Violence et contrôle social des femmes Author(s): Jalna Hanmer and E. L. Review

Violence et contrôle social des femmes Author(s): Jalna Hanmer and E. L. Reviewed work(s): Source: Questions Féministes, No. 1 (Novembre 1977), pp. 68-88 Published by: Nouvelles Questions Féministes & Questions Feministes Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40619104 . Accessed: 26/11/2011 21:42 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. Nouvelles Questions Féministes & Questions Feministes and Editions Antipodes are collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Questions Féministes. http://www.jstor.org 68 La photo de couverture de «La chasse est ouverte». J^H^^^^^H 69 Jalna Hanmer * Violence et contrôle social des femmes Cet article traite du phénomène social que constituent les violences physiques exercées par les hommes contre les femmes. l Notre problème n'est pas ici de com- parer et d'expliquer les divers types et degrés de violence ni de raffiner sur les varia- tions de lieu, de temps et les personnalités des individus concernés. Nous ne cherchons pas non plus l'explication de tel acte individuel : notre préoccupation centrale est la signification, au niveau social structurel, de la violence des hommes contre les femmes. Pour comprendre le phénomène, il convient de ré-évaluer le rôle de la violence dans les relations entre hommes et femmes. Nous considérons d'abord l'universalité de la subordination des femmes, pour examiner ensuite les formes et les incidences de la violence et en donner une définition. Nous critiquerons les explications socio- logiques habituelles de la violence interpersonnelle et analyserons le rôle de l'Etat dans la création d'une dépendance «symétrique» entre les sexes. Nous tenterons de mettre en évidence la pertinence d'une analyse des rapports de violence entre hommes et femmes pour la compréhension des catégories de «sexe» et de «classe». Et la question finale est : pouvons-nous combattre efficacement la violence masculine ? Violence des hommes et subordination des femmes. Quand on pose la question du partage du pouvoir et de l'autorité entre les sexes dans les différentes cultures, l'opinion prédominante est que les femmes, tou- jours et partout, ont moins de pouvoir et d'autorité dans la société que les hommes.2 Les activités masculines, quelles qu'elles soient, sont toujours, partout, plus valorisées que celles des femmes. A ce phénomène on donne généralement deux raisons d'ordre matériel : l'une est que la fonction reproductrice des femmes ♦ Chargée de cours à la London School of Economics, Université de Londres. 1. Ce texte a e te écnt a la suite d un séminaire anglo-français sur les rapports de violence entre hommes et femmes, organisé par le Social Science Research Council en 1975. Il a été pré- senté à la conférence annuelle de la British Sociological Association, Sheffield, 1er avril 1977. 2. Cf. par exemple : Rosaldo, M. & Lamphere, L. (eds.), Women, Culture and Society, Stanford University Press, 1974. Friedl, E., Women and Men, Holt, Rinehart & Winston, 1975. Reiter, R. (ed.), Toward and Anthropology of Women, Monthly Review Press, 1975. Dans son Introduction à / 'Origine de la famille... Engels {The Origin of the Family, Pri- vate Property and the State, Lawrence & Wishart, 1972), E. Leacock souligne le fait que nous ne connaissons aucune société qui n'ait subi l'influence de la société occidentale. Les anthro- pologues ont importé leur propre vision de la société et nulle part plus fidèlement que dans les domaines qui pour eux soulevaient le moins de problèmes : c'est-à-dire la division sexuelle du travail et l'invisibilité de la violence. 70 limite leur participation sociale. Le fait de porter les enfants, les nourrir puis les élever, est considéré comme la base de l'exclusion des femmes des activités les plus valorisées (et les plus violentes) dans un grand nombre de sociétés : la guerre, la chasse. Cette division sexuelle du travail est aussi une division entre sphère publique et sphère privée de la vie culturelle, qu'elle soit embryonnaire ou hautement déve- loppée, et la rigidité de ce cloisonnement s'étend ensuite à l'accès des femmes à l'autorité et au pouvoir. Le second facteur matériel invoqué est le rôle des femmes dans la production, mais on a constaté que, même dans les sociétés où leur parti- cipation excède 50 %, les femmes n'atteignent jamais à la pleine égalité.3 Il est rare que l'on mette en relation la violence physique et sa menace avec d'autres facteurs sociaux, mais un article récent tente d'établir l'importance relative de la violence institutionnalisée, de l'idéologie et