25 La culture d’une organisation peut être définie comme l’ensemble des habitud
25 La culture d’une organisation peut être définie comme l’ensemble des habitudes, comportements, codes et images partagés par ses membres. Cette culture sert de ciment social à la vie de l’organisation (Cameron & Quinn, 2011). Ce pourrait être une sorte d’inconscient de l’organisation (Bernard & Daviet, 1992). Culture organisationnelle : un modèle descriptif Le modèle « Competing Values Framework » (Cameron & Quinn, 2011) décrit la culture d’une organisation sur la base de deux dimensions : • Première dimension : la flexibilité Les organisations où il y a une grande flexibilité, une latitude d’action et un dynamisme important, s’opposent aux organisations où l’on insiste sur la stabilité et le contrôle. • Seconde dimension : orientation interne ou externe Les organisations qui sont centrées sur leur fonctionnement interne, leur unité, s’opposent à celles qui mettent en avant la relation à l’extérieur, la différenciation et la rivalité. Centrage externe & Différentiation Centrage interne & Intégration Flexibilité & Discrétion Stabilité & Contrôle Clan (Collaboration) Adhocracy (Création) Hierarchy (Contrôle) Market (Compétition) Fig. 1 : Les quatre types de culture d’organisation (Cameron & Quinn, 2011) L’innovation est identifiée comme un élément essentiel à la survie et au développement des organisations. La culture innovation d’une organisation est l’ensemble des comportements, habitudes et codes ayant trait à l’innovation au sein de celle-ci. Pour une organisation, diagnostiquer cette culture innovation permet d’identifier des leviers pour la développer. Mais comment s’y prendre pour effectuer ce diagnostic ? Ce chapitre propose différentes définitions permettant une première approche. Ces deux axes définissent quatre grandes catégories d’organisation, ayant une orientation (exemple « Contrôle ») et un nom (exemple « Hierarchy »). La figure 1 présente ces quatre types d’organisation. Pour Cameron & Quinn, l’innovation se développe lorsque la culture de l’organisation se situe dans le cadran « Adhocracy » : une organisation ouverte sur l’extérieur ou chacun possède une grande liberté d’actions. A chaque culture (Hierarchy/Market/Clan/ Adhocracy) correspondent une orientation, la valorisation d’un certain type de leader, des valeurs spécifiques et un domaine privilégié d’efficacité. Le tableau 1 vous présente quelques caractéristiques. Tableau 1 : Précision sur les ca ractéristiques de chaque type de culture organisationnelle (Cameron & Quinn, 2011) CHAPITRE 4 LA CULTURE INNOVANTE 1. LA CULTURE ORGANISATIONNELLE 26 Ces quatre catégories ne sont cependant pas mutuellement exclusives : une organisation durablement viable a besoin de posséder des caractéristiques dans chaque cadran. La figure 2 illustre, avec deux exemples extrêmes, l’utilisation de ce modèle pour visualiser les différences de culture d’organisation : - Une agence gouvernementale américaine : il s’agit ici d’une administration, non soumise à la concurrence, sans nécessité de se développer. Sa culture est essentiellement de type « Hierarchy ». Son potentiel innovant est faible. - Une manufacture de produits grand public, avec une concurrence forte. Sa culture est essentiellement du type « Market ». Son potentiel innovant est fort. Clan Adhocracy Hierarchy Market Agence gouvernementale américaine Manufacture de produits grand public Fig. 2 : Illustration de profils culturels liés aux secteurs et aux métiers (Cameron & Quinn, 2011) Culture organisationnelle : un modèle évolutionniste Un autre modèle des organisations d’hier et d’aujourd’hui (Laloux, 2015) propose une vision évolutionniste, liée au développement de la conscience humaine depuis la préhistoire. A chaque étape de ce développement, de nouvelles formes d’organisations ont vu le jour. Chaque nouveau type d’organisation s’est construit par rapport à l’étape antérieure, généralement en conservant les avancées, parfois en changeant d’approche. Cinq types d’organisation coexisteraient aujourd’hui, chacune représentée par une couleur. La figure 3 les schématise. Pour Laloux, chaque avancée des organisations correspond à l’adoption d’innovations organisationnelles. Chasseur cueilleur / impulsif Agriculture / Conformiste Révolution industrielle / réussite Société information / pluralité En émergence / évolutif Fig. 3 : Formes d’organisation d’après Laloux Cinq niveaux sont ainsi identifiés : A l’époque des chasseurs-cueilleurs Deux innovations organisationnelles : la division des tâches et l’autorité du chef Les organisations associées sont très opportunistes, adaptées au chaos. Elles sont de petites tailles. Le chef utilise la peur et la violence comme liant. On trouve encore ce type d’organisation dans les mafias, les bandes armées. On parle de stade impulsif. La couleur associée est le rouge. Avec l’agriculture Deux innovations organisationnelles : des processus stables et des hiérarchies instituées Les organisations associées sont stables sur le long terme et ont des tailles importantes. On leur doit les uniformes, les rôles formels, le contrôle, et matériellement les pyramides, les cathédrales… Ce type d’organisation est très présent dans la société actuelle, par exemple l’Eglise Catholique, ou les grandes administrations. On parle de stade conformiste. La couleur associée est l’ambre. 