Tony GRUNDY LES GOUROUS DU MANAGEMENT Traduit de l’anglais par Larry Cohen et B
Tony GRUNDY LES GOUROUS DU MANAGEMENT Traduit de l’anglais par Larry Cohen et Brigitte Vadé © Groupe Eyrolles, 2006 ISBN : 2-7081-3425-6 46 © Groupe Eyrolles Igor Ansoff Qui est Igor Ansoff ? Igor Ansoff est le fondateur de la planification d’entreprise. Ses travaux sur la gestion stratégique s’étendent sur plusieurs décennies. Il est au manage- ment stratégique ce que Mick Jagger et les Rolling Stones sont au rock, et sur une durée comparable (depuis les années 1960 jusqu’à l’an 2000). C’est un des principaux théoriciens de l’école de la stratégie, qui préconise une approche plus logique et plus délibérée de la stratégie. Quelles idées ont fait connaître Igor Ansoff ? • l’affirmation de la planification stratégique comme processus formalisé de gestion ; • la vulgarisation de l’analyse SWOT (Strengths and Weaknesses of the Organization in the light of Opportunities and Threats in its environ- ment, soit : Forces et faiblesses de l’organisation confrontée aux oppor- tunités et aux menaces de son environnement) ; • l’élaboration de la matrice Ansoff (voir figure 5), qui permet de com- prendre le niveau de risque qu’une stratégie de diversification est sus- ceptible d’entraîner ; • le développement du concept d’évaluation de l’environnement – et de détection des signaux faibles –, de changements bouleversant l’environnement ; • le repositionnement de la « planification stratégique » en « management stratégique », c’est-à-dire comme partie intégrante d’un processus continu et non comme processus de planification qui se déroule une fois par an (ou moins) ; • ses polémiques avec Henry Mintzberg sur les différents avantages et inconvénients de la stratégie délibérée opposée à la stratégie émergente ; Trombinoscope des gourous de la stratégie 47 © Groupe Eyrolles • l’analyse de l’« écart » existant entre les aspirations et l’issue probable des stratégies en cours. Figure 5. La matrice Ansoff Voyons maintenant en détail chacun de ces concepts. La planification stratégique comme processus formalisé de gestion Dans son livre, qui a fait date, Corporate Planning, Igor Ansoff soulignait la nécessité de découper le processus stratégique en une série d’étapes, en distinguant tout particulièrement : • une analyse externe destinée à comprendre les opportunités et les menaces du marché : • une analyse interne destinée à en comprendre les forces et les faiblesses ; Nouveaux Existants Existants PRODUITS RISQUE MARCHÉS Nouveaux Les gourous du management 48 © Groupe Eyrolles • le choix (et nos possibilités) ; • la mise en œuvre. Ce modèle est toujours utilisé aujourd’hui (avec des améliorations) par les prin- cipaux cabinets de conseil en stratégie (voir figure 1 pour les améliorations). La vulgarisation de l’analyse SWOT Même si l’origine de l’analyse SWOT est incertaine, il est évident que la vulgarisation de cette technique par Igor Ansoff a fait d’elle l’analyse straté- gique la plus couramment utilisée depuis quarante ans, mais aussi de tech- nique d’analyse essentielle dans le marketing (voir figure 6). Figure 6. L’analyse SWOT La grille d’analyse SWOT est l’un des premiers modèles stratégiques impor- tants. Son mérite réside dans sa simplicité: elle permet de comparer le déve- loppement de l’activité sur deux axes : d’une part produits existants contre produits nouveaux, et, d’autre part marchés existants contre nouveaux mar- chés. Son principe de base veut que « le développement simultané de nou- veaux produits et de nouveaux marchés augmente le risque d’une façon aussi considérable que disproportionnée ». Tout en nous mettant prudemment en garde, les études approfondies menées sur la réussite relative des diversifications indiquent (ce qui peut apparaître surprenant) qu’elles n’érodent pas nécessairement les résultats, pourvu que FORCES FAIBLESSES OPPORTUNITÉS MENACES Trombinoscope des gourous de la stratégie 49 © Groupe Eyrolles l’entreprise exploite ses compétences fondamentales. Par conséquent, la diversification n’est pas nécessairement un faux pas – et, en réalité, on peut corréler de façon positive un certain niveau de diversification à de meilleurs résultats –, la condition essentielle étant que l’entreprise soit innovante et adaptée à ses marchés. De la « planification stratégique » au « management stratégique » Igor Ansoff a fait preuve d’innovation en redéfinissant la « planification stratégique » comme « management stratégique » pour insister sur le fait que : • la stratégie n’est pas une démarche qui doit se borner à s’intégrer dans un cycle de planification annuelle, c’est un processus continu et constant ; • la stratégie ne se borne pas à répondre aux changements environne- mentaux, mais