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Les dossiers les multiples facettes du LEADERSHIP Mohammed Taha BEN HAMMOU 3 Par Driss Ksikes I ÉDITO En quête d’une culture de leadership l est assez éprouvant de chercher à traquer l’existence ou du moins la reconnaissance de leaders dans une société qui se débat pour sortir de l’autoritarisme. Cela a été vrai dans la Russie post-soviétique, dans l’Allemagne post-nazie, comme il l’est, de manière plus ardue, dans des pays, comme le Maroc. La difficulté est double, dans notre cas. Il est vrai que, comme les pays précités, l’ombre d’un super- leader, charismatique, écrasant et inhibiteur d’énergies, reste pesante et omniprésente, des années après sa disparition. Mais, au-delà des personnes, chez nous, contrairement aux autres, les bases d’un système libéral et d’un État social permettant à des leaders positifs, insuffleurs de dynamique vertueuse d’émerger, ne semblent pas encore réunies. Qu’est-ce qui nous a persuadé, pourtant, d’aller à la recherche de cette culture de leadership ? Pourquoi aller sonder un concept principalement forgé par les Américains, développé dans une société hyper-individualisée ? L’irruption en 2011 de leaders virtuels dans l’espace public ? Sans doute, d’autant que nos travaux antérieurs sur les médias sociaux nous ont montré qu’une conglomération de mobilisateurs et de communicateurs se distinguait du lot et méritait d’être appréhendée à part, d’où les prolongements proposés dans ce dossier sur le leadership 2.0. Ceci étant dit, la raison, plus circonstanciée, qui nous a convaincus de l’importance de cette question est le paradoxe marocain. Alors que son mode de gouvernance politique demeure autocratique, il développe des ambitions économiques de hub régional, et donc de leader régional. Alors que la culture de soumission, d’accommodement et de consensus prédomine, au sein des organisations économiques, tenues par une rationalité d’efficience, une nécessité de leadership semble se développer pour initier le changement et passer le cap crucial de la compétitivité. Nous le montrons assez, cette culture-là, balbutiante, insondable à l’œil nu, est peu favorisée par l’école et autres structures de socialisation, même si certaines de ses prémices se manifestent de manière informelle ici et là. Aussi, au sein des organisations formelles, privées et publiques, objet de notre étude, elle ne pouvait être identifiée et appréciée à sa juste valeur sans un long travail d’exploration, de lecture et de terrain. Il en ressort un fait marquant : les leaders, chez nous, ne sont pas reconnus pour leur vista ou leur capacité à se projeter, mais principalement pour leur intelligence émotionnelle. Cela montre que ce n’est pas tant la vision personnelle qui forge aujourd’hui le leadership, mais beaucoup plus l’écoute des autres. L’ère des leaders géniaux et déconnectés serait-elle révolue ou condamnée à revenir sous une forme plus sophistiquée ? À voir lEaDErshIp lEs mul TIplEs facETTEs Du Adib Bensalem et Bachir Znagui 7 34 13 38 19 43 22 47 25 53 30 56 El Mostafa Bensalem et Adib Bensalem Adib Bensalem Omar Benaini Hammad Sqalli Monique Dagnaud Mohamed Tozy Latifa El Bouhsini Mohamed Sghir Janjar Noureddine Zahi Aziz Chahir Bachir Znagui chrONIquE 90 aNs DE ThÉOrIE sur lE lEaDErshIp à quOI rEcONNaIT-ON uN lEaDEr DaNs NOs OrgaNIsaTIONs ? frEINs culTurEls au lEaDErshIp DaNs l’ENTrEprIsE marOcaINE uNE archÉOlOgIE crITIquE DE la NOTION DE « lEaDErshIp » Majid Safouane fEmmEs ET lEaDErshIp : lE prÉalaBlE DÉmOcraTIquE l’ÉcOlE marOcaINE fOrmE-T-EllE au lEaDErshIp lEaDErshIp pOlITIquE ET INsTITuTION Du sEcrET lEaDErshIp parTIsaN au marOc à l’èrE Du chaNgEmENT Entretien avec chaNgEmENTs DaNs lE lEaDErshIp lOcal lE lEaDEr Du prOchE ET Du lOINTaIN lE lEaDErshIp à l’èrE Du WEB 2.0 Adib Bensalem Jacques Igalens “ ÊTrE lEaDEr N’EsT pas INNÉ” fIN Du lEaDErshIp amÉrIcaIN, vOus DITEs ? 6 7 les multiples facettes du leadership BeARBOZ La recherche dès les années 1920 s’est focalisée sur l’identification des qualités de personnages imminents en position de leader. Une évolution du concept s’est opérée depuis : d’un leadership « directif » à celui « participatif ». D’un processus unidimensionnel, la théorie du leadership est devenue multidimensionnelle. Les organisations du XXIe siècle ont besoin de leaders sûrs, capables de porter leurs projets. Par El Mostafa Bensalem et Adib Bensalem Chercheur universitaire et consultant Enseignant-chercheur, Cesem-HEM les mul tiples facettes du leadership EN BREF Coordination scientifique Adib Bensalem Coordination éditoriale Bachir Znagui ans ce nouveau rendez-vous, Economia vous offre une large palette. Le menu comprend d’abord un travail de repérage de deux chercheurs et spécialistes, El Mostafa et Adib Bensalem, où se déclinent les différentes théories du leadership (p. 7), ainsi qu’un examen de terrain effectué, sous leur direction, pendant une année et demie sur un échantillon de leaders et de collaborateurs dans des