Réflexion R.F .C. 414 Octobre 2008 2 Or, l’entreprise n’a pas toujours la possi
Réflexion R.F .C. 414 Octobre 2008 2 Or, l’entreprise n’a pas toujours la possibilité de réaliser cette valeur. Imaginons qu’un segment de consommateurs accepte de payer relativement cher un certain produit. S’il est vendu dans la grande distribution, le producteur renoncera à afficher ce prix élevé de peur de perdre les nombreux autres clients. Le producteur ne parvient donc pas à réaliser la valeur créée pour ce segment de consommateurs. Il est donc indispensable de dissocier les concepts de coût, de prix et de valeur, d’en analyser les relations, ce qui conduit à identifier trois couples, trois leviers d’action qui seront détaillés dans la suite de cet article : LA GESTION DU COUPLE COÛT/PRIX OU L’ANALYSE DE LA “RENTABILITÉ” (1) La gestion du couple coût/prix est un des fondements de la comptabilité de gestion avec la mise en évidence de résultats ou de marges selon que les coûts évalués sont complets ou partiels. LES INFORMATIONS PRODUITES PAR LA COMPTABILITÉ DE GESTION Deux facteurs ont profondément modifié les pratiques dans le domaine de la comptabilité de gestion : • les évolutions de l’informatique qui ont conduit à l’accroisse- ment des puissances de traitement mais aussi des capacités de LA GESTION STRATÉGIQUE DES COÛTS : PROPOSITION D’UN CADRE D’ANALYSE L e pilotage stratégique des coûts est le plus souvent associé à la gestion du couple coût/valeur. Sans être dénuée d’intérêt, cette approche repose néanmoins sur une approximation : l’assimilation des concepts de valeur et de prix. La valeur est assimilée au prix que le consommateur paye le produit ou le service considéré alors qu’elle est ce qu’il est prêt à payer. Ainsi J. Shank et V. Govindarajan (1992), auteurs à l’origine du concept de gestion stratégique des coûts, reprennent-ils l’affirmation de M. Porter : « l’avantage compétitif sur un marché dépend de la capacité à offrir plus de valeur au consommateur pour un coût équivalent ou une valeur équivalente pour le client à un coût plus faible ». Résumé de l’article Apparu au cours des années 1990, le concept de gestion stratégique des coûts et les techniques associées restent peu utilisés et diffusés. Dans cet article, en distinguant soi- gneusement les notions de prix et de valeur, le domaine de la gestion stratégique des coûts est clairement délimité au couple coût/valeur. Cela permet de saisir ses contributions par rapport à la comptabilité de gestion (gestion du couple coût/prix) et d'identifier un troisième couple valeur/prix. Bien qu’étant hors du champ du contrôle de gestion, le couple valeur/prix est déterminant pour transformer la valeur créée pour le client en recettes. Ces trois couples sont décrits comme de puissants leviers d'action pour amé- liorer la performance financière de l'entreprise. 1. L’expression rentabilité est abusive, seul le résultat étant apprécié et celui-ci n’étant pas rapporté aux capitaux engagés. Olivier de LA VILLARMOIS Professeur des Universités à l’IAE de Lille Diplômé d’expertise comptable. Yves LEVANT Maître de conférences à l’Université Lille 1 Professeur associé à l’Ecole Supérieure de Commerce de Lille Christophe BENAVENT Professeur des Universités à l’Université Paris X La gestion du couple coût/prix ou l’analyse de la “rentabilité” La gestion du couple valeur/prix ou la discrimination par les prix La gestion du couple coût/valeur ou la gestion stratégique des coûts Valeur Coût Prix R.F .C. 414 Octobre 2008 3 stockage d’informations multidimensionnelles ; • l’apparition de nouvelles techniques d’évaluation des coûts (ABC, TDABC) ou la redécouverte des intérêts d’approches plus anciennes (UVA). Alors que l’objet de la comptabilité analytique était de détermi- ner un résultat par produit, aujourd’hui des comptabilités de gestion proposent des résultats par client, voire par facture. Ces informations sont généralement représentées de la manière sui- vante : ■ “Courbe de profitabilité cumulée” proposée par R. Kaplan et A. Atkinson (1998, p. 150) ■ “Courbe de rentabilité” proposée par les promoteurs de la méthode UVA (J. Fiévez et D. Staykov, 2007, p. 44) Ces deux schémas ne sont qu’une présentation différente des mêmes informations. R. Kaplan et A. Atkinson (1998) montrent avec leur exemple que 20 % du chiffre d’affaires dégagent 300 % du résultat de l’entreprise, les 80 % restants étant défici- taires. J. Fiévez et D Staykov (2007) identifient des ventes pour lesquelles les pertes sont plus importantes que le chiffre d’af- faires (partie gauche du schéma). LES IMPLICATIONS MANAGÉRIALES L’utilisation de ces informations n’est pas toujours aisée ; de nombreux décideurs sont désemparés par la richesse de l’infor- mation produite (résultat par facture, client, produit, mar- ché…). Ø. Helgesen (2005) a étudié les résultats dégagés par les clients d’une banque et proposé la typologie suivante : Face à