’ordre, dans la nuit du 14 au 15, de gagner le village de La Horgne (14 kilomètres au sud de Charleville), de s’y installer défensivement et de barrer la route aussi longtemps que possible aux blindés allemands, qui, venant de Sedan (20 kilomètres à l’est), ne manqueront pas de se présenter. À 9 heures, tout est en place. Ordre du colonel Marc : tenir sans esprit de recul ». Insigne du 2e RSA. Collection particulière. Insigne du 2e RSA. Collection particulière. Illustration Thierry Moné. 5 Cas concret Précédée par quelques avant-postes temporaires à cheval, la position de résistance de La Horgne (Cf. Fig. A - page 4 ) s’articule autour d’une ligne principale (LP), d’une ligne des soutiens (LS), et d’une ligne d’arrêt (LA). La 3e BS ne dispose que d’un canon de 37 millimètres du modèle 1916 et de deux canons antichars de 25 millimètres. Le village proprement dit de La Horgne constitue le centre de gravité des spahis du 2e algériens sur la LP. Les spahis du 2e marocains occupent des lisières boisées en fond de tableau à hauteur de la LA, ainsi que les deux positions antichars de la LS. La première phase de l’attaque allemande (Cf. Fig. B ) se déroule entre 10h et 14h environ. La 13e compagnie est fixée à hauteur des premières maisons. La 11e compagnie tente de déborder à pied par la droite et est également fixée. La 14e compagnie met en oeuvre mitrailleuses et mortiers. La 15e compagnie met en place au moins deux de ses 3 pièces antichars de 37 millimètres et ses deux obusiers légers de 75 millimètres qui tirent un total de 216 obus en début d’après-midi. La 12e compagnie rapproche ses véhicules pour déborder à pied par la gauche quand les appuis lourds et les chars seront en place. Le dernier lien de la 3e BS avec l’extérieur, la station ER 26 ter, est repris par l’échelon supérieur à midi. À partir de 16h30 (Cf. Fig. C ), les Allemands engagent un bataillon de chars à 50 % de son potentiel : 2 compagnies légères et 1 compagnie moyenne, soit environ 12 Pz.III (3,7 centimètres) et 8 Pz.IV (7,5 uploads/Litterature/ soldats-de-france-n08.pdf

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