DU Mll:ME AUTEUR Aux PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE : Essai sur la significat
DU Mll:ME AUTEUR Aux PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE : Essai sur la signification de la mort, 1948. L'~tre et le travail, Les conditions dialectiques de la psychologie et de la socio- logie, 1949. Aux ÉDITIONS DE LA BACONNIÈRE, Neuchâtel, en collaboration avec Louis GUILLERMIT : Le sens du destin, 1948. BIBUOTH~OUE DE PHILOSOPHIE CONTEMPORAINE HISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE ET PHILOSO~HIE G~NfRALE SECTioN diRiGÉE pAR PiERRE·MAxiME SCHUHL, PRofESSEUR À lA SoRbONNE L'HERITAGE KANTIEN ET LA REVOLUTION COPERNICIENNE FICHTE - COHEN - HEIDEGGER PAR JulEs VUILLEMIN PRofesseuR À lA fAculTÉ des lETTRES de CleRMONr•FERRANd PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE 108, BeulEVARd SAiNr•GERMAiN, PARIS 19'14 D~POT L~GAL 1re édition 1er trimestre 1954 TOUS DROITS de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés pour tous pays COPYRIGHT by Presses Universitaires de France, 1954 A Monsieur Martia,l GUllROULT CHAPITRE PREMIER LE DÉPLACEMENT DES CONCEPTS ET LA RÉVOLUTION COPERNICIENNE § 1. La Révolution copernicienne et la critique hégélienne des « déplacements » Dans la Phénoménologie de l'Esprit, Hegel entreprend, à propos de la « vision morale du monde ll, une critique systéma- tique de l'idéalisme kantien. Il en analyse l'ambition philoso- phique; il montre combien peu le résultat lui répond. Sous l'unité de la Révolution copernicienne, il découvre une dualité réelle; il expose les moyens par lesquels cette dualité se cache; il dénombre enfin sous ces divers faux-fuyants deux positions philosophique- ment et existentiellement contradictoires, de telle sorte que l'ap- parente cohésion du kantisme ne résulte que de la rapidité avec laquelle ce dernier passe de la première position à la seconde et inversement. Résultat d'autant plus surprenant que la décou- verte critique promettait d'éviter les erreurs de l'ancienne méta- physique et que dans la Dialectique transcendantale elle préten- dait même décrire la genèse de ces représentations doubles et contraires dont la philosophie avait été encombrée jusqu'à elle. Tel était le projet de la célèbre Révolution copernicienne, qui, faisant tourner l'objet autour du sujet au lieu de faire tourner le sujet autour de l'objet, trouvait un moyen d'opérer le passage de la certitude à la vérité, du Moi au Monde, et semblait achever ainsi les efforts que depuis Descartes la pensée avait accumulés au profit de la subjectivité. Si l'esprit ne connaît a priori des choses que ce qu'il a introduit implicitement en elles, l'analyse transcendantale n'aura-t-elle pas précisément pour fin dans sa déduction de recréer devant nous cette unité primitive du sujet et de l'objet, du moi et de la chose, de la certitude de soi et de la conscience vraie, alors que la recherche dogmatique, partant de la chose seulement, de la vérité et de l'être, ne pouvait expli- J, VUILLEMIN 4 L'HÉRITAGE KANTIEN en dehors de la loi, mais se soumettre à elle. Un terme non impliqué et même rejeté par l'identité copernicienne entre la certitude et la vérité, entre la médiateté et l'immédiateté, se glisse donc subrepticement à son principe. La nature est reconnue nécessaire si la volonté veut ce qu'elle veut. Mais elle reste d'une part hors de l'immédiateté morale, puisqu'elle définit justement l'être et non le devoir, ce qui est extérieur à la loi et non ce qui lui est intérieur, d'autre part hors de la médiateté morale, puisque, loin d'appartenir à la réflexion, elle figure l'être-là situé dans l'espace et le temps et relevant de ce fait de l'immédiateté la plus brutale. Manquant à la fois les deux critères dont l'identité caractérisait la conscience morale, la nature brise dès lors l'iden- tité de la certitude et de la vérité et elle définit même leur exté- riorité radicale. Ainsi l'effectivité du devoir contredit sa pureté. La volonté morale est partagée. La vision morale du monde contient en fait deux visions contraires. « Au fondement de ce rapport se trouvent, d'une part la pleine indifférence mutuelle et l'indépendance spécifique de la nature et de la moralité (comme buts moraux et activité morale), mais se trouve aussi bien, d'autre part, la conscience de l'essentialité exclusive du devoir et de la complète inessentialité et dépendance de la nature (1). » L'analyse du système kantien découvre donc dans l'Analytique de la raison pratique l'indépendance de la nature et de la liberté (pureté morale), dans la Dialectique et la théorie des postulats la dépendance de la nature par rapport à cette même liberté (effectivité morale). Déjà nous pressentons l'universalité de la critique hégélienne. Sous le système moral, c'est tout l'édifice critique qui est en cause. Celui-là ne fait qu'exprimer plus claire- ment celui-ci et la difficulté qu'il rencontre de définir le phéno- mène sans faire implicitement appel à ce que le phénomène, en tant qu'identité du sujet et de l'objet dans l'immanence de la conscience transcendantale, rejetait absolument : la chose en soi, l'altérité de l'absolu. -* * * La solution, la synthèse que Kant prétend apporter sur le plan pratique à cette contradiction s'exprime dans les postulats de la Raison pratique.