devrait créer un environnement plus favorable et plus concurrentiel. Veille environnementale Igor Ansoff a insisté sur la nécessité de rester constamment au courant des transformations de l’environnement. Il a surtout souligné le besoin de demeu- rer attentif aux « signaux faibles » qui en émanent, comme ceux qui indiquent l’avènement d’une nouvelle ère économique/concurrentielle. Les signaux faibles d’Igor Ansoff sont souvent tout sauf « faibles ». Le 11 septembre 2001 était un signal – en l’occurrence pas si faible que cela – pour se préparer à une perturbation majeure sur le plan mondial, perturbation d’une ampleur inégalée depuis la crise de Cuba des années 1960 (qui a fait planer la menace d’une troisième guerre mondiale). L’opposition entre la « stratégie délibérée » et la « stratégie émergente » Igor Ansoff s’est opposé à Henry Mintzberg sur les différents avantages et inconvénients de la stratégie délibérée et de la stratégie émergente. La longue Les gourous du management 50 © Groupe Eyrolles polémique à laquelle ils se sont livrés dans différentes revues universitaires s’est terminée par un match nul. À la lecture de ces échanges, on ne peut s’empê- cher de penser qu’il s’agissait d’un désaccord essentiellement artificiel, et qu’il faudrait s’inspirer des deux écoles de pensée, en leur accordant une même importance, pour décider de la façon de mener un plan stratégique. L’analyse de l’écart L’analyse de l’écart (voir figure 7) est l’une des techniques les plus essentielles – et les plus oubliées – du management stratégique. La figure 7 montre : • les résultats futurs, compte tenu d’un fonctionnement immobiliste ; • les résultats futurs, compte tenu des projets actuels ; • les objectifs futurs (ou la stratégie comme « dépassement » dont parlent Hamel et Prahalad). Figure 7. Analyse de l’écart Il faut d’abord et avant tout garder en tête la nécessité de créer de nouvelles stratégies (percées) pour combler l’écart. Néanmoins, même si l’analyse de Écart Objectifs stratégiques Commerce en développement Commerce existant RENTABILITÉ TEMPS Trombinoscope des gourous de la stratégie 51 © Groupe Eyrolles l’écart est un aspect fondamental de tout plan stratégique solide, elle com- porte quelques inconvénients : • elle peut créer le besoin panique de trouver des éléments pour combler l’écart, à moins que les managers n’aient des bases solides en matière de créativité stratégique et d’évaluation de ces percées potentielles ; • elle peut limiter les aspirations des managers à la réalisation des objectifs financiers à moyen terme et les détourner de l’art du possible (selon Hamel et Prahalad). Nous y reviendrons. Fait surprenant, l’analyse de l’écart d’Igor Ansoff a pratiquement disparu des courants dominants de la littérature sur la stratégie et n’est probablement uti- lisée que par 20 % des entreprises environ. Il semblerait que les seuls à en avoir eu connaissance soient les spécialistes du marketing, qui l’étudient dans leurs cours. L’auteur se demande comment de grandes entreprises (et de moins grandes) parviennent à mettre au point des plans sans recourir à l’analyse de l’écart (en réalité, il semblerait que de nombreux plans soient de simples faux- semblants, puisque l’écart est simplement occulté par des prévisions peu fon- dées). Ce qui se passe en réalité est probablement que lorsque les perfor- mances s’effondrent, la direction récupère une partie de l’écart, fût-ce momentanément, en remontant les bretelles aux managers, à savoir en leur mettant la pression pour obtenir des résultats avant la fin de l’exercice ou en réduisant les budgets. Comment se situe Igor Ansoff par rapport aux autres gourous ? Comme nous l’avons déjà fait remarquer, Igor Ansoff est diamétralement opposé à Henry Mintzberg dans sa vision du management stratégique. Il appartient pleinement à l’école de la conception, dont fait partie, entre autres, Michael Porter. Les gourous du management 52 © Groupe Eyrolles Quels sont ses ouvrages principaux ? • Corporate Strategy, New York, McGraw Hill, 1965, le premier sys- tème analytique complet de planification de l’entreprise. • « Managing Surprise by Response to Weak Signals », California Management Review, XVIII, 1975, analyse de l’environnement. • The New Corporate Strategy, New York, Wiley, 1988, de la planifi- cation stratégique au management stratégique. Quels sont ses concepts clés ? • stratégie d’entreprise ; • diversification ; • facteurs PEST ; • analyse SWOT ; • options ; • processus stratégique. Difficulté de lecture : Moyenne. uploads/Management/ igor-ansoff-grundy 2 .pdf
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- Publié le Jan 24, 2022
- Catégorie Management
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