i Université de Montréal Les incidences littéraires du fragment dans les oeuvre

i Université de Montréal Les incidences littéraires du fragment dans les oeuvres Monsieur Teste de Paul Valéry et Palomar d’Italo Calvino par Marie-Pier Beaulieu Département de littérature comparée Faculté des arts et des sciences Mémoire présenté à la Faculté des arts et des sciences en vue de l’obtention du grade de M.A en littérature comparée août 2010 © Marie-Pier Beaulieu, 2010 ii Université de Montréal Faculté des arts et des sciences Ce mémoire intitulé : Les incidences littéraires du fragment dans les oeuvres Monsieur Teste de Paul Valéry et Palomar d’Italo Calvino Présenté par : Marie-Pier Beaulieu a été évalué par un jury composé des personnes suivantes : Terry Cochran Président-rapporteur Wladimir Krysinski Directeur de recherche Jacques Cardinal Membre du jury iii Résumé/Abstract Rédigés de manière non linéaire, Monsieur Teste (1946) de Paul Valéry et Palomar (1983) d’Italo Calvino posent les limites de l’intellection pure et les possibilités du texte littéraire à rendre compte d’une conscience, celle des sujets – Teste et Palomar – , comme les témoins réfléchis des phénomènes de l’univers. Bien qu’issus d’époques et de mouvements littéraires différents (poésie moderne française de l’entre-deux guerre chez Valéry, le néoréalisme italien chez Calvino) les deux auteurs parviennent néanmoins à une écriture comparable, qui valorise l’éclatement formel des catégories romanesques conventionnelles (intrigue, espace, temps, personnage) vers un nouveau réalisme, plus libre et moins contraignant. Que ce soit par le récit composites Monsieur Teste où Valéry met en scène Teste, un homme taciturne et solitaire vivant de l’intérieur, ou encore Palomar dont le protagoniste décide, un beau jour, d’arpenter du regard la moindre parcelle de l’univers, un élément demeure constant : le fragment, comme manière d’appréhender et de comprendre le monde et, par ricochet, de se saisir soir-même. L’analyse des incidences littéraires du fragment nous permettra d’interroger et de mettre en lumière, en les comparant, l’écriture fragmentaire de Monsieur Teste et Palomar comme la création d’une structure textuelle, mais aussi comme une forme donnant vie à un contenu : la pensée prenant conscience de ses actes. Mots clés : fragment, littérature, consctruction, oeuvre, sujet, connaissance. Written in non-linear fashion, Paul Valery’s Monsieur Teste (1946) and Italo Calvino’s Palomar (1983) establish limits for pure intellection and modern literatures possibility to account for subjective consciousness – that is, for Teste and Palomar – as thinking witness to phenomena of the universe. Althought stemming from different literary movement (for Valery, modern poetry of the inter-war period and, for Calvino, Italian Neorealism), both writers produce a similar form of writing that valorises the formal explosion of conventional categories (plot, spacetime, character) and points toward a new realism, freer and less restrictive. Whether it is in the composite narrative of Monsieur Teste representing Teste, a taciturn and solitary man with an inner life, or that of Palomar who suddenly decides to visually inventory the smallest parcels of the universe, one element remains constant : the fragment as a way of seizing and understanding the world and, indirectly, one self. Analyzing the fragment’s literary effects will allow us to reflect on and demonstrate by way of comparison, how the fragmentary writes of Monsieur Teste and Palomar create a textual structure as well of a form giving life to a content : thought becoming aware of its actions. Keywords : fragment, literature, construction, work, subject, knowledge. iv Table des matières Page titre i L’identification du jury ii Résumé /Abstract iii Table des matières iv Abréviations et sigles utilisés v Dédicace vi Remerciements vii Introduction 1 Chapitre I : La poétique du fragment dans Monsieur Teste et Palomar L’espace fragmentaire comme dialectique du mouvement 7 Le regard fragmenté 29 Le fragment comme voix narrative 34 Calvino : arsenal d’un écrivain à contraintes 41 Chapitre II : La conduite du refus chez Valéry et Calvino L’écriture fragmentaire comme totalité romantique ? 54 L’écriture fragmentaire comme contestation romanesque ? 