La guerre est un crime Du même auteur 1. Evangéliser les médias, un défi chréti

La guerre est un crime Du même auteur 1. Evangéliser les médias, un défi chrétien, Edi- livre, Paris, 2016. 2. Médias et formation à la vie consacrée, Edi- livre, Paris, 2015. 3. Jésus au bout du clic. L’Eglise répond à la communication, Baobab, Kinshasa, 2014. 4. Une seule chose te manque. Méditation à l’occasion de mes vingt-cinq ans de sacerdoce, Baobab, Kinshasa, 2013. 5. Philosophie africaine, philosophie de la com- munication. L’universel au cœur du particu- lier, L’Harmattan, Paris, 2012. 6. Philosophie africaine, philosophie de la com- munication. L’universel au cœur du particu- lier, Baobab, Kinshasa, 2011. 7. Prêtre dans la rue, troisième édition augmen- tée à l’occasion de l’Année du sacerdoce (2009-2010), Baobab, Kinshasa, 2010. 8. Jésus au micro. Eglises d’Afrique appelées à la communication, Baobab, Kinshasa, 1994. 9. Liberté d’expression, L’Epiphanie, Kinshasa, 1993. 10. Maintenant ou jamais, chroniques, Sélect, Kinshasa, 1993. 11. Sans jambages, poèmes, Editions du Trottoir, Kinshasa, 1993. 12. Prêtre dans la rue, deuxième édition augmen- tée, Baobab, Kinshasa, 1992. 13. Prêtre dans la rue, Le Bel Elan, Louvain-la- Neuve, 1990. Jean-Baptiste MALENGE Kalunzu La guerre est un crime Kinshasa, 2017 © Editions Baobab, 2017 3145, avenue Kasa-Vubu Kinshasa-Kintambo B.P. 8251 Kinshasa 1 R.D. Congo baobab@isemomi.org Dépôt légal : DB 3.01612-57396 ISBN : 978-99951-86-10-1 A Marjan Hoeijmakers Pour la marche sur les pas de François d’Assise et pour la visite chez Erasme de Rotterdam « Le guerrier n’est pas toujours un criminel, mais la guerre est toujours un crime ». Jean-Marie Muller, Le principe de non-violence. Une philosophie de la paix. « Douce est la guerre pour ceux qui ne l’ont pas vécue ». Desiderius Erasmus, Adages, 3001.IV, I, 1 « Quand on dit qu’il y a guerre tribale dans un pays, ça signifie que des bandits de grand chemin se sont partagé le pays. Ils se sont partagé la richesse ; ils se sont partagé le territoire ; ils se sont partagé les hommes. Ils se sont partagé tout et tout et le monde entier les laisse faire. Tout le monde les laisse tuer librement les innocents, les enfants et les femmes. Et ce n’est pas tout ! » Ahmadou Kourouma, Allah n’est pas obligé. Table des matières Introduction La guerre sent mauvais .............................. 11 1. Comprendre la guerre ? ..................................... 25 1. La guerre des philosophes ? ........................... 27 2. La parole et la violence .................................. 34 3. La raison au piège de la guerre ? .................... 42 4. Les « raisons » de la guerre ............................ 53 Conclusion ........................................................... 58 2. La parole qui tue ................................................. 61 1. Journalisme embarqué et crimes contre les journalistes ..................................................... 62 2. Donner la parole à la violence ? ..................... 75 3. Des journalistes chez les rebelles ? ................ 81 4. Journaliste et tueur ? ....................................... 88 5. Puissance et impuissance................................ 91 Conclusion ........................................................... 98 3. Prier pour la guerre ? ....................................... 101 1. La Bible pue mais rassure ............................ 102 2. Avec Jésus, contre la haine et la vengeance . 106 3. L’Afrique des pasteurs chefs de guerre ........ 110 4. Eglises profanées et pasteurs ciblés en RDC et au Rwanda .................................................... 115 5. François, pape de la non-violence ................ 127 Conclusion ......................................................... 135 Conclusion ............................................................. 137 Introduction La guerre sent mauvais Tout commence par le corps. Le cœur, l’estomac, le nez. Les yeux tentent de repousser la vue du sang répandu. Il y a surtout des odeurs… « Nous sentions mauvais », m’a dit une reli- gieuse burkinabè me racontant la guerre vécue en 1998, dans sa vie missionnaire au Congo- Brazzaville. Avec deux consoeurs, un prêtre et l’évêque, elle a passé trois jours dans une étroite cellule de caserne militaire, après trois premiers jours de marche forcée. Les jeunes soldats commis à leur garde étaient censés les accompa- gner jusqu’aux lieux d’aisance. Et il y avait, parmi ces soldats, des enfants connus qui avaient parfois servi la messe dans l’église pa- roissiale… Nous n’avons jamais accepté d’y aller, renseigne la religieuse. Au lendemain du retrait des rebelles du mou- vement dit du M23 de la ville de Goma qu’ils avaient occupée du 20 au 1er décembre 2012, le journaliste Alain Diasso a écrit : « A Goma, ça 12 La guerre est un crime ‘pue’ du M231. » Le commentaire du journaliste accuse la « roublardise » des membres