du stade de développement économique dans l'acceptation par les femmes de leur oppression.4 D'après K. Young et 0. Harris, dans les sociétés où l'on a le moins de contrôle sur la nature, le mode dominant de contrôle social est l'usage institutionnalisé de la force : les hommes punissent collec- tivement les individus femmes qui ont enfreint les règles sociales - par le viol de groupe, par exemple. A un degré supérieur de contrôle sur la nature, ce sont les mé- canismes idéologiques qui dominent : «II y a prolifération des institutions vécues, répressives», et la violence se limite à l'usage individuel de la force. A un stade de production encore plus développé, le mode dominant de contrôle devient l'écono- mie. «Les femmes n'ont pas accès aux moyens de production, elles ne contrôlent plus leur propre surplus domestique, n'ont pas accès au travail [rémunéré], etc..» Le contrôle idéologique s'affaiblit et la violence est encore plus masquée. Il est certain que dans notre société, ni les hommes ni les femmes ne sont très empressés de reconnaître l'importance de la violence et de la menace dans le drame routinier de la vie quotidienne. Souvent on dissimule et on se dissimule les senti- ments et attitudes hostiles qu'on a envers le sexe opposé et on ne les reconnaît pas comme partie intégrante de la vie quotidienne. La violence des hommes envers les femmes au sein de la famille semble un sujet tabou qui fait surface à l'occasion, au moins dans une frange de la conscience collective. Par exemple, à la fin du 19ème siècle, en Grande Bretagne, le problème de la violence maritale a été soulevé publiquement, ce qui a conduit à une modifi- cation de la loi, permettant aux femmes d'obtenir la séparation légale de leur mari lorsque la violence de ce dernier se manifestait de façon régulière. 5 Puis le problème tomba dans l'oubli pour ressurgir pendant la lutte pour le droit de vote, sombrer à nouveau et refaire surface aujourd'hui. Les femmes ont, de temps en temps, pris conscience du fait que la violence physique s'exerçait contre elles en tant que groupe, mais la plupart du temps, ce qui est sociologiquement plus important, l'usage de la force et de la menace n'a été considéré que comme un problème 3. Ibid. 4. Young, K. & Harris, O., «The Subordination of Women in Cross Cultural Perspective», Papers on Patriarchy, Women's Publication Collective, 1977 (à paraître). 5. Young, J., Wife Beating in Britain : a Socio-Historical Analysis, 1850-1914, A.S.A. Conference Paper, 1976% Entre «les problèmes individuels dans le milieu social» et «les effets publics de la structure sociale», les mouvements féministes ont laissé place à l'imagination sociologique. Les académiciens de la sociologie feront-ils de même ? {cf. Mills, C. Wright, The Sociological Ima- gination, Oxford University Press, 1959 ;trad. franc. : Paris, Maspero, 1967). 71 individuel. Aussi le fait d'interpréter la violence conjugale, y compris le viol, et les diverses agressions dont les femmes sont victimes sur la voie publique, comme des actes perpétrés par des hommes individuels au nom de tous les hommes, peut-il paraître osé, ou même absurde, tellement nous avons individualisé ce phénomène social important. Etant donné le manque d'informations sur le sujet, nous ne chercherons pas à établir de comparaisons avec d'autres sociétés. Ce que nous voulons montrer, en revanche, c'est que l'utilisation de la force et de la menace, même si elle est parti- culièrement occultée, est d'une importance suffisante dans notre société indus- trielle occidentale pour être reconnue comme un facteur majeur de contrôle social des hommes sur les femmes. Nous voulons montrer également que tout ce que les hommes extorquent aux femmes, qu'il s'agisse de bénéfices économiques, sexuels, ou de prestige, repose fondamentalement sur l'usage de la force et de la menace, tout comme la domination exercée sur une classe sociale, un groupe ethnique, ou une nation. La violence et la peur de la violence façonnent les comportements. Il s'agit là d'un phénomène sociologique par excellence. Mais pour pouvoir le comprendre à fond de ce point de vue même, il faut, dans sa définition, tenir compte du point de vue de la victime aussi bien que de l'agresseur ou de la société en général. Définition de la violence Dans la vie d'une femme, la peur de la violence masculine existe de façon subtile et diffuse. A un premier niveau, la peur se ressent uploads/Management/ jalna-hanmer-violence-et-controle-social-des-femmes-1977.pdf

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  • Publié le Jui 11, 2022
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