68 La prose lapidaire : un style riche en inventions 81 Chapitre III : Pour un déplacement symbolique de la pensée Teste et Palomar comme purs impossibles accomplis ?1 86 Le fragment : de l’écriture à la lecture 100 Conclusion 109 Bibliograpgie 114 v 1 Expression empruntée à Jean Levaillant dans sa préface de l’ouvrage Valéry devant la littérature de Michel Jarrety, p. 12. Abréviations et sigles utilisés Pour les citations de Palomar, nous utilisons deux éditions. La première en langue originale. Lorsque nous citons la version italienne, le titre est indiqué suivi de la page. Lorsque nous utilisons la traduction de Jean-Paul Manganaro le titre Palomar est directement suivi de l’abréviation trad. ainsi que du numéro de page. Pour les citations tirées des Oeuvres, 2 volumes, de Paul Valéry, Gallimard, Bibliothèque de La Pléiade, 1957 et 1961, nous abrégeons par OE. I, pour le tome I, et OE.II, pour le tome II. En ce qui concerne les quelques extraits des Cahiers de Paul Valéry nous les tirons directement de l’ouvrage Paul Valéry philosophe d’art de Patricia Signorile, publié avec le concours du Centre National de la Recherche Scientifique, 1993, Librairie philosophique J.Vrin, Collection « Essais d’art et de philosophie ». Tous les extraits des Cahiers font référence au fac- similé, tome I à XXIX, C.N.R.S., 1957-1962, préface de Louis de Broglie. Nous indiquons le numéro du volume suivi de la page concernée par l’auteure pour les fragments utilisés. Ci-dessous sont précisées les années réunies dans chaque tome. I (1894-1900) II (1900-1902) III (1903-1906) IV (1906-1913) V (1913-1916) VI (1916-1918) VII (1918-1921) VIII (1921-1922) IX (1922-1924) X (1924-1925) XI (1925-1926) XII (1926-1928) XIII (1928-1929) XIV (1929-1931) XV (1931-1932) XVI (1932-1933) XVII (1933-1935) XVIII (1935-1936) XIX (1936-1937) XX (1937-1938) XXI (1938-1939) XXII (1939-1940) XXIII (1940) XXIV (1940-1941) XXV (1941-1942) XXVI (1942-1943) XXVII (1943) XXVIII (1943-1944) XXIX (1944-1945) vi À mes familles ainsi qu’à mes deux soleils : Eliot et Charlie vii Remerciements Dans un premier temps, je désire remercier mon directeur Wladimir Krysinski avec qui j’ai toujours voulu travailler. Merci de m’avoir donné à lire Valéry et Calvino dans un cours au baccalauréat ; Je tiens aussi à souligner mon admiration à l’égard de Terry Cochran et Jean-Claude Guédon, tous les deux professeurs au Département de littérature comparée de l’Université de Montréal. Leur passion pour la littérature n’a d’égale que l’intérêt que nous avons tous à vouloir suivre leurs cours ; À Jacques-Bernard, auprès de qui le dialogue est si naturellement possible ; À mes fidèles amies, qui me prennent comme je suis et sans qui je n’aurais pu terminer cette longue aventure ; Et finalement, une reconnaissance toute spéciale à mon amoureux et complice de longue date Stéphane, qui par son amour donne vie à toute cette théorie. 1 INTRODUCTION La poétique, du grec ancien poïesis, implique la création d’un sens, alors que le fragment, du latin frangere, évoque la brisure. Or, comment parvenir à créer ce qui doit initialement être rompu, comme le rappelle Pierre Garrigues dans son ouvrage Poétiques du fragment (1995) ? C’est autour de cette interrogation que gravitera le présent mémoire, alors que notre attention sera portée sur les incidences littéraires du fragment dans les récits Monsieur Teste (1946) de Paul Valéry et Palomar (1983) d’Italo Calvino. Textes complexes certes, qui par la spécificité de leurs structures, nous empêchent de les considérer de facto comme de véritables recueils de fragments. D’une part, parce qu’ils évoquent beaucoup plus qu’une simple forme naturelle ou accidentée (ruine ou vestige d’une totalité antérieure) mais aussi parce que leur forme est plus souple et donc moins contraignante que les structures explicites du roman ou de l’essai philosophique. La notion de fragment entretient des relations multiples avec plusieurs totalités, qu’elles se nomment « Œuvre, Sujet, Société ou Histoire ».2 Or, l’étendue de tous ces champs d’analyse étant beaucoup trop vaste pour les contenir dans une simple analyse, seules les notions d’œuvre et de sujet seront, ici, retenues. Notre réflexion s’articulera de cette manière autour de la question 2 Ginette Michaud, Le fragment dans les textes de Roland Barthes, Théorie et pratique de la lecture, Thèse de doctorat présentée au Département d’études françaises, Faculté des arts et des sciences, Université de Montréal, 1983, p. 39. 2 suivante : « Comment rendre compte du fragment s’il s’inscrit à l’intérieur d’un système, c’est-à- dire à l’intérieur de ce qu’il tente de nier pour lui échapper ? ». Dans le sillage de la pensée de Garrigues entourant le fragment, nous retrouvons celle de Ginette Michaud qui soulève, dans sa thèse de doctorat, la complexité de l’exigence fragmentaire. On y apprend que l’écriture du fragment ne peut être élaborée ni comprise à partir d’une seule définition. Car le propre du fragment est bien, pour l’auteure, de ne pouvoir être pleinement saisi ; d’où l’intérêt toujours actuel d’y consacrer des études littéraires. S’il n’y a jamais eu ni concept, ni théorie, ni même forme délimitée ou fixée du fragment, c’est qu’il ne saurait en être autrement, non à cause de déterminismes historiques ou « extérieurs », mais à cause de la nature même du fragment. Ni théorie, ni concept, ni forme du fragment n’aident à penser l’exigence fragmentaire. C’est même, uploads/Litterature/le-fragment-comme-voix-narrative 1 .pdf

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