entreprises au Maroc (p. 13). Un autre éclairage nous est offert en termes d’entreprises marocaines et d’outils de communication. Omar Benaini, grâce à son regard d’observateur et d’évaluateur, a dégagé quelques constats typiques des entreprises marocaines (p. 19). Hammad Sqalli, chercheur en science de l’information, a exploré le modèle du leadership transfrontalier (p. 22) et, avec beaucoup de rigueur, Monique Dagnaud, spécialiste des nouvelles générations, a traité du rôle des réseaux sociaux en leadership (p 25). En complément, l’entretien avec Jacques Igalens brasse le leadership sous l’angle de l’évolution survenue dans le rôle des entreprises au sein du système économique et social (p. 30). Pour saisir au mieux l’émergence du leadership dans le contexte marocain, le dossier élargit le scope. Ainsi, sous l’angle psychanalytique, l’approche singulière de Majid Safouane a procédé à une véritable archéologie critique de la notion de « leadership » (p. 34). Quant au travail du politologue marocain Mohamed Tozy, il a mis en évidence l’émergence au Maroc d’un nouveau type de leadership au niveau local (p. 38). Sur le plan social, l’anthropologue Mohamed Sghir Janjar s’interroge sur la capacité de l’école marocaine à former au leadership (p. 47). Latifa El Bouhsini, historienne, évoque pour sa part le sujet à travers la question du genre. Le leadership féminin, estime-t-elle, est suspendu à la problématique de la démocratie (p.43). Sur le terrain politique, le leadership est examiné à travers l’analyse du sociologue Noureddine Zahi, à propos des fonctions du secret dans les systèmes de représentation (p. 53), et la dissection des obstacles à l’émergence des relèves au sein des partis politiques, par le politologue Aziz Chahir (p. 56). En traitant ainsi les multiples facettes du leadership au Maroc, en particulier, nous espérons aider à comprendre son potentiel de développement et les entraves à son émergence D 90 ans de théorie sur le leadership 8 9 rigine et définition Burns1 (1978) affirme que « le leadership est l’un des phénomènes les plus observés et les moins compris ». En effet, ce paradoxe hante, depuis des siècles déjà, un grand nombre de chercheurs qui tentent de comprendre le leadership, sa manifestation, ainsi que les éléments qui le composent. Tous ces travaux font incontestablement du leadership un des phénomènes les plus complexes auxquels s’est heurtée la recherche organisationnelle et psychologique, renforcée d’apports d’obédiences scientifiques multiples et variées : de l’anthropologie aux sciences de gestion, en passant par l’ethnologie, la sociologie et la psychologie. L’enjeu pour les dirigeants est de démontrer qu’ils ont pris conscience de leur responsabilité éthique vis-à-vis de toutes les parties prenantes de l’organisation Alors que l’on retrouve dans la littérature le concept de leadership dès le XIVe siècle (Stodgill2, 1974), la recherche scientifique sur le sujet n’a réellement commencé qu’au XXe siècle (Bass3, 1981). Étymologiquement, le mot leader vient du mot ancien anglais leden (guider) et du mot latin ducere (conduire). Plusieurs langues européennes anglo-saxonnes et latines créent leurs versions de ce mot à partir des racines anglaises et latines depuis 1300 à nos jours, hormis la langue française, qui ne possède toujours pas d’équivalent pour les mots leader et leadership (Rost4, 1991). Bien qu’ancien, le concept de leadership n’en demeure pas moins complexe. Selon Rost, il existerait autant de définitions du leadership que ceux ayant tenté de le définir. Il échoue d’ailleurs à extraire une définition commune à partir de l’analyse de 221 interprétations différentes du mot leadership. Nous constatons malgré cela une évolution du concept, à travers les travaux étudiés, d’un leadership « directif » à un leadership « participatif » (Tableau 1). La définition commune à toutes les époques serait, selon nous, que le leadership est une relation, entretenue entre un leader et des suiveurs, qui donne lieu à une action. O L’évolution des définitions du leadership n’est pas anodine et suit avant tout celle des théories du leadership (Figure 1). Figure 1 : Les approches théoriques du leadership (source : élaboration personnelle) Tableau 1 : Évolution des définitions du leadership (adapté et traduit de Rost, 1991) Les années 1920 Le leadership est la capacité du leader à imposer sa volonté à ses suiveurs. Les années 1940 Le leadership résulte de la capacité à persuader ou diriger des hommes, hormis le prestige ou le pouvoir conférés par des circonstances externes. Les années 1960 Le leadership est l’action d’influencer une autre personne pour l’orienter vers une direction partagée. Les années 1980 Le leadership concerne la motivation des autres dans le but de les amener à mener une action représentant uploads/Management/ cas-type-de-leadership-au-maroc.pdf

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  • Publié le Apv 19, 2021
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