l’impossibilité d’identifier des actions propres à chaque client compte tenu de leur grand nombre, une telle typologie permet de le faire pour chacune des catégories. Pour les clients “potentiels” il s’agira, par exemple, de développer le volume d’affaires alors que pour les clients “problèmes”, si l’impossibili- té de rétablir la rentabilité se confirmait, des modalités de sortie du portefeuille clients pourront être recherchées. LES LIMITES DE L’ANALYSE Nous ne reviendrons pas ici sur les limites propres aux tech- niques d’évaluation des coûts (choix des inducteurs, homogé- néité des activités…). Nous insisterons sur le caractère statique de l’analyse, la difficulté de prendre en considération des effets de synergie et, enfin, il ne s’agit que d’analyses comptables qui ne doivent pas faire oublier les objectifs stratégiques. Si une banque de détail analyse le résultat dégagé par client, les clients jeunes seront souvent déficitaires (ils réalisent beaucoup d’opérations de faible montant parfois non facturées) alors que les clients plus âgés, compte tenu de leur patrimoine, seront plus rentables. Il s’agit bien évidemment d’une vision statique qui ne doit pas faire oublier que les clients jeunes auront l’opportunité d’épargner à moyen terme, en vieillissant. L’actualisation des flux de trésorerie futurs révélerait probablement une plus grande valeur des clients jeunes... Une telle analyse nécessiterait de for- muler de nombreuses hypothèses de travail. Les comptables sont très sensibilisés au volume d’activité néces- saire pour supporter les coûts fixes. Les économistes ont déve- loppé de nombreux concepts révélant des phénomènes qui ne doivent pas être négligés : • les économies d’échelles. L’augmentation du niveau d’activité permet de réduire les coûts unitaires ; • les économies d’expérience qui reflètent l’accumulation des connaissances acquises dans la maîtrise d’un processus indus- triel ; • les économies de champ (ou d’envergure). La production simultanée de plusieurs biens peut être moins coûteuse que leur production séparée. Deux types d’économie de champ peuvent être distingués : • les économies de variété qui découlent de la production de biens différents au moyen de ressources communes ; Comptabilité Abstract Appearing during the 1990’s, the concept of strategic cost management and its associated techniques is still little used and diffused. By making a careful distinction bet- ween the notions of price and value in this article, strate- gic cost management is clearly shown as the link between cost/value. This leads to understanding its contribution to manage- ment accounting (cost/value link) and to identifying a third link: that of value/price. Although outside the field of management control, the link between value/price is cru- cial to transforming the value into client revenue. These three links are described as powerful levers to impro- ve the financial performance of a company. % du chiffre d’affaire 50% 0% 100% 0% 100% 200% 300% % du résultat 500 1 000 1 500 2 000 Chiffre d’affaires en Ke 0 Rentabilité moyenne Résultat relatif du client Fort Potentiels Stratégiques Faible Mineurs Problèmes Faible Elevé Chiffre d’affaires du client Résultat/Chiffre d’affaires Réflexion R.F .C. 414 Octobre 2008 4 Pourtant, traditionnellement, les services de contrôle de gestion portent l’essentiel de leurs efforts sur l’analyse des coûts décais- sés (plus précisément engagés mais au sens comptable). C’est dans cette perspective que s’inscrit la démarche de target cos- ting que F. Meyssonnier (2001) décrit en cinq phases : • détermination du concept commercial porteur de sens et de valeur pour le client ; • proposition d’un coût cible pour le produit en fonction d’un niveau d’exigence ; • détermination d’un coût cible par fonction. Ce coût est déter- miné en respectant la contrainte suivante : une fonction qui représente x % de la valeur totale ne doit pas consommer plus de x % du coût cible total ; • spécifications de production et fixation de coûts cibles par composants ; • optimisation des coûts sur l’ensemble du cycle de vie du pro- duit (kaizen costing). L’analyse de la valeur a toute sa place dans les phases de spéci- fication et d’optimisation des coûts. Trois limites principales sont fréquemment avancées. La forte pression à la réduction des coûts conduit à une banalisation des produits. Un concept innovant, attractif, lors de l’engagement de la phase de développement risque de devenir banal lors de la phase d’industrialisation. Pour éviter ce type de dérive, Renault a mis en place des chefs de produits dont le rôle est de défendre les produits, de s’assurer que les modifications propo- sées pour réduire les coûts ne mettent pas en cause la capacité de séduction uploads/Management/ controle-des-couts.pdf
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- Publié le Fev 28, 2021
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