27 La culture innovation peut être définie comme l’ensemble des habitudes, comportements, codes, images et mythes partagés par les membres d’une organisation en lien avec l’innovation. Pour la décrire, trois analogies sont possibles : 1. Culinaire : quels ingrédients pour une culture innovation ? 2. Environnementale : qu’est-ce qu’un écosystème innovant ? 3. Biologique : quel est l’ADN d’une organisation innovante ? Les ingrédients de la culture innovation Après avoir étudié de nombreux travaux antérieurs, Dobni (2008) propose quatre ingrédients à observer pour décrire une culture innovation : 1. L’intention d’innover qui se mesure à deux niveaux : - L’identification de l’innovation dans la structure, la stratégie et les processus, - L’engagement des salariés dans l’innovation. 2. Le cadre favorable, qui se manifeste via : - La capacité d’apprentissage organisationnel, - La créativité, la liberté et l’autonomisation des employés. 3. Le comportement des opérationnels, qui doit laisser transparaître deux centres d’intérêt : - Une orientation « marché », incluant la connaissance des produits, des clients, et concurrents, - Une orientation « valeur », permettant d’améliorer le produit pour les clients. 4. Le contexte d’implantation, qui doit permettre la mise en œuvre rapide des bonnes idées. Dans ce modèle, l’accent est mis sur des notions importantes comme l’appropriation du concept d’innovation par l’ensemble du personnel, l’implication de chacun dans le produit et la valeur client, la capacité à apprendre et la liberté d’agir. Avec la révolution industrielle Trois innovations organisationnelles : l’innovation, la responsabilité et la méritocratie Les organisations associées travaillent par objectifs, recherchent le profit, et pratiquent la compétition. Elles ont inventé le marketing, la stratégie, les ressources humaines. Ces organisations ont permis la fin de la misère, mais touchent leur limite avec l’épuisement des milieux. Ce type d’organisation est très présent aujourd’hui, avec les grands groupes internationaux, les universités. On parle de stade de la réussite. La couleur associée est l’orange. Avec la société de l’information Innovations : autonomisation des salariés, intégration des parties prenantes et centralité des valeurs Les organisations associées recherchent l’engagement des salariés. Elles sont particulièrement sensibles à leur responsabilité sociétale. Cependant, ce modèle est peu répandu. On parle de stade de la pluralité. La couleur associée est le vert. En émergence Innovations, auto-gouvernance, plénitude, écoute du projet de l’entreprise Les organisations associées ont mis au centre la raison d’être de l’organisation. La prise de décision y est distribuée, c’est-à-dire qu’il y a auto-gouvernance. Ce type d’organisation a émergé en différents lieux. On parle de stade évolutif. La couleur associée est l’opale. L’entreprise française FAVI, fonderie industrielle, est un exemple d’organisation de ce type. Cette PME a en effet mis en place un management atypique ou le salarié est au centre des décisions (voir témoignage dans le chapitre « Développer son activité commerciale »). Dans cette modélisation des cultures d’organisation, il apparaît clairement que l’innovation est un élément central de développement pour les organisations situées dans les cercles orange, vert et opale. En revanche, dans les organisations situées dans les cercles rouge et ambre, le contexte est peu propice à l’innovation. 2. LA CULTURE INNOVATION 28 Les caractéristiques d’un écosystème innovant Aujourd’hui, la Silicon Valley est vue comme l’écosystème innovant par excellence. Deux chercheurs (Hwang & Horowitt, 2012) ont tenté de comprendre pourquoi. Au cours de leur enquête, ils ont découvert que la Silicon Valley fonctionnait un peu comme la forêt amazonienne (d’où le titre de leur ouvrage, Rainforest). Cette analogie implique que l’innovation se produit préférentiellement dans des contextes luxuriants, riches en échanges, et naît souvent des « mauvaises herbes » qui se développent spontanément sans avoir été attendues ni suscitées. Cette image s’oppose à celle d’un champ, avec un processus bien défini, bien aligné, où les mauvaises herbes sont régulièrement éliminées. Ainsi, un écosystème innovant respecterait les sept règles de fonctionnement suivantes : 1. « Enfreins les règles et rêve » 2. « Ouvre les portes et écoute » 3. « Fais confiance et sois digne de confiance » 4. « Expérimente, itère, ensemble » 5. « Cherche l’équité, pas l’avantage » 6. « Cherche, trompe-toi et persiste » 7. « Passe le relais ». Derrières ces règles, les conditions permettant une culture innovation se dessinent : • Facilité et rapidité à mobiliser les ressources et l’engagement humain et financier, • Vision positive de l’échec, de l’erreur, de la prise de risque, • Lien bienveillant et proactif avec l’extérieur de l’organisation (entrepreneurs externes, inventeurs, détenteurs de capitaux, communautés d’intérêt, gouvernement, entourage proximal, infrastructures, etc.) L’ADN de l’organisation innovante uploads/Management/ 9-ouvrage-chap-4.pdf
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- Publié le Dec 10, 2021
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