« Nature et moralité sont indifférentes l'une à l'égard de l'autre, et pourtant la nature doit être dépendante de la moralité ; une synthèse doit donc être postulée qui réconcilie (1) HEGEL, Phénoménologie de l'Esprit, Il, p. 145. LE DÉPLACEMENT DES CONCEPTS 5 ces termes opposés ; cette synthèse se présente en soi dans le premier postulat (harmonie du bonheur et de la moralité), pour soi dans le deuxième postulat (progrès indéfini de la conscience de soi morale par l'harmonie conquise de sa nature et de la mora- lité), en soi et pour soi dans le troisième postulat (celui d'un saint législateur du monde dans lequel les deux termes s'identifient pleinement). Mais la contradiction qui est au fondement de cette vision morale du monde se manifestera dans le développement de ces postulats; elle est du reste incluse dans cette notion d'un postulat qui porte sur l' .2tre ( 1). » Et en effet les trois postulats pratiques qui ne font naturellement que reprendre les trois idées de la Dialectique de la Raison pure, la nature, l'âme et Dieu, posent un être qu'ils ne se contentent pas de recevoir ; ils possè- dent le privilège, à eux seuls réservé, de faire de l'être un prédicat dans un jugement synthétique a priori, qui sans doute, en tant qu'il exprime une croyance et non un savoir, ne nous fournit aucune connaissance de son objet, mais qui néanmoins, du moment qu'il affirme l'être sans une affection préalable dans la sensation, nous montre à l'œuvre pratiquement la productivité du noumène et transforme la subjectivité de l'intention morale en la création tremblante du monde dans la foi. En soi la volonté moralement bonne s'affirme, d'une part comme unité de l'immédiateté et de la médiateté, de la certitude de soi et de la vérité : elle s'épuise dans la décision intérieure qui définit la conscience du devoir. D'autre part, cette décision même implique la subordination de la nature extérieure à la moralité ; ici la réflexion doit devenir immédiateté naturelle, tandis que l'immédiateté morale doit devenir médiate en tant qu'absolu- ment extérieure à la certitude de soi de l'intention. Comment se résout cette contradiction ? Il faut que la nature pénètre dans la réflexion morale, et elle le fait par le bonheur. Celui-ci sert donc pour ainsi dire de schème à la synthèse entre le sujet et l'objet, entre le devoir et son effectivité; -- bien entendu ce schème n'appartient pas à l'imagination, et il est posé sans être connu, comme le fait remarquer la rédaction de la Critique de la Raison pratique dans la mesure où, s'écartant des Fondements de la métaphysique des mœurs, elle s'engage à considérer la nature formelle (la nature comme législation) simplement comme un type de la moralité, et non pas comme un schème proprement dit. Si le bonheur peut donc être appelé schème de la moralité, c'est uniquement si l'on entend ce mot en un sens particulier: comme (1) HYPPOLITE, op. cit., p. 459-460. 6 L'llÉRITA.GE KANTIEN un « schème de la foi », comme la construction pratique et vide de toute connaissance de l'immédiateté naturelle dans la réflexion morale. Ainsi s'éclaire la déclaration kantienne de la seconde préface à la Critique de la Raison pure. Si le criticisme remplace le savoir par la foi, c'est que le centre de la doctrine kantienne est bien, comme le prétend Hegel, dans les postulats de la Raison pratique, c'est que le véritable acte copernicien se joue non pas dans la lumière de la raison théorique, mais dans les exigences de la raison pratique, c'est que le bonheur enfin est le véritable jugement synthétique a priori, jugement simplement pratique et premier par rapport à toutes les connaissances futures dont il fonde en dernier ressort la possibilité, puisque, seul, il permet de passer du sujet à l'objet, de l'intention à la nature, de la loi à l'effectivité. L'identité de la nature et de la moralité qu'exprime le bonheur n'est possible en second lieu que par l'acte de la conscience morale de soi comme telle, par le second postulat, par le pour soi. L'acte copernicien se révèle d'abord à lui-même sous la forme aliénée de la nature. Il est bonheur, âme naturelle, uploads/Litterature/jules-vuillemin-lheritage-kantien-et-la-revolution-copernicienne-fichte-cohen-heidegger.pdf
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- Publié le Mai 03, 2021
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