du mou- vement rebelle dissimulé dans la ville et autour de la ville. Les récits feraient croire à l’univers de La vie et demie ou d’un autre roman du congolais Sony Labou Tansi. Tout y pue la violence et la mort. Entre la fiction et la réalité, la guerre tend à sup- primer toute différence. Pour sa part, le journaliste Laurent Houssay de l’Agence France Presse rapporte les propos d’Edith Bouvier, reporter de guerre, pour qui la guerre, « c'est l'odeur de la mort qui ne disparaît pas, même après dix douches, il faudrait pouvoir s'en défaire, comme on range son gilet pare- balles et son téléphone satellitaire2 ». Mais dans le registre, c’est plutôt de Basan- kusu, dans la province de l’Equateur, que nous vient le titre. L’évêque de Basankusu avait une 1 http://direct.cd/2012/12/04/goma-ca-pue-du-m23.html 2 Lire Laurent Houssay, « Cette odeur de mort qui ne disparaît pas », http://blogs.afp.com/makingof/?post/2013/09/09/Cette- odeur-de-mort-qui-ne-dispara%C3%AEt-pas&pub=0#pr La guerre sent mauvais 13 expression favorite : « Bitumba solo mabe ! La guerre sent mauvais ! » Pendant des années, Mgr Joseph Mokobe a fait répéter la phrase au cours de ses homélies. A Basankusu, nul ne souhaitait revivre les années de guerre. Beaucoup ont perdu des parents. Des familles et des couples se sont disloqués et pour longtemps. Chacun a emporté dans son corps des odeurs et des détonations. L’aéroport de Basankusu avait été un enjeu stratégique pour l’armée gou- vernementale de Kinshasa et celle du chef re- belle Jean-Pierre Bemba. Jamais de mémoire d’homme on n’avait entendu pareilles détona- tions qui secouaient les intestins. Comme adulte, je n’ai personnellement ja- mais vécu la guerre. Mais je ne m’estime pas du tout heureux pour autant. Contrairement à ce qu’a pu penser le philosophe hollandais Erasme au seizième siècle, la guerre n’est pas douce pour moi qui ne l’ai pas vécue. Mais jusqu’où ne suis-je pas une victime collatérale de bien des guerres ? Certains médias semblent tant se délecter des coups de feu, des enfants soldats, des déplacés de guerre et des massacres. Tels sont leurs « su- 14 La guerre est un crime jets » favoris. Des chefs de guerre parés des meilleures intentions et promis aux meilleurs postes dans une vie politique postérieure, tels sont les meilleurs interlocuteurs et invités préfé- rés de tels médias. Ainsi, dans les paysages afri- cains, ne devraient briller que d’anciens sei- gneurs de guerre ! Ce sont des intellectuels qui donnent leur caution à des entreprises guerrières. Et des Eglises consacrent des prières d’invocations pour la survenue de la guerre destinée à consu- mer des ennemis, à brûler des adversaires poli- tiques que la compétition démocratique, par des élections notamment, ne peut contraindre à l’abandon et donc à l’alternance souhaitée. J’ai entendu beaucoup de récits de guerre ra- contés par des survivants. Mais c’est toujours en vain que je demande d’écrire l’un ou l’autre épi- sode pour renseigner notre futur commun et pour ainsi rendre sage et prévenir de nouvelles guerres. Le seul rappel des événements vécus fait trop mal, répondent certains. Ils promettent de laisser passer un peu le temps pour cicatriser des blessures. D’autres trouvent difficile d’apprendre l’art d’écrire avec un récit qui est déjà dur à porter. Apprendre à écrire semble plus traumatisant encore. Il y en a qui s’imaginent La guerre sent mauvais 15 qu’écrire doit même être plus difficile que de vivre une guerre. Et voilà pourquoi je m’oblige ou me résous à traduire à ma manière la conviction qui résume bien des récits entendus : la guerre est un crime. Ces quelques pages veulent donc modeste- ment considérer l’affirmation selon laquelle la guerre est un crime. Il ne s’agit pourtant pas de rapporter des émotions. Au défi de l’actualité, il s’agit ici de prévenir contre la culture de la vio- lence qui tend à s’imposer dans les consciences et qui affleure dans les discours. C’est un devoir d’intelligence qui est exercé ici. C’est un appel de la philosophie dans ce que cet amour de la sagesse plaide radicalement pour la vie. La biographie officielle de bien des personna- lités politiques escamote la période de leur vie passée dans une rébellion. Ces hommes et femmes préfèrent s’afficher comme des artisans de la paix. Ils émeuvent bien lorsque, la main sur le cœur, ils dénoncent tout nouveau seigneur de guerres. Et les hérauts des guerres d’hier de- viennent ainsi des héros de la paix d’aujourd’hui ! Un Paul de Tarse, persécuteur devant l’éternel, est bien devenu un jour l’apôtre de la paix. L’ancien président sud-africain Nel- son Mandela, enterré le 15 décembre 2013 comme l’icône mondiale de la non-violence des 16 La guerre est un crime temps modernes, ne figurait-il pas, jusqu’en 2008, sur la liste des terroristes reconnus uploads/Litterature/la-guerre-est-un-crime